Intervention de Josiane Mathon-Poinat

Réunion du 5 mars 2009 à 21h30
Loi pénitentiaire — Article additionnel avant l'article 25

Photo de Josiane Mathon-PoinatJosiane Mathon-Poinat :

Ce projet de loi fait peu de cas des mineurs incarcérés. Seulement deux articles y font référence et pourtant, cette année, selon la Défenseure des enfants, soixante-douze d’entre eux ont tenté de se suicider, soit quarante fois plus que parmi les jeunes en liberté et, en 2008, trois d’entre eux ont trouvé la mort.

La construction de sept établissements pénitentiaires pour mineurs, ou EPM, ne règle rien. À Meyzieu, pourtant présenté comme un modèle, un jeune s’est pendu il y a un an. Il avait seize ans et avait été incarcéré deux mois auparavant.

Madame le garde des sceaux, pour les jeunes, encore plus que pour les majeurs, la prison est dure, d’autant plus qu’ils sont fragiles et vulnérables.

C’est pourquoi il nous paraît essentiel de consacrer dans la loi le principe selon lequel la détention d’un mineur ne peut être qu’une mesure de dernier recours. Elle doit donc demeurer exceptionnelle dans son prononcé et minimale dans la durée.

C’est d’ailleurs ce que prévoit l’article 37, b), de la convention internationale des droits de l’enfant : « L’arrestation, la détention ou l’emprisonnement d’un enfant doit être en conformité avec la loi, n’être qu’une mesure de dernier ressort et être d’une durée aussi brève que possible. »

Hélas, la création de ces EPM est emblématique de la politique gouvernementale en matière de justice des mineurs : depuis 2002, toutes les réformes de l’ordonnance de 1945 donnent la prééminence à l’enfermement, bientôt peut-être dès douze ans en cas de crime ! Je n’ose même pas y penser…

Ainsi, les moyens supplémentaires affectés ces dernières années à la protection judiciaire de la jeunesse vont en quasi-totalité à l’enfermement, au détriment des suivis éducatifs en milieu ouvert et des structures d’hébergement classiques, déjà insuffisants, et sans considération pour les effectifs en juges et en greffiers qui seraient nécessaires pour que les juridictions des mineurs fonctionnent dans des délais normaux.

Construire des EPM, c’est nécessairement enfermer un nombre toujours plus grand de jeunes. C’est banaliser la prison pour les mineurs, quand tous les professionnels s’accordent à dire que les solutions résident dans la prise en charge individualisée, l’accompagnement adapté dans le temps, en accord avec la famille et en tenant compte du milieu social.

La seule construction des sept EPM coûte environ 90 millions d’euros et leur fonctionnement mobilise, pour soixante jeunes, une quarantaine de personnels de la PJJ !

Dans le même temps, en deux ans, entre 2006 et 2007, une dizaine de foyers éducatifs ont été fermés.

La création d’un seul EPM équivaut à six foyers éducatifs de dix places, huit services d’insertion professionnelle, soit la prise en charge de 250 mineurs, dix services de milieu ouvert, soit le suivi de 1 500 jeunes.

Or, quand nous écrivons la loi, n’oublions pas que l’enfance et l’adolescence sont des périodes structurantes de la vie, des périodes de très grande vulnérabilité.

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