Vous vous en doutez, la commission est évidemment très favorable à ces trois amendements identiques, qui émanent de différents groupes politiques. Ils sont tout simplement issus d’un travail en commun que nous avons mené depuis un certain temps, un travail extrêmement approfondi qui a conduit le Sénat, peut-être avant tout le monde, à s’intéresser à la question de l’économie collaborative et aux évolutions de consommation que nous connaissions avec le développement d’Internet.
Ce travail a débouché sur un premier amendement, qui, sur l’insistance du Sénat, a permis l’inscription d’une disposition dans la loi. Je veux parler de l’obligation de déclaration automatique par les plateformes. Cela a constitué une première avancée, mais il faut maintenant envisager le pendant de cette mesure : traiter les revenus une fois qu’ils sont déclarés par les plateformes. Là est la vraie question. Leur applique-t-on la fiscalité dès le premier euro ? Met-on en place un système de franchise ? Quel régime fiscal appliquer ?
Les amendements qui nous sont proposés sont bienvenus en ce qu’ils visent à la simplification et à la clarification.
Vous le savez, ces amendements ont déjà été défendus sur différents bancs de l’Assemblée nationale, mais le Gouvernement s’y est opposé, invoquant notamment le principe d’égalité devant l’impôt. Monsieur le secrétaire d’État, vous n’êtes pas sans savoir qu’il y a d’autres principes constitutionnels. Le Conseil constitutionnel juge toujours par rapport à des objectifs, parmi lesquels figure le principe d’intelligibilité de la loi.
Aujourd’hui, avouez-le, avoir des seuils différents en matière fiscale et en matière sociale ou selon le type d’activité n’est absolument pas intelligible. À lire le guide édité par l’administration, reconnaissez qu’il faut être un peu spécialiste pour savoir si vous entrez dans la catégorie du loueur de voitures occasionnel, du loueur d’appartements occasionnel, etc. Tout cela est très compliqué aujourd’hui. Par ces amendements identiques, nous visons tout simplement à simplifier le régime par une franchise unique.
Autre objectif de valeur constitutionnelle : la lutte contre la fraude fiscale. Aujourd’hui, ces revenus ne sont pas déclarés. J’ai bien entendu notre collègue Julien Bargeton, mais ne se pose pas simplement la question des loueurs d’appartements à Paris, avec Airbnb. C’est toute l’économie collaborative qui se développe, dans tous les secteurs d’activité.
L’objet de ces amendements identiques est de faire le distinguo entre l’activité occasionnelle, qui correspond en quelque sorte à un remboursement des frais, et l’activité qui devient régulière et s’assimile alors à une quasi-activité professionnelle.
En dessous de 3 000 euros, il s’agit pratiquement du remboursement des frais ; au-delà de 3 000 euros, l’activité devient un peu plus récurrente et fournit un véritable complément de revenus. C’est la raison pour laquelle nous proposons de la fiscaliser.
J’en reviens au principe d’égalité : d’autres pays, comme la Belgique et le Royaume-Uni, ont mis en place cette mesure. Par ailleurs, l’exemple des organismes de gestion agréés a été cité à l’instant.
Enfin – et j’en termine, monsieur le président –, si vous arguez, monsieur le secrétaire d'État, que les dispositions prévues sont contraires au principe d’égalité, je déposerai demain – même peut-être ce soir ! – une QPC pour interroger le Conseil constitutionnel sur l’abattement de 20 % pour les organismes de gestion agréés. On verra quelle sera sa décision ! Aussi, vous ne pouvez qu’être favorable.