Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l'avenir de la formation professionnelle en France passe nécessairement par la refonte en profondeur de l'ensemble du dispositif actuellement en place et par un véritable repositionnement de tous les acteurs concernés.
C'est le constat qui ressort des travaux récents de la mission commune d'information sur le fonctionnement des dispositifs de formation professionnelle, présidée par Jean-Claude Carle.
Le champ de la formation professionnelle englobe celui de la formation professionnelle initiale et celui de la formation professionnelle continue.
Cette dernière, conformément à ses objectifs initiaux, consiste en une politique d'adaptation professionnelle des salariés aux évolutions de leurs métiers, de mobilité et de sécurité professionnelles.
Ainsi, elle est supposée permettre au salarié d'être performant et à l'employeur de gagner en compétitivité et en productivité.
De plus, à partir des années soixante-dix, la formation professionnelle continue, à l'instar de la formation professionnelle initiale, s'est positionnée en politique du traitement du chômage.
Toutefois, formation professionnelle initiale et formation professionnelle continue ne remplissent pas, ou pas totalement, leurs objectifs. Le système en vigueur apparaît inefficace à plusieurs égards.
Jean-Claude Carle l'a rappelé, chaque année, 160 000 jeunes, soit 20 % d'une génération, sortent du second degré sans qualification professionnelle et sans diplôme. Trois ans après leur sortie du circuit scolaire, le taux de chômage de ces jeunes non qualifiés atteint 40 %.
Selon les dernières statistiques, seulement 8% des demandeurs d'emploi suivent une formation professionnelle.
De plus, les formations profitent davantage aux jeunes chômeurs qu'à leurs aînés. En 2005, 14 % des demandeurs d'emploi de moins de vingt-six ans étaient en formation contre 6 % des chômeurs de vingt-six ans et plus.
Au sein des entreprises, le taux de départ en formation des salariés est trois fois plus élevé dans les grands groupes que dans les TPE ou les PME.
En ce qui concerne les salariés, ce sont les plus jeunes et les plus qualifiés qui accèdent à la formation professionnelle continue.
On l'aura compris, la formation professionnelle initiale enregistre un cuisant échec pour ce qui est de l'entrée sur le marché de travail de nombre de jeunes et la formation professionnelle continue ne bénéficie pas à ceux qui en ont le plus besoin.
C'est d'autant plus regrettable que 25 milliards d'euros sont consacrés chaque année à cet objectif. À une certaine inefficacité s'ajoute dès lors une vraie gabegie.
Les principales raisons de cette situation, mises en exergue par la mission commune d'information, sont la complexité du système, le manque de passerelles entre les différents dispositifs, la déconnexion avec le marché de l'emploi, la multiplicité des acteurs, avec une absence de coordination et de gouvernance, enfin, le foisonnement des financeurs.
Les chiffres sont éloquents : plus de 1 200 diplômes ou titres professionnels délivrés par sept ministères différents, quelque 45 000 organismes de formation déclarés, quatre-vingt-dix-huit organismes paritaires collecteurs agréés, ou OPCA. Aussi, à chaque catégorie d'individus pouvant prétendre à des sessions de formation, correspondent des conditions d'accès particulières.
Alors, que faire ? Les propositions de la mission commune d'information sont nombreuses et concrètes. Elles ont d'ailleurs été saluées par nombre d'observateurs pour leur pertinence et leur audace.
Pour ma part, je considère qu'il est fondamental de remettre du sens, du liant, de la cohérence et de la simplicité.
Il faut simplifier en regroupant contrat d'apprentissage et contrat de professionnalisation au sein d'un contrat d'insertion en alternance, et ainsi optimiser les capacités d'accueil en entreprise et en centre de formation.
Il faut remettre de la cohérence avec la rationalisation des financements.
À ce propos, il convient d'insister sur le regroupement interprofessionnel des OPCA et la suppression de l'obligation légale faite aux entreprises de verser 0, 9 % de leur masse salariale brute pour le financement du plan de formation.
Les sommes ainsi libérées abonderaient en partie un compte d'épargne de formation individualisé.
Le champ d'application de ce dispositif se veut plus large que celui du droit individuel à la formation, qui, même transférable, reste circonscrit aux salariés en activité, laissant ainsi plusieurs catégories de population en marge du système.
Attaché à la personne tout au long de sa vie professionnelle, le compte d'épargne de formation couvrirait alors les individus indépendamment de leur statut : les primo-entrants dans le monde du travail, les salariés en activité, les demandeurs d'emploi, les personnes en reconversion et les retraités.
Un seul outil répondrait alors à une grande variété de situations.
Il faut encore remettre du sens et du liant au travers d'une gouvernance territoriale articulant des niveaux de compétences clairement définis.
L'État doit demeurer dans son rôle de cadrage normatif mais également se poser en tant que garant de l'équité.
Le Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie a légitimement vocation à devenir l'instance de concertation nationale, garante des objectifs nationaux de la formation professionnelle.
La mise en cohérence des politiques de formation doit revenir à la région. Élaboré sous l'autorité du président du conseil régional, le plan régional de développement des formations professionnelles s'avère l'instrument adapté pour assurer la coopération régionale des acteurs publics, associatifs, professionnels et privés autour d'un même projet.
Enfin, c'est à l'échelon du bassin d'emploi que doit se faire l'articulation entre les besoins en emplois et les formations à mettre en place.
En conclusion, la réforme de la formation professionnelle est un défi capital à relever sans attendre ; les sénateurs du groupe UC-UDF sont prêts à concourir efficacement à cette réforme.