Intervention de Bruno Le Maire

Commission des affaires économiques — Réunion du 14 novembre 2017 à 17h55
Projet de loi de finances pour 2018 — Audition de M. Bruno Le maire ministre de l'économie et des finances

Bruno Le Maire, ministre :

Depuis de nombreuses années, l'économie française se fragilise, ne crée pas assez d'emplois et notre balance commerciale est en déficit. C'est la réalité. Je suis ouvert à toutes les solutions mais je refuse le statu quo qui n'est plus tenable. Le Président de la République est décidé à changer les choses en profondeur.

Le programme 134 avait été conçu pour aider les entreprises, notamment les PME, à sortir de la crise. Il convient maintenant de réfléchir à d'autres moyens pour accompagner nos PME, notamment pour l'accès au crédit. Cela sera un des enjeux de la loi de transformation des entreprises. Des consultations sont en cours. Les conclusions des différents groupes de travail seront publiées le 10 décembre. Les propositions seront mises en ligne. Le travail législatif devrait débuter au printemps. Je souhaite que les sénateurs soient associés le plus étroitement possible à ces travaux.

Les subventions représentent une petite fraction (2 %) du budget des associations de consommateurs. Le Gouvernement est prêt, le cas échéant, à une approche au cas par cas. Je rappelle toutefois qu'une médiation indépendante a été mise en place en 2016 et que la numérisation permet aussi aux consommateurs d'être mieux renseignés. Pourquoi enfin ces associations, dont le rôle pour l'information et la défense des consommateurs est essentiel, ne pourraient-elles pas se rassembler, comme d'autres organismes le font déjà, pour réduire leurs dépenses de fonctionnement ?

Je ne crois pas que nous ayons réglé le problème de différentiel de coût du travail entre la France et l'Allemagne. Nous avons choisi d'alléger le coût du travail sur les bas salaires pour favoriser l'emploi. Le CICE sera maintenu sous la forme d'un allègement de charges pérenne. Cela ne suffira pas toutefois : n'est-il pas contradictoire d'inciter les entreprises à investir dans les technologies innovantes, à mieux former leurs personnels pour qu'ils acquièrent de nouvelles qualifications plus pointues, donc mieux rémunérées, et en même temps de limiter les baisses des charges aux bas salaires ? C'est pourquoi je souhaite que l'on ouvre le débat sur l'allégement des charges sur les salaires supérieurs à 2,5 SMIC. Louis Gallois a d'ailleurs salué ma démarche dans l'hebdomadaire Marianne. Tout le monde s'inquiète de la désindustrialisation, mais si on refuse d'envisager des solutions nouvelles, elle se poursuivra ! Or l'industrie, au même titre que l'agriculture, est un élément clef de notre puissance économique. Un pays ne doit pas mettre tous ses oeufs dans le même panier en misant sur un seul secteur. Aussi je propose une stratégie différente : alléger les charges au-dessus de 2,5 SMIC tout en mettant l'accent sur la formation. Il faut aussi gagner la bataille culturelle pour inciter les jeunes à travailler dans l'industrie. L'industrie par définition est un mélange d'activité manufacturière et de services. Voyez Michelin, qui non seulement fabrique des pneumatiques, mais propose aussi une offre de services aux entreprises tout en s'appuyant sur un laboratoire de recherche innovant. Il faut donc agir sur ces trois leviers : l'innovation, avec le CIR et le soutien aux innovations de rupture, les services, en allégeant le coût du travail, et l'industrie manufacturière, en réfléchissant à des allégements de charges, au-dessus de 2,5 SMIC de façon à ce que nos entreprises restent compétitives. Le président de la République entend développer une stratégie offensive pour l'industrie. Même si cet allègement supplémentaire coûte cinq milliards d'euros, il mérite que l'on y réfléchisse et que l'on prenne en compte les effets bénéfiques pour la compétitivité. Le suramortissement a été efficace mais ce mécanisme ne saurait devenir permanent : son efficacité diminuerait tandis que son coût augmenterait. L'aide à l'investissement et à l'innovation passe d'abord par un allégement de la fiscalité sur le capital. Les mesures que nous avons prises en matière fiscale pour alléger la fiscalité sur le capital permettront aux entreprises d'investir et d'innover. La baisse de l'impôt sur les sociétés de 33 % à 25 % améliorera la profitabilité de nos entreprises et leur permettra d'investir. La transformation de l'ISF va aussi dans le bons sens. Je suis prêt à réaliser dans deux ans une évaluation de notre politique fiscale.

Je suis avec vigilance et attention les annonces de General Electric. Il ne s'agit pas de faire preuve « d'optimisme ». Je comprends les inquiétudes des salariés. J'ai déjà rencontré les organisations syndicales à Belfort. Je suis prêt à les recevoir à nouveau. Nous sommes déterminés à faire respecter les engagements de GE en France. Le rachat des actions de Bouygues n'aurait rien changé. Je veux couper court ici à toute illusion. La branche énergie d'Alstom n'a rien à voir avec sa branche transport : même en prenant la place de Bouygues au capital de la branche transports, l'État n'aurait eu aucune influence sur la branche énergie. Ensuite il ne faut pas croire que l'État, avec 5 ou 10 % du capital d'une entreprise et un strapontin au conseil d'administration (CA), peut diriger une entreprise. Ce sont les actionnaires majoritaires qui décident de sa stratégie. Ne leurrons pas les Français ! On ne gouverne pas une entreprise avec 5 ou 10 % du capital ! De plus le rachat des parts de Bouygues aurait coûté un milliard d'euros...

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