Intervention de Louis Mermaz

Réunion du 5 mars 2009 à 21h30
Loi pénitentiaire — Article 24, amendement 134

Photo de Louis MermazLouis Mermaz :

Vous pourrez demander la parole à la fin du débat pour fait personnel. Mais je ne pense pas que votre honneur soit en cause. Par conséquent, je poursuis et je vous remercie de votre attention, cher collègue.

Les membres du groupe socialiste et les sénateurs de divers groupes vont présenter un certain nombre d’amendements tendant, précisément, à réduire le plus possible la dangerosité de cet article 24 – car elle est réelle !

Par l’amendement n° 134, nous demanderons que la fouille des cellules soit effectuée en présence des personnes visées. D’aucuns nous rétorqueront sans doute que la fouille sera impossible s’il y a une émeute et que le détenu se trouve sur le toit de l’établissement. Mais ne généralisons pas à partir de faits divers qui restent exceptionnels, sinon, nous ne pourrons plus adopter aucune loi !

Les fouilles des cellules doivent donc se faire en présence des intéressés, chaque fois qu’ils sont disponibles – ce sera le cas 99, 9 fois sur 100 –, surtout lorsqu’il s’agit de fouiller les effets personnels, l’intimité de la personne devant alors être respectée.

L’amendement n° 135 concerne les fouilles intégrales. Comme l’a dit Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, on ne va pas vous faire un dessin, tout le monde sait ce que cela signifie ! Nous pensons que ces fouilles doivent être spécialement motivées. Nous souhaitons que, le plus vite possible, il y soit procédé de manière électronique. En effet, on a renoncé depuis longtemps à déshabiller les gens avant qu’ils ne prennent l’avion ! Nous pouvons donc procéder de la même manière en l’occurrence.

Nous nous fondons sur les stipulations, les décisions et les critiques émanant des institutions européennes, lesquelles, je le répète, sont à l’origine du débat qui a lieu aujourd’hui. En effet, si l’Europe ne nous avait pas demandé de prendre rapidement un certain nombre de dispositions, nous n’aurions pas ce débat et nous attendrions toujours une loi pénitentiaire !

Dans son rapport de décembre 2007 qu’il a rendu à la suite de la visite des prisons françaises – cela ne pouvait pas lui être refusé ! –, le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants a relevé un certain nombre de points. Par exemple, à la maison d’arrêt de Fresnes, un détenu placé à l’isolement par décision de l’administration pénitentiaire a déclaré avoir été soumis à une fouille à corps 14 fois en un mois ! Le Comité a considéré qu’il s’agissait là d’un traitement dégradant, s’apparentant à une torture. De nombreuses plaintes ont été déposées par des détenus pour des faits semblables.

Pour ce qui concerne la fouille des locaux, nous constatons que la commission, malgré sa grande, laisse, avec sa rédaction, une énorme latitude à l’administration pénitentiaire, par délégation du ministère de la justice et de l’ensemble du Gouvernement, d’ailleurs. Or, dans le même temps, les surveillants de prison que nous rencontrons regrettent de n’être que des « porteurs de clés » ! Ils voudraient pouvoir exercer un métier beaucoup plus valorisant pour eux et pour ceux dont ils ont la responsabilité. Alors, ne confondons pas les choses et rendons à chacun ses responsabilités dans la situation actuelle.

Il est donc nécessaire que les fouilles s’effectuent conformément aux règles pénitentiaires européennes.

Les fouilles corporelles devraient désormais être pratiquement proscrites. Il serait tout à fait regrettable que le Gouvernement, malgré des circonlocutions pudiques et une débauche de bons sentiments, continue de faire en sorte que les choses ne changent pas. Votre manière de réfuter les amendements déposés par l’opposition crée, madame le garde des sceaux, un climat tel qu’il faudra beaucoup de valeur, de mérite et de noblesse à l’administration pénitentiaire pour continuer à agir dans le respect des droits de l’homme, comme c’est le cas 99 fois sur 100.

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