Intervention de Gérald Darmanin

Réunion du 14 novembre 2017 à 21h30
Financement de la sécurité sociale pour 2018 — Article 7

Gérald Darmanin, ministre :

J’y reviendrai, mais personne ne prétend cela.

Je veux remercier le rapporteur général de l’honnêteté de sa présentation, car il a parlé d’or : ses mots sont justes et ses chiffres ne sont pas contestables.

En revanche, il y a des choix politiques et budgétaires. Quel est le fond de cette affaire ?

Un certain nombre d’entre vous l’ont rappelé, sans jamais préciser qu’il s’agissait d’une mesure pérenne, en 2015 – l’année qui précédait l’élection présidentielle, vous l’aurez remarqué –, au moment de la crise du lait, le ministre de l’agriculture avait expliqué qu’il fallait procéder à une baisse de cotisation très importante, mais temporaire. Ainsi, aujourd’hui, dans le cadre de la réforme de la CSG et de l’alignement sur les indépendants, nous devons rediscuter de ce dispositif pour le pérenniser.

En effet, si l’on considère, en miroir, le projet de loi de finances, les conséquences de nos décisions, passées ou actuelles, se traduisent aussi par des crédits budgétaires. Il ne s’agit pas que de cotisations que l’on baisserait ou que l’on augmenterait. La mesure que vous propose aujourd’hui le Gouvernement est largement supérieure, pour toutes les catégories d’agriculteurs, les plus aisés comme les moins aisés – on sait qu’ils sont majoritairement peu aisés. Tous les agriculteurs seront bénéficiaires par rapport au régime de 2015, qui était en vigueur avant la mesure gouvernementale exceptionnelle de 2016 ; aucun agriculteur ne connaîtra une situation stagnante ou défavorable par rapport à l’année 2016.

C’est le premier point, et je vous prie de m’en excuser, car je ne veux pas alourdir nos débats par des déclarations qui pourraient passer pour de la provocation. Il n’y a là nulle provocation, connaissant les difficultés très fortes vécues par ces personnes extrêmement courageuses – je le sais pour en connaître dans mon territoire. Néanmoins, si le gouvernement de l’époque avait tenu ce genre d’argumentation, on ne serait pas en train d’en discuter maintenant, on parlerait d’un système pérenne.

Deuxième point, je ne peux pas accepter que l’on dise que le ministère de l’agriculture ne sait pas ce que l’on fera des 300 millions d’euros. Monsieur le sénateur, soyons raisonnables ! Le rapport de la Cour des comptes a démontré que la dérive budgétaire du ministère de l’agriculture au cours du quinquennat précédent représentait 7 milliards d’euros, et la France est incapable, depuis des années, de se mettre en accord avec la politique européenne. D’où des apurements communautaires qui nous coûtent une fortune.

Ainsi, demain, je vais de nouveau devoir présenter au conseil des ministres un projet de loi de finances rectificatives ouvrant 1 milliard d’euros de crédits pour le ministère de l’agriculture, ce que nous ferons, évidemment.

Il s’agit certes de remédier à des difficultés climatiques ; à cela, on ne peut pas faire grand-chose, si ce n’est prévoir des provisions pour risques, ce que nous allons faire, car c’est de bonne gestion – même s’il est bien difficile de prévoir ce qui se produira pour telle ou telle crise sanitaire, il faut tout de même provisionner. Mais il s’agit aussi de prévoir 700 millions d’euros – rien que pour cette année ! – d’apurements communautaires. Comme c’est forfaitaire, on ne peut pas réclamer aux agriculteurs, c’est bien logique, des aides qu’ils ont touchées indûment des années plus tôt – connaissant leurs difficultés, il serait à la fois difficile et inhumain de les réclamer. Et tout cela, parce que nous sommes incapables de nous mettre en ligne avec la politique communautaire !

Cela nous conduit à payer des centaines de millions d’euros – la Cour des comptes évoque jusqu’à 7 milliards d’euros sous le quinquennat précédent –, alors que tout cet argent pourrait utilement être utilisé pour l’agriculture française.

Il n’est donc pas juste et, surtout, il n’est pas raisonnable d’affirmer, dans votre démonstration, que le Gouvernement mettrait 300 millions d’euros de côté sans savoir à quoi servira cette somme.

Ne vous inquiétez pas ! La première chose que nous avons faite en arrivant aux responsabilités, comme M. le rapporteur général de la commission des finances a bien voulu le souligner, c’est de nous atteler à la sincérisation du budget, notamment du budget du ministère de l’agriculture, qui, objectivement, ne permettait ni un bon contrôle du Parlement ni une bonne relation de confiance avec les agriculteurs, avec des chiffres qui dépassent l’entendement.

Troisième point, comme M. le rapporteur général l’a dit avec justesse, vous nous proposez à peu près 300 millions d’euros de dépenses supplémentaires, j’y reviendrai ultérieurement, soit un gain de pouvoir d’achat important, si j’ose dire, pour les 15 % d’agriculteurs les plus aisés, alors que la position du Gouvernement vise à proposer une augmentation – et non une stagnation – du pouvoir d’achat pour quasiment les deux tiers d’entre eux – 60 % selon mes chiffres, à quelques chiffres près, monsieur le rapporteur général.

Je suis tout à fait d’accord avec vous, madame la sénatrice, un revenu annuel de 13 000 euros, c’est un problème !

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