Intervention de Albéric de Montgolfier

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 8 novembre 2017 à 9h05
Projet de loi de finances rectificative pour 2017 — Examen du rapport

Photo de Albéric de MontgolfierAlbéric de Montgolfier, rapporteur général :

Si. Mais pas pour ces 200 millions d'euros de recettes ni pour un remboursement dès 2017. Pour 2018, une provision de 300 millions d'euros a été inscrite.

En prononçant la non-conformité à la Constitution de la contribution de 3 %, la décision du Conseil constitutionnel entraîne deux conséquences. La première est relative au champ des réclamations, puisque l'ensemble des contributions versées à compter de 2015 peut faire l'objet d'une réclamation jusqu'à la fin de l'année 2019. La seconde est relative à la comptabilisation du coût du contentieux : en faisant naître une créance des entreprises sur l'État, la déclaration d'inconstitutionnalité se traduit par une comptabilisation de remboursements dès 2017.

Le montant de 5,7 milliards d'euros provisionné par le Gouvernement sur la période 2018-2021 est donc insuffisant et le calendrier de paiement, trop tardif : le coût des contentieux est revu à la hausse de 4,3 milliards d'euros, totalisant 10 milliards d'euros répartis à égalité sur 2017 et 2018.

Afin de compenser la baisse des recettes, le Gouvernement prévoit la création de deux contributions exceptionnelles et ponctuelles sur l'impôt sur les sociétés (IS), dont le rendement attendu s'élève à 4,8 milliards d'euros en 2017 et à 600 millions d'euros en 2018. Cela représente environ 10 % du montant brut de l'IS.

Il y aurait ainsi une majoration du taux d'IS avec deux tranches : une première majoration de 15 % du taux d'IS pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 1 milliard d'euros, une seconde majoration de 15 % pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 3 milliards d'euros.

Ces contributions permettraient de contenir la dégradation du déficit budgétaire de l'État et la détérioration du solde public effectif qui, en l'absence de compensation, se serait élevé à 3,1 % du PIB.

Il s'agit de conserver l'espoir d'une sortie de la France en 2018 du volet correctif, ce qui est indispensable pour renforcer sa crédibilité vis-à-vis de nos partenaires européens.

Cette mesure de rendement s'accompagne d'importants biais, puisque 223 sociétés sur les 318 redevables seront perdantes, car ceux qui seront taxés ne bénéficieront pas forcément du remboursement. L'industrie, le commerce et les services financiers sont particulièrement concernés. Le produit est fortement concentré, puisque 30 sociétés payeront 71 % des recettes prévues. Il est très difficile de mieux cibler le dispositif sans risquer une nouvelle censure du Conseil constitutionnel. Le Gouvernement a choisi la simplicité en créant une taxe additionnelle sans toucher à l'assiette. Il avait songé à un mécanisme de plafonnement, mais le Conseil d'État a jugé cela contraire à la Constitution.

Il faut souligner de plus que les entreprises devront acquitter des montants élevés selon un calendrier très contraint - alors même que le projet de loi de finances prévoit une baisse de l'IS ! Le collectif budgétaire qui sera présenté mercredi prochain pourrait être l'occasion pour le Gouvernement de calculer sa vraie marge de manoeuvre. Compte tenu de l'acquis de croissance au troisième trimestre 2017, la croissance devrait s'établir à 1,8 % en fin d'année. De même, l'élasticité des prélèvements obligatoires au PIB devrait être supérieure au montant retenu. Le ministre l'a d'ailleurs confirmé tout récemment en réponse au courrier de la Commission européenne sur le budget 2018 : « les derniers encaissements comptables recueillis à fin septembre indiquent le dynamisme de certaines recettes, en particulier la TVA », et il mentionne une « élasticité des recettes plus élevée très probable ».

Bref, les rentrées fiscales et sociales devraient être meilleures qu'attendu : l'effet positif sur le solde d'une hausse de 0,1 point du coefficient d'élasticité des recettes à la croissance peut être estimé à 2,5 milliards d'euros.

Je vous propose donc - à défaut de pouvoir réviser les paramètres de la nouvelle contribution - d'ajuster la contribution des grandes entreprises au montant strictement nécessaire au respect de nos engagements européens en réduisant de moitié la contribution exceptionnelle qui leur est demandée. C'est l'objet de mon amendement, qui est un amendement d'appel. Si le Gouvernement refuse, il devra s'expliquer sur la raison pour laquelle il n'intègre pas les prévisions plus optimistes parues récemment. Serait-ce pour constituer un matelas de précaution ?

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