L'annulation de 850 millions d'euros de crédits de paiement nous a d'abord conduits à prendre des mesures sans impact physique immédiat, à hauteur de 430 millions d'euros, à savoir pour l'essentiel de moindres versements aux organisations internationales auxquelles nous participons, en particulier l'agence de l'Otan chargée du programme NH90 et l'Organisme conjoint de coopération en matière d'armement. Nous avons en outre réévalué les besoins de paiement prévus pour 2017 sur les programmes : ceci nous a permis de réduire les besoins de paiement de 200 millions d'euros. Mais ces décisions sans impact physique se traduisent par un report de charges, mécanique, sur les années suivantes que nous compenserons par une réduction des paiements en 2018, grâce à la renégociation de contrats d'armement et le décalage d'un certain nombre d'opérations. L'absence d'effet sur les soldats engagés sur le terrain a bien sûr été le principal critère de décision.
De quels programmes s'agit-il ? D'abord, nous sommes en train de renégocier avec Dassault les études à réaliser pour le passage au standard F4 du Rafale - réorganisation qui ne devrait pas remettre en cause le lancement du standard à la fin 2018. Nous renégocions ensuite les conditions logistiques entourant l'acquisition des frégates de taille intermédiaire, ce qui ne devrait pas remettre en cause les besoins opérationnels de la Marine, puisque la date de livraison de la première frégate resterait inchangée. Nous allons enfin décaler d'environ six mois de l'arrivée des premiers Mirage 2000D rénovés prévus en 2020, ce qui est cohérent avec le plan de retrait des flottes anciennes.
Le décalage des programmes, de quelques mois seulement, concerne d'abord la commande de radars pour les avions légers de surveillance et de reconnaissance - dont le premier exemplaire arrivera en 2018. La capacité de surveillance et de détection sera assurée dans un premier temps par une boule optronique. Dans l'attente de l'arrivée de la capacité radar sur la flotte patrimoniale d'ALSR, le recours aux ALSR locatifs, équipés de cette capacité et déployés sur les théâtres d'opérations, permettra de pallier ce déficit capacitaire.
Deuxièmement, nous avons été amenés à décaler la livraison de tourelleaux téléopérés pour les engins Griffon. Il s'agit d'un complément d'acquisition programmé dans le cadre de la première étape du programme Scorpion, qui correspond à l'augmentation du nombre de Griffon équipés d'emblée de ces tourelleaux. Nous serons capables d'équiper la moitié des Griffon livrés pour les engager en opération en 2021.
Troisième programme décalé : l'acquisition d'une charge utile « Renseignement électromagnétique » (ROEM) pour le drone Reaper. Nous envisageons dorénavant de mettre en place ces charges utiles ROEM pour 2020 sans mettre en cause nos engagements dans la bande saharo-sahélienne.
Dernier décalage : celui des équipements de détection de départs de missiles nouvelle génération pour le Rafale Marine. Cette mesure était destinée à mettre à niveau les systèmes d'autoprotection des dix premiers Rafale Marine livrés au standard F1, qui sont en cours de rétrofit sur le standard F3.
J'insiste : il n'y a pas d'effet immédiat sur les capacités de nos forces en opération, ni annulation de programmes - seulement des décalages.
S'agissant des 700 millions d'euros qui restent gelés, des discussions sont en cours entre le ministère des armées et Bercy. Sans dégel de tout ou partie de ces crédits, nous sommes à la veille de la cessation de paiement, sensiblement à la même période que l'an passé.
Nous avons en effet demandé, et demandons toujours, une augmentation du budget prévu pour les études amont au titre de la prochaine loi de programmation militaire pour atteindre le milliard d'euros. Nous avons comme vous l'objectif de réaliser des démonstrateurs de technologies innovantes et d'aller chercher les technologies de rupture qui apparaissent dans le domaine civil. Nous en parlerons sans doute en début d'année prochaine.
Oui, nous croyons toujours à l'intérêt du drone MALE. Accompagnant le chef d'état-major des armées sur l'opération Barkhane il y a quelques semaines, j'ai pu mesurer l'intérêt du drone Reaper, mais il nous fait dépendre des Américains puisque ce sont eux qui le font décoller, atterrir, et qui l'entretiennent. Nous devons atteindre un minimum d'autonomie dans ce domaine. Les discussions sont en cours avec les industriels et notre partenaire allemand. Lors du Conseil franco-allemand de défense et sécurité (CFADS) du 13 juillet, l'Allemagne et la France sont convenus de continuer l'étude en cours sur la base d'une architecture bimoteur turbopropulseur. J'espère que le programme pourra être soutenu par la partie capacitaire du fonds européen de défense. Mais toute coopération, par nature, est difficile à conduire.