Séance en hémicycle du 5 mars 2009 à 21h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • corporelle
  • dignité
  • détention
  • détenu
  • fouille
  • intégrale
  • l’administration pénitentiaire
  • prison
  • pénitentiaire

La séance

Source

La séance, suspendue à dix-neuf heures quinze, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Roger Romani.

Photo de Roger Romani

La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi pénitentiaire.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’article 23.

Section 6

Des biens

La division et son intitulé ont été supprimés par la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L’article 23 a été supprimé par la commission.

L’amendement n° 59 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard, Muller et Anziani, est ainsi libellé :

I. - Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le droit de propriété des détenus doit être respecté.

Les biens dont les détenus sont porteurs à leur entrée dans un établissement pénitentiaire sont conservés et mis à leur disposition par l’administration pénitentiaire dans les conditions définies à l’article 18 bis.

À leur sortie de prison, les détenus se voient remettre leurs réalisations, quel qu’en soit le support.

II. - En conséquence, rétablir une division et son intitulé ainsi rédigés :

Section 6

Des biens

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

L’objet de cet amendement est de rétablir une section consacrée au droit de propriété des détenus.

M. le rapporteur a jugé utile, à bon droit, de supprimer la mention aux biens abandonnés par les détenus. En revanche, la loi pénitentiaire doit prévoir des dispositions concernant le respect du droit de propriété des détenus.

Le principe que nous vous proposons d’inscrire est très simple : les détenus jouissent d’un droit de propriété sur leurs biens qui doit être pleinement respecté. Cela implique que soit accordée aux détenus la possibilité de faire conserver leurs biens et, le cas échéant – je pense au cas des ordinateurs –, de les utiliser au cours de leur détention.

Je me souviens d’un détenu qui m’a interpellée un jour à ce sujet : il a fallu plus d’un an pour que son ordinateur lui soit restitué, et, lorsque cela s’est enfin produit, le détenu a constaté qu’il était… vide ! Peut-être importerait-il d’ailleurs de spécifier qu’il ne suffit pas de rendre son bien au détenu : encore faut-il qu’il lui soit restitué en l’état. Les logiciels installés sur un ordinateur, pour reprendre cet exemple, sont eux aussi la propriété du détenu, et, privé de tout logiciel, un ordinateur n’est plus d’aucune utilité !

Le principe en question implique également que les détenus se voient remettre à leur sortie leurs réalisations, quel qu’en soit le support. En effet, celles-ci leur appartiennent en propre.

Dans ce domaine, permettez-moi de prendre encore un exemple : si des détenus produisent des œuvres de l’esprit, l’administration pénitentiaire doit en assurer le respect et garantir à leur auteur la possibilité de les récupérer à sa sortie.

Il ne s’agit pas d’une hypothèse farfelue ! Une initiative intéressante, pilotée par la direction interrégionale des services pénitentiaires de Toulouse et la direction régionale d’art contemporain, a permis à plusieurs détenus d’exposer des œuvres au musée des Abattoirs, le musée d’art contemporain de Toulouse.

Il n’est donc pas absurde de vouloir préciser que les détenus bénéficient du droit de propriété et peuvent, dans le respect des exigences de la sécurité et du bon ordre de l’établissement, détenir leurs biens et en jouir tout au long de leur détention.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

La commission a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 59 rectifié.

En effet, si la commission estime que les mesures relatives aux biens, qui sont légion actuellement dans les textes réglementaires, mériteraient peut-être, pour certaines, d’être promues au niveau législatif, une telle décision supposerait que l’on procède à un toilettage beaucoup plus complet des dispositions concernées. Le présent projet de loi pénitentiaire n’est pas réellement le lieu adapté pour le faire.

De plus, les dispositions proposées dans l’amendement sont de l’ordre du détail. Nous pensons donc qu’il faut laisser l’ensemble au niveau réglementaire.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

J’ajouterai aux propos de M. le rapporteur qu’il n’entre pas dans les attributions des greffes pénitentiaires, qui gèrent la situation pénale des détenus, d’assurer la conservation et la mise à disposition des biens de ces personnes.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 59 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je mets aux voix l’amendement n° 59 rectifié.

Je suis saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Parce que j’en ai le droit !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Le principe de propriété est inscrit dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Justement, inutile de le répéter ici !

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

Il est procédé au comptage des votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 125 :

Le Sénat n’a pas adopté.

En conséquence, l’article demeure supprimé, de même que la division et son intitulé.

Section 7

De la surveillance

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L’amendement n° 204, présenté par M. About, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Avant l’article 24, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant le 31 juillet 2009, le Gouvernement présente au Parlement un plan d’équipement des prisons en moyens de détection électronique, pour les années 2009 à 2014, permettant d’éviter les fouilles à corps.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

La commission des affaires sociales souhaite que, à terme, il ne soit plus procédé à des fouilles à corps.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Même si la commission des lois partage totalement la préoccupation de M. About, elle est bien obligée de constater que le présent amendement ne relève pas du domaine de la loi.

Cela dit, plus l’encadrement des fouilles à corps sera strict, plus il est vraisemblable que le Gouvernement sera contraint de hâter la mise en place d’un plan d’équipement des prisons en moyens de détection électronique. Voilà qui peut aussi nous donner quelques idées !

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Pour les mêmes motifs, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 204.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Monsieur le rapporteur pour avis, l’amendement n° 204 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Il s’agit donc de l’amendement n° 204 rectifié.

La parole est à M. Louis Mermaz, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

M. Louis Mermaz. Nous admirons le docteur About

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

M. Louis Mermaz. L’amendement n° 204 était excellent, mon cher collègue, et c’est pourquoi nous le reprenons ; et s’il devait rencontrer le succès, il restera pour nous l’amendement « About » !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

Comment en finir avec ces fouilles à corps, qui sont une humiliation pour la République – c’est le cas de le dire ! –, …

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

… sinon en obligeant le Gouvernement à réaliser les investissements nécessaires ? Il dépense suffisamment d’argent chaque jour pour ceci ou pour cela, il peut en consacrer un peu à la préservation de la dignité des prisonniers !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

M. Philippe Dallier, au nom de la commission des finances. Je demande la parole.

Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

… puisque nous allons aborder l’examen de l’article 24, qui traite précisément de cette difficile et délicate question des fouilles.

Nous avons repris l’amendement, parce que nous considérons que cette disposition offre effectivement une solution pour l’avenir.

M. Philippe Dallier se lève.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Les fouilles sont nécessaires pour la sécurité…

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

M. Philippe Dallier, au nom de la commission des finances. Monsieur le président !

Nouvelles protestations sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Cet amendement n’a pas été rejeté par la commission des finances !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Monsieur Dallier, je sais bien que vous représentez la commission des finances, mais vous permettrez que M. Richard Yung achève son propos !

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Laissez-moi terminer mon intervention, mon cher collègue, avant que l’amendement ne soit, une fois de plus, « liquidé » par l’article 40 !

Il n’y a vraiment plus de débat possible, et je me demande pourquoi nous passons encore nos soirées ici !

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Nous développerons nos arguments au moment de l’examen de l’article 24. J’indiquerai simplement ici qu’il s’agit à nos yeux d’une solution d’avenir qui permettra de rendre leur dignité aux détenus. Elle contribuera également à résoudre les difficultés rencontrées par le personnel pénitentiaire, qui ne procède pas de gaîté de cœur à ces fouilles et sera soulagé de disposer de moyens électroniques pour assurer la sécurité intérieure des prisons.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Monsieur Dallier, avant de répondre à votre sollicitation, je vais, par courtoisie, donner la parole à ceux de nos collègues qui ont déjà demandé à expliquer leur vote.

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Cet amendement est très important, mais je me demande si nous ne sommes pas en train de jouer à un jeu de dupes.

En effet, nous travaillons sur cette loi, et à juste titre, avec beaucoup d’ardeur. Mais sans moyens, sans échéancier, sans programme, tous nos efforts risquent d’être vains. Voilà pourquoi je parle de jeu de dupes !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

C’est bien au Sénat qu’a eu lieu la journée du même nom !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Tout à l’heure, j’ai posé une question sur les unités de vie familiale. Il est tout de même important de savoir quand, à quel rythme et selon quel calendrier elles seront mises en place dans l’ensemble des établissements !

Ce soir, nous soulevons le problème de la détection électronique. La question n’est pas vaine, et il est important que nous sachions à quoi nous en tenir ! À quoi servirait de voter les meilleures dispositions si leur application est impossible ?

Madame la garde des sceaux, permettez-moi de vous dire ce que j’ai depuis plusieurs années sur le cœur. Vous et votre ministère n’êtes d’ailleurs pas seuls en cause !

La maison d’arrêt d’Orléans, dont j’ai déjà prix l’exemple hier, est l’une des plus surpeuplées de France, avec un taux de surpopulation de 230 %. Voilà une dizaine d’années, le site d’Ingré avait été retenu pour construire un nouvel établissement, site qui, un beau jour, a été abandonné en raison de la découverte, sur le terrain, de la seule canalisation de France, voire du monde, qu’il est impossible de déplacer, ce qui m’a beaucoup étonné !

Une grande concertation a été mise en œuvre. Les préfets successifs, notamment l’avant-dernier, se sont beaucoup dépensés, les élus ont également apporté leur concours et, finalement, un terrain a été trouvé sur la commune de Saran. À la suite de tous les engagements pris tant par vous-même, madame la garde des sceaux, que par votre administration, nous avions compris que, compte tenu de la surpopulation de l’actuelle maison d’arrêt, il était urgent de construire une nouvelle prison et que celle-ci ouvrirait en 2012. Telle était la position de votre ministère au mois de novembre dernier.

Mais, en décembre 2008, nous avons appris par une déclaration de M. le directeur de l’administration pénitentiaire que l’ouverture était reportée et n’aurait lieu qu’après 2012. Les élus, dont j’étais, ont protesté. Lorsque M. Sarkozy s’est rendu sur placepour souhaiter la bonne année aux policiers, aux gendarmes et aux personnels de l’administration pénitentiaire – madame la garde des sceaux, vous étiez présente, vous vous en souvenez certainement ! –, ce grave problème lui a été exposé. L’ouverture aura lieu en 2013, a-t-il indiqué ; puis, emporté par son éloquence, il l’a avancée en 2012, ce qui, a-t-il ajouté très gentiment, n’était pas plus mal pour lui. Après tout, si cela permet que la nouvelle maison d’arrêt ouvre en 2012…

En résumé : au mois de novembre, l’ouverture était prévue pour 2012 ; au mois de décembre, elle est reportée ; au mois de janvier, de la bouche de M. Sarkozy, elle est de nouveau prévue pour 2013, voire 2012 ; et voilà qu’au mois de février, dans une déclaration de Mme Rachida Dati elle-même, elle est repoussée à 2014 !

Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Les gens en ont assez ! Nous voudrions savoir une bonne fois ce qu’il en sera !

Madame la garde des sceaux, si vous pouvez confirmer que l’engagement pris voilà cinq ans par votre prédécesseur sera bien respecté et que la nouvelle maison d’arrêt ouvrira en 2012, tous les élus du département en seront très heureux !

J’ai pris cet exemple, avec votre permission, monsieur le président, car il montre parfaitement combien la crédibilité d’une loi est tributaire des moyens accordés et de la programmation prévue. Qu’adviendra-t-il de l’amendement de M. About, qui vise à remplacer des fouilles dégradantes, humiliantes, par des systèmes de détection électronique, si nous n’obtenons aucune réponse à nos questions ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Je partage tout à fait le point de vue de M. Sueur et, depuis trois jours qu’a commencé l’examen du projet de loi, nous avons déjà eu des échanges de ce type.

Mes chers collègues, si nous devions attendre que tous les moyens soient réunis pour prendre des décisions qui nous engagent, nous les parlementaires que nous sommes, nous courrions encore ce qui est important ! Les moyens, nous devons nous les donner dès que notre objectif est fixé.

Le nôtre est en l’occurrence d’en finir avec une pratique vraiment humiliante, dégradante – inutile d’insister ou de vous faire un dessin ! Franchement, ces fouilles ne font pas honneur au xxie siècle, pourtant le siècle de la technique et des technologies les plus sophistiquées. Pensez au nombre de plus en plus important de personnes qui vont être sous bracelet électronique !

Des prouesses technologiques formidables, qui vont permettre de régler tous les problèmes et de ne plus se soucier de rien hormis de la surveillance des personnes qui se promènent à travers la France ? Personnellement, je suis très sceptique… Mais si les moyens de détection électronique permettent de remplacer la fouille à corps, pratique que nous sommes d’accord pour dénoncer, il faut une nouvelle fois dire oui à la technique et se dépêcher de prévoir les sommes nécessaires pour mettre en place de tels systèmes partout ! Si nous commençons à tergiverser sous prétexte que ce sera compliqué, la pratique des fouilles à corps perdurera et, dans quelques années, nous continuerons d’être montrés du doigt !

Je ne sais pas si la commission des finances opposera l’article 40. Ce qui est certain, c’est que, si tel n’est pas le cas, l’amendement doit être discuté ce soir !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Disons que nous discutons de cet amendement au bénéfice du doute… Mais tout de même ! Il vise à demander au Gouvernement de présenter au Parlement un plan d’équipement des prisons en moyens de détection électronique pour les années 2009 à 2014, donc d’engager des dépenses. Le doute est pour le moins fondé…

Puisque bénéfice du doute il y a, au moins, votons !

L’amendement n’est pas adopté.

Les fouilles doivent être justifiées par la présomption d’une infraction ou par les risques que le comportement des détenus fait courir à la sécurité des personnes et au maintien de l’ordre dans l’établissement. Leur nature et leur fréquence sont strictement adaptées à ces nécessités et à la personnalité des détenus.

Les fouilles intégrales ne sont possibles que si les fouilles par palpation ou les moyens de détection électronique sont insuffisants.

Les investigations corporelles internes sont proscrites, sauf impératif spécialement motivé. Elles ne peuvent alors être réalisées que par un médecin requis à cet effet.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

M. Louis Mermaz. Monsieur le président, j’étais tenté de faire un rappel au règlement. En effet, si l’on oppose l’article 40 à chacune de nos suggestions, il ne reste plus qu’à fermer les portes du Parlement ! Pourquoi ne pas aussi invoquer cet article chaque fois que quelqu’un respire, pour rejet de gaz carbonique, pollution, nécessité de dépolluer, etc. ?

Protestations sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

Soyons un peu sérieux, nous ne sommes pas aux Bouffes parisiens !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je vous en prie, monsieur Dallier. M. Mermaz s’exprime. Si vous souhaitez intervenir, je vous donnerai la parole ensuite.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

Mes chers collègues – et je vise également M. Dallier –, aux termes de l’article 24, « les fouilles doivent être justifiées par la présomption d’une infraction ou par les risques que le comportement des détenus fait courir à la sécurité des personnes et au maintien de l’ordre dans l’établissement ».

C’est ce que l’on appelle la suspicion ! C’est une notion totalement subjective que la dangerosité de tel ou tel individu – comme celle des sorcières de Salem ! Aucune science ne saurait l’admettre !

Je poursuis la lecture de l’article : « Leur nature et leur fréquence sont strictement adaptées à ces nécessités et à la personnalité des détenus. » Le mot « personnalité » est d’une pudeur extraordinaire ! Je vous laisse deviner…

« Les fouilles intégrales ne sont possibles que si les fouilles par palpation ou les moyens de détection électronique sont insuffisants. » Voilà un langage que je qualifie d’hypocrite. Qui va en décider ? Quand on voudra procéder à des fouilles intégrales, on trouvera toujours des raisons de déclarer insuffisants les moyens de détection ou les fouilles par palpation !

« Les investigations corporelles internes sont proscrites, » – tout de même ! – « sauf impératif spécialement motivé. Elles ne peuvent alors être réalisées que par un médecin requis à cet effet. »

Notre travail est simplifié, puisque la disposition de notre collègue M. About, devenue l’amendement n° 197 rectifié quater de M. Alain Anziani, a été votée – ô miracle ! – avant que la majorité ne se ressaisisse pour demander un scrutin public. Sans le léger « retard à l’allumage » du président de la commission des lois pour mobiliser ses troupes

Rires sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

Je vous sais susceptible, monsieur Hyest, mais il n’y a vraiment pas là de quoi vous fâcher !

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

Vous pourrez demander la parole à la fin du débat pour fait personnel. Mais je ne pense pas que votre honneur soit en cause. Par conséquent, je poursuis et je vous remercie de votre attention, cher collègue.

Les membres du groupe socialiste et les sénateurs de divers groupes vont présenter un certain nombre d’amendements tendant, précisément, à réduire le plus possible la dangerosité de cet article 24 – car elle est réelle !

Par l’amendement n° 134, nous demanderons que la fouille des cellules soit effectuée en présence des personnes visées. D’aucuns nous rétorqueront sans doute que la fouille sera impossible s’il y a une émeute et que le détenu se trouve sur le toit de l’établissement. Mais ne généralisons pas à partir de faits divers qui restent exceptionnels, sinon, nous ne pourrons plus adopter aucune loi !

Les fouilles des cellules doivent donc se faire en présence des intéressés, chaque fois qu’ils sont disponibles – ce sera le cas 99, 9 fois sur 100 –, surtout lorsqu’il s’agit de fouiller les effets personnels, l’intimité de la personne devant alors être respectée.

L’amendement n° 135 concerne les fouilles intégrales. Comme l’a dit Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, on ne va pas vous faire un dessin, tout le monde sait ce que cela signifie ! Nous pensons que ces fouilles doivent être spécialement motivées. Nous souhaitons que, le plus vite possible, il y soit procédé de manière électronique. En effet, on a renoncé depuis longtemps à déshabiller les gens avant qu’ils ne prennent l’avion ! Nous pouvons donc procéder de la même manière en l’occurrence.

Nous nous fondons sur les stipulations, les décisions et les critiques émanant des institutions européennes, lesquelles, je le répète, sont à l’origine du débat qui a lieu aujourd’hui. En effet, si l’Europe ne nous avait pas demandé de prendre rapidement un certain nombre de dispositions, nous n’aurions pas ce débat et nous attendrions toujours une loi pénitentiaire !

Dans son rapport de décembre 2007 qu’il a rendu à la suite de la visite des prisons françaises – cela ne pouvait pas lui être refusé ! –, le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants a relevé un certain nombre de points. Par exemple, à la maison d’arrêt de Fresnes, un détenu placé à l’isolement par décision de l’administration pénitentiaire a déclaré avoir été soumis à une fouille à corps 14 fois en un mois ! Le Comité a considéré qu’il s’agissait là d’un traitement dégradant, s’apparentant à une torture. De nombreuses plaintes ont été déposées par des détenus pour des faits semblables.

Pour ce qui concerne la fouille des locaux, nous constatons que la commission, malgré sa grande, laisse, avec sa rédaction, une énorme latitude à l’administration pénitentiaire, par délégation du ministère de la justice et de l’ensemble du Gouvernement, d’ailleurs. Or, dans le même temps, les surveillants de prison que nous rencontrons regrettent de n’être que des « porteurs de clés » ! Ils voudraient pouvoir exercer un métier beaucoup plus valorisant pour eux et pour ceux dont ils ont la responsabilité. Alors, ne confondons pas les choses et rendons à chacun ses responsabilités dans la situation actuelle.

Il est donc nécessaire que les fouilles s’effectuent conformément aux règles pénitentiaires européennes.

Les fouilles corporelles devraient désormais être pratiquement proscrites. Il serait tout à fait regrettable que le Gouvernement, malgré des circonlocutions pudiques et une débauche de bons sentiments, continue de faire en sorte que les choses ne changent pas. Votre manière de réfuter les amendements déposés par l’opposition crée, madame le garde des sceaux, un climat tel qu’il faudra beaucoup de valeur, de mérite et de noblesse à l’administration pénitentiaire pour continuer à agir dans le respect des droits de l’homme, comme c’est le cas 99 fois sur 100.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Je souhaite simplement rappeler à notre collègue Louis Mermaz, qui fut il n’y a pas si longtemps président de l’Assemblée nationale, …

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

… que, lorsqu’un parlementaire invoque l’article 40 de la Constitution, cela ne mérite pas d’être qualifié de « bouffonnerie ». Selon moi, de tels propos ne sont absolument pas dignes dans cet hémicycle.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Vous n’étiez pas là, monsieur Dallier, mais nous « mangeons » de l’article 40 depuis le début de l’examen de ce texte !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Mes chers collègues, depuis trois jours, nous avons souvent parlé de dignité et d’intimité. Cet article est pour nous un grand rendez-vous, une épreuve de vérité : allons-nous passer des bonnes intentions aux actes ?

Nous devrions être nombreux, me semble-t-il, à nous retrouver sur certains points.

La fouille a deux réalités, et il faut distinguer la théorie, qui n’est pas forcément fausse, de la pratique.

Selon la théorie, la fouille est un outil visant à assurer la sécurité publique, ce qui est en partie vrai. Cependant, nous le voyons bien, cette théorie est défaillante, puisque, malgré les fouilles, on trouve à peu près de tout en prison, et surtout le pire.

Dans la pratique de la fouille, que je vous conjure de ne pas contester, il y a, au fond, la volonté de soumettre le détenu, de le « casser » – j’emploie ce terme sciemment parce qu’il revient souvent au cours des différents témoignages –, pour qu’il devienne plus obéissant. Après une fouille, tous vous le diront, on ne se sent pas fier, et on reste donc tranquille, du moins dans un premier temps, car ensuite on sent monter la violence en soi.

C’est sans doute cela, la pratique de la fouille : un corps fouillé et, en fait, une âme humiliée. À travers ce corps mis à nu, fouillé à l’intérieur même, c’est évidemment l’âme du détenu que l’on essaie d’atteindre, et sa psychologie.

Mmes Marie-Thérèse Hermange et Catherine Troendle s’esclaffent.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

La combinaison de ces deux aspects de la fouille, d’une part, l’outil de sécurité, que je ne conteste pas, d’autre part, l’outil de soumission, aboutit, dans la réalité quotidienne, à des fouilles trop fréquentes, voire permanentes. Mais d’autres collègues développeront ce point tout à l’heure.

C’est d’autant moins acceptable que nous ne sommes plus au temps d’Edmond Dantès. Aujourd’hui, dans notre société moderne, comment ne pas être choqué de voir que ce qui est bon pour chacun de nous dans un aéroport ne l’est pas pour un détenu dans une prison ?

Monsieur le rapporteur, votre idée d’installer des portiques va dans le bon sens. Une telle surveillance, qui a effectivement fait ses preuves, mériterait d’être généralisée.

Je voudrais d’ailleurs remercier mon collègue Philippe Dallier, qui a fort heureusement renoncé tout à l’heure à invoquer l’article 40 de la Constitution. Imaginez-vous seulement ce que cela signifiait ? Opposer l’article 40 sur une telle question, c’était nous dire que la dignité a un prix trop élevé et que, pour cette raison-là, nous ne pouvons la garantir.

Il faut faire un choix, madame le garde des sceaux : si vous voulez une grande loi pénitentiaire, vous ne pouvez pas commencer par nous expliquer que la pierre sur laquelle repose tout l’édifice est d’un coût inabordable. Or cette pierre, c’est la dignité !

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, avec cet article, nous en arrivons effectivement à l’un des points essentiels du débat.

Nous l’avons souvent souligné, le respect de la dignité de la personne humaine est l’une de nos principales préoccupations. Or, avec la question des fouilles, nous sommes au cœur du sujet.

Question ô combien difficile que de préserver, comme c’est notre devoir, la dignité de la personne humaine sans méconnaître les nécessaires impératifs de sécurité.

En l’état actuel du droit, qui est uniquement de nature réglementaire – c’est un écueil permanent –, l’administration pénitentiaire bénéficie d’une très grande marge de manœuvre. Les fouilles sont souvent pratiquées sans discernement, au nom des seuls impératifs de sécurité. Les règles d’application font défaut ; j’y reviendrai.

Dans leur excellent rapport, MM. Hyest et Cabanel comparaient les fouilles à un « automatisme pénitentiaire ». Cela prouve bien que, en la matière, les habitudes et, plus rarement, les mauvaises intentions l’emportent sur tout le reste.

Les détenus sont en effet fouillés à tout bout de champ : lorsqu’ils font leur entrée dans l’établissement pénitentiaire et chaque fois qu’ils en sont « extraits », selon la terminologie assez curieuse qui est utilisée, ou qu’ils y sont reconduits ; avant et après les parloirs ; avant et après les visites. En d’autres termes, tout contact avec le monde extérieur donne lieu à une fouille.

Des fouilles intégrales avec mise à nu sont en particulier pratiquées après la visite des avocats. Cela en dit long sur la considération que l’on a pour eux…

Mon collègue Louis Mermaz l’a rappelé, le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants a ainsi notamment rencontré un détenu alléguant avoir été fouillé à corps à quatorze reprises en un mois.

En 2006, la Commission nationale de déontologie de la sécurité a évoqué le cas d’un « détenu particulièrement signalé », ou DPS, fouillé à corps par des agents d’une équipe régionale d’intervention et de sécurité, alors que ceux-ci sont seulement habilités à pratiquer des fouilles de cellules.

Depuis 2002, les campagnes de fouille générale dans les établissements pénitentiaires sont, semble-t-il, plus fréquentes chaque année, ce qui a évidemment pour conséquence d’attiser les tensions au sein même des prisons.

Les fouilles sont vécues comme une humiliation, voire comme un viol, au sens propre du terme. Elles répondent parfois à des petites haines entre détenus et surveillants. Le contrôleur général des lieux de privation de liberté, M. Delarue, les qualifie de « petits coups bas ».

Il faut le souligner, les fouilles sont également pénibles pour les personnels de l’administration pénitentiaire, surtout lorsqu’ils sont amenés à pratiquer eux-mêmes des fouilles corporelles internes, dont, je le rappelle, aucun texte ne fixe le régime.

Les fouilles sont donc dégradantes tant pour ceux qui les subissent que pour ceux qui les pratiquent. Elles ne correspondent pas, à l’évidence, à l’idée que les personnels de l'administration pénitentiaire se faisaient de leurs fonctions en entrant dans la carrière.

Des atteintes aussi manifestes à la dignité humaine et à l’intégrité physique des personnes détenues sont d’autant plus critiquables que les bénéfices des fouilles en termes de sécurité sont limités. La réalité des trafics de stupéfiants, de téléphones portables et d’armes au sein des prisons en est la preuve.

Notre pays est régulièrement pointé du doigt pour les traitements dégradants infligés aux personnes incarcérées. Sans procéder à une énumération complète, je mentionnerai notamment les critiques que le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants formule dans son rapport de décembre 2007.

De son côté, la Cour européenne des droits de l’homme, dans sa décision du 12 juin 2007, a jugé que les fouilles intégrales avec obligation de se pencher et de tousser après chaque parloir ne s’appuient sur « aucun impératif convaincant de sécurité ».

Même le juge administratif s’est saisi du sujet. Récemment, le 14 novembre dernier, le Conseil d’État a jugé une affaire dans laquelle le requérant avait fait l’objet d’une décision le soumettant à un régime de fouilles corporelles intégrales, opérées plusieurs fois par jour lors d’extractions pour différentes comparutions, notamment devant le juge judiciaire. Dans son arrêt, le Conseil d'État a fixé les conditions dans lesquelles les détenus peuvent être soumis à des fouilles corporelles intégrales. Selon l’expression qu’il a employée, elles doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées.

Des progrès ont donc été enregistrés dans ce domaine, puisqu’un certain nombre de règles ont été fixées. Mais, je le répète, l’arrêt du Conseil d'État date de novembre dernier, soit d’à peine quelques mois, et il y a encore du travail à faire !

Ces décisions prouvent à quel point le régime des fouilles est insuffisamment encadré.

Les fouilles intégrales avec mise à nu et les fouilles corporelles internes constituant en elles-mêmes une atteinte grave à la dignité humaine, je pense qu’il conviendrait de les réserver à quelques catégories très particulières de détenus, notamment aux DPS.

De notre point de vue, et nous retrouvons ici l’amendement de M. About, l’idéal serait d’installer dans les établissements pénitentiaires des portiques dits à « ondes millimétriques ». Ces « scanners corporels » permettent en effet d’obtenir une image sur un écran de contrôle et évitent au personnel pénitentiaire d’avoir à pratiquer ces fouilles.

Voilà ce que nous voulions dire, de manière générale, sur l’article 24. Cette prise de parole éclairera également les trois amendements que nous avons déposés et que nous défendrons dans la suite de la discussion.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Raymonde Le Texier, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Cet article relatif aux fouilles corporelles pose le problème de l’équilibre entre le respect de la dignité humaine et les impératifs de sécurité.

Nous ne nous attarderons pas sur la question des fouilles intracorporelles. La pratique est inacceptable et porte un nom on ne peut plus clair : le viol. Cette pratique ne saurait donc être.

La question des fouilles à corps reste néanmoins posée. Supposées non intrusives, elles n’en réduisent pas moins celui qui en est victime à se dénuder entièrement, obligé de prendre des positions dégradantes afin que rien n’échappe au toucher ou au regard de celui qui effectue la fouille.

De plus, systématiquement réalisées au moment des parloirs, elles sont d’autant plus humiliantes et difficiles à vivre qu’elles succèdent aux rares moments un peu chaleureux que connaît le prisonnier durant sa détention.

Alors que ce temps de répit peut lui permettre de garder espoir, de sentir l’affection et le soutien de ses proches et de se projeter dans un avenir meilleur, ce lien avec l’extérieur, porteur d’une possible réinsertion, est entaché par la pratique des fouilles. La redescente est brutale quand succèdent aux retrouvailles avec les siens la honte de la mise à nu et la dégradation de l’estime de soi qui en résulte.

Or ce traitement avilissant, outre qu’il n’est pas toujours efficace – on l’a vu encore récemment avec les évadés de Moulins –, n’est surtout pas nécessaire. Pour faire face aux impératifs de sécurité et empêcher l’entrée d’objets et de substances illicites au sein de la prison, il est possible d’user de moyens respectant l’intégrité du corps humain et évitant l’humiliation psychologique. Je pense bien sûr aux détecteurs de métaux et aux rayons X, mais aussi à un instrument déjà évoqué à plusieurs reprises, notamment par le président Nicolas About : un scanner qui utilise des ondes magnétiques à basse énergie pour traverser les vêtements et reconstituer une image électronique du corps afin que cessent définitivement les fouilles à corps.

« Le degré de civilisation d’un pays se mesure à la façon dont il traite ses prisonniers ». Bien sûr, nous souscrivons tous ici à cette phrase de Camus. Avec cet article, nous avons l’occasion de la faire vivre dans les faits. Ne nous privons pas d’être à la hauteur des valeurs humanistes que nous portons.

Voilà pourquoi, mes chers collègues, nous devons, tous, être particulièrement attentifs aux amendements permettant de supprimer ces actes dégradants pour ceux qui les subissent comme pour ceux qui les pratiquent.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Hugues Portelli, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Hugues Portelli

J’ai lu avec beaucoup d’intérêt l’excellent rapport de M. Lecerf, notamment le commentaire qu’il fait de l’article 24.

Premièrement, il reconnaît clairement que la pratique des fouilles corporelles est dégradante et humiliante pour le détenu. Deuxièmement, il rappelle que la France a été récemment condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme, au motif que ce type de pratiques constitue une violation de l’article 3 de la convention européenne des droits de l’homme, lequel prohibe, notamment, les traitements dégradants.

La lecture attentive du commentaire de notre rapporteur, auquel je souscris intégralement, me conduisait fort logiquement à penser que les fouilles corporelles, notamment internes, seraient interdites. Malheureusement, dans la rédaction de l’article qu’elle a adoptée, la commission ne les supprime pas complètement : elles sont proscrites, sauf impératif spécialement motivé.

Je vous ferai tout d’abord remarquer, mes chers collègues, que la pratique des fouilles n’a pas empêché des détenus de s’évader avec des explosifs voilà quelques jours. Si l’on avait pratiqué des fouilles corporelles, je ne sais pas où l’on aurait pu trouver lesdits explosifs… On sait qu’à plusieurs reprises des évasions se sont produites indépendamment de la possibilité d’opérer des fouilles pour vérifier si les détenus étaient en possession d’instruments ou d’engins leur permettant de s’évader.

Mais qu’entendez-vous, monsieur le rapporteur, par « impératif spécialement motivé » ? Et, surtout, qui va motiver ? Le doute est énorme quand on lit cette disposition. La moindre des choses serait de confier la tâche de l’évaluation de l’impératif non pas à l’administration pénitentiaire mais à un magistrat qui, seul, pourrait autoriser le recours à ce genre de fouilles.

À titre personnel, j’estime que nous devrions respecter non seulement la convention européenne des droits l’homme, mais aussi l’article 1er du présent projet de loi, que nous avons adopté dès le tout début de notre débat en proclamant que nous devions respecter la dignité de tous les détenus.

Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

À ce stade de nos débats, je tiens à souligner que, grâce aux amendements de M. le rapporteur, le texte issu des travaux de la commission marque de vraies avancées par rapport au projet de loi du Gouvernement et par rapport à la situation actuelle.

Il me semblait juste de commencer par rappeler cette réalité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Le problème des fouilles est éminemment complexe.

Nous savons tous ce que sont les « mules ». Je garde en mémoire qu’une jeune fille est morte, dans notre pays, pour avoir ingéré un certain nombre de substances. Si c’est malheureusement banal, cela n’en est pas moins horrible.

C’est pourquoi nous avons accordé, mes chers collègues, une grande importance à l’amendement de M. About. La solution qu’il propose est bonne. Il existe aujourd’hui des moyens techniques qui permettent de préserver la dignité de la personne. Leur développement nécessite un effort financier que la République française peut supporter, si toutefois elle en a la volonté.

J’espère que les amendements de mes amis recevront un accueil favorable ; ils permettraient en effet de prolonger le mouvement qu’a largement amorcé M. Lecerf.

Je ne saurais conclure sans tenir la promesse que j’ai faite, la semaine dernière, à des surveillants de la prison de mon département, avec lesquels je me suis longuement entretenu. Ils m’ont demandé de dire ici, au Sénat, qu’ils sont obligés de pratiquer des dizaines et même des centaines de fouilles et que ces actes ne sont pas humiliants et dégradants pour les seuls détenus ; ils sont aussi très difficiles à vivre pour les personnels de l’administration pénitentiaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Robert Badinter, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Badinter

Avant de commencer la discussion des amendements déposés sur cet article, nous devons rappeler certains principes et les considérer à la lumière de ce qui est advenu de la civilisation européenne dans des temps sinon récents du moins pas assez lointains pour être oubliés.

Être mis à nu devant un autre, c’est la première étape de la dégradation du sujet. Les régimes totalitaires le savent bien, et de multiples témoignages nous sont parvenus de périodes tragiques et de lieux concentrationnaires. D’abord, mise à nu ; ensuite, on voit…

La fouille corporelle interne doit être absolument épargnée aux détenus. Comme d’aucuns l’ont rappelé justement, toute pénétration corporelle interne, hors le consentement de la personne, constitue un viol. Nous disposons maintenant de certaines techniques, citées par M. About, qui permettent d’éviter ces fouilles internes. Utiliser l’électronique est à notre portée. Nous devons faire preuve de la plus grande fermeté en la matière.

La fouille par palpation ? Rien de plus normal : elle est désormais pratiquée partout, en particulier dans les aéroports.

La fouille intégrale ? Il n’y a aucune raison de la pratiquer.

La fouille corporelle interne ? Jamais !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Je ferai quelques remarques d’ordre général avant de proposer, au nom de la commission des lois, un amendement supplémentaire.

Je remercie M. Sueur d’avoir fait référence aux travaux de la commission des lois. Les amendements ont été adoptés à l’unanimité. Nous avons tous, les uns et les autres, tenté d’améliorer le texte initial et de concilier les impératifs de sécurité et de dignité.

Les conditions posées sont loin d’être dérisoires. Dire que les fouilles doivent être justifiées par la présomption d’une infraction ou par les risques que le comportement des détenus fait courir à la sécurité des personnes, c’est une façon de remettre en cause toute une série de pratiques qui ont cours aujourd’hui.

Lorsqu’un détenu passe du contrôle de l’administration pénitentiaire à celui de la gendarmerie ou de la police, ou inversement, des fouilles sont nécessaires. Y a-t-il pour autant présomption d’infraction ?

La commission des lois a tenté en outre d’introduire une gradation dans les fouilles. Elle a ainsi prévu que les fouilles intégrales ne sont possibles que si les fouilles par palpation ou les contrôles par les moyens de détection électronique sont insuffisants. Ce faisant, nous préparons l’avenir, les cas de fouille intégrale devant se réduire avec le progrès technique.

Elle a également posé le problème des fouilles corporelles internes, qui ne devraient pas être pratiquées, mais dont on sait qu’elles le sont de temps à autre, y compris par le personnel pénitentiaire. Nous avons prévu de les limiter aux cas où les deux premières catégories de fouilles, fouilles par palpation et fouilles intégrales, sont insuffisantes.

Nous avons prévu de proscrire les investigations corporelles internes, sauf impératif spécialement motivé. Dans ce cas, nous avons ajouté, sur la proposition de M. About, qu’elles ne pourront être réalisées que par un médecin requis à cet effet qui sera totalement étranger au médecin de la détention.

Mes chers collègues, à la suite de l’intervention de notre collègue Hugues Portelli, je vous propose d’introduire une précaution supplémentaire en prévoyant que ce médecin sera requis à cet effet par l’autorité judiciaire.

Par conséquent, je vous proposerai de modifier en ce sens l’article 24 du projet de loi en complétant la dernière phrase de son dernier alinéa par les mots « par l’autorité judiciaire ».

Dès lors, il appartiendra non plus à l’autorité pénitentiaire, amenée à réquisitionner un médecin, à apprécier si l’impératif spécialement motivé est fondé ou non, mais à l’autorité judiciaire et, vraisemblablement, en cas d’urgence, au parquet.

Mes chers collègues, ne nous déchirons pas sur cette question. Nos objectifs respectifs sont très proches. Ainsi que l’atteste l’intervention de notre collègue Richard Yung, nous considérons tous que, bien que la préservation de la dignité humaine soit essentielle, nous ne pouvons pas pour autant négliger les impératifs de sécurité. Certes, des hommes et des femmes souffrent de ces fouilles, aussi bien les personnes détenues, qui les subissent, que les surveillants, qui les pratiquent, mais n’oublions pas que le personnel pénitentiaire dans son ensemble prend de grands risques pour assurer la protection de la société.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

J’indique à M. le rapporteur qu’il s’agira de l’amendement n° 303.

La parole est à Mme le garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Je reviendrai sur quelques éléments d’actualité, évoqués par M. Portelli.

Très récemment, deux détenus se sont évadés d’un établissement pénitentiaire en utilisant des explosifs et une arme que des visiteurs leur avaient apportés au parloir et qui n’avaient pas été détectés par les installations électroniques.

De manière générale, je le rappelle, les visiteurs ne sont pas fouillés ; ils ne peuvent l’être qu’à titre exceptionnel, sur décision du chef d’établissement.

Au cours de cette évasion, les deux hommes ont pris en otage plusieurs personnes et mis en danger la vie des personnels, des détenus, mais également des visiteurs. Grâce à l’intervention d’autres détenus, nous avons peut-être évité le pire. En effet, certains d’entre eux ont demandé aux preneurs d’otage de ne pas commettre l’irréparable.

Cet exemple démontre, s’il en était besoin, combien il est indispensable pour l’administration pénitentiaire de pouvoir procéder à des fouilles minutieuses, afin d’assurer la sécurité des personnels, mais également des établissements.

Lorsque l’administration pénitentiaire détient des détenus dangereux, il est de son devoir de prendre toutes les mesures nécessaires et, notamment, de procéder à des fouilles intégrales pour préserver l’ordre et la sécurité des établissements, qui sont au cœur de ses missions.

Monsieur Mermaz, je ne peux pas accepter les accusations que vous avez portées à l’encontre du Gouvernement.

Lorsque vos amis étaient au pouvoir, vous-même étant alors président de l’Assemblée nationale, vous aviez tout le loisir de faire adopter une loi pénitentiaire de manière à améliorer les conditions de détention et les conditions sanitaires en prison. La loi de 1998 a été adoptée, mais sans les moyens correspondants.

Vous auriez pu aussi décider la construction de nouveaux établissements, permettant des conditions d’incarcération plus dignes, mais vous ne l’avez pas fait. Pis, entre 1997 et 2002, vous avez fermé 4 % des places de prison, sans en ouvrir de nouvelles dans le même temps, et ce alors que plus des deux tiers des établissements pénitentiaires sont extrêmement vétustes !

Comme cela était attendu depuis un certain nombre d’années, vous auriez pu également instituer un contrôleur général des prisons. Pour notre part, nous sommes allés plus loin en décidant l’institution d’un contrôleur général chargé de l’ensemble des lieux de privation de liberté.

Lorsque vous étiez au pouvoir, un surveillant a été assassiné par un détenu lors d’une fouille.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Je n’accepte pas plus que l’on accuse l’administration pénitentiaire de procéder à des fouilles dans le but de « casser du détenu », pour reprendre l’expression qui a été utilisée tout à l’heure. En 2008, sur 550 fouilles, 50 d’entre elles ont donné lieu à l’agression d’un surveillant, soit 10 %.

Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Je veux bien que l’on respecte la dignité des détenus, mais je veux aussi que l’on respecte celle des personnels pénitentiaires !

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Ne nous trompons pas d’objectif et faisons preuve de responsabilité. Reconnaissons la difficulté des missions des personnels pénitentiaires.

Pour la clarté des débats, je rappellerai quelques éléments relatifs aux fouilles.

Par une confusion très fréquente, certains prétendent que l’administration pénitentiaire pratiquerait des fouilles à corps, sous-entendu des investigations corporelles. C’est totalement faux ! Les fouilles intégrales que pratique l’administration pénitentiaire ne sont pas des fouilles corporelles ; elle n’a jamais été habilitée à pratiquer ce genre d’investigations.

En réalité, les fouilles sont de plusieurs types.

La palpation de sécurité s’apparente à celle qui est pratiquée dans tous les aéroports.

La fouille des cellules, quant à elle, est effectuée hors la présence des détenus.

Mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, permettez-moi de rappeler un fait qui n’est pas si lointain, alors que vous étiez encore au pouvoir. En août 1992, à la maison d’arrêt de Rouen, lors du contrôle du barreaudage de la fenêtre d’une cellule, un détenu a subtilisé la barre métallique que le surveillant utilisait et lui a porté de violents coups à la tête, ce qui a provoqué le décès du surveillant.

La fouille intégrale, qui ne doit pas être confondue avec la fouille à corps, consiste à faire se déshabiller complètement le détenu. Cependant, elle n’entraîne aucun contact physique.

Les investigations corporelles internes consistent en l’examen des cavités buccale, anale et vaginale, et sont destinées, par exemple, à la recherche de produits stupéfiants ou de produits explosifs. Elles sont pratiquées de manière tout à fait exceptionnelle, lorsque l’on soupçonne le détenu d’avoir ingéré à des fins de trafic des produits stupéfiants ou d’autres types d’objets.

Ces investigations ne sont jamais pratiquées par les personnels pénitentiaires ; elles le sont par des médecins.

Le cadre juridique est clair : les fouilles par palpation et les fouilles intégrales sont décidées par l’administration pénitentiaire par mesure de sécurité. Les investigations corporelles internes sont pratiquées par des médecins. En pratique, l’administration pénitentiaire saisit les services de police et de gendarmerie ou le parquet, qui requiert un médecin.

Il n’a jamais été envisagé dans le présent texte de permettre à l’administration pénitentiaire de pratiquer elle-même ce genre de fouilles.

Ce projet de loi représente une réelle avancée. Nous prenons nos responsabilités, non seulement pour améliorer les conditions de détention des personnes privées de liberté et leur donner encore plus de droits, mais aussi, ne les oublions pas, pour améliorer les conditions de travail de l’ensemble des personnels de l’administration pénitentiaire, qui remplissent une mission difficile avec beaucoup de dévouement, d’engagement et de professionnalisme.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. le président de la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité formulée par la commission ?

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Avis favorable, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La priorité, de droit, est ordonnée.

Je suis saisi de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 235, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat, Assassi et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit cet article :

Les fouilles doivent être justifiées par la présomption d'une infraction ou par les risques que le comportement des détenus fait courir à la sécurité des personnes et au maintien de l'ordre dans l'établissement. Leur nature et leur fréquence sont strictement adaptées à ces nécessités. Elles s'effectuent si besoin par des moyens de détection électronique.

La fouille des détenus est effectuée dans le respect de la dignité de la personne et de son intégrité physique et psychique. La fouille intégrale des détenus et les investigations corporelles internes sont interdites.

Les fouilles des cellules sont effectuées sur décision motivée du chef d'établissement et en présence du détenu.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Comme cela a été fort bien dit, les fouilles, en particulier les fouilles intégrales et les investigations corporelles internes, constituent l’une des atteintes les plus graves au respect de l’intégrité physique et de l’intimité. Humiliantes et dégradantes, elles portent atteinte à la dignité des personnes concernées.

Par un arrêt rendu le 12 juin 2007, la Cour européenne des droits de l’homme a condamné la France. Plus récemment, le Conseil d’État, par un arrêt rendu le 14 novembre 2008, a encadré la fréquence et la modalité des fouilles à corps des prisonniers.

Aujourd’hui, le code de procédure pénale, dans sa partie réglementaire, prévoit que la fouille des détenus a lieu à l’entrée et à la sortie de l’établissement, en cas de transfèrement ou d’hospitalisation, avant et après un entretien au parloir, ou de façon inopinée, et qu’elle peut être « intégrale ». Elle l’est notamment avant et après chaque parloir.

Or ce projet de loi ne remet pas du tout en cause le régime actuel des fouilles ; tout juste les encadre-t-il en prévoyant, par exemple, que les fouilles intégrales ne sont possibles que si les fouilles par palpation ou les moyens de détection électroniques sont insuffisants. Cela ne protège pas le détenu du risque d’arbitraire, puisque c’est l’administration pénitentiaire qui seule jugera qu’une fouille intégrale se révèle finalement nécessaire.

En 2000, le rapport d’enquête sénatorial sur les prisons, rappelant que les fouilles étaient un « automatisme pénitentiaire », les évoquait en ces termes : « L’efficacité de ces fouilles reste pourtant limitée, comme le démontre la réalité des trafics de stupéfiants en prison : le détenu apprend vite les “ruses” pour échapper à la fouille. »

Pourquoi conserver des pratiques dégradantes et humiliantes qui, de surcroît, ne démontrent même pas leur efficacité ?

La Commission nationale consultative des droits de l’homme, dans son avis sur le projet de loi, a opté pour une position radicale. En effet, elle « préconise l’interdiction de la fouille intégrale de la personne détenue et réaffirme la nécessité d’atteindre le même niveau de sécurité en recourant à des moyens de détection modernes garantissant le respect de la dignité de la personne et de son intégrité physique et psychique ».

Par ailleurs, l’article 24 du projet de loi reste totalement muet sur les fouilles des cellules, …

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

… alors que celles-ci sont attentatoires au respect de la vie privée.

Là encore, la CNCDH préconise qu’un régime plus strict que celui qui existe actuellement leur soit appliqué, et demande qu’une telle fouille n’intervienne que sur décision motivée du chef d’établissement et en présence du détenu.

Cet amendement s’inspire de ces deux recommandations de la CNCDH : il vise à interdire formellement les fouilles intégrales, mais aussi les investigations corporelles internes, considérées par beaucoup d’associations comme contraires au respect de la dignité et de l’intégrité physique et psychique de la personne.

Enfin, il vise à encadrer les fouilles des cellules, afin de combler le silence du projet de loi sur ce point.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 45 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard, Muller et Anziani, est ainsi libellé :

I. - Avant le premier alinéa de cet article, ajouter un alinéa ainsi rédigé :

L'inspection des cellules a lieu dans le respect des biens et de la vie privée des détenus. Leur nature et leur fréquence sont strictement adaptées aux nécessités de maintien de l'ordre et de la sécurité dans l'établissement.

II. - Dans la première phrase du premier alinéa de cet article, après le mot :

fouilles

insérer le mot :

corporelles

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Cet amendement a pour objet d’insérer dans cet article relatif aux fouilles un alinéa concernant les cellules.

La précision nous paraît importante, car, même si la cellule n’est pas considérée comme un domicile au sens de la loi, la nature et la fréquence de ces fouilles doivent être encadrées.

Voici ce qui est écrit à la page 122 du rapport de la commission, au sujet de l’article 24 : « Le présent article fixe les critères justifiant les fouilles susceptibles de concerner les cellules et surtout les détenus eux-mêmes ».

À moins que nous n’ayons mal compris la rédaction de cet article 24, les fouilles de cellules ont disparu. En effet, il y est question essentiellement de la fouille des détenus. C’est pourquoi, mes chers collègues, nous vous proposons d’insérer à cet article un alinéa relatif à la fouille des cellules, dont la nature et la fréquence doivent être adaptées aux nécessités du maintien de l’ordre et de la sécurité dans l’établissement. Elles devront respecter bien entendu les biens des détenus et leur correspondance.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 134, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. - Dans la première phrase du premier alinéa de cet article, après le mot :

fouilles

insérer les mots :

des cellules

II. - Après le premier alinéa du même article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

Tous les détenus doivent assister à la fouille de leurs effets personnels, à moins que les techniques de fouille ou le danger potentiel pour le personnel ne l'interdise.

La parole est à M. Alain Anziani.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Mon amendement complète celui qui vient d’être exposé. Il y a en effet une ambiguïté sur le premier paragraphe : s’agit-il de la fouille des détenus ou de la fouille des cellules ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

S’il s’agit des cellules, comme nous le pensons, nous vous demandons de le préciser.

Par ailleurs, beaucoup de détenus qui voient leur cellule fouillée se plaignent de la disparition de telle photo ou de tel document qui leur appartenaient.

Mme le garde des sceaux s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Pour éviter ces polémiques, qui ne sont pas favorables au calme à l’intérieur de la prison, nous proposons que ces fouilles des cellules aient lieu en présence du détenu.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 135, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter le deuxième alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :

Elles doivent être spécialement motivées.

La parole est à M. Alain Anziani.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Dans le texte de la commission, les fouilles intégrales ne sont possibles que si les fouilles par palpation ou les moyens de détection électronique sont insuffisants. Nous proposons un ajout.

Dans l’esprit de l’article, comme dans l’esprit du rapporteur – que d’ailleurs nous partageons – on nous propose une réponse en deux temps. Autrement dit, oui à l’interdiction des fouilles intégrales, mais fouilles intégrales tout de même s’il n’y a pas d’autres solutions, notamment électroniques.

Or, dans un cas de « oui, mais », il faut être très vigilant sur le « mais » et la condition qui le suit. Pour que cette condition puisse faire l’objet d’un contrôle de l’autorité judiciaire, elle doit être motivée. Nous souhaitons qu’elle soit « spécialement motivée ».

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 303, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Compléter la dernière phrase du dernier alinéa de cet article, par les mots :

par l'autorité judiciaire

Cet amendement a été défendu.

L'amendement n° 44, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Les fouilles sont effectuées dans le respect de la dignité de la personne.

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

C’est en quelque sorte la troisième édition sur la notion de dignité !

L’objet de cet amendement est en effet de préciser que les fouilles sont effectuées dans le respect de la dignité. Tout le monde parle de la dignité depuis tout à l’heure, or ce mot n’est pratiquement pas dans le texte. Il n’apparaît qu’une seule fois, et ce grâce à la discussion d’hier.

Je suis d’ailleurs surprise de ne pas retrouver dans le texte de la commission cette notion de dignité qui existait pourtant dans le projet de loi initial. Rien ne justifie cette disparition : le principe du respect de la dignité de la personne humaine doit être le socle même de toutes les fouilles, qu’elles soient intégrales ou non.

J’ai le souvenir d’un détenu qui, il n’y a pas très longtemps de cela, a été obligé de se mettre tout nu pour accéder au parloir. Comme l’agent de l’administration pénitentiaire qui était présent a oublié de fermer la porte, ce détenu s’est retrouvé dans le plus simple appareil devant des familles entières venues au parloir !

Il s’agit d’un exemple concret d’une atteinte intolérable à la dignité d’un détenu, mais je pourrais en citer beaucoup d’autres.

Les fouilles intégrales sont par nature dégradantes, mais il est possible d’éviter qu’elles soient également attentatoires à la dignité du détenu : tout dépend des conditions dans lesquelles elles sont organisées.

Dans son arrêt du 12 juin 2007 condamnant la France pour des fouilles subies par un détenu à Fresnes, la Cour européenne des droits de l’homme ne s’oppose pas au principe de la fouille ; elle précise seulement que la fouille doit être entourée de précautions.

C’est l’idée de notre amendement : prévoir que les fouilles s’exercent dans le respect de la dignité de la personne humaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 136 rectifié, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Compléter cet article par une phrase ainsi rédigée :

Les fouilles sont pratiquées dans le respect de la personne.

La parole est à M. Alain Anziani.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Cet amendement de repli vise à compléter l’article 24 par une phrase assez claire. Cette précision est la moindre des choses !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Mes chers collègues, la commission propose déjà un encadrement des fouilles très strict. Interdire totalement les fouilles intégrales comme le prévoit l’amendement n° 235 – il n’est pas question ici des fouilles corporelles internes -, c’est pousser trop loin le curseur de la dignité au détriment de la sécurité.

Il est préférable, dans un premier temps, d’encadrer les fouilles intégrales de la manière la plus stricte qui soit.

Nous sommes donc défavorables à l’amendement n° 235.

Il y a une incompréhension entre nous au sujet de l’amendement n° 45 rectifié. Cela va de soi, le premier alinéa de l’article 24, où nous encadrons de manière générale les fouilles - la présomption d’infraction, les risques que fait courir l’attitude de tel ou tel détenu -, couvre l’ensemble des fouilles, y compris celles des cellules. Seuls les alinéas suivants ne concernent que les fouilles des détenus.

Mme Boumediene-Thiery a donc la réponse à la question qu’elle se posait.

En conséquence, je demande le retrait de cet amendement.

L’amendement n° 134 concerne un problème proche de celui du contrôle du courrier. Nous nous demandions si le contrôle du courrier devait être réalisé en présence des détenus. De la même manière, ces derniers doivent-ils être présents lors des fouilles des cellules ?

Nous l’avons indiqué plus tôt, cette présence pourrait susciter des vexations susceptibles d’aviver les tensions entre le personnel et les détenus, ce qui irait à rebours de l’objectif. En outre, cela peut poser des problèmes pratiques très simples : si le détenu travaille, s’il est au parloir, comment faudra-t-il procéder ?

Cette disposition poserait davantage de problèmes qu’elle n’en résoudrait. C’est pourquoi l’avis de la commission est défavorable.

Concernant l’amendement n° 135, la commission des lois a voulu un dispositif déjà très encadré. Nous souhaitons donc en rester à l’équilibre proposé. Nous demandons le retrait de l’amendement.

Au sujet de l’amendement n° 44, la rédaction du premier alinéa de l’article 24 met en avant les principes de proportionnalité et de nécessité des fouilles, ce qui implique nécessairement le respect de la dignité de la personne.

Nous demandons le retrait de cet amendement ; à défaut, la commission sera défavorable.

La commission demande également le retrait de l’amendement n° 136 rectifié et sera défavorable si cet amendement est maintenu. En effet, la notion de respect de la personne est incluse au premier alinéa de l’article qui, comme je le disais, met en avant le principe de proportionnalité et de nécessité des fouilles.

Sur le fond, nous sommes parfaitement d’accord, mais cet objectif est déjà pleinement satisfait.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Nous sommes favorables à l’amendement n° 303.

Concernant l’amendement n° 235, l’utilisation de moyens de détection électroniques, qui sont au nombre des modalités de mise en œuvre des fouilles, ne relève pas du domaine législatif.

Par ailleurs, le principe du respect de la dignité de la personne résulte des dispositions de l’article 10 du texte.

En outre, l’amendement tel qu’il a été rédigé prévoit une interdiction des fouilles intégrales ainsi qu’une décision spécialement motivée pour les fouilles des cellules. Or ces fouilles ont lieu pour la sécurité de l’établissement et ne sont pas une sanction. Imposer la motivation des fouilles à l’administration pénitentiaire alourdirait la gestion et l’organisation de l’établissement.

Nous sommes donc défavorables à l’amendement n° 235.

L’amendement n° 45 rectifié a pour objet le respect des biens et de la vie privée des détenus. Or, comme l’a dit le rapporteur, le premier alinéa de l’article 24 ne prévoit pas de distinction entre les fouilles corporelles et les fouilles de cellules ; il a vocation à s’appliquer à l’ensemble des cas.

En conséquence, l’amendement est satisfait. S’il est maintenu, nous y serons défavorables.

L’amendement n° 134 prévoit que les détenus assistent à la fouille de leur cellule et de leurs effets personnels. J’ai entendu les arguments du rapporteur, mais j’irai encore plus loin : je défends la dignité et la sécurité de l’administration pénitentiaire.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Des faits divers tragiques sont survenus à une période où l’on aurait pu prendre des mesures ; pourtant, rien n’a été fait.

Nous prenons quant à nous les mesures pour avancer et permettre la réalisation des fouilles dans un cadre légal moderne. Mais je tiens aussi à la sécurité et à la dignité des personnels pénitentiaires, en conséquence, pour des raisons de sécurité, je ne souhaite pas que le détenu soit présent dans la cellule au moment de la fouille.

En conséquence, nous émettons un avis défavorable sur cet amendement.

Sur l’amendement n° 135 qui précise que les fouilles intégrales « doivent être spécialement motivées », je ferai les mêmes observations que pour l’amendement du groupe CRC.

L’avis du Gouvernement est défavorable.

Concernant l’amendement n° 44, les dispositions relevant du respect de la dignité sont déjà dans l’article 10 et s’imposent pour l’ensemble du texte.

Nous sommes donc défavorables à cet amendement.

L’amendement n° 136 rectifié ayant pratiquement le même objet que le précédent, nous y sommes défavorables, et pour les mêmes raisons.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour explication de vote sur l'amendement n° 303.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Selon l’amendement de M. Lecerf, le médecin sera requis par l’autorité judiciaire. Or j’aurais aimé que « l’impératif spécialement motivé » soit lui aussi motivé par l’autorité judiciaire. En effet, la motivation doit pouvoir venir d’une autorité indépendante et l’autorité judiciaire semble la plus appropriée.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Mon intervention va exactement dans le même sens que celle de Mme Boumediene-Thiery.

Nous comprenons très bien le souci de M. Lecerf quand il souhaite qu’il s’agisse d’une décision de l’autorité judiciaire. Nous considérons cela, monsieur Lecerf, comme un progrès.

Mais il existe un problème de coordination entre les phrases. L’alinéa est ainsi rédigé : « Les investigations corporelles internes sont proscrites, sauf impératif spécialement motivé. Elles ne peuvent alors être réalisées que par un médecin requis à cet effet. »

Vous proposez d’ajouter : « par l’autorité judiciaire ». Cet ajout ne porte donc que sur la seconde phrase.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Il n’est pas dit explicitement que, s’agissant d’un acte particulièrement grave – nous en avons parlé – l’investigation elle-même doit être décidée par l’autorité judiciaire.

C’est pourquoi je vous propose la rédaction suivante pour cet alinéa : « Les investigations corporelles internes sont proscrites, sauf décision de l’autorité judiciaire pour raisons impératives spécialement motivées. Elles ne peuvent alors être réalisées que par un médecin requis à cet effet par celle-ci. »

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat approuve.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Cette rédaction a le mérite d’être claire et elle montre que c’est l’autorité judiciaire qui, dans ce cas spécifique et particulièrement grave, pour des raisons impérieuses spécialement motivées, décide.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Je souscris aux observations des orateurs qui m’ont précédée. Si M. le rapporteur rejoint la conception exprimée par M. Sueur, nous soutiendrons cet amendement qui, en tout état de cause, constitue un progrès. En revanche, s’il ne s’agit que de faire requérir le médecin par l’autorité judiciaire, cela n’apporte pas grand-chose.

Nous considérons qu’il est important de poser des principes. Certes, il est toujours possible d’y déroger, et on le fait d’ailleurs souvent, mais on doit alors présenter une raison motivée. Je sais que vous contestez cette appréciation, madame le garde des sceaux, mais je considère pour ma part qu’il s’agit d’une question essentielle.

L’association des chrétiens pour l’abolition de la torture, l’ACAT, fait, chacun le sait, un travail remarquable pour dénoncer la torture. J’ai lu ses rapports.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Bien sûr, comme nous tous, monsieur Hyest !

L’ACAT nous amène à réfléchir, à engager une démarche que nous n’aurions peut-être pas initiée seuls et qui nous conduit à considérer certains actes dégradants comme des actes de torture, la notion de « torture » ayant évolué au cours des siècles.

La sécurité est bien évidemment essentielle pour le bon fonctionnement d’un établissement pénitentiaire. Nous le savons et le sujet n’est pas là.La difficulté tient au rapport entre la nécessité d’assurer la sécurité des établissements, d’une part, et le respect de la dignité des détenus, d’autre part.

Les différentes mesures qui ont été prises pour renforcer la sécurité n’empêchent pas les évasions, les actes graves entre détenus. On doit donc s’interroger sur le rapport qu’il y a entre les moyens, très lourds, que l’on consacre à la sécurité et les conséquences qui en découlent en termes d’humiliation des personnes.

L’ACAT s’inquiète, dans son rapport, de la manière dont sont traités les « détenus particulièrement signalés », accusés d’actes de terrorisme, par exemple.

Cela m’amène à évoquer le cas de Julien Coupat, dont l’affaire prend à mon sens un tour tout à fait regrettable.

Julien Coupat a été placé en détention provisoire sous l’accusation de terrorisme, bien qu’aucune preuve n’ait été apportée à son encontre. C’est un détenu particulièrement signalé.

Selon les témoignages de sa famille – on peut toujours prétendre que les proches ne sont pas objectifs, mais il faut parfois savoir les écouter – Julien Coupat serait fouillé à corps à plusieurs reprises à chacune des visites de son avocate ou de ses déplacements au tribunal et contraint de se dénuder devant des policiers hilares. De telles situations ne nous honorent pas !

Je considère donc qu’il est essentiel de poser des principes, auxquels il est bien entendu possible de déroger en cas d’absolue nécessité, par décision spécialement motivée.

Pour toutes ces raisons, je suis favorable aux amendements de Mme Boumediene-Thiery en ce qui concerne tant les fouilles intégrales que les fouilles internes corporelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Pierre Fauchon, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Fauchon

Mes chers collègues, comme j’ai eu l’occasion de le rappeler ce matin, j’ai personnellement l’expérience d’événements qui touchent étroitement le sujet dont nous parlons. C’est peut-être l’une des raisons qui m’ont incité à rester en retrait. Il me semble néanmoins utile, à cet instant, d’apporter le témoignage de quelqu’un qui a personnellement connu l’angoisse de la détention, avec les menaces qui lui étaient liées, pendant les événements d’Afrique du Nord. Je n’ai pas besoin d’en dire davantage.

En août 1955, j’ai pris, non sans difficulté, non sans courir beaucoup de risques, des décisions qui ont permis d’éviter à plus de cent détenus les horreurs de la détention, entre les mains des militaires français de l’époque, qui n’étaient pas toujours des gens très délicats, c’est le moins que l’on puisse dire.

Je crois donc pouvoir apporter ici, en toute modestie, mais aussi en toute assurance, un certain témoignage. Il y a sans doute les exigences de la dignité, mais il y a aussi, qu’on le veuille ou non, c’est un fait, l’exigence de la sécurité. Nous en sommes aussi responsables, il ne faut pas l’oublier.

Les détenus, faut-il le rappeler, ne sont pas tous des anges. Leur imagination dépasse quelquefois l’imaginable. §Vous levez les bras au ciel, mais il s’agit malheureusement de vérités incontournables. Nous en mesurons tous les jours les résultats et les conséquences.

Je ne sais pas si certains êtres sont méchants. Je ne me permets pas de le dire, je suis trop avocat pour cela. Mais, ce que je sais, et que je dis, est que certains êtres sont dangereux. On ne peut pas l’ignorer.

M. Badinter évoquait tout à l’heure les horreurs de la fouille. Si j’étais aussi bon avocat que vous, mon cher collègue – ce n’est pas le cas, je le reconnais bien volontiers –, je pourrais évoquer les horreurs des conséquences de la criminalité et de la délinquance, et vous décrire la souffrance, l’humiliation, les douleurs de toutes les victimes. On pourrait aussi faire ce tableau et vous en seriez tout aussi épouvanté.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Fauchon

Non, vous ne l’avez pas dit ! Vous l’avez minimisé. C’est trop commode de passer outre, car ces deux aspects des choses sont bien réels et toute la difficulté est d’assumer nos responsabilités en évitant les abus. Ce n’est pas facile !

Il y a ceux qui, comme M. Portelli, considèrent que ces mesures ne sont pas toujours efficaces. Certes ! Mais le code pénal dans son entier n’est pas toujours efficace. Il n’empêche pas la délinquance. Allez-vous pour autant l’abroger ? Est-ce que nous allons renoncer à toutes les dispositions qu’il prévoit sous prétexte qu’elles ne sont pas toujours efficaces ?

Mme Borvo Cohen-Seat regrettait elle aussi que ces mesures ne soient pas toujours efficaces. Il est en effet très difficile d’en mesurer l’efficacité, mais nous prenons des mesures parce qu’il est de notre devoir de les prendre. Même si elles ne sont pas toujours efficaces, elles sont malgré tout assez efficaces, et c’est toujours cela de sauvegardé.

Notre devoir est de faire le possible et non pas l’impossible.

Pour toutes ces raisons, considérant qu’il parvient à un équilibre assez sage, je voterai avec confiance l’amendement n° 303.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Hugues Portelli, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Hugues Portelli

M. Hugues Portelli. Monsieur Fauchon, nous faisons une loi sur les victimes tous les trois mois et une loi sur les prisons tous les cinquante ans !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Fauchon

Je vous ai déjà dit que j’ai fait plus que quiconque ici pour les détenus !

Debut de section - PermalienPhoto de Hugues Portelli

Je ne le nie pas et je ne vous critique pas, mon cher collègue. Mais nous avons le droit de légiférer sur tous les sujets, et, puisque nous légiférons sur les prisons, nous avons le droit d’accorder au sort des détenus tout l’intérêt qu’il mérite. C’était un simple rappel sur notre façon de légiférer sur les prisons au cours des siècles.

Je partage le point de vue de M. Jean-Pierre Sueur, pour une raison très simple.

Imaginez un week-end ordinaire. Le malheureux substitut de service voit défiler de très nombreux dossiers au bout milieu desquels se trouve une demande d’autorisation de requérir un médecin afin de faire procéder à une fouille. Il traitera cette demande avec sérieux, certes, mais peut-être pas toujours avec le temps nécessaire pour réfléchir.

En revanche, si on lui demande de motiver sa décision, ce n’est plus la même chose. Il devra se donner le temps de la réflexion. D’un point de vue technique, motiver une autorisation de faire procéder à une fouille et saisir un médecin pour effectuer une fouille, c’est très différent. C’est pourquoi je préfère la rédaction proposée par M. Jean-Pierre Sueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. le rapporteur, puis nous procéderons au vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Mes chers collègues, nous avançons et le problème, essentiel, est extrêmement complexe.

Je ne partage pas l’appréciation de MM. Sueur et Portelli. Il me semble que chacun a, à sa place, son rôle à jouer pour assurer la sécurité dans les établissements pénitentiaires et garantir le respect de la dignité des personnes.

L’investigation corporelle interne est exceptionnelle. Celui qui la demande connaît la situation de la prison. Si l’autorité pénitentiaire l’estime nécessaire, elle formule une demande motivée de fouille corporelle interne qui est, en effet, la plus vexatoire.

Cette demande est adressée à l’autorité judiciaire, seule compétente pour réquisitionner éventuellement un médecin. Il est bien évident que l’autorité judiciaire ne le réquisitionnera que si elle a été convaincue par la motivation spéciale invoquée par l’autorité pénitentiaire.

Si l’autorité judiciaire estime que la raison invoquée n’est pas suffisante, elle n’ordonnera pas la réquisition et la fouille n’aura pas lieu.

Cette organisation correspond à une logique qui ne me paraît pas déraisonnable.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Badinter

Je demande la parole, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

J’avais indiqué que nous passerions au vote après l’intervention de M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

M. Badinter n’a pas expliqué son vote. Il peut donc le faire, c’est le règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Certes, mais il eût été préférable que M. Badinter expliquât son vote plus tôt, cela aurait permis à M. le rapporteur d’apporter à chacun les précisions qu’il estime nécessaires.

La parole est donc à M. Robert Badinter, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Badinter

Je serai d’une grande concision, monsieur le président.

Monsieur le rapporteur, nous sommes très proches d’une solution sur le problème, gravissime, des fouilles corporelles internes.

Il est plus clair, y compris pour les personnels et pour les autorités pénitentiaires, d’avoir l’autorisation de l’autorité judiciaire lorsqu’ils se trouvent en présence de situations – et on conçoit lesquelles – qui font naître un soupçon : une arme cachée, par exemple.

Nous sommes au temps du téléphone portable, des e-mails. Nous vivons dans l’instantanéité. L’autorité pénitentiaire avise le parquet. L’autorité judiciaire donne une réponse immédiate : procéder ou ne pas procéder à la fouille. La première signale ; la seconde décide. Au final, la gardienne des droits fondamentaux, donc de la dignité de la personne, c’est bien l’autorité judiciaire.

Vous l’avez d’ailleurs démontré en affirmant que, si l’autorité judiciaire n’est pas convaincue que les circonstances le justifient, elle ne donnera pas l’autorisation de recourir à un médecin.

Il s’agit vraiment d’une question de rédaction.

Comme l’a évoqué M. Sueur, les investigations corporelles internes sont proscrites, sauf décision spécialement motivée de l’autorité judiciaire. Mais un simple e-mail suffit ; tout se fait en un instant.

La suite telle que vous l’avez écrite est parfaite : « Elles ne peuvent alors être réalisées que par un médecin requis à cet effet. » Ce n’est même plus la peine de faire apparaître l’autorité judiciaire. C’est la décision qui doit venir de l’autorité judiciaire, non le choix du médecin. C’est aussi simple que cela, ce n’est rien de plus.

Au fond, nous sommes d’accord : c’est à l’autorité judiciaire de prendre cette responsabilité, pas au personnel pénitentiaire. Et de quelle manière ? De la façon la plus simple que les techniques actuelles permettent. C’est tout, monsieur le rapporteur. Si vous reprenez cette rédaction, je crois que tout le monde votera l’amendement, et puis ce sera fini !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Mes chers collègues, nous sommes effectivement sur le point de trouver un accord. Je souhaiterais cependant que, pour le moment, nous en restions à la proposition qui a été faite.

Pour cela, je vous donnerai un dernier argument, tiré de la comparaison – même si comparaison n’est pas raison – avec le même type de fouilles, effectuées cette fois lors d’une garde à vue ou lors d’un contrôle des services des douanes. Dans l’hypothèse de la garde à vue, la réquisition est faite par un officier de police judiciaire. Pour les fouilles effectuées par les douaniers, elle est faite par les autorités des douanes.

En l’espèce, l’hypothèse que nous avons adoptée est la plus protectrice, puisque la réquisition ne pourra être décidée que par l’autorité judiciaire. Nous avons déjà fait un grand pas.

Il faut aussi prévoir la possibilité, pour les uns et les autres, de pouvoir se rallier à une solution. Nous avons beaucoup avancé dans votre direction, monsieur Badinter. Nous souhaiterions que vous fassiez un petit pas vers nous.

L'amendement est adopté à l’unanimité des présents.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

En conséquence, l’amendement n° 235 n’a plus d’objet.

Madame Boumediene-Thiery, l'amendement n° 45 rectifié est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Oui, monsieur le président, je le maintiens, car je considère que les fouilles des cellules, et pas seulement les fouilles corporelles, doivent figurer dans le texte.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 24 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 137, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 24, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Lors des fouilles, le personnel applique une procédure dont les modalités sont fixées par décret en Conseil d'État.

La parole est à M. Alain Anziani.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Il est souvent reproché aux règles pénitentiaires européennes d’être purement déclaratoires et pas suffisamment normatives.

En l’espèce, nous disposons justement d’une règle pénitentiaire européenne, la règle 54-1, qui est normative et précise que, lors des fouilles, le personnel applique une procédure dont les modalités sont fixées par décret en Conseil d’État.

Cette règle pénitentiaire européenne doit, à nos yeux, être transcrite dans notre droit : en effet, la fixation par décret en Conseil d’État des modalités d’application de la procédure, c'est-à-dire en quelque sorte la méthode, protégera à la fois le personnel surveillant et les détenus. Cela nous semble une très bonne chose.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. La commission est tellement d’accord avec M. Anziani qu’elle considère que l’amendement est totalement satisfait !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Puis-je vous interrompre, monsieur le rapporteur ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Alain Anziani, avec l’autorisation de M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Dans sa fougue, M. le rapporteur est passé un peu à côté de l’objet de mon amendement, qui vise en premier lieu, non pas un décret en Conseil d’État, mais une procédure appliquée par le personnel. Or cette disposition ne figure pas dans le texte initial.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

La procédure est définie pour l’essentiel à l’article 24, et tout ce qui n’a pas été prévu par cet article ne peut, en vertu de l’article 27, qu’être fixé par la procédure assez solennelle du décret en Conseil d’État.

Encore une fois, mon cher collègue, nous sommes tellement d’accord qu’il n’y a plus l’épaisseur d’une feuille de papier à cigarette entre nous !

Nouveaux sourires

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Pour les mêmes raisons, nous estimons que l’amendement est satisfait par l’article 27 du projet de loi.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 236, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat, Assassi et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :

Avant l'article 25, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'emprisonnement de mineurs doit constituer une mesure de dernier recours. Le régime de détention doit, en toutes circonstances, être adapté aux spécificités des détenus mineurs.

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

Ce projet de loi fait peu de cas des mineurs incarcérés. Seulement deux articles y font référence et pourtant, cette année, selon la Défenseure des enfants, soixante-douze d’entre eux ont tenté de se suicider, soit quarante fois plus que parmi les jeunes en liberté et, en 2008, trois d’entre eux ont trouvé la mort.

La construction de sept établissements pénitentiaires pour mineurs, ou EPM, ne règle rien. À Meyzieu, pourtant présenté comme un modèle, un jeune s’est pendu il y a un an. Il avait seize ans et avait été incarcéré deux mois auparavant.

Madame le garde des sceaux, pour les jeunes, encore plus que pour les majeurs, la prison est dure, d’autant plus qu’ils sont fragiles et vulnérables.

C’est pourquoi il nous paraît essentiel de consacrer dans la loi le principe selon lequel la détention d’un mineur ne peut être qu’une mesure de dernier recours. Elle doit donc demeurer exceptionnelle dans son prononcé et minimale dans la durée.

C’est d’ailleurs ce que prévoit l’article 37, b), de la convention internationale des droits de l’enfant : « L’arrestation, la détention ou l’emprisonnement d’un enfant doit être en conformité avec la loi, n’être qu’une mesure de dernier ressort et être d’une durée aussi brève que possible. »

Hélas, la création de ces EPM est emblématique de la politique gouvernementale en matière de justice des mineurs : depuis 2002, toutes les réformes de l’ordonnance de 1945 donnent la prééminence à l’enfermement, bientôt peut-être dès douze ans en cas de crime ! Je n’ose même pas y penser…

Ainsi, les moyens supplémentaires affectés ces dernières années à la protection judiciaire de la jeunesse vont en quasi-totalité à l’enfermement, au détriment des suivis éducatifs en milieu ouvert et des structures d’hébergement classiques, déjà insuffisants, et sans considération pour les effectifs en juges et en greffiers qui seraient nécessaires pour que les juridictions des mineurs fonctionnent dans des délais normaux.

Construire des EPM, c’est nécessairement enfermer un nombre toujours plus grand de jeunes. C’est banaliser la prison pour les mineurs, quand tous les professionnels s’accordent à dire que les solutions résident dans la prise en charge individualisée, l’accompagnement adapté dans le temps, en accord avec la famille et en tenant compte du milieu social.

La seule construction des sept EPM coûte environ 90 millions d’euros et leur fonctionnement mobilise, pour soixante jeunes, une quarantaine de personnels de la PJJ !

Dans le même temps, en deux ans, entre 2006 et 2007, une dizaine de foyers éducatifs ont été fermés.

La création d’un seul EPM équivaut à six foyers éducatifs de dix places, huit services d’insertion professionnelle, soit la prise en charge de 250 mineurs, dix services de milieu ouvert, soit le suivi de 1 500 jeunes.

Or, quand nous écrivons la loi, n’oublions pas que l’enfance et l’adolescence sont des périodes structurantes de la vie, des périodes de très grande vulnérabilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

La commission sollicite le retrait de cet amendement, pour la seule raison qu’il est largement, pour ne pas dire intégralement satisfait.

D’une part, le texte proposé par l’article 32 du projet de loi pour l’article 132-24 du code pénal dispose, dans la rédaction retenue par la commission, qu’« une peine d’emprisonnement ferme ne peut être prononcée qu’en dernier recours… » Ces dispositions s’appliquent tant aux majeurs qu’aux mineurs.

Les articles 53 et 53 bis du texte élaboré par la commission relatifs aux sanctions disciplinaires et au placement administratif à l’isolement comportent des dispositions spécifiques propres aux mineurs.

Par ailleurs, l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante prévoit déjà que la détention provisoire – article 11 – ou l’emprisonnement – article 20-2 – d’un mineur doit intervenir soit dans un quartier spécial d’un établissement pénitentiaire, soit dans un établissement pénitentiaire spécialisé pour mineur, de manière à garantir un isolement complet d’avec les détenus majeurs ainsi que la présence en détention d’éducateurs.

J’ajoute que la refonte de cette ordonnance, dans le cadre d’un projet de loi en cours d’élaboration, sera l’occasion de réexaminer l’ensemble des règles applicables à l’incarcération des mineurs, à l’exception, bien évidemment, des règles qui ont été constitutionnalisées, c’est-à-dire la juridiction spécialisée, la primauté de l’éducatif et l’atténuation de responsabilité.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Je fais miens tous les arguments invoqués par M. le rapporteur.

L’article 32 du projet de loi prévoit qu’en matière correctionnelle une peine d’emprisonnement ferme ne peut être prononcée qu’en dernier recours.

Ce texte ne distingue pas entre les détenus majeurs et mineurs, de sorte que la précision sur l’emprisonnement comme solution de dernier recours s’applique aussi aux mineurs. D’ailleurs, le code de procédure pénale évoque aussi bien les majeurs que les mineurs.

En outre, l’article 20-2 de l’ordonnance du 2 février 1945 dispose que l’emprisonnement des mineurs a lieu, soit dans un quartier spécial d’un établissement pénitentiaire, soit dans un établissement pénitentiaire spécialisé pour mineurs.

Cet amendement est totalement satisfait.

Effectivement, un EPM équivaut à plusieurs foyers éducatifs, mais il ne serait pas adapté de placer dans un même foyer éducatif des mineurs délinquants, notamment des mineurs criminels, et des mineurs victimes, qui sont souvent hébergés dans ces foyers, sous peine de voir la situation se dégrader plus encore.

Il est donc important de prévoir des établissements dédiés, adaptés à la délinquance des mineurs.

À ce propos, les EPM que vous critiquez ont pourtant été salués par le commissaire européen aux droits de l’homme.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Il a même suggéré aux autres pays européens de nous imiter ; cela mérite d’être souligné !

Je reçois d’ailleurs assez souvent des personnalités de pays européens voisins, qui souhaitent s’inspirer du modèle des établissements pénitentiaires pour mineurs.

À ce jour, le succès est au rendez-vous, en raison de la prise en charge pluridisciplinaire effectuée dans l’intérêt du mineur et destinée à lutter contre la délinquance.

Pour toutes ces raisons, nous sommes défavorables à cet amendement.

L'amendement n'est pas adopté.

L'administration pénitentiaire garantit aux mineurs détenus le respect des droits fondamentaux reconnus à l'enfant.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

L'article 25 est des plus brefs, qu’il s’agisse de la rédaction du Gouvernement ou de celle de la commission des lois. Il n’a pas nécessité beaucoup d’encre : l'article 40 est passé par là, probablement !

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

Les articles 26 et 27 ne sont guère plus détaillés. La question des détenus mineurs aurait toutefois mérité davantage.

Nous sommes tous solidaires et je souhaite prendre la défense de mon collègue Robert Badinter, dont tout le monde se souvient qu’il a été ministre de l’agriculture.

Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

Mme le garde des sceaux n’était pas encore entrée en politique et sans doute n’est-elle pas au courant de cet épisode de notre histoire, pourtant récente !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

Je me rappelle avoir un jour déclaré à Élisabeth Guigou que le garde des sceaux qui mérite d’être félicité est celui qui quitte ses fonctions avec moins de personnes détenues qu’à son arrivée.

Hélas ! ce n’est pas votre cas, madame le garde des sceaux !

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Avant, les criminels étaient dehors !

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

Vous pouvez en effet vous prévaloir d’une surpopulation carcérale dont sont victimes à la fois les détenus et le personnel pénitentiaire. Il faut le rappeler, pour replacer les choses dans leur juste ordre.

Pour remédier à l’indigence de l'article 25, le Sénat, je l’espère, prendra en considération deux amendements déposés par mon groupe.

L'amendement n° 140 rectifié vise à compléter l'article 25 par un alinéa ainsi rédigé : « Dans chaque établissement pénitentiaire, il sera mis en place un dispositif pénitentiaire propre à garantir l’intégrité physique des détenus mineurs. » En effet, ce problème très important n’est pas traité dans le projet de loi pénitentiaire.

L'amendement n° 141 rectifié tend, lui, à insérer un article additionnel après l'article 25 ainsi rédigé : « Le service public pénitentiaire garantit la prévention totale du risque de confusion entre l’incarcération de mineurs et celle de majeurs. »

En effet, dans un certain nombre d’établissements pénitentiaires, notamment outre-mer, il existe une détention conjointe des majeurs et des mineurs, ce qui entraîne de très importantes difficultés.

Par conséquent, sur ce sujet, il est plus que jamais nécessaire de se référer aux règles pénitentiaires européennes.

Les mineurs de dix-huit ans devraient être détenus non dans des prisons pour adultes, mais dans des établissements spécialement conçus à cet effet.

Si des mineurs sont néanmoins exceptionnellement détenus dans des prisons pour adultes, leur situation et leurs besoins doivent être fixés par des règles spéciales. Sur cette question, les recommandations et les mises en demeure des institutions européennes sont très claires.

Se pose également le problème des enfants en bas âge, lorsque l’un des deux parents est incarcéré.

Les parents d’enfants en bas âge ne devraient pas être incarcérés, mais ce n’est pas toujours possible. Lorsqu’ils le sont, il faut prévoir des dispositions qui tiennent pleinement compte de l’intérêt de l’enfant.

Il faut tout faire pour que l’autorité parentale de la mère, si elle ne lui a pas été retirée par la justice, soit véritablement reconnue et exercée. Il en est de même pour celle du père.

Il convient également de souligner que, lorsqu’ils sont incarcérés, les enfants en bas âge ne doivent pas être considérés comme des détenus : ils conservent tous les droits des enfants en bas âge en milieu libre, comme le précise la convention de New York, ou convention internationale des droits de l’enfant.

La règle européenne ne définit aucune limite supérieure en ce qui concerne l’âge à partir duquel un enfant en bas âge doit être séparé de son parent détenu. Il faut agir ici avec le plus d’humanité possible.

Il est nécessaire de tenir compte des prescriptions et des conseils formulés par la Commission nationale consultative des droits de l'homme, notamment en transposant le plus rapidement possible au niveau législatif de nombreuses dispositions qui, jusque-là, n’ont jamais été réglées ou adoptées que par voie réglementaire.

Le projet de loi devrait prévoir des mesures qui ont été demandées plusieurs fois par le Conseil d’État.

Enfin, il serait regrettable que l’affirmation positive des droits fondamentaux des détenus mineurs ne soit pas suivie de leur énumération précise ou d’un renvoi explicite aux sources internes et internationales les consacrant.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

Or la singularité de la prise en charge des détenus mineurs est uniquement mise en évidence dans l’article 53 du présent texte, qui est relatif au régime disciplinaire des personnes détenues placées en détention provisoire ou exécutant une peine privative de liberté et qui évoque le cas des détenus mineurs de plus seize ans. Une telle situation reflète d’ailleurs bien l’esprit trop souvent répressif du projet de loi.

C’est pourquoi les amendements qui seront défendus dans un instant sont nécessaires, si nous voulons rendre plus humaines les dispositions prévues par ce texte.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Je n’ai certainement pas oublié que Robert Badinter avait été garde des sceaux. En revanche, monsieur le sénateur, vous avez raison d’indiquer que je suis depuis beaucoup moins longtemps que vous en politique. Il n’en reste pas moins que je suis depuis beaucoup plus longtemps que vous sur le terrain !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Peut-être les prisons comptent-elles plus de détenus aujourd'hui, mais la délinquance a fortement diminué. Entre 1997 et 2002 – une référence ! –, celle-ci avait augmenté de plus de 20 %...

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

Nous ne sommes plus en campagne électorale !

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

... et les atteintes aux personnes, de 50 % !

Mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, je ne fais que rappeler les résultats de la politique mise en œuvre par vos gouvernements !

Vous n’avez rien fait ni sur la condition pénitentiaire ni sur la délinquance, laquelle, à cette époque, avait littéralement explosé.

Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Il n’est qu’à voir les chiffres ! Je les tiens d’ailleurs à votre disposition. Le nombre de mineurs détenus était beaucoup plus important sous votre gouvernement qu’aujourd'hui. Entre 2000 et 2008, il a fortement diminué. Les mineurs détenus étaient plus de 800 à l’époque ; ils sont moins de 700 aujourd'hui, et ce malgré une politique pénale qui se caractérise par sa fermeté et que nous assumons : nous sanctionnons les criminels et les délinquants, et les condamnations sont exécutées.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Ce n’était pas le cas avec la gauche, peut-être ?

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Parallèlement, nous prenons beaucoup mieux en charge les mineurs, notamment avec la création des centres éducatifs fermés. À l’époque, vous avez voté contre ; aujourd'hui, vous reconnaissez leur pertinence, comme celle des établissements pour mineurs, qui évitent la récidive.

La sécurité des Français est ma première préoccupation.

Dans le même temps, j’entends favoriser la réinsertion des personnes délinquantes, notamment des mineurs, car personne ne peut se satisfaire de voir ces derniers s’ancrer dans la délinquance. C’est le seul objectif politique de la majorité.

Pour ma part, je refuse les polémiques stériles !

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Je ne nourrirai pas la polémique, madame le garde des sceaux.

Il nous semble nécessaire de compléter l’article 25, qui se caractérise par sa très grande concision, par une disposition concernant les détenus mineurs étrangers, sujet que nous avons eu l’occasion d’évoquer hier.

Les problèmes des détenus mineurs étrangers sont spécifiques. Étant à la fois mineurs et étrangers, ils sont doublement victimes des conditions difficiles de l’incarcération et les vivent encore plus durement que les autres mineurs ou les autres détenus.

Les détenus mineurs étrangers sont séparés de leurs parents à la suite de différents événements. Quelquefois même, ils ont été instrumentalisés dans la poursuite de différentes actions que le code civil ou le code pénal punissent.

La législation française prévoit, pour de tels mineurs, un régime spécifique. Il faut notamment que la régularisation administrative de leur situation se fasse le plus rapidement possible et qu’ils aient accès à des informations précises ; je n’ose ajouter « dans une langue qu’ils comprennent », pour ne pas relancer un débat qui nous a occupés longtemps. En particulier, il est indispensable que leur soit alloué un titre de séjour dans les plus brefs délais.

Malheureusement, tous les amendements que nous avons déposés en ce sens, qui semblaient utiles et de bon sens, ont été rejetés au titre de l'article 40 de la Constitution. Je le rappelle, car cela ne doit pas être oublié.

Je conclus en précisant que nous voterons les amendements présentés par notre collègue Richard Tuheiava.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 140 rectifié, présenté par MM. Tuheiava, Anziani et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Dans chaque établissement pénitentiaire, il sera mis en place un dispositif pénitentiaire propre à garantir l'intégrité physique des détenus mineurs.

La parole est à M. Richard Tuheiava.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Tuheiava

L’amendement n° 140 rectifié a pour objet d’attirer l’attention de la Haute Assemblée sur la question de l’incarcération des mineurs. Il s’agit de mettre en place un dispositif pénitentiaire propre à garantir l’intégrité physique - et morale, cela va sans dire - des détenus mineurs.

À la lecture de ce projet de loi ou du texte issu des travaux de la commission, on peut déplorer que seuls trois articles soient consacrés à la question de la détention des mineurs.

Je ne peux me satisfaire des arguments qui ont été opposés par le rapporteur à l'amendement n° 236, selon lesquels l’ordonnance du 2 février 1945 contient des dispositions de nature à satisfaire cet amendement ou qu’un projet de loi en cours d’élaboration permettra de couvrir ces points, à l’exception de ceux qui sont déjà constitutionnellement prévus.

Nous examinons un projet de loi pénitentiaire et nous en sommes parvenus à la section réservée à la détention des mineurs. S’il est bien un endroit dans le texte où il convient de mentionner la question du droit des détenus mineurs de manière un peu plus précise, c’est bien l’article 25 !

Je tiens ici à rappeler les dispositions de l’article 37 paragraphe c) de la convention internationale des droits de l’enfant :

« Les États parties veillent à ce que :

« c) Tout enfant privé de liberté soit traité avec humanité et avec le respect dû à la dignité de la personne humaine, et d’une manière tenant compte des besoins des personnes de son âge. En particulier, tout enfant privé de liberté sera séparé des adultes, à moins que l’on estime préférable de ne pas le faire dans l’intérêt supérieur de l’enfant... »

Cette convention a été ratifiée par la France en 1990 et trouve donc à s’appliquer dans l’ordre juridique national.

En 2005, la Cour de cassation s’est ralliée à la jurisprudence du Conseil d’État, qui reconnaissait la possibilité pour les tribunaux judiciaires français de se référer, dans leurs décisions, directement aux dispositions de la convention internationale des droits de l’enfant.

Dans la pratique, la confusion entre détention - ou incarcération - de détenus mineurs et majeurs est de nature à porter directement atteinte aux dispositions que je viens de rappeler.

Pour la Polynésie française en particulier, dont je me fais ici le porte-parole, cette situation a déjà été pointée dans un rapport alternatif rédigé conjointement par la Ligue polynésienne des droits de l’homme et par la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme le 3 juin 2004, rapport qui a été officiellement déposé sur le bureau du Comité des droits de l’enfant de l’ONU, à Genève.

J’ai personnellement défendu ce rapport alternatif à Genève et cette situation a été à juste titre retenue par le Comité des droits de l’enfant de l’ONU, qui a émis des recommandations claires et précises à l’égard de la France.

Bien qu’elle soit régularisée dans la pratique, cette atteinte aux dispositions de la convention internationale des droits de l’enfant n’a toujours pas trouvé de solution législative.

Il s’agit donc de poser clairement dans la loi ce principe de séparation entre les quartiers réservés aux mineurs et ceux qui accueillent les majeurs. Ce projet de loi pénitentiaire, qui est présenté comme le texte permettant, à bien des égards, de mettre la France en conformité avec ses engagements internationaux, vis-à-vis de l’Europe comme des Nations unies, est le cadre adéquat.

Je souhaite donc que le consensus le plus large se dégage sur cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Certains points me semblent parfois difficilement compréhensibles

Je rappelle aux uns et aux autres que la convention internationale des droits de l’enfant de New York est directement applicable, même sans transposition dans la législation nationale, et, par conséquent, elle a toute vocation à s’appliquer.

Par ailleurs, monsieur Tuheiava, je comprends mal que vous vous insurgiez, avec la plus grande courtoisie d’ailleurs, contre la non-séparation des détenus majeurs et mineurs.

Quelle est réellement la situation actuelle ? Depuis la loi d’orientation et de programmation pour la justice du 9 septembre 2002, sept établissements pénitentiaires pour mineurs, dotés d’une capacité d’accueil de 420 places, ont été créés. Dans ce cas, on peut parler de séparation intégrale, puisque ces établissements n’accueillent que des mineurs, et je les ai pour ainsi dire tous visités.

En outre, un programme de rénovation de l’ensemble des quartiers pour mineurs qui se trouvent dans les centres de détention a été engagé en 2003. Il a déjà permis la création de 330 places répondant aux normes européennes et la remise à niveau de 326 places.

Nous disposons donc d’une capacité de l’ordre d’un millier de places, qui, au plan des normes européennes et des impératifs de séparation des détenus, ne peut pas susciter de critiques.

Au 1er novembre 2008, 673 mineurs étaient incarcérés. Je précise d’ailleurs que ce nombre s’élevait à 713 au 1er novembre 2007. Par conséquent, si on évalue les gardes des sceaux à la diminution de l’effectif de mineurs incarcérés, votre situation s’améliore, madame le garde des sceaux.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Nous ne cherchons pas à obtenir des médailles, mais je pense tout de même que, en matière de séparation entre détenus majeurs et mineurs, nous avons fait énormément.

Cela étant, la situation des établissements pénitentiaires pour mineurs pose effectivement des problèmes.

Je peux dire que, au cours des visites que j’ai effectuées, certains de ces établissements m’ont donné l’impression d’être nettement plus efficaces que d’autres. C’est le site de Quiévrechain, situé dans mon département, le Nord, qui m’a semblé être le plus opérationnel, mais c’est un pur hasard.

En ce qui concerne les établissements pénitentiaires pour mineurs, je m’inquiète surtout de l’importance du coût de la journée de détention. Il évoluera sans doute, mais il s’élevait tout de même, l’an dernier, à 1 400 euros.

Exclamations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Certes, le programme n’en est qu’à ses débuts et, pour le moment, les établissements pénitentiaires pour mineurs sont loin d’être totalement remplis. Reste qu’il faudra faire baisser, rapidement et largement, le coût de la journée de détention et obtenir des résultats spectaculaires, faute de quoi nous ne pourrons pas poursuivre cette démarche.

Je rappelle, avec émotion, que cette remarque m’avait été adressée par notre regretté collègue Michel Dreyfus-Schmidt, lorsque nous visitions ensemble l’établissement pénitentiaire pour mineurs de Meyzieu.

Vraiment, mes chers collègues, je pense que, sur ce point, le Gouvernement a correctement fait son travail !

Il existe peut-être des problèmes spécifiques, par exemple en Polynésie française.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. J’avoue que ma compétence sur ce point n’est pas la plus sûre. S’il n’était pas si tard, j’aurais l’audace de demander au président de la commission des lois de bien vouloir envoyer son rapporteur pour avis du budget de l’administration pénitentiaire en Polynésie pour faire le point sur la situation

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Pour en venir plus précisément à l’amendement, je dois dire qu’il est globalement satisfait par l’article 1er dans la rédaction adoptée par la commission, qui affirme, sur l’initiative de notre collègue Hugues Portelli, que le service public pénitentiaire « garantit à tout détenu le respect des droits fondamentaux inhérents à sa personne ».

Il est également satisfait par l’article 4 bis, que l’on doit au groupe communiste et qui prévoit que, dans le cadre de leur mission de sécurité, les personnels de surveillance « veillent au respect de l’intégrité physique des personnes privées de liberté et participent à l’individualisation de leur peine ainsi qu’à leur réinsertion ».

Il est encore satisfait par l’article 19 bis disposant que « l’administration pénitentiaire doit assurer à chaque personne détenue une protection effective de son intégrité physique en tous lieux collectifs et individuels ». Je vous rappelle que nous en avons tiré, comme conséquence concrète, la responsabilité sans faute dans certaines hypothèses.

Par conséquent, je ne peux pas rendre un avis favorable sur cet amendement, qui est satisfait, et je me contenterai, sans beaucoup d’illusion, d’en demander le retrait.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Pour les mêmes raisons, notre avis est défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Richard Tuheiava, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Tuheiava

Je pense effectivement que M. le rapporteur n’a pas suffisamment visité les établissements pénitentiaires situés en outre-mer, que ce soit en Guyane ou en Polynésie française.

En effet, les dispositions prévues à l’article 25, dans sa rédaction actuelle, ne permettent absolument pas de répondre à la situation de ces établissements. Nous sommes donc aujourd’hui confrontés à des différences et des décalages entre territoires, ce pourquoi je serai désormais beaucoup plus technique dans mon propos.

Si, dans la pratique, le territoire hexagonal dispose déjà d’établissements remplissant ce type de conditions et si – je rebondis sur un autre argument de M. le rapporteur – le texte de la convention internationale des droits de l’enfant s’applique directement dans l’ordre juridique national, il n’existe aucun argument légal ou financier qui s’oppose au vote de mon amendement. L’article 40 de la Constitution ne lui a pas non plus été opposé.

Actuellement, certains territoires de la République ne bénéficient réellement pas des mêmes facilités que les autres pour garantir la séparation entre détenus mineurs et majeurs au sein des établissements pénitentiaires.

Des exemples dans l’Hexagone pour lesquels ces garanties sont effectives ont été évoqués ; je les connais. Le texte de la convention internationale des droits de l’enfant, en lui-même, trouve à s’appliquer dans l’ordre juridique interne. Il ne reste qu’à l’acter dans notre loi et c’est l’objet de mon amendement !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. le président de la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Mon cher collègue, il est vrai que le rapporteur n’a pas visité tous les établissements pénitentiaires des départements et collectivités d’outre-mer.

En revanche, quelque temps avant votre élection, deux de nos collègues ont effectué une mission sur les droits et libertés des communes de Polynésie française. À cette occasion, ils ont visité les établissements pénitentiaires, ce que nous avons également fait lors de la mission que j’ai menée à Mayotte.

En fait, dès que nous effectuons une mission dans un département d’outre-mer, nous en profitons pour visiter les établissements pénitentiaires. Nous nous rendons également dans les juridictions pour vérifier leur fonctionnement, avant d’établir notre rapport. La commission des lois est extrêmement vigilante sur ces points, il faut tout de même le rappeler !

Il est vrai que le principal établissement pénitentiaire de Polynésie française souffre de surpopulation et connaît des difficultés importantes. Nous le savons et nous le signalons d’ailleurs chaque année, au moment de l’examen du budget de l’outre-mer, dont notre collègue Christian Cointat est rapporteur pour avis au nom de la commission des lois, et dans le rapport pour avis de M. Jean-René Lecerf sur les crédits alloués à l'administration pénitentiaire.

Vous avez donc raison, cher collègue, et Mme le garde des sceaux ne doit pas oublier l’outre-mer.

Toutefois, parce que vous rencontrez des problèmes, vous nous demandez de répéter ce qui est déjà inscrit dans toutes les lois.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

J’insiste, monsieur Tuheiava, vous avez raison, mais ce n’est pas en écrivant, une fois de plus, ce qui est déjà dans toutes les lois que nous changerons quelque chose.

Il faut désormais mener les travaux nécessaires en Polynésie française afin, non seulement de réaliser un établissement pénitentiaire pour mineurs digne de ce nom, mais également de traiter d’autres problèmes. Pour avoir été plusieurs fois en Polynésie française, je connais effectivement l’établissement pénitentiaire de Faa’a-Nuutania et je l’ai progressivement vu se dégrader.

Par conséquent, ce n’est pas pour vous être désagréables, monsieur Tuheiava, mais nous ne pouvons qu’être défavorables à cet amendement.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Nous rencontrons effectivement un problème en Polynésie, puisque nous disposons de 150 places pour 390 détenus. La surpopulation est réelle !

S’agissant de l’ensemble de l’outre-mer, nous venons d’inaugurer à Saint-Denis de la Réunion un nouvel établissement pénitentiaire de 600 places.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Il est vrai que nous avons attendu plus de dix ans…

Par ailleurs, on trouve trois mineurs sur les 390 détenus du centre pénitentiaire de Faa’a-Nuutania. Certes, l’isolement pose des difficultés, mais des travaux d’extension ont été engagés. Cent places supplémentaires seront ouvertes à la fin du mois de mai 2009 et nous sommes en négociation pour l’achat d’un terrain en vue de la construction d’un autre établissement pénitentiaire.

Nous disposerons donc d’une nouvelle capacité pénitentiaire dans les deux ou trois ans à venir et, dès la fin du mois de mai, de cent places de prison supplémentaires.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 25 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 141 rectifié, présenté par MM. Tuheiava, Anziani et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 25, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le service public pénitentiaire garantit la prévention totale du risque de confusion entre l'incarcération de mineurs et celle de majeurs.

La parole est à M. Richard Tuheiava.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Tuheiava

Dans la lignée de l’amendement n° 140 rectifié, que je viens de soutenir, le présent amendement tend à poser, parmi les principes directeurs du projet de loi pénitentiaire, le principe de l’effort de prévention à l’encontre des risques de harcèlement, voire de sévices corporels entre détenus.

En effet, nous venons de l’indiquer, dans certaines maisons d’arrêt et établissements pénitentiaires des régions et collectivités d’outre-mer, le sous-dimensionnement et la vétusté des bâtiments, auxquels s’ajoute un phénomène de surpopulation carcérale qui bat des records – nous avons récemment dû échanger sur ce sujet avec Mme le garde des sceaux – engendrent un risque souvent avéré de confusion entre la détention de personnes mineures et celle de personnes majeures.

Toujours en accord avec l’impératif de mise en conformité de notre législation pénitentiaire nationale avec le troisième paragraphe de l’article 37 de la convention internationale des droits de l’enfant, qui trouve à s’appliquer en France, je vous propose d’insérer cet article additionnel après l’article 25.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

La commission a bien entendu notre collègue et prend acte de la situation en Polynésie française. Mais, pour les raisons que j’ai exprimées précédemment, elle donne un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

L’objet de cet amendement a déjà été évoqué et notre avis reste défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

Les mineurs, lorsqu'ils ne sont pas soumis à l'obligation scolaire, sont tenus de suivre une activité à caractère éducatif. –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 237, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat, Assassi et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :

Après l'article 26, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'administration pénitentiaire doit garantir l'accès des détenus mineurs aux services sociaux, psychologiques et éducatifs, culturels et sportifs ou à des activités similaires.

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

L’article 25 rappelle que les mineurs détenus disposent de droits fondamentaux dont la reconnaissance par l’administration pénitentiaire doit être effective.

Bien entendu, il est tout à fait positif que ce principe soit inscrit dans le projet de loi pénitentiaire. Cependant, les rédacteurs de ce texte renvoient au Conseil d’État le soin d’en définir les modalités d’application. Cela ne correspond pas à la règle pénitentiaire européenne 35.1, qui énumère précisément un certain nombre de droits devant être garantis aux détenus mineurs.

Je ne reviendrai pas sur les exigences de l’article 37 de la convention internationale des droits de l’enfant, celui-ci ayant été rappelé par mon collègue Richard Tuheiava. Toutefois, le fait que rien ne soit indiqué dans le projet de loi pénitentiaire sur les droits liés à l’âge des jeunes incarcérés fait peser un flou sur la nature de ces droits et, par conséquent, un risque d’arbitraire.

Nous proposons donc d’énumérer un certain nombre de ces droits incontournables, notamment l’accès aux services sociaux, psychologiques, éducatifs, culturels, sportifs, afin de garantir leur meilleure application ; le non-respect de ces droits pourrait faire l’objet de recours.

Un réel problème se pose à propos du droit des mineurs. Le projet de loi est de nature généraliste et ne s’applique que par défaut aux mineurs, comme vous l’avez rappelé, madame le garde des sceaux. Par ailleurs, les droits qu’il accorde aux détenus sont chaque fois assortis de restrictions, qui, en toute logique, s’appliqueront aussi aux mineurs. De surcroît, selon l’exposé des motifs, les mineurs voient garanti l’exercice de leurs droits fondamentaux dans les mêmes conditions que les majeurs, ce qui renforce notre interprétation.

La seule disposition spécifique figure dans l’article 53, qui limite le placement des mineurs de plus de seize ans en cellule disciplinaire à une durée maximale de sept jours.

En résumé, les mesures explicitement destinées aux mineurs sont abordées sous l’angle le plus répressif.

Pourtant, selon l’étude du projet de loi réalisée par le groupe de travail de la Commission nationale consultative des droits de l’homme, la spécificité de la vie carcérale relative à l’âge s’applique au quotidien et dans tous les domaines : hygiène, hébergement, santé physique et psychologique, droit au recours, maintien des liens familiaux.

Nous demandons simplement que ces précisions soient inscrites dans la loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

L’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante exige déjà la présence d’éducateurs en détention. La refonte de cette ordonnance, dans le cadre d’un projet de loi en cours d’élaboration, sera l’occasion de réexaminer l’ensemble des règles applicables à l’incarcération des mineurs.

En pratique, les mineurs qui sont incarcérés dans des établissements pénitentiaires pour mineurs bénéficient d’une prise en charge intensive – tous ceux qui ont visité de tels établissements le savent –, qui correspond largement aux attentes des auteurs de l’amendement n° 237. Relevons la présence de la protection judiciaire de la jeunesse, la PJJ, aux côtés de l’administration pénitentiaire.

Certes, je reconnais que la qualité de cette prise en charge est moindre dans les quartiers pour mineurs des établissements pénitentiaires, mais elle a progressé en raison de l’intervention des éducateurs de la PJJ.

La commission émet donc un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Aux termes de l’article 25, l’administration pénitentiaire « garantit aux mineurs détenus le respect des droits fondamentaux reconnus à l’enfant. » Je rappelle que tous les droits fondamentaux sont reconnus par l’ordonnance de 1945.

D’ici à quelques jours sera présenté le nouveau projet de réforme de la justice des mineurs, et il ne remet pas du tout en cause les droits fondamentaux de ces derniers.

Les garanties souhaitées par les auteurs de l’amendement n° 237 sont assurées par la rédaction actuelle du projet de loi. Par conséquent, le Gouvernement vous demande, madame Mathon-Poinat, de bien vouloir retirer cet amendement, faute de quoi il émettra un avis défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

Les modalités d'application du présent chapitre sont fixées par décret en Conseil d'État.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Raymonde Le Texier, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

L’article 27 est supposé clore le chapitre III relatif aux droits des détenus. Pourtant, il lui manque quelque chose : un pan entier sur les droits spécifiques des femmes détenues et de leurs enfants en bas âge, excusez du peu !

Il est incompréhensible qu’un projet de loi ayant pour objet affiché de réaffirmer le respect des droits fondamentaux pour les personnes détenues, fasse l’impasse sur ces droits spécifiques. Cette lacune est d’autant plus incompréhensible que ces droits sont explicitement réaffirmés par les règles pénitentiaires européennes 34 et 36.

D’aucuns soutiendront sans doute que les droits des détenus affirmés dans ce texte s’appliquent évidemment indifféremment aux hommes et aux femmes, mais ces dernières ont des besoins spécifiques, qui doivent être transcrits dans la loi, qu’il s’agisse du suivi gynécologique, de l’accouchement, de la prise en charge des très jeunes enfants, du maintien de la relation mère-enfant, que l’enfant soit né en prison ou avant l’incarcération.

Madame le garde des sceaux, nous sommes plusieurs, sur toutes les travées de cet hémicycle, à considérer cette carence comme inacceptable. Aussi, je vous invite à bien prendre la mesure de ce manque, tant pour la vie de ces femmes et de leurs enfants que pour ce qu’il dit de nous et de notre société.

Les membres du groupe socialiste avaient déposé sept amendements tendant pour la plupart à transposer les règles européennes en droit français, mais cinq d’entre eux ont été rejetés, l’article 40 ayant été invoqué. C’est une nouvelle illustration de l’usage à la fois excessif et discrétionnaire de cet article.

Il est dommage que l’on ne puisse parler de l’impérieuse nécessité de mettre en place une procédure d’adaptation avec la famille d’accueil lorsque l’enfant doit quitter sa mère.

Il est aussi dommage que l’on ne puisse parler de l’obligation de rechercher pour cet enfant un placement le plus proche possible de la maison d’arrêt, afin de faciliter les contacts avec la mère.

Il est enfin dommage que l’on ne puisse parler de la nécessité de mettre tout en œuvre pour maintenir des liens entre la mère et l’enfant.

Le recours à l’article 40 pour « évacuer », si je puis dire, ces questions est d’autant plus regrettable que seuls quelques cas par an sont concernés. Le coût financier ne saurait donc être élevé, contrairement aux répercussions humaines de cette situation. De surcroît, notons que les femmes ne représentent que 3, 8 % de la population carcérale.

La mesure de ces carences étant prise, mes chers collègues, je ne doute pas que nous voterons tous les amendements gouvernementaux que Mme le garde des sceaux ne manquera pas de nous proposer pour, faute de mieux, au moins nous aligner sur le droit européen.

L'article 27 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 142, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 27, insérer une division additionnelle et son intitulé ainsi rédigés :

Section...

Des personnes détenues femmes et des enfants en bas âge

L'amendement n° 143, présenté par M. Anziani et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 27, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'administration pénitentiaire doit respecter les besoins des femmes aux niveaux physique, professionnel, social et psychologique pour tous les aspects de la détention.

La parole est à Mme Raymonde Le Texier.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Comme je viens de le rappeler, les femmes ne représentent que 3, 8 % de la population carcérale. Le fait qu’elles soient peu nombreuses au regard de l’ensemble de la population carcérale ne doit pas, pour autant, nous amener à banaliser ou à nier leurs problèmes spécifiques.

Notons, en effet, que les femmes incarcérées sont majoritairement des mères de famille ; 76 % d’entre elles ont au moins un enfant.

L’amendement n° 142 a pour objet d’insérer, après l’article 27, une division additionnelle consacrée aux femmes et aux enfants en bas âge, comme le préconisent les règles pénitentiaires européennes.

J’en viens à l’amendement n° 143.

La règle pénitentiaire européenne 34 – nouvelle disposition – vise à tenir compte du fait que les détenues femmes, minoritaires au sein du système pénitentiaire, peuvent facilement être l’objet de discriminations.

Elle tend à aller au-delà de la proscription de la discrimination négative et à sensibiliser les autorités à la nécessité de prendre des mesures positives à cet égard. Ainsi, les femmes sont parfois logées dans de petits quartiers qui proposent moins de travail ou du travail moins intéressant. Il convient donc de favoriser les initiatives permettant de mettre fin à cet état de fait.

Par ailleurs, il importe de reconnaître que les besoins particuliers des femmes couvrent des aspects très divers, qui ne doivent pas être considérés comme essentiellement d’ordre médical. C’est la raison pour laquelle les dispositions relatives à l’accouchement et aux facilités qui doivent être accordées aux parents en prison ont été retirées des règles pénitentiaires européennes relatives aux soins et placées dans une règle spécifique, la règle 34.

Lorsqu’une femme est transférée dans un établissement non pénitentiaire, elle doit être traitée avec dignité. Par exemple, il est inacceptable qu’une femme accouche menottée ou attachée à un meuble, comme cela fut pourtant le cas fréquemment.

Les membres du groupe socialiste avaient déposé des amendements tendant à faire figurer dans notre droit positif toutes les règles pénitentiaires européennes concernant les femmes et les enfants en bas âge nés en prison et amenés à y séjourner. À l’exception du présent amendement, les autres ont été déclarés irrecevables par la commission des finances.

Il est réellement regrettable que nous n’ayons pas pu aborder ces règles lors de l’examen de ce projet de loi et qu’il ne nous ait pas été permis de les introduire.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Selon les statistiques relatives à la détention, au 1er novembre 2008, on comptait 61 491 hommes incarcérés, et 2 386 femmes, soit 3, 7 %. Or les établissements réservés à ces dernières étant nettement moins nombreux que ceux qui accueillent des hommes, les femmes peuvent connaître un plus grand éloignement par rapport à leur lieu d’habitation ou à celui de leur proche famille. C’est dommageable.

Par ailleurs, il va de soi que les droits fondamentaux des femmes détenues et de leurs enfants en bas âge sont couverts par la référence générale aux droits des détenus des articles 1er et 10 du projet de loi.

Il faut souligner que l’administration pénitentiaire assure des conditions de détention convenables aux femmes détenues. Je le reconnais volontiers, alors que je n’ai pas toujours été tendre sur la situation des prisons en France. Lorsque certains collègues présents ce soir dans cet hémicycle et moi-même avons quitté l’établissement de Rennes, nous avons estimé que, si tous les établissements pénitentiaires étaient du même niveau après la mise en œuvre de la présente réforme, cette dernière serait vraiment réussie.

Pour avoir visité les établissements de Rennes, de Fleury-Mérogis, de Lille-Sequedin, où les jeunes mères sont accueillies, où des espaces nurseries sont prévus ainsi que l’intervention d’assistantes maternelles, je considère que des efforts considérables ont été réalisés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

J’ai rencontré une mère prévenue pour infanticide qui, ayant eu un enfant en détention, s’en occupait. Je m’étais un peu inquiété, mais j’ai appris que cette détenue était toujours en présence d’une éducatrice qui, le soir, emmenait l’enfant à son propre domicile.

Lorsqu’un enfant vivant une telle situation atteint l’âge de dix-huit mois, la pratique consiste à lui trouver un placement à proximité immédiate, pour qu’il puisse rendre visite à sa mère le plus souvent possible.

Je reconnais que certains problèmes sont liés à la vie des couples, mais l’administration ne peut pas suivre les évolutions en la matière au jour le jour. Ainsi, lorsqu’un père, qui a la charge des enfants, est muté de Marseille à Lille, par exemple, pendant une période intermédiaire, la situation est un peu plus difficile.

Quoi qu’il en soit, les conditions de détention des femmes et de leurs enfants en bas âge n’ont rien d’humiliant pour la République.

Pour toutes ces raisons, la commission vous demande, madame Le Texier, de bien vouloir retirer les amendements n° 142 et 143, faute de quoi elle émettra un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Les détenues femmes ne sont pas nombreuses au sein des établissements pénitentiaires. Les conditions de leur prise en charge sont bien meilleures qu’auparavant, notamment pour ce qui est des soins médicaux et du suivi gynécologique.

Madame le sénateur, on n’accouche pas en prison. Tous les accouchements ont lieu en dehors des établissements pénitentiaires. La règle pénitentiaire européenne 34 le prévoit, ce qui suppose que tel n’est pas forcément le cas dans tous les pays.

Actuellement, environ une vingtaine d’enfants de moins de dix-huit mois sont incarcérés avec leur mère. Ils sont tous suivis par des juges des enfants et par les services de la protection maternelle et infantile.

Certes, l’arrivée de l’enfant à l’âge de dix-huit mois marque une véritable rupture entre la mère et l’enfant, mais il n’est pas possible de garder ces enfants en détention au-delà de cet âge.

Par ailleurs, il faut savoir que toutes les surveillantes qui s’occupent d’eux le font sur la base du volontariat, et, une fois encore, je rends hommage au personnel pénitentiaire.

Quand ils atteignent l’âge de dix-huit mois, ces enfants sont suivis par le juge des enfants, mais le code civil oblige à privilégier les liens familiaux quand il s'agit de les placer. Si le père ou les membres de la famille ne vivent pas à proximité de l’établissement pénitentiaire, l’exercice du droit de visite peut donc se révéler problématique.

Toutefois, dans ce cas, un parent ou un proche, ce que l’on appelle un « tiers digne de confiance », ou même simplement un éducateur, peut toujours amener l’enfant rendre visite à sa mère en prison.

Pour l’essentiel, tous ces enfants sont suivis par des juges des enfants. Nous n’avons donc pas à rougir de la prise en charge et du suivi des enfants nés pendant la détention, même s’il est vrai qu’à dix-huit mois ils quittent la prison et sont séparés de leurs mères.

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Madame Le Texier, les amendements sont-ils maintenus ?

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Je tiens à préciser que je n’ai pas critiqué la façon dont les femmes et les jeunes enfants sont pris en charge par l’administration pénitentiaire.

Nous nous réjouissons tous que la situation soit aujourd'hui, dans la plupart des cas, satisfaisante. Ce n’est cependant pas une raison pour ne pas transcrire dans la loi les dispositions reconnaissant la spécificité de l’incarcération des femmes !

Les femmes détenues étant peu nombreuses, il est inutile de mettre en avant l’article 40 de la Constitution pour faire de petites économies ! Puisque M. le rapporteur et Mme le garde des sceaux nous affirment que les choses se passent bien, ce qui, effectivement, est vrai dans la plupart des cas, les dispositions que nous proposons ne coûteront rien de plus.

Nous estimons simplement qu’il existe en la matière une spécificité qu’il serait dommage de ne pas reconnaître dans un tel projet de loi.

Je maintiens donc ces amendements, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Si vous en êtes d’accord, madame le garde des sceaux, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous allons réserver le vote sur l’amendement n° 142 jusqu’après la mise aux voix de l’amendement n° 143. (Assentiment.)

Je mets aux voix l'amendement n° 143.

L'amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 238, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat, Assassi et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :

Après l'article 27, insérer une division additionnelle et son intitulé ainsi rédigés :

Section...

Des détenus étrangers

Madame le garde des sceaux, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je vous propose de réserver cet amendement jusqu’après le vote des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 27.

Assentiment.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 239, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat, Assassi et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :

Après l'article 27, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'administration pénitentiaire doit prendre toute disposition pour permettre aux détenus étrangers un accès effectif à leurs droits, aux soins, au travail et aux activités dispensées dans les établissements pénitentiaires.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Je voudrais évoquer une autre spécificité qui n’apparaît pas dans le texte, celle des étrangers incarcérés.

En effet, plus que les autres détenus, les étrangers rencontrent des difficultés à accéder à la plupart des services, compte tenu de la barrière de la langue.

Certes, ils peuvent toujours formuler leurs besoins par l’intermédiaire des surveillants ou des autres personnes incarcérées, mais cette situation remet singulièrement en cause leur droit à un minimum de discrétion, voire de confidentialité, en ce qui concerne leur propre vie. L’atteinte au secret médical, par exemple, va bien au-delà d’une simple question de discrétion !

L’éloignement de la famille pose également de réelles difficultés pour les étrangers, alors que le maintien des liens familiaux – on l’a souligné à plusieurs reprises au cours de nos débats –, contribue fortement, pour tous les détenus, à la future réinsertion.

En somme, dans les prisons françaises, l’accès aux soins, au travail, aux activités culturelles, sportives et aux loisirs reste très restreint, voire impossible, pour les étrangers, en raison, je le répète, de la barrière de la langue.

Pour tenter de remédier à cette ségrégation, certains établissements diffusent un livret d’accueil en plusieurs langues. Toutefois, cette pratique n’a jamais été généralisée, bien que, dans son étude de 2004, la Commission nationale consultative des droits de l’homme ait déjà préconisé cette généralisation. Il serait bienvenu de prendre exemple sur ces méthodes et d’assurer une diffusion de ces documents dans l’ensemble des lieux de détention de France.

C’est pourquoi, mes chers collègues, nous vous suggérons d’adopter cet amendement, aux termes duquel l’administration pénitentiaire devrait permettre un accès effectif à ces droits pour les étrangers incarcérés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Cet amendement et les quatre qui suivent tendent à décliner spécifiquement pour les étrangers certains des droits reconnus aux détenus. Or il va de soi que les droits prévus par le projet de loi pénitentiaire s’appliquent aussi aux étrangers incarcérés. Il n’apparaît donc pas nécessaire de viser ces derniers en particulier.

J'ajoute que, pour la commission, cette disposition ne semble même pas opportune : si nous nous engageons dans cette voie, nous finirons par créer des régimes différenciés pour les étrangers, pour les femmes, et pourquoi pas, demain, pour les pratiquants de telle ou telle religion !

La commission émet donc un avis tout à fait défavorable.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Je reprends totalement à mon compte les arguments de M. le rapporteur.

Je crains toujours, lorsqu’on institue des catégories particulières – les femmes tout à l'heure, les étrangers maintenant – et qu’on les dote de droits spécifiques, qu’elles ne finissent pas être moins bien traitées que les autres…

Je préfère que tout le monde soit traité de la même manière. C'est pourquoi je ne suis pas favorable à cet amendement.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 240, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat, Assassi et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :

Après l'article 27, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les détenus étrangers doivent pouvoir procéder à une demande de titre de séjour ou obtenir le renouvellement de titre de séjour, ou procéder à une demande d'asile politique durant leur incarcération.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Si vous le voulez bien, monsieur le président, je présenterai en même temps les amendements nos 241 et 242.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je suis en effet saisi de deux autres amendements présentés par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat, Assassi et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche.

L'amendement n° 241 est ainsi libellé :

Après l'article 27, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les dispositions de l'article 12 bis de la présente loi sont applicables aux détenus étrangers.

L'amendement n° 242 est ainsi libellé :

Après l'article 27, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les détenus étrangers mineurs doivent faire l'objet d'un signalement et bénéficier d'un suivi spécifique afin de préparer leur sortie.

Veuillez poursuivre, ma chère collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

À l’instar des femmes, les étrangers constituent réellement une catégorie spécifique, me semble-t-il, car ils sont frappés – passez-moi l’expression, mes chers collègues – par une « double peine ».

Par exemple, ils ne peuvent obtenir ou renouveler un titre de séjour, ni procéder à une demande d’asile politique. Ainsi, à leur sortie de prison, ils se trouvent bien souvent en situation d’irrégularité et peuvent, de fait, être expulsés à tout moment.

De plus, comme ils ne peuvent renouveler leur titre de séjour, ils perdent leurs droits aux prestations sociales, ce qui emporte de graves conséquences sur leur propre situation et celle de leurs familles.

Il s'agit donc, j’ose l’affirmer, d’une « double peine masquée », qui est inadmissible, me semble-t-il, car elle repose sur le postulat raciste selon lequel les étrangers seraient par nature susceptibles de commettre des délits !

La surreprésentation des étrangers en prison donne lieu à des considérations sur la supposée « surdélinquance » de cette catégorie de la population. Elle devrait plutôt attirer l’attention sur les mesures qu’il est nécessaire de mettre en œuvre pour rendre les conditions de détention des étrangers égales à celles qui sont vécues par les personnes françaises !

En ce qui concerne à présent l’amendement n° 241, je rappelle que l’article 12 du projet de loi ouvre pour les détenus la possibilité d’élire domicile auprès de l’établissement pénitentiaire – nous en avons longuement débattu – pour pouvoir exercer leurs droits civiques et prétendre aux droits sociaux.

S’il est appréciable que ce droit fondamental soit – enfin ! – reconnu par la loi, nous regrettons que cette disposition ne s’étende pas aux détenus étrangers, en ce qui concerne leurs démarches administratives, par exemple le dépôt d’une demande d’asile politique et l’obtention ou le renouvellement d’un titre de séjour.

Comme nous l’avons souligné, l’absence de mesures spécifiques pour les détenus étrangers plonge ceux-ci dans un véritable isolement. Leur permettre d’élire domicile auprès des établissements pénitentiaires dans lesquels ils sont incarcérés résorberait en partie cette ségrégation.

J’en viens à l’amendement n° 242.

Mes chers collègues, cette disposition vise plus particulièrement à vous interpeller sur le cas des mineurs étrangers incarcérés, pour lesquels, là encore, rien n’est prévu par le projet de loi.

Vous le savez, ces mineurs doivent faire l’objet d’un signalement spécifique et demander l’obtention d’un titre de séjour de plein droit avant leur majorité ; ces démarches leur permettent d’éviter toute situation d’illégalité et d’être suivis dans le cadre de la formation, de la recherche de travail, de la préparation à la sortie ou de tout projet socio-éducatif.

Or la méconnaissance en matière de droit au séjour ou le défaut de demande de titre de séjour à la majorité complique par la suite la situation administrative des détenus étrangers. À dix-huit ans, ceux-ci entrent, en effet, dans le régime général, et sont dépourvus de toute protection particulière.

C’est pourquoi nous considérons qu’il est nécessaire de sensibiliser les personnels pénitentiaires à la spécificité de la situation des mineurs étrangers, qui devraient faire l’objet d’un signalement et d’un suivi particulier concernant, notamment, leur droit au séjour une fois qu’ils ont atteint l’âge de la majorité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

J’ai déjà donné l’avis de la commission sur ces amendements.

J’ajouterai simplement que certains des problèmes évoqués par Mme Assassi sont réels, mais qu’ils sont très largement réglés ou le seront bientôt.

Ainsi, en ce qui concerne la demande ou le renouvellement du titre de séjour, je rappellerai que nous avons voté un amendement visant à faciliter les démarches administratives grâce à la domiciliation des détenus dans les établissements pénitentiaires.

En effet, ces « démarches administratives » couvrent aussi bien le renouvellement de carte d’identité par les Français que la demande de titre de séjour par les étrangers. Nous avons voulu précisément qu’ils soient traités sur un pied d’égalité.

Vous réclamiez que les détenus puissent élire domicile dans les établissements pénitentiaires. C’est fait ! Le problème est entièrement réglé.

En ce qui concerne les mineurs étrangers détenus, là encore, nous ne pensons pas qu’il y ait lieu de prévoir de dispositions spécifiques. L’ordonnance de 1945 exige la présence d’éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse dans les prisons, et j’ai constaté que cette prescription était respectée. Cet amendement est donc très largement satisfait.

Les problèmes qui existaient sont réglés ou en passe de l’être. Je salue d'ailleurs l’action du Médiateur, qui a beaucoup contribué à les résoudre, notamment en ce qui concerne les titres de séjour.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Il sera désormais possible, durant l’incarcération, de renouveler un titre de séjour ou de formuler une demande d’asile politique, puisque les détenus pourront élire domicile dans les établissements pénitentiaires.

Par ailleurs, vous avez raison de le souligner, madame Assassi, les détenus doivent se déplacer pour obtenir la délivrance d’un titre de séjour. Toutefois, des conventions ont été signées avec presque toutes les préfectures afin de faciliter cette démarche, et elles concernent également les personnes en détention.

Donc, toutes ces formalités seront facilitées par la possibilité ouverte aux détenus d’élire domicile dans les établissements pénitentiaires. L’amendement n° 240 est en conséquence satisfait, madame Assassi.

En ce qui concerne l’amendement n° 241, je rappelle que les détenus étrangers, comme tous les autres, pourront élire domicile auprès des établissements pénitentiaires afin d’exercer leurs droits civiques et sociaux.

D'ailleurs, les détenus qui sont ressortissants de l’Union européenne mais qui ne disposent pas de la nationalité française pourront également s’inscrire sur les listes électorales. Le présent projet de loi, notamment ses articles 12 et 12 bis, permet donc d’authentiques avancées en matière d’exercice des droits civiques et sociaux.

En ce qui concerne les mineurs étrangers, qui doivent faire l’objet d’un signalement pour bénéficier d’un suivi spécifique, je rappelle que des éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse travaillent à l’intérieur des établissements, mais les mineurs sont suivis par des juges des enfants.

Le problème du suivi des mineurs étrangers se pose plutôt à la sortie, lorsqu’ils se retrouvent en quelque sorte dans la nature. Et même quand ils sont placés dans des établissements ou des foyers, ils n’y restent pas longtemps et fuguent fréquemment...

Nous ne pouvons faire plus en matière d’encadrement, de prise en charge, de suivi des mineurs.

J’indique au passage que la nouvelle édition du guide Droits et devoirs de la personne détenue, que nous évoquions hier, est parue en janvier 2009. Ce document avait été supprimé en 2000 et c’était donc l’Observatoire international des prisons qui, depuis, distribuait un guide aux personnes détenues.

C’était donc l’Observatoire international des prisons qui, depuis, distribuait un guide aux personnes détenues.

C’est désormais l’administration pénitentiaire qui s’en chargera. Ce guide

Mme le garde des sceaux montre un exemplaire du guide.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Le guide du détenu arrivant, quant à lui, sera édité à 100 000 exemplaires, traduit en quatre langues, et diffusé auprès de tous les détenus venant d’être incarcérés.

Le Gouvernement a mis en œuvre de gros moyens en faveur du droit à l’information des personnes détenues. L’État s’était déchargé de cette responsabilité en 2000 – l’Observatoire international des prisons avait donc pris le relais –, alors que, selon moi, cette dernière lui incombe bel et bien.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote sur l’amendement n° 240.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Nous avions déposé un amendement similaire à l’amendement n° 242, mais il a été rejeté – ce sont les mystères de l’application de l’article 40 de la Constitution ! –, …

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

… alors que celui du groupe CRC-SPG a échappé à ce couperet. Je m’en réjouis : félicitations, mes chers collègues !

Madame le garde des sceaux, ces amendements n’ont pas pour objet, selon moi, de créer un droit plus favorable pour les détenus étrangers, comme vous l’avez prétendu tout à l’heure.

Mme le garde des sceaux proteste.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Vous avez stigmatisé le fait qu’étaient définis des droits spécifiques pour les femmes, les enfants, les détenus. En l’occurrence – cela a été souligné –, les détenus étrangers sont dans des situations souvent plus difficiles et plus douloureuses que les détenus français. Ces différents amendements n’ont pas d’autre objet que de prendre cette réalité discriminatoire en compte et d’essayer d’y remédier.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Nul n’ignore que les étrangers incarcérés sont confrontés à des problèmes spécifiques, d’autant que nombre d’entre eux sont emprisonnés pour cause de séjour illégal sur notre territoire.

Vous seriez plus crédible, dans votre refus de consacrer une division spécifique à la situation des étrangers, si vous aviez accepté, comme nous vous l’avions proposé, que soit précisé à l’article 10 que les étrangers incarcérés ne peuvent pâtir d’aucune discrimination. Vous l’avez refusé, au prétexte que l’administration pénitentiaire ne fait jamais aucune discrimination d’aucune sorte.

Comment attirer l’attention sur le fait que l’on peut être discriminé parce que l’on est étranger ? Comment inciter les pouvoirs publics à réagir et à mettre fin à cette situation ?

Proposer d’insérer ce paragraphe spécifique, dont je sais bien que vous ne voudrez pas l’accepter, est une façon de mettre l’accent sur des pratiques bien réelles, en cours dans les établissements pénitentiaires.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

En conséquence, l'amendement n° 238 n’a plus d’objet.

CHAPITRE IV

Dispositions diverses

Supprimé

L'Agence de maîtrise d'ouvrage des travaux du ministère de la justice prend le nom d'« Agence publique pour l'immobilier de la justice ».

À compter de l'entrée en vigueur de la présente loi, sa dénomination peut être modifiée par décret. –

Adopté.

L'article 1er de la loi n° 87-432 du 22 juin 1987 relative au service public pénitentiaire est abrogé. –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 243, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat, Assassi et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :

Après l'article 30, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les troisième et quatrième alinéas de l'article L. 6141-5 du code de la santé publique sont supprimés.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Cet amendement a trait au secret médical. Monsieur le rapporteur, l’amendement adopté précédemment, visant à reconnaître le secret médical, vaut-il pour ce chapitre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Il va de soi que l’amendement que nous avons adopté tout à l’heure vaut globalement pour l’intégralité du texte. Cet amendement garantissait néanmoins le secret médical « dans le respect des dispositions des troisième et quatrième alinéas de l’article L. 6141-5 du code de la santé publique », qui résultent de la loi du 25 février 2008 relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental.

Il devrait ainsi permettre d’éviter une interprétation excessivement stricte et rigide du secret médical, du type de celle qui a conduit au drame de Rouen, notamment.

Mais les dispositions de cet amendement, je le répète, valent bien évidemment globalement.

Dans ces conditions, l’avis de la commission ne peut être que défavorable.

Debut de section - Permalien
Rachida Dati, garde des sceaux

Même avis défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

J’ai reçu de MM. Daniel Raoul, Jean-Pierre Bel, Edmond Hervé, Marc Daunis, Robert Navarro, Mme Nicole Bonnefoy, MM. Michel Teston, Yannick Bodin, Mme Samia Ghali, MM. Serge Lagauche, Thierry Repentin, Jean-Pierre Sueur, Charles Gautier, François Rebsamen, Mmes Bariza Khiari, Christiane Demontès, Odette Herviaux, Jacqueline Chevé, MM. Pierre-Yves Collombat, Yves Daudigny, François Marc, Didier Guillaume, Martial Bourquin, Mmes Nicole Bricq, Maryvonne Blondin, Gisèle Printz, MM. Jean-Luc Fichet, Yannick Botrel, Jean-Marc Todeschini, Mme Annie Jarraud-Vergnolle et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés une proposition de loi pour le développement des sociétés publiques locales.

La proposition de loi sera imprimée sous le n° 252, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d’une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

J’ai reçu de M. Simon Sutour une proposition de résolution, présentée au nom de la commission des affaires européennes, en application de l’article 73 bis du règlement, sur la proposition de décision-cadre relative à l’utilisation de données des dossiers passagers (Passenger Name Record – PNR) à des fins répressives (n° E-3697).

La proposition de résolution sera imprimée sous le n° 253, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale sous réserve de la constitution éventuelle d’une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, vendredi 6 mars 2009, à neuf heures quarante-cinq, à quinze heures et, éventuellement, le soir :

- Suite du projet de loi pénitentiaire (495, 2007-2008).

Rapport de M. Jean-René Lecerf, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale (143, 2008-2009).

Rapport supplémentaire de M. Jean-René Lecerf, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale (201, 2008-2009).

Texte de la commission (n° 202, 2008-2009).

Avis de M. Nicolas About, fait au nom de la commission des affaires sociales (222, 2008 2009).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée le vendredi 6 mars 2009, à zéro heure trente-cinq.