Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, monsieur le président de la commission des lois, chers collègues, c’est avec beaucoup d’attention que j’ai pris connaissance de cette proposition de loi déposée en 2015 par le groupe socialiste à l’Assemblée nationale.
J’en comprends et j’en partage l’objectif : il s’agit d’éviter que des partis ou groupements puissent profiter de l’inattention ou de la faiblesse de certains de nos concitoyens pour les inscrire, à leur insu, sur une liste de candidats à une élection. Il y va du caractère sincère du scrutin, cela a été dit, ce qui est tout à fait fondamental.
Parfois, ces candidats malgré eux découvrent leur nom sur des documents de propagande électorale, voire sur des affiches électorales. Imaginons leur stupeur, pour dire le moins, car lorsque vous vous trouvez ainsi associé à un parti qui ne représente pas du tout les valeurs auxquelles vous croyez, la violation de la liberté individuelle est patente. Et je n’insiste pas sur le préjudice qui peut en résulter. M. le rapporteur et la commission ont exprimé tout cela avec clarté, et je les remercie du travail qu’ils ont réalisé.
Seulement, c’est avec surprise que j’ai découvert les mesures préconisées par les auteurs du texte et par notre commission des lois pour y remédier. En effet, l’apposition d’une mention manuscrite et la transmission d’une copie du justificatif d’identité des candidats et de leurs suppléants deviennent obligatoires.
En d’autres termes, parce que quelques rares indélicats – seulement vingt-deux candidats malgré eux en 2014 aux municipales, paraît-il ! – se comportent mal, tous les Français désireux de s’engager dans la vie publique devraient accepter sans mot dire de nouvelles lourdeurs et complexités. C’est illogique. Pourquoi ne pas punir les auteurs plus sévèrement et faire confiance à l’immense majorité des citoyens ? Pourquoi encore renforcer le contrôle a priori pour 67 millions de Français potentiellement concernés, alors que deux dizaines de cas sont à traiter ?
En effet, si cette obligation nouvelle peut s’entendre à la rigueur pour l’élection des parlementaires, au vu de l’importance du législateur dans le système démocratique, l’étendre aux communes de moins de 1 000 habitants, comme le prévoit le texte de la commission en son article 1er, est de nature à décourager les candidats.
C’est avec gravité, madame la ministre, que je voudrais insister sur ce point : nous sommes la chambre de tous les territoires, pas seulement celle des métropoles !
Dans les communes de moins de 1 000 habitants, très majoritaires dans mon département par exemple, et notamment dans les communes de moins de 200 habitants ou de 100 habitants, c’est un vrai défi de constituer un conseil municipal. Il faut aller chercher des volontaires et les convaincre. C’est pourquoi l’obligation de déposer sa candidature, effective depuis les dernières municipales, est en soi un obstacle supplémentaire qui décourage les bonnes volontés.
Si, en plus, au travers de ce territoire, vous alourdissez encore cette obligation désormais applicable, autant dire franchement aux communes à taille humaine que le Sénat leur refuse le droit d’exister.
Il est assez hypocrite de créer des obligations nouvelles, année après année, et de les imposer aux élus qui n’en peuvent déjà plus, tout en feignant de s’étonner que les conseils municipaux se vident, que les candidats se font de plus en plus rares dans le monde rural, madame la ministre.
En 2014, en Haute-Marne, …