Intervention de Agnès Buzyn

Réunion du 15 novembre 2017 à 14h30
Financement de la sécurité sociale pour 2018 — Articles additionnels après l'article 9, amendements 564 344

Agnès Buzyn, ministre :

Je suis tout à fait d'accord avec la méthode que vous proposez, madame la présidente.

Les auteurs de ces amendements, qui ont en effet deux objets différents, ne prennent pas tout à fait en compte le plan visant à renforcer l’accès territorial aux soins que le Gouvernement a présenté en octobre dernier et qui sera mis en œuvre à partir de janvier prochain.

Les amendements n° 564 rectifié et 344 rectifié ter tendent à exonérer de charges sociales et fiscales les médecins généralistes ou spécialistes qui viendraient s’installer en zone sous-dotée, que ce soit en outre-mer ou dans certains quartiers de nos villes.

Je suis défavorable à ces amendements, parce que les exonérations de charges sociales et fiscales pour les médecins sont aujourd’hui un levier pour la modération tarifaire : elles servent à favoriser l’installation de médecins qui ne pratiquent pas de dépassements d’honoraires.

Il me paraît très important de rester dans cette logique d’incitation à la régulation tarifaire. Ouvrir le dispositif à l’ensemble des médecins favoriserait, par un effet d’aubaine, des médecins pratiquant des dépassements d’honoraires, ce qui, je crois, ne serait pas rendre service à la population. Gardons l’exonération pour les médecins du secteur 1.

Le problème reste néanmoins entier dans les territoires sous-dotés, en outre-mer, dans le monde rural et dans certains quartiers de nos villes. Je tiens à vous rassurer sur notre volonté de les aider.

Dans le plan visant à renforcer l’accès territorial aux soins, nous avons prévu un très grand nombre d’outils pour permettre aux territoires de s’organiser en fonction de l’offre de soins existante. Avec ce plan, nous changeons de paradigme : nous ne misons pas tout sur l’installation coûte que coûte de médecins, car, la démographie médicale étant ce qu’elle est, ce serait déshabiller Paul pour habiller Pierre – il n’y a pas aujourd’hui de territoires surdotés en médecins, cela se saurait –, mais nous voulons donner du temps médical aux territoires.

Toute la logique du plan vise à projeter des médecins, généralistes ou spécialistes, issus des hôpitaux de la région, des maisons de santé ou organisés en réseau, pour, par exemple, aider une journée ou deux par semaine une maison ou un centre de santé ou remplacer un jour par semaine un médecin qui souhaite partir en retraite.

Bref, c’est toute une philosophie d’organisation territoriale des soins. Dans ce cadre, j’ai négocié avec les syndicats médicaux et les fédérations hospitalières l’idée d’une responsabilité territoriale.

Le deuxième versant de notre plan consiste à miser sur les coopérations interprofessionnelles. Nous le savons, un certain nombre de professionnels de santé dans les territoires peuvent se voir déléguer certaines tâches, à condition qu’il y ait des protocoles et des coopérations bien construites. Nous misons donc sur l’interprofessionnalité et la multidisciplinarité avec les pharmaciens, les infirmières et les kinésithérapeutes.

Le troisième versant du plan est le développement de la télémédecine et de la téléexpertise.

Je souhaite que vous preniez en compte l’ensemble des mesures prévues dans ce plan et que vous ne misiez pas tout sur des installations de médecins. Ce serait, à mon avis, une erreur de philosophie. D’ailleurs, depuis dix ans que l’on cherche à favoriser ces installations, on n’y arrive pas, parce que la démographie médicale est aujourd’hui telle que nous n’avons pas de médecins en réserve.

Nous devons tous être conscients que cette situation va s’aggraver dans les années qui viennent : la démographie médicale déclinera jusqu’en 2025 et ne remontera qu’ensuite. Nous devons donc nous organiser intelligemment sur le territoire, sans chercher à attirer des médecins dans certaines zones au détriment d’autres.

En ce qui concerne les médecins retraités, le plan d’accès aux soins prend tout à fait en compte le souhait de certains d’entre eux de poursuivre leur activité, au moins à temps partiel. En effet, nous avons plus que triplé le plafond du cumul emploi-retraite, en le portant de 11 000 euros à 40 000 euros. Nous savons que, d’ores et déjà, nous serons en mesure de doubler ou tripler le nombre de médecins qui, parvenus à l’âge de la retraite, souhaitent s’inscrire dans ce dispositif. Du temps médical en résultera pour les territoires.

Exonérer ces médecins de cotisations créerait un déséquilibre entre professions libérales, puisqu’ils cotisent à la retraite avec toutes les professions libérales et seraient les seuls à bénéficier d’une exonération.

Même si, sur le fond, nous visons le même objectif, je suis donc défavorable à l’amendement n° 29 rectifié bis, ainsi qu’aux amendements n° 425 rectifié bis, 558 rectifié bis et 559 rectifié.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion