La séance est ouverte à quatorze heures trente.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2018, adopté par l’Assemblée nationale (projet n° 107, rapport général n° 108).
Dans la suite de la discussion des articles de la première partie, nous poursuivons l’examen des dispositions relatives aux ressources.
PREMIÈRE PARTIE
CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER
TITRE PREMIER
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
I. – IMPÔTS ET RESSOURCES AUTORISÉS
A. – Autorisation de perception des impôts et produits
I. – La perception des ressources de l’État et des impositions de toute nature affectées à des personnes morales autres que l’État est autorisée pendant l’année 2018 conformément aux lois et règlements et aux dispositions de la présente loi.
II. – Sous réserve de dispositions contraires, la présente loi s’applique :
1° À l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année 2017 et des années suivantes ;
2° À l’impôt sur les sociétés dû au titre des exercices clos à compter du 31 décembre 2017 ;
3° À compter du 1er janvier 2018 pour les autres dispositions fiscales.
Monsieur le ministre, notre groupe a déposé sur ce PLF un certain nombre d’amendements visant à mieux encadrer et lutter contre la fraude et l’évasion fiscales. Vous devriez, me semble-t-il, les regarder d’un œil bienveillant. Et, dans le cas contraire, sachez que notre groupe a une volonté très affirmée d’améliorer les dispositifs en la matière.
Le gouvernement précédent avait fait des progrès extrêmement importants dans la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales. J’espère que ce sujet important reste d’actualité.
Je ne doute pas une seule seconde que vous allez « retoquer » certains de nos amendements, mais nous les soutiendrons néanmoins avec énergie, monsieur le ministre !
L'amendement n° I-345, présenté par MM. Malhuret, Capus et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le montant annuel des dépenses fiscales ne peut excéder 89, 8 milliards d’euros en 2018.
La parole est à M. Emmanuel Capus.
Cet amendement vise à maintenir les dépenses fiscales au niveau de l’année précédente, avec pour objectif d’alerter le Gouvernement sur les dérapages éventuellement constatés de ces niches.
À l’occasion des échanges qui se sont tenus ce matin en commission des finances, on m’a indiqué que cet amendement n’était peut-être pas pertinent, car fondé sur des évaluations du Gouvernement, et non sur des montants fixes.
J’entends ces remarques d’autant plus que le but de ma proposition étant surtout d’éviter que les amendements déposés par les différents groupes du Sénat n’accroissent cet effet de niche et ses inconvénients.
Je partage les propos de notre collègue Emmanuel Capus.
Le souhait, partagé sur un certain nombre de travées, de limiter le montant des dépenses fiscales rejoint l’objet de l’article 17 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022. Cet amendement aurait donc davantage trouvé sa place dans ce dernier texte.
Par ailleurs, vous fixez très précisément le montant des dépenses fiscales pour 2018 à 89, 8 milliards d’euros. Cela voudrait dire que nous sommes capables de connaître à l’euro près le montant des dépenses fiscales. Or, quand vous examinez les « bleus budgétaires », vous constatez que, si certaines dépenses sont évaluées à l’euro près, beaucoup d’autres relèvent d’estimations effectuées à partir d’échantillons. Malheureusement, on ne connaît donc pas réellement le volume des dépenses fiscales, ce qui serait nécessaire pour fonder un texte normatif du type de celui que vous proposez.
J’entends néanmoins l’alerte, nous en avons déjà tenu compte en adoptant l’article 17 du projet de loi de programmation, et nous partageons la même intention.
À la suite de ces explications, vous aurez sans doute à cœur de retirer cet amendement, mon cher collègue. Je vous y invite, en tout cas.
Je partage, monsieur le sénateur, l’invitation qui vous est faite à l’instant par le rapporteur général, pour des raisons identiques.
Vous le savez, le Gouvernement souhaite réduire les dépenses fiscales. Différents engagements seront débattus au cours de la discussion, notamment la suppression du CICE. Nous sommes même encore plus ambitieux que vous, avec une volonté de baisser de 14 milliards d’euros les dépenses fiscales à l’horizon 2022. Nous nous sommes engagés, dans le projet de loi de programmation des finances publiques, à limiter le coût des dépenses fiscales à 28 % du montant des recettes fiscales nettes en 2018 et à 25 % en 2022.
Ce souhait de maîtriser la dépense fiscale est partagé et je suis certain que les arguments développés par le rapporteur général et par votre modeste serviteur sauront vous convaincre de retirer votre amendement, monsieur le sénateur.
Je le retire, monsieur le président, après avoir entendu l’avis de la commission des finances et les observations du Gouvernement.
L'article 1 er est adopté.
Le II de la section V du chapitre Ier du titre Ier de la première partie du livre Ier du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au second alinéa de l’article 196 B, le montant : « 5 738 € » est remplacé par le montant : « 5 795 € » ;
2° Le I de l’article 197 est ainsi modifié :
a) Le 1 est ainsi modifié :
– aux premier et deuxième alinéas, le montant : « 9 710 € » est remplacé par le montant : « 9 807 € » ;
– à la fin du deuxième alinéa et au troisième alinéa, le montant : « 26 818 € » est remplacé par le montant : « 27 086 € » ;
– à la fin du troisième alinéa et à l’avant-dernier alinéa, le montant : « 71 898 € » est remplacé par le montant : « 72 617 € » ;
– à la fin des avant-dernier et dernier alinéas, le montant : « 152 260 € » est remplacé par le montant : « 153 783 € » ;
b) Le 2 est ainsi modifié :
– au premier alinéa, le montant : « 1 512 € » est remplacé par le montant : « 1 527 € » ;
– à la fin de la première phrase du deuxième alinéa, le montant : « 3 566 € » est remplacé par le montant : « 3 602 € » ;
– à la fin du troisième alinéa, le montant : « 903 € » est remplacé par le montant : « 912 € » ;
– à la première phrase de l’avant-dernier alinéa, le montant : « 1 508 € » est remplacé par le montant : « 1 523 € » ;
– à la première phrase du dernier alinéa, le montant : « 1 684 € » est remplacé par le montant : « 1 701 € » ;
c) Au a du 4, les montants : « 1 165 € » et « 1 920 € » sont remplacés, respectivement, par les montants : « 1 177 € » et « 1 939 € ».
L'amendement n° I-214, présenté par MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
I - Alinéa 2
Remplacer le montant :
par le montant :
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Éric Bocquet.
À une époque où la solidarité familiale doit souvent compenser les effets de l’incertitude sociale, des difficultés d’insertion professionnelle ou des tensions existant sur le « marché du logement », le rattachement des enfants majeurs, mariés ou non, est l’une des réponses fiscales proposées par notre droit.
La situation concerne environ 1, 7 million de foyers fiscaux et le rattachement coûte 1, 9 milliard d’euros au Trésor public, soit une incidence fiscale d’un peu plus de 1 000 euros par foyer fiscal concerné.
On est donc assez loin de la niche fiscale génératrice d’un avantage indu ou exorbitant…
Cet amendement se détermine avec simplicité, en cohérence avec l’évolution du barème de l’impôt sur le revenu que nous avons indiquée lors de la discussion de l’article. Il s’agit tout simplement de procéder au relèvement du seuil de plafonnement des effets du rattachement, en lui appliquant la progression de 2 % que nous avons imprimée aux tranches du barème de l’impôt sur le revenu.
J’ai peur qu’il y ait une petite imprécision dans l’amendement d’Éric Bocquet. Dans son argumentation, il parle du rattachement de tous les enfants au foyer fiscal. Pourtant, son amendement ne vise très concrètement que le rattachement d’un enfant marié ou ayant des enfants à charge, ce qui est finalement plus restrictif que l’article 196B du code général des impôts, qui prévoit le rattachement fiscal des enfants majeurs de moins de 21 ans.
Cet amendement me semble en outre pleinement satisfait par le relèvement du quotient familial de 1 527 euros à 1 750 euros que je propose à travers l’amendement n° I-96, et par la revalorisation d’un point de l’abattement dans l’article 2 du projet de loi de finances.
En effet, l’article 2 du présent projet de loi prévoit déjà de porter l’abattement de 5 738 euros à 5 795 euros, sans parler des différents autres dispositifs à l’avantage des familles prévus par ailleurs.
Je vous rappelle en outre que ces personnes, majeures et mariées, devraient en principe être imposées séparément, la possibilité de demander le rattachement au foyer des parents étant dérogatoire. À ce stade, nous n’envisageons pas d’aller au-delà et je vous demanderai donc de bien vouloir retirer votre amendement, monsieur le sénateur.
L'amendement n° I-214 est retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° I-137 rectifié, présenté par MM. P. Dominati, Longuet et Husson et Mme Boulay-Espéronnier, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 4 à 8
Remplacer ces alinéas par quatre alinéas ainsi rédigés :
a) Le 1 est ainsi rédigé :
« 1. L’impôt est calculé en appliquant à la fraction de chaque part de revenu qui excède 18 000 € le taux de :
« – 3, 3 % pour la fraction supérieure à 18 000 € et inférieure ou égale à 48 000 € ;
« – 16, 3 % pour la fraction supérieure à 48 000 €. » ;
II. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Les articles 16, 31, 31 bis, 35 bis, 35 ter, 44 nonies, 62, 72 B, 72 D, 72 D bis, 72 D ter, 73 B, 75-0 A, 80 bis, 80 quinquies, 80 sexies, le 6° du 1 de l’article 80 duodecies, les articles 80 quaterdecies, 81, 81 A, 81 D, 83, 84 A, 92 A, 93, 93-0 A, 100 bis, 125-00 A, 125-0 A, 125 A, 131 quater, 135, 150 ter, 150-0 A, 150-0 B quater, 150-0 D, 150-0 D ter, 150 U, 150 VJ, 151 ter, le VII de l’article 151 septies, les articles 151 septies A, 154 bis A, 155 B, 156, 156 bis, 157, 157 bis, les a et b quinquies de l’article 158, les articles 163 A, 163 bis, 163 bis AA, 163 bis B, 163 quinquies B, 163 quinquies C, 163 quinquies C bis, 163-0 A ter, 194, 195, 196 A bis, 196 B, les 2 et 3 du I de l’article 197, les articles 199 quater B, 199 quater C, 199 quater F, 199 septies, 199 decies I, 199 decies E, 199 decies EA, 199 decies F, 199 decies G, 199 decies G bis, 199 decies H, 199 undecies A, 199 undecies B, 199 undecies C, le I et les VI à VI ter A de l’article 199 terdecies-0 A, les articles 199 terdecies-0 B, 199 terdecies 0-C, 199 quindecies, les 1 à 5 de l’article 199 sexdecies, les articles 199 octodecies, 199 vicies A, 199 unvicies, le I de l’article 199 duovicies, les articles 199 tervicies, 199 sexvicies, 199 septvicies, 199 octovicies, 199 novovicies, 200, 200 quater, 200 quater A, 200 quater B, 200 decies A, 200 undecies, 200 terdecies, 200 quaterdecies, 200 quindecies, 200 A, 244 bis C, 1691 ter du code général des impôts et l’article 18 bis de l’annexe IV du code général des impôts sont abrogés.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dominati.
Au moment où commence l’examen du premier budget de cette mandature présidentielle, le rapport annuel de l’OCDE montre que la France reste vice-championne du monde des prélèvements obligatoires. Et nous serons peut-être champions dans peu de temps, car, dans le projet de loi de programmation pluriannuelle, j’ai bien noté que la baisse des prélèvements obligatoires envisagée par le Gouvernement était extrêmement faible.
Néanmoins, à l’heure où certaines annonces doivent intervenir sur le plan de la fiscalité, cet amendement permettrait peut-être d’aménager l’impôt sur le revenu.
En France, cet impôt est particulièrement progressif, avec une tranche supérieure à 45 %. Je propose de le remplacer par un mécanisme que l’on désigne le plus souvent par l’appellation flat tax.
Je rappelle quelques chiffres : sur les 37, 7 millions de foyers fiscaux, seuls 16 millions acquittent l’impôt sur le revenu, et 10 % des contribuables payent près de 70 % de la recette totale. Cette réalité explique que les Français soient périodiquement excédés, la colère s’exprimant par vague.
Il appartient à ce gouvernement de saisir l’occasion d’une remise à plat de la fiscalité afin de disposer d’un système d’imposition beaucoup plus moderne.
Nous proposons seulement deux seuils et deux taux, l’un à 16 % avec la contribution sociale généralisée, l’autre à 26 %.
Ce mécanisme fonctionne déjà dans un certain nombre de pays et présenterait aussi l’avantage d’abolir le grand fatras, le véritable maquis des niches fiscales, qui représentent à peu près la moitié des recettes de l’IR : environ 33 milliards d’euros, pour 72 milliards d’euros de recettes au total.
Je soumets donc cet amendement à la sagacité du Gouvernement et du rapporteur. J’aimerais aussi que l’on puisse étudier le coût et l’impact – on parle souvent d’impact - d’une telle mesure fiscale, qui ferait de nous un pays réellement moderne.
L’amendement n° I-213, présenté par MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 4 à 8
Remplacer ces alinéas par onze alinéas ainsi rédigés :
a) Le 1 est ainsi rédigé :
« 1. L’impôt est calculé en appliquant à la fraction de chaque part de revenu qui excède 9 905 € le taux de :
« - 8 % pour la fraction supérieure à 9 905 € et inférieure ou égale 12 800 € ;
« - 12 % pour la fraction supérieure à 12 800 € et inférieure ou égale à 18 890 € ;
« - 16 % pour la fraction supérieure à 18 890 € et inférieure ou égale à 27 360 € ;
« - 22 % pour la fraction supérieure à 27 360 € et inférieure ou égale à 45 950 € ;
« - 30 % pour la fraction supérieure à 45 950 € et inférieure ou égale à 73 345 € ;
« - 40 % pour la fraction supérieure à 73 345 € et inférieure ou égale à 112 325 € ;
« - 45 % pour la fraction supérieure à 112 325 € et inférieure ou égale à 155 320 € ;
« - 50 % pour la fraction supérieure à 155 320 € et inférieure ou égale à 200 000 € ;
« - 60 % pour la fraction supérieure à 200 000 €. » ;
La parole est à M. Éric Bocquet.
Cet amendement répond à deux exigences, d’une part la réduction du déficit de l’État, d’autre part, et surtout, la justice fiscale et sociale, préoccupation qui ne doit jamais cesser de nous guider.
En proposant, comme nous le faisons, de modifier la progressivité des tranches du barème, nous poursuivons l’ensemble des objectifs ainsi définis.
La mesure que nous préconisons est susceptible de dégager des marges de manœuvre pour les finances publiques, tout en répartissant la charge fiscale au plus près des capacités contributives de chacun et chacune.
Au-delà de l’examen de notre proposition, ce qui est en question, c’est bel et bien le fait que l’impôt sur le revenu, dans notre pays, est marqué par une forte concentration des revenus imposables, qui traduit la réalité des inégalités sociales, de patrimoine et autres, ces inégalités affectant également la situation générale du pays et son économie en particulier.
Pour vérifier la réalité de ces inégalités, un simple examen des données officielles, présentes sur le site du ministère, suffit.
Ainsi, en 2016, 749 000 foyers fiscaux ont déclaré un revenu supérieur à 100 000 euros annuels – ils cumulent plus de 140 milliards d’euros de revenus soumis au barème, soit une moyenne proche de 190 000 euros par foyer, tout de même – et acquitté 28 milliards d’euros d’impôt sur le revenu, soit environ 20 % de leurs revenus.
Nous sommes tout de même assez loin de l’impôt « confiscatoire ».
À l’autre bout de la chaîne, si l’on peut dire, un peu plus de 14 millions de foyers fiscaux ont déclaré moins de 15 000 euros annuels, pour un revenu total de 107 millions d’euros environ, soit un revenu moyen de moins de 7 500 euros.
Notre proposition vise donc à conférer une plus grande progressivité au barème et, partant, à lui insuffler ce supplément de justice fiscale qui lui manque singulièrement, et qui risque de lui manquer plus encore avec le prélèvement forfaitaire unique annoncé sur les revenus financiers, lequel va faire perdre beaucoup d’argent au budget général.
L'amendement n° I-489, présenté par MM. Requier, Collin, Gabouty et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Castelli, Mmes Costes et N. Delattre, M. Gold, Mme Laborde et M. Menonville, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 5 et 6
Remplacer ces alinéas par quatre alinéas ainsi rédigés :
- les premier et deuxième alinéas sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :
« 1. L’impôt est calculé en appliquant à la fraction de chaque part de revenu qui excède 6 114 € le taux de :
« – 5, 5 % pour la fraction supérieure à 6 114 € et inférieure ou égale à 12 196 € ;
« – 14 % pour la fraction supérieure à 12 196 € et inférieure ou égale à 27 086 € ; »
II. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le troisième alinéa du 2° est applicable à compter de l’imposition des revenus de l’année 2017.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Notre groupe présente chaque année cet amendement dit « Joseph Caillaux », qui manquerait assurément au rapporteur général si nous renoncions à le défendre, même s’il s’évertue à en demander le retrait !
Sourires.
Cet amendement vise à rétablir la dimension citoyenne de l'impôt sur le revenu des personnes physiques, conformément à la philosophie originelle de Joseph Caillaux, le père de l’impôt sur le revenu, radical de surcroît.
En l’espèce, il est prévu de rétablir la tranche de l’impôt sur le revenu à 5, 5 %, supprimée en 2014, afin d’élargir l’assiette.
En 2015, seuls 45, 6 % des foyers étaient effectivement imposés, soit moins d’un foyer fiscal sur deux. Ce pourcentage est en diminution. La suppression de la tranche à 5, 5 % par la loi de finances pour 2015 a été en partie responsable de cette évolution, qui fragilise le statut de l’impôt sur le revenu, lequel devrait rester l’impôt citoyen par excellence.
La Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, en son article XIII, dispose : « Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés. »
Si les contribuables disposant d’un faible revenu imposable, inférieur à 6 114 euros annuels, doivent continuer à ne pas être soumis à l’impôt sur le revenu, il importe que ce dernier soit acquitté par le plus grand nombre, ne serait-ce qu’à titre symbolique. Au-delà de la mesure ponctuelle, il s’agit de redonner tout son sens à la citoyenneté et de retisser les liens entre l’État et les citoyens.
Cette mesure n’augmentera pas la charge pesant sur les ménages déjà imposés en 2017.
Par ailleurs, il est prévu que les seuils des tranches à 5, 5 % et à 14 % soient revalorisés de 1 %, conformément à l’évolution de l’indice des prix hors tabac entre 2016 et 2017. Cela permet de neutraliser les effets de l’inflation et de préserver le pouvoir d’achat.
Je me réjouis de ces propositions, que je conçois davantage comme des amendements d’appel, notamment en direction du Gouvernement, pour parvenir à un chiffrage et à une étude approfondie sur l’impôt sur le revenu.
Au fur et à mesure des réformes qu’il a connues, cet impôt a subi une sorte d’hyperconcentration et, aujourd’hui, plus de la moitié des foyers fiscaux français ne sont pas imposables.
On peut donc concrètement s’interroger sur le fait de savoir si l’impôt sur le revenu, qui est également miné par un grand nombre de niches fiscales, est toujours adapté. Néanmoins, on ne peut pas admettre ces amendements en l’état. Ils nécessiteraient au minimum un chiffrage, et Philippe Dominati nous invitait d’ailleurs à mener une étude d’impact.
L’amendement n° I-137 rectifié, qui vise à instaurer une sorte de flat tax progressive composée de deux taux, outre le taux à 0 %, présente l’avantage de la simplicité et de la lisibilité. Il se heurte néanmoins à deux problèmes. Tout d’abord, la jurisprudence du Conseil constitutionnel exige une progressivité de l’impôt et je ne suis pas sûr que l’on réponde à cet objectif constitutionnel en fixant seulement une tranche à 3, 3 % et une tranche à 16, 3 %.
Ensuite, il faudrait approfondir sérieusement les conséquences de la suppression des dépenses fiscales.
Si j’ai bien compris, à part le quotient familial, inhérent au calcul de l’impôt, elles seraient toutes supprimées si cet amendement était retenu.
Je pourrais prendre l’exemple de l’emploi à domicile. De nombreux collègues, sur toutes les travées, ont déposé des amendements visant à relever les plafonds pour ces emplois, actuellement fixés à 12 000 euros plus 1 500 euros par enfant à charge, dans la limite de 15 000 euros. Or ces mesures fiscales constituent un soutien important à l’emploi à domicile et évitent sans doute le travail non déclaré. Je ne suis pas certain que nous soyons capables du jour au lendemain de supprimer ces aides, avec à la clef un risque d’effondrement de ces emplois et de basculement vers le travail non déclaré.
Je pourrais encore parler des dons aux œuvres et du soutien au monde associatif.
Certaines niches fiscales sont en effet très importantes en volume. Certaines sont justifiées, d’autres le sont moins, mais leur suppression brutale pourrait induire des effets importants. Ce débat devrait néanmoins avoir lieu et la commission des finances pourrait examiner, de concert avec le Conseil des prélèvements obligatoires, le CPO, et le Gouvernement le poids réel de l’impôt sur le revenu aujourd’hui.
Les deux autres amendements en discussion commune sont totalement contradictoires avec le premier.
L’amendement n° I-213, présenté par le groupe CRCE, vise au contraire à créer de nouvelles tranches, dont une à 60 %. Je suis au grand regret de vous annoncer, mon cher collègue, que le Conseil constitutionnel trouverait certainement à y redire. Sa jurisprudence est bien établie en la matière. Souvenez-vous de la censure de la taxe à 75 %, après saisine du Conseil par plus de soixante députés et sénateurs, en particulier des sénateurs membres du groupe auquel j’appartiens. Si on ajoute la CSG, on atteint des taux d’imposition qui ne passent pas la barre de la jurisprudence du Conseil.
Quant à l’amendement n° I-489, je salue la constance de la fidélité de notre collègue Jean-Claude Requier à Joseph Caillaux, le père de l’impôt sur le revenu.
Au fil des réformes, en particulier celles qui sont intervenues lors du dernier quinquennat, le nombre de contribuables qui payent l’impôt sur le revenu a diminué. Cela pose la question de la réforme de la première tranche du barème, à laquelle la majorité sénatoriale s’était opposée, arguant justement de l’hyperconcentration de l’impôt.
Quand vous regardez aujourd’hui qui paye l’impôt, vous vous apercevez que 20 % des contribuables payent plus de 70 % du produit de l’impôt sur le revenu. Cette réalité n’est pas sans conséquence, y compris parfois sur des décisions de départ à l’étranger.
Sommes-nous prêts pour autant à réintégrer aujourd’hui plusieurs millions de foyers fiscaux pour 500 millions d’euros de recettes environ ? C’est un vrai débat…
L’augmentation de la CSG concourt sans doute déjà un peu à la réalisation de cet objectif, puisque cet impôt a un public beaucoup plus large que l’impôt sur le revenu.
Pour ma part, je suis plutôt partisan d’une baisse des prélèvements obligatoires que d’une augmentation du produit, même si je partage la volonté de rééquilibrage exprimée par l’auteur de cet amendement.
Je sollicite donc plutôt le retrait de ces trois amendements d’appel. À défaut, l’avis de la commission sera défavorable.
Sur l’amendement n° I-137 rectifié, présenté par M. Dominati, je partage avec son auteur la volonté de gagner en visibilité, en lisibilité et en compréhension de l’impôt.
Le temps passé à Bercy me fait découvrir le caractère parfois très sédimenté de l’édifice fiscal français. Il doit même arriver que les services de Bercy n’arrivent plus à reconstituer l’historique de certains impôts, personne ne se souvenant de la raison qui permettait, initialement, de les légitimer.
Or, la compréhension de l’impôt, c’est en effet la base de l’acceptation de l’impôt, de même qu’un lien important entre nos concitoyens et la Nation. Je partage cet argument.
Toutefois, le rapporteur général l’a rappelé, cette proposition contrevient au principe de progressivité de l’impôt, défendu de manière constante par le Conseil constitutionnel dans sa jurisprudence.
Elle introduit également une dose de justice fiscale relativement faible, avec seulement deux taux d’imposition, ce qui bénéficierait très fortement aux contribuables les plus aisés.
De plus, en supprimant la quasi-totalité des avantages fiscaux associés à l’impôt sur le revenu, votre proposition, monsieur Dominati, aurait pour conséquence d’annihiler l’effet incitatif de certaines dépenses fiscales destinées à soutenir des acteurs économiques ou des acteurs sociaux qui opèrent dans nos territoires.
Je partage le sentiment du rapporteur général sur le chiffrage qu’il conviendrait d’effectuer pour évaluer la faisabilité d’une telle mesure.
Je comprends votre souhait d’ouvrir ce débat. Il n’y a pas de sujet tabou, le Président de la République et le Gouvernement étant assez ouverts à la discussion, y compris sur des sujets aussi anciens que celui-là.
Toutefois, nous sommes très attachés à la progressivité de l’impôt sur le revenu. Pour cette raison, je demanderai le retrait de cet amendement.
L’amendement n° I-213, présenté par Éric Bocquet, prévoit un taux marginal d’imposition de 60 %. Je ne reviendrai pas sur la totalité de la démonstration, mais je rappelle que le Conseil constitutionnel a fait état de son scepticisme, arguant du caractère confiscatoire de ces taux.
De surcroît, au-delà des problèmes juridiques, il y a aussi un aspect psychologique. Quand votre taux d’imposition final dépasse la moitié de ce que vous gagnez, vous n’êtes vraiment pas incité à l’entrepreneuriat et à la prise de risque. Pour cette raison – et pour d’autres qui leur appartiennent –, certaines personnes préféreront aller créer, innover et embaucher à l’extérieur de nos frontières plutôt qu’à l’intérieur.
L’objectif est évidemment de faire baisser la pression fiscale – c’est l’autre argument que j’emploierai pour demander le retrait de cet amendement –, mais également de construire un édifice fiscal qui soit plus incitatif et qui rémunère justement les prises de risques sur le territoire national. Il ne s’agit pas de rémunérer encore plus des gens déjà aisés, mais de récompenser des personnes qui investissent en France, créent de l’emploi en France et rendent nos territoires plus attractifs.
Enfin, l’amendement n° I-489, présenté par Jean-Claude Requier, prévoit l’instauration d’une tranche à 5, 5 %. Je ferai la même réponse : notre objectif est de faire baisser la pression fiscale et d’éviter de faire entrer de nouvelles personnes dans l’impôt. J’entends l’argument qui consiste à dire que le consentement à l’impôt sera d’autant mieux établi que la base de la population qui y consentira et le paiera sera large.
Toutefois, les foyers les plus modestes participent déjà à l’effort et à la dépense publique de la Nation par d’autres types de prélèvements que l’impôt sur le revenu. Le lien avec la Nation est sans doute moins direct qu’avec l’impôt sur le revenu, que vous payez par tiers ou tous les mois, mais il existe néanmoins.
Pour cette raison, je sollicite également le retrait de cet amendement.
Au détour de trois amendements, nous avons finalement trois propositions de refonte de l’impôt sur le revenu. C’est intéressant.
D’un côté, M. Dominati nous propose un allégement et une simplification radicale de cet impôt.
Puis la balle arrive en fond de court, du côté de M. Bocquet, qui entend pour sa part accroître la progressivité de l’IR en ajoutant une tranche.
Enfin, la balle est envoyée au centre avec M. Requier, qui propose l’élargissement de la base de l’impôt sur le revenu.
Il est compliqué d’aborder ce débat de fond, passionnant en soi, au détour de ces trois amendements, même s’ils nous invitent à la réflexion.
La proposition de M. Requier est très intéressante en ce qu’elle ouvre le débat sur l’universalité de l’impôt sur le revenu. Il y aurait, c’est vrai, des effets de transfert de charges, et n’oublions pas que les personnes non assujetties à l’IR payent beaucoup d’autres impôts, la TVA, qui est légèrement dégressive dans les derniers déciles, mais aussi la CSG, bien sûr, de même que les impôts et droits indirects sur l’essence, les tabacs, etc.
L’élargissement de la base représenterait donc un prélèvement de pouvoir d’achat qui nécessiterait sans doute, par ailleurs, de revoir la politique sociale dans son ensemble. Je ne ferme pas la porte à une telle évolution, mais elle va beaucoup plus loin qu’un simple amendement à l’occasion de cet article. Il faudrait ouvrir plus largement les débats.
Pour ces raisons, et même si nous ne sommes pas forcément opposés à certains des arguments avancés, le groupe La République En Marche votera contre ces amendements, sans méconnaître les perspectives qu’ils ouvrent.
M. Claude Raynal. Je voudrais d’abord dire qu’il serait bien difficile de faire plus provocateur que l’amendement présenté par notre collègue Philippe Dominati.
Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.
Ce serait tout de même compliqué de l’être davantage…
Pour autant, il est intéressant d’entendre ce type de discours, car, au moins, monsieur Dominati, vous posez les choses sur la table de manière extrêmement claire !
En gros, vous proposez qu’il y ait moins, voire plus du tout, de progressivité, ce qui reviendrait finalement à une espèce de flat tax. On comprend bien à qui elle bénéficierait – pas besoin de suivre de longues études pour cela ; vous l’écrivez d’ailleurs quasiment dans l’objet même de votre amendement : à ceux qui sont le plus soumis à l’impôt sur le revenu. Ce faisant, vous allez, à mon sens, à l’encontre de l’un des principes fondateurs de notre République.
Toutefois, il ne faut pas voir cet impôt comme un impôt majeur. La flat tax que vous proposez, elle existe déjà : c’est la TVA, qui constitue aujourd'hui un impôt majeur de notre système fiscal. Je ne crois donc pas utile d’aller plus loin en la matière.
En ce qui concerne l’amendement de notre collègue Jean-Claude Requier, qui revient sur une mesure que nous avons prise en 2014, je veux dire, sans aucune provocation évidemment, qu’il aboutirait finalement, s’il était adopté, à taxer davantage des personnes qui sont déjà largement touchées par la TVA. Je ne crois pas que ce soit une bonne idée.
Pour l’ensemble de ces raisons et pour celles qui viennent d’être évoquées à l’instant par mon collègue Julien Bargeton, nous voterons contre l’ensemble de ces amendements.
Que ce soit par solidarité avec Joseph Caillaux ou non, il me semble que l’amendement de M. Requier devrait être voté par tout le monde !
J’entends bien l’argument avancé par M. le secrétaire d’État ou par Claude Raynal sur le fait qu’il existe déjà des participations de différents types – la TVA, la CSG, etc. Mais ce n’est pas la même chose.
La participation des gens à l’action publique est claire, quand ils payent, même de manière symbolique, un impôt sur le revenu.
Quand vous achetez un produit, où que ce soit, avec la TVA, avez-vous vraiment le sentiment de participer à l’action publique ? Pas du tout ! Vous achetez un produit, et c’est tout ; vous n’avez, je le répète, absolument pas le sentiment de participer à l’action publique.
Je considère que le paiement d’un impôt sur le revenu – même quelques euros ! – permettrait à tous les citoyens d’avoir conscience de faire partie de la République : ils pourraient alors se dire que la République leur appartient. Cet impôt, même très minime, et avec une base très faible, c’est autre chose ; il crée un vrai sentiment d’appartenance ! C’est un véritable impôt citoyen, ce que ne sont pas les impôts indirects sur la consommation.
J’en suis désolé pour mon collègue Philippe Dominati, qui a raison de défendre ses convictions. Il n’y a pas de provocation à débattre. Vous le savez, si tout le monde était si satisfait du système fiscal français, cela se saurait… Lancer les pistes d’un débat, qui devra de toute façon avoir lieu, ne me choque pas.
M. Roger Karoutchi. Au final, l’amendement qui constitue une mesure de justice et d’équité et qui permet de faire en sorte que chaque citoyen se sente responsable – propriétaire même, pourrais-je dire – de la République, c’est l’amendement de M. Requier, que je voterai.
M. Jean-François Rapin applaudit.
Ces trois amendements en discussion commune sont très différents. J’ai cosigné celui de Philippe Dominati, parce que, comme lui, je crois profondément que nous devons réfléchir à ce que pourrait être un impôt simplifié, qui serait en effet très proche de ce qui est appelé une flat tax, et procéder à une évaluation. Je vous rappelle qu’un tel système a été défendu dans notre assemblée par l’ancien doyen de notre groupe, Serge Dassault.
L’amendement n° I-137 rectifié, qui prévoit cette flat tax avec un taux de 26 %, présente l’immense avantage de répondre à l’appel du Président de la République élu en mai dernier. Il encourage tous nos compatriotes à être des « premiers de cordée » : à partir de 45 000 euros, le taux d’imposition est plafonné à 26 %. Par conséquent, le travail, l’initiative, l’offensive, l’engagement sont récompensés par un impôt qui n’est plus confiscatoire.
Pour autant, je reconnais que le travail de Philippe Dominati, que j’ai soutenu, mériterait d’être approfondi.
J’ajoute que l’adoption d’un tel amendement constituerait un fait tragique pour la presse écrite. Vous le savez, il m’arrive encore de dire des bêtises…
Sourires sur différentes travées.
M. Vincent Éblé, président de la commission des finances. Rien ne vous interdit d’arrêter !
Nouveaux sourires.
Mêmes mouvements.
Plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains. De moins en moins !
Mêmes mouvements.
De moins en moins, je le reconnais !
Toute la presse a dénoncé les dernières turpitudes du Panama, avec les Panama papers, en matière d’optimisation fiscale et je ne peux pas m’empêcher de sourire, car ces mêmes magazines et quotidiens ne manquent pas, chaque année – c’est un véritable marronnier ! –, de présenter à leurs lecteurs des dizaines de pages consacrées aux moyens de ne pas payer les impôts qu’ils devraient normalement assumer.
C’est pourtant de l’optimisation fiscale…
L’avantage de la proposition de Philippe Dominati, c’est de faire tomber les niches. La presse devrait alors abandonner la publication des pages qu’elle réalise sur les sujets liés à l’optimisation fiscale, optimisation qu’elle dénonce par ailleurs, lorsqu’elle n’en est pas à l’origine.
En conclusion, je me rallierai volontiers à la proposition de notre collègue Jean-Claude Requier. Joseph Caillaux était l’adversaire de Raymond Poincaré, mais, pour une fois, je choisirai la Sarthe plutôt que la Meuse !
M. Dominique de Legge applaudit.
Avec ces trois amendements, nous sommes déjà au cœur du débat, et c’est bien qu’il s’engage. Je voudrais vous dire à quel point nous ne sommes pas des extrémistes de l’impôt sur le revenu. Nous proposons une tranche de 60 %, et on nous répond que c’est dissuasif, voire anticonstitutionnel, et que ce n’est pas bien pour les gens qui veulent s’engager.
Mais souvenons-nous de ce qu’a décidé Roosevelt dans les années trente : il me semble qu’il avait créé une tranche d’imposition à 92 %, qui est restée en vigueur pendant plus d’un demi-siècle – c’est le président Clinton qui y a mis fin ! Et cela n’a pas empêché les États-Unis de devenir la puissance économique que nous connaissons.
C’est tout de même étonnant de voir les communistes se réclamer de la fiscalité américaine…
Je note aussi que Mme Lagarde, qu’on ne peut pas soupçonner d’extrémisme fiscal, puisqu’elle est directrice générale du FMI et fut ministre de M. Sarkozy, relève qu’il pourrait être intéressant d’envisager une super-taxe sur les très hauts revenus.
On sait bien que la tendance est plutôt au dumping fiscal : « Venez chez nous et vous ne serez pas trop taxé ! » J’ai lu avec intérêt l’interview de Lloyd Blankfein dans les pages saumon du Figaro le 20 novembre dernier. Celui qui est tout de même le dirigeant de Goldman Sachs – ce n’est pas n’importe quelle banque : c’est du sérieux, du lourd ! – y expliquait qu’il envisageait, en raison du Brexit, d’installer des équipes en Europe, à Paris et Francfort, mais à deux conditions : assouplir le marché du travail, ce qui est déjà fait en France, et baisser les impôts, ce à quoi vous travaillez…
Voilà pourquoi nous proposons qu’une tranche supérieure de l’impôt soit créée.
Ces trois amendements ont le mérite de poser un certain nombre de questions. L’impôt sur le revenu n’est pas une création récente ; de mémoire, c’est une loi de décembre 1959 qui l’a institué et il a connu de nombreuses évolutions.
Ces amendements, en particulier celui qui a été présenté par Philippe Dominati, ont le mérite d’appeler notre attention sur la question des dépenses fiscales, qui représentent, en ordre de grandeur, 30 milliards d’euros. Cette question doit donc être largement prise en compte. On le comprend, monsieur le secrétaire d'État, nous sommes tout de même là pour soutenir les recettes de l’État, qui ne doivent pas être réduites. On parle toujours d’une progression des recettes.
Selon le document relatif à l’évaluation des voies et moyens annexé au projet de loi de finances, l’impôt sur le revenu est estimé à environ 78 milliards d’euros. Or, le nombre de foyers imposés diminue et entre 20 et 21 millions de foyers n’en paient pas du tout. On voit donc bien qu’une réflexion doit être menée en la matière, ce qui explique l’intérêt de ces amendements.
C’est dans cet esprit que je me rallierai à l’avis de la commission des finances.
Enfin, je souhaite rappeler le travail réalisé par les agents des directions des finances publiques ; il n’est pas simple du tout. Si beaucoup de personnes utilisent maintenant Internet, ce n’est pas le cas de tous – les services font un effort de communication – : une présence humaine reste indispensable, par exemple au moment des déclarations d’impôts.
Après les explications claires du secrétaire d’État et sur la suggestion du rapporteur général, qui semble avoir de la peine quand on supprime quelques niches fiscales, je vais le retirer, monsieur le président.
Néanmoins, je souhaiterais disposer de simulations sur les résultats que donneraient l’application des taux figurant dans mon amendement. Nous sommes en début de mandature, et, vous l’avez bien compris, c’est le moment d’engager des débats. Aussi, pour les mener correctement, nous avons besoin de simulations, en vue des futurs travaux.
L’amendement n° I-137 rectifié est retiré.
Monsieur Bocquet, l’amendement n° I-213 est-il maintenu ?
L’amendement n’est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° I-215, présenté par MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 9 à 14
Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :
b) Le 2 est ainsi rédigé :
« 2. La réduction d’impôt résultant de l’application du quotient familial ne peut excéder 1 545 € par demi-part ou la moitié de cette somme par quart de part s’ajoutant à une part pour les contribuables célibataires, divorcés, veufs ou soumis à l’imposition distincte prévue au 4 de l’article 6 et à deux parts pour les contribuables mariés soumis à une imposition commune.
« Toutefois, pour les contribuables célibataires, divorcés, ou soumis à l’imposition distincte prévue au 4 de l’article 6 qui répondent aux conditions fixées au II de l’article 194, la réduction d’impôt correspondant à la part accordée au titre du premier enfant à charge est limitée à 3 630 €. Lorsque les contribuables entretiennent uniquement des enfants dont la charge est réputée également partagée entre l’un et l’autre des parents, la réduction d’impôt correspondant à la demi-part accordée au titre de chacun des deux premiers enfants est limitée à la moitié de cette somme. » ;
II. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Pour compenser la perte de recettes découlant de cet article, les taux d’imposition des plus-values de long terme indiqués au a du I de l’article 219 du code général des impôts sont relevés à due concurrence.
La parole est à M. Éric Bocquet.
La question du quotient familial est, sans aucun doute, ce qui fait obstacle à la mise en œuvre de certains choix en matière de réforme fiscale, en particulier en ce qui concerne l’impôt sur le revenu.
En outre, l’annonce de la mise en œuvre de la retenue à la source va sans doute faire naître, entre les salariés d’une même entreprise, bien des interrogations, singulièrement du fait de l’application du fameux quotient familial.
Pour des raisons diverses, le quotient familial d’un foyer fiscal peut connaître une majoration d’une demi-part : celle-ci est, par exemple, liée à la situation de santé du contribuable, au service qu’il a rendu à la Nation – c’est le cas des anciens combattants – ou encore au fait qu’il a assumé seul la charge de l’éducation d’un ou plusieurs enfants.
La demi-part des personnes seules ayant élevé des enfants pendant au moins cinq ans représente 550 millions d’euros d’impôts en moins, qui sont partagés entre environ un million de ménages.
C’est autant pour la demi-part des anciens combattants – 900 000 ménages –, quand celle des contribuables invalides représente 390 millions d’euros, partagés entre près de 1, 4 million de redevables, et celle des veuves 110 millions pour environ 160 000 dossiers fiscaux.
Enfin, les conséquences du divorce coûtent 415 millions d’euros au trésor public en impôts en moins pour environ 1, 8 million de ménages.
Ainsi, toutes ces mesures liées au quotient familial, qui prend en compte les situations réelles des ménages, coûtent au total un peu plus de 2 milliards d’euros au budget de la Nation, pour plus de 5 millions de contribuables.
Ce dispositif constitue donc un élément de la politique sociale de la Nation, mais, pas plus que la suppression de l’exonération des majorations de pension, les mesures prises pour réduire leurs coûts ne se sont traduites par un renforcement des moyens de ladite politique.
Tel est le sens de cet amendement.
L’amendement n° I-96, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 10
Remplacer le montant :
par le montant :
II. – Pour compenser la perte résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l'État de la hausse du plafond du quotient familial est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
Cet amendement concerne également le quotient familial, puisqu’il vise tout simplement à le relever de 1 527 euros à 1 750 euros.
Lorsque l’on regarde la politique du précédent quinquennat, dont nous venons indirectement de parler au travers de l’amendement de notre collègue Jean-Claude Requier, on s’aperçoit que les familles et les classes moyennes ont sans doute été les plus malmenées.
En outre, les familles sont un petit peu les oubliés de ce projet de loi de finances ; nous parlerons plus tard de la taxe d’habitation – vous le voyez, je suis honnête et complet dans mon explication –, mais en ce qui concerne l’impôt sur le revenu, il n’y a pas de changement. C’est pourquoi nous souhaitons soutenir les familles, leur redonner un peu de pouvoir d’achat, en relevant de 1 527 euros à 1 750 euros par demi-part le quotient familial.
Le coût de cette mesure est certes de 550 millions d’euros, mais nous venons, à l’instant, de voter un amendement – je vous rappelle que j’avais demandé son retrait – qui apporte plus de 700 millions d’euros de recettes. Cet amendement est donc complètement gagé par le précédent vote.
Sourires sur les travées du groupe Les Républicains. – Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.
C’est la raison pour laquelle je pense que vous le soutiendrez avec beaucoup d’enthousiasme… Les classes moyennes et les familles vous en sauront gré !
Si M. Bocquet vote l’amendement de la commission, qui va au-delà du sien, il sera pleinement satisfait !
Surtout, je m’interroge, parce que l’amendement n° I-215 prévoit d’appliquer le même plafonnement par demi-part pour un contribuable célibataire ou divorcé ayant élevé seul un enfant à charge par le passé, mais n’ayant plus cet enfant à charge, et pour un contribuable veuf ayant effectivement un enfant à charge. Dans un cas, l’enfant est encore à charge, pas dans l’autre, alors que le plafonnement serait le même.
J’ai donc du mal à comprendre la logique de cette proposition, qui ne me semble pas équitable. Encore une fois, l’objectif poursuivi sera atteint si l’amendement de la commission est adopté.
Sur l’amendement présenté par le sénateur Éric Bocquet, qui propose une revalorisation sélective du quotient familial selon la situation des contribuables concernés, je dois dire que le présent projet de loi de finances permet une revalorisation identique au taux de l’inflation – plus 1 % – de tous les plafonds et de toutes les demi-parts, notamment celles pour les invalides, les anciens combattants et les veuves.
Il me paraît plus juste de procéder de la sorte, de façon générale. Avec la proposition du Gouvernement, le plafond du quotient augmente déjà de 15 euros…
… et celui des parents isolés, de 36 euros. Je le redis, cette proposition me semble plus juste. C’est pourquoi je demande le retrait de l’amendement n° I-215.
Concernant l’amendement présenté par le rapporteur général, le coût de la mesure s’élève à 550 millions d’euros. Certes, vous estimez que l’adoption, à l’instant, de l’amendement du sénateur Jean-Claude Requier vous donne les moyens de la financer, mais je rappelle que le plafonnement du quotient familial est nécessaire. Les économies dégagées ont permis de maintenir le niveau des prestations, notamment pour les allocations familiales.
Votre proposition remettrait en cause, en partie, l’équation financière de ce choix. Surtout, elle ne concernerait que les ménages les plus aisés. Or il me semble que nous partageons la conviction qu’il faut revaloriser les revenus, le pouvoir d’achat, des classes moyennes.
Plus de 80 % des ménages concernés par le plafonnement du quotient familial appartiennent au décile le plus élevé : on ne se situe pas dans les classes moyennes quand on s’adresse au décile le plus élevé ! Pour un couple marié avec deux enfants, le plafonnement s’applique uniquement à ceux dont le revenu déclaré est supérieur à 5 930 euros par mois pour l’imposition des revenus de l’année 2016.
Vous l’aurez compris, il y aura d’autres voies et moyens – nous aurons l’occasion d’en débattre – pour améliorer le pouvoir d’achat des classes moyennes. C’est la raison pour laquelle je demande également le retrait de cet amendement.
Vous l’avez bien compris, je suis défavorable à l’amendement présenté par Éric Bocquet.
Je rappelle tout de même que les décisions prises par le Gouvernement sur la prestation d’accueil du jeune enfant, la PAJE, et les allocations familiales sont malheureusement très défavorables pour les familles.
L’amendement n° I-96, qui vise à relever le plafond du quotient familial, a précisément pour objet de compenser ces décisions. Sous le précédent quinquennat, ce plafond a été abaissé à deux reprises. Pour ce qui nous concerne, nous voulons revenir à un peu plus de justice pour les familles, fussent-elles de la classe moyenne supérieure !
J’irai dans le sens du secrétaire d’État. L’amendement n° I-96 ne constitue pas une mesure générale pour les familles : celle-ci bénéficiera uniquement aux plus aisées d’entre elles. Les chiffres nous ont été donnés, ils parlent d’eux-mêmes !
Nous aurions pu être sensibles, dans un premier temps, au principe général de cet amendement, mais à bien y regarder, nous ne pouvons pas le voter, car il vise seulement à redonner du pouvoir d’achat aux familles qui, sans aller jusqu’à dire qu’elles n’en ont pas besoin – qui n’en a pas besoin ? –, sont parmi les plus aisées de notre pays.
Ensuite, d’après un rapport de la Cour des comptes bien documenté, il faut savoir que le quotient familial représente à peu près le tiers de la politique familiale.
Enfin, pour rebondir sur ce qu’ont dit M. le secrétaire d’État et M. Raynal à l’instant, je m’étonne que vous proposiez une mesure qui coûte 550 millions d’euros, alors que vous êtes habituellement très soucieux des dépenses publiques… Et gager ces 550 millions par les 700 millions qui découlent de l’amendement de M. Requier constitue un mouvement anti-redistributif. Cela veut dire que vous élargissez l’imposition à des gens qui, aujourd’hui, ne paient pas d’impôt sur le revenu, c’est-à-dire les moins favorisés, pour avantager les familles les plus aisées.
Nous ne pouvons évidemment que voter contre ce double mouvement.
Je viens de découvrir un adepte de la finance magique ! Monsieur Bargeton, vous nous expliquez que supprimer la taxe d’habitation va améliorer le pouvoir d’achat, mais vous oubliez tout simplement le fait qu’il va bien falloir trouver les 10 milliards nécessaires quelque part – et ce sera peut-être 20 milliards dans quelques années… Comme les dépenses ne seront pas supprimées, ce sont les contribuables de l’État qui paieront en lieu et place des contribuables locaux. Cela ne créera donc pas de pouvoir d’achat, ce sera simplement une répartition différente de la charge.
Sur le fond, pour répondre à M. le secrétaire d’État de manière plus sérieuse, la progressivité de l’impôt sur le revenu, telle qu’elle a été définie à plusieurs reprises par le Conseil constitutionnel, a en effet pour objet de redistribuer des richesses entre ceux qui gagnent bien leur vie et ceux qui gagnent moins. Il me semble que cette idée est assez largement partagée.
Quant à la politique familiale, elle vise, depuis sa généralisation en 1945 par le gouvernement de la Libération, à égaliser la situation, à l’intérieur de catégories qui ont des revenus identiques, entre ceux qui font le choix d’avoir des enfants et de contribuer ainsi à la vitalité de notre pays et ceux qui – heureusement, ils sont de moins en moins nombreux ; c’est d’ailleurs un état d’esprit qui s’efface –, choisissent de ne pas avoir d’enfant pour avoir une vie plus confortable.
Il s’agit donc non pas de redistribuer de l’argent entre ceux qui sont riches, ceux qui le sont moins et ceux qui ne le sont pas, …
… mais d’égaliser les conditions de vie entre les familles qui font le choix et ont la chance d’avoir des enfants et les autres, qui n’ont pas fait ce choix pour différentes raisons.
Nous revenons en permanence sur ce débat, car nous avons besoin d’une politique familiale qui favorise la naissance d’enfants. L’Allemagne, qui ne connaît pas une telle politique, en souffre cruellement. Le meilleur investissement de la IVe et de la Ve République – elles ont été constantes sur ce point – réside justement dans cette politique familiale qui, à l’intérieur des catégories sociales, égalise les chances entre ceux qui font le choix d’avoir des enfants et ceux qui, pour des raisons qui leur sont propres, n’en ont pas.
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement est adopté.
L’article 2 est adopté.
L’amendement n° I-135, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 5 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sont redevables d’une contribution de solidarité sur le revenu les fonctionnaires internationaux qui ne sont pas assujettis à l’impôt sur le revenu. Cette contribution est fixée à 10 % du revenu des personnes assujetties. »
II. – Le Gouvernement remet avant le 1er juin 2018 un rapport au Parlement établissant la liste complète et l’affectation exacte des fonctionnaires internationaux de nationalité française.
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Monsieur le secrétaire d’État, les temps changent… Aussi je présente de nouveau cet amendement devant notre assemblée.
La convention de 1961 portant sur les fonctionnaires internationaux a aujourd’hui plus de cinquante-six ans. Alors que nous venons de parler d’une répartition plus juste des richesses et d’une contribution de chacun au budget des nations, on pourrait tout de même imaginer que les fonctionnaires internationaux, qui – je le rappelle – ne payent absolument pas d’impôts, soient effectivement amenés à le faire un jour ou l’autre.
D’ailleurs, l’un des directeurs de l’OCDE, Pascal Saint-Amans, a récemment évoqué la position acrobatique qui est la sienne : en tant que fonctionnaire international, il ne paye pas d’impôt alors qu’il est chargé de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ! C’est la même chose pour les fonctionnaires du FMI ou pour ceux du Bureau international du travail, par exemple.
L’amendement que je présente vise à créer une imposition forfaitaire. Je sais pertinemment que cela est contraire aux traités internationaux tels qu’ils sont aujourd’hui rédigés, mais je crois que les temps changent et qu’il serait opportun de réfléchir, malgré tout, à une contribution des fonctionnaires internationaux au fonctionnement des États dans lesquels ils vivent.
Je connais l’histoire des fonctionnaires internationaux ; en m’épinglant, Gérard Longuet l’avait longuement rappelée la dernière fois que nous avons évoqué cette question. J’ai bien retenu la leçon : à l’origine, les gens n’étaient pas très enclins à travailler dans les organisations internationales et il fallait les attirer. Mais je crois que ce problème ne se pose plus du tout aujourd’hui en ces termes et que c’est même le contraire qui se produit : on est plus confronté à un trop-plein qu’à un vide.
J’ai parfaitement conscience des limites de mon amendement, mais, à une époque où tout évolue, il s’agit clairement d’un problème que le contribuable moyen ne peut pas comprendre, compte tenu du niveau des revenus des fonctionnaires internationaux. Je ne conteste évidemment pas la qualité de leur travail, qui est de très bon niveau.
Il est vrai aussi que ceux d’entre nous qui seraient battus aux élections feraient vraisemblablement la queue pour entrer dans l’une de ces organisations internationales, aux conditions qu’elles fixent.
Sourires.
Mes chers collègues, je vous demande instamment de respecter votre temps de parole, car beaucoup d’amendements ont été déposés sur la première partie du projet de loi de finances.
Quel est l’avis de la commission ?
Je salue la constance, mais aussi le réalisme de Nathalie Goulet quant au sort de cet amendement. Comme elle le dit elle-même, celui-ci est contraire aux articles 34 et 38 de la convention de Vienne.
Le débat est légitime. On peut en effet se demander pourquoi des fonctionnaires qui travaillent à l’OCDE à Paris ne payent pas d’impôts. Cette différence de traitement est parfois difficilement admise par nos concitoyens. Néanmoins, elle est conforme aux traités internationaux.
Le Gouvernement nous dira, dans quelques instants, s’il souhaite s’engager sur la voie d’une modification de la convention de Vienne, qui constitue une question sensible et complexe, car elle traite de beaucoup d’aspects relatifs au statut diplomatique, à l’exonération fiscale des résidences, à l’immunité diplomatique, etc. Mais je doute que nous puissions le faire de manière unilatérale.
Vous le voyez, cet amendement va bien au-delà des prérogatives de notre modeste assemblée. C'est pourquoi la commission des finances ne peut y être que défavorable – peut-être à son grand regret, mais je vous en ai expliqué les raisons.
Madame la sénatrice, vous l’aurez compris, pour les mêmes raisons que le rapporteur général et même si les temps changent – ce dont je conviens ! –, il est difficile à ce stade de modifier les traités de manière unilatérale.
Le débat peut évidemment être ouvert, mais il dépasse largement le cadre de l’Hexagone, a fortiori celui de cette auguste assemblée. Il doit avoir lieu au sein des organisations et institutions internationales concernées, mais j’ai bien peur que les différents traités, dont celui de Vienne, ne résistent à vos assauts répétés et constants, madame la sénatrice…
Je demande donc le retrait de cet amendement.
L’amendement n° I-135 est retiré.
L’amendement n° I-602, présenté par M. Gremillet et Mme Deromedi, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 154 bis A du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les indemnités temporaires, à hauteur de 50 % de leur montant, ainsi que les prestations et rentes viagères, servies aux victimes d’accidents du travail ou à leurs ayants droit, en application des articles L. 752-5 et L. 752-6 du code rural et de la pêche maritime, ne sont pas prises en compte pour la détermination du revenu imposable de leur bénéficiaire. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Jacky Deromedi.
Cet amendement vise à corriger le régime d’imposition applicable aux indemnités journalières et aux rentes d’incapacité versées aux exploitants agricoles victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle et à défiscaliser les indemnités journalières ATEXA, l’assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles des non-salariés agricoles, à hauteur de 50 % de leur montant, ainsi que les rentes ATEXA versées aux victimes, comme cela est le cas pour les salariés.
En effet, conformément au 8° de l’article 81 du code général des impôts, les indemnités journalières, à hauteur de 50 % de leur montant, ainsi que les rentes viagères servies aux victimes d’accident du travail ou à leurs ayants droit, sont exonérées de l’impôt sur le revenu.
En revanche, les indemnités journalières et les rentes d’incapacité permanente servies par le régime d’accident du travail des exploitants agricoles sont passibles de cet impôt.
Il apparaît que cette imposition, même compensée, entraîne de vraies difficultés pour les exploitants agricoles, qui, outre les problèmes de gestion de leur exploitation liés à leur arrêt d’activité consécutif à l’accident de travail ou à la maladie professionnelle, connaissent une diminution considérable du niveau de leur rente d’incapacité.
Aussi, cet amendement tend à rétablir le principe d’égalité devant l’impôt.
Mme Deromedi entend remédier à une différence de traitement entre les salariés et les non-salariés. Je peux évidemment l’entendre, car, c’est vrai, il y a une différence, puisque, dans un cas, les indemnités pour accident du travail seraient exonérées de l’impôt sur le revenu, tandis que, dans l’autre cas, ils ne le seraient pas. De ce fait, elle souhaite exonérer de l’impôt sur le revenu les indemnisations au profit des exploitants agricoles.
Si nous adoptions cet amendement, nous créerions une seconde inégalité, non pas entre les salariés et les non-salariés agricoles, mais entre les travailleurs indépendants en général et les travailleurs indépendants agricoles que sont les exploitants agricoles. Cette différence poserait une vraie difficulté. Il faut que non seulement tous les salariés soient traités sur le même plan, mais également tous les travailleurs indépendants, qu’ils relèvent ou non du statut agricole.
C’est la raison pour laquelle nous ne pouvons pas introduire une différence de régime fiscal entre les indemnités versées aux travailleurs indépendants en général et celles qui sont versées aux travailleurs agricoles indépendants que sont les exploitants.
Aussi, j’invite notre collègue à retirer son amendement.
Madame la sénatrice, vous le savez, le Gouvernement est évidemment sensible aux risques auxquels les agriculteurs sont exposés dans le cadre de l’exercice de leur travail. Néanmoins, pour les raisons qu’a évoquées M. le rapporteur général, je vous demanderai, de manière bienveillante, de bien vouloir retirer votre amendement.
Bruno Le Maire s’est engagé à ouvrir, dès le début de l’année prochaine, une réflexion globale portant à la fois sur la question de la fiscalité agricole et sur celle des prestations sociales agricoles. À cette refonte globale seront associés les organisations représentatives, la Mutualité sociale agricole, ainsi que les élus, parlementaires et élus des territoires ruraux. Il s’agira d’aborder tant l’aspect fiscal que le traitement social de la question agricole.
Ce domaine a trop fait l’objet de sédimentation, avec des niches qui se sont additionnées les unes aux autres, ce qui ne donne pas beaucoup de lisibilité. Au contraire, la complexité du sujet demande du temps aux exploitants. Or ceux-ci ont déjà suffisamment de temps à passer sur leur exploitation sans, en plus, devoir essayer de s’y retrouver dans le labyrinthe de l’environnement fiscalo-social.
C’est pourquoi je vous invite, avec bienveillance, je le répète, à retirer cet amendement, pour le verser par la suite au débat général qui va s’ouvrir, dès le printemps prochain, sur ce sujet.
L’amendement n° I-602 est retiré.
L’amendement n° I-217, présenté par MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 199 quindecies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la première phrase, les mots : « d’une réduction d’impôt égale » sont remplacés par les mots : « d’un crédit d’impôt égal » ;
2° À la seconde phrase, les mots : « à la réduction » sont remplacés par les mots : « au crédit ».
II. – Le I du présent article n’est applicable qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
Nous souhaitons passer d’une réduction d’impôt à un crédit d’impôt pour les dépenses d’hébergement en établissement de long séjour.
En l’état actuel des choses, il existe deux dispositifs bien connus : la réduction d’impôt accordée au titre des emplois dits familiaux et la réduction d’impôt liée aux dépenses d’hébergement en établissement de long séjour.
Le premier de ces dispositifs intéresse plus de 3, 8 millions de ménages, ce qui n’est pas du tout négligeable, et devrait coûter 4, 74 milliards d’euros en 2018, faisant de cette dépense fiscale l’une des plus importantes du budget.
Nous devrions donc passer d’une réduction d’environ 636 euros par ménage et par an à un crédit d’impôt environ deux fois plus important.
Le second représente une dépense fiscale de 288 millions d’euros, au bénéfice d’un peu plus de 460 000 ménages, soit une réduction d’impôt moyenne de 620 euros par ménage et par an.
Par conséquent, nous avons, d’un côté, un dispositif plutôt encore sous-dimensionné au regard des besoins, avec une dépense annuelle moyenne de 3 000 euros environ pour un plafond de 10 000 euros, et, de l’autre, un dispositif, à l’inverse, plutôt surdimensionné, avec moins de 1 500 euros de dépenses retenues pour un plafond minimal de 12 000 euros.
Les dépenses d’hébergement en établissement de long séjour s’élèvent à près de 8 milliards d’euros pour environ 400 000 ménages, soit une dépense moyenne de près de 16 700 euros par ménage, bien supérieure, donc, au plafond de 10 000 euros.
Un certain nombre de familles modestes, confrontées au problème de l’accompagnement du vieillissement de leurs aînés, se trouvent aujourd’hui contraintes de recourir au placement de leurs parents sans pouvoir réellement bénéficier d’une prise en compte, même limitée, de leur situation.
Nous proposons donc de procéder à la transformation en crédit d’impôt de la réduction d’impôt relative aux dépenses d’hébergement en établissement de long séjour, eu égard au caractère très imparfait encore de la solidarité nationale en la matière. Nous sommes en l’occurrence confrontés à un double problème que tout le monde connaît ici : allongement de la durée de vie – et c’est tant mieux ! – et, en même temps, des difficultés pour les aidants et les accompagnants de nos aînés.
La question du coût de la dépendance ne se limite pas au débat fiscal. On pourrait parler aussi de l’APA, l’allocation personnalisée d’autonomie. On aborde très souvent ce sujet très compliqué, dont les coûts vont en effet augmenter avec l’allongement de la durée de la vie. Il mérite donc d’être posé.
En transformant la réduction d’impôt en crédit d’impôt, nous doublerions le coût du dispositif, qui serait à peu près de 300 millions d’euros, d’après les estimations de la commission. Malheureusement – à notre grand regret ! –, nous ne pouvons pas nous permettre de dégrader le solde de la sorte.
C’est donc uniquement, j’y insiste, pour des raisons de coût de cette mesure que la commission a émis un avis défavorable.
Je partage l’idée que l’outil fiscal n’est sans doute pas le plus adapté pour tenir compte de la réalité des charges liées à la dépendance et pour proportionner au mieux l’aide aux besoins des personnes et des familles.
A été également évoquée par le rapporteur général la question du coût de la mesure, à savoir la transformation de cette réduction d’impôt en crédit d’impôt. Compte tenu de la trajectoire de nos finances publiques et des engagements pris par le Gouvernement de s’inscrire dans le respect du critère de 3 % de déficit public dès la fin de cette année et pour l’année 2018, vous comprendrez que je demande le retrait de votre amendement.
Monsieur le rapporteur général, monsieur le secrétaire d’État, vous avancez l’argument, certes avec souplesse, d’un surcoût de 300 millions d’euros pour une dépense globale de 4, 74 milliards d’euros ! Mais nous parlons de nos aînés et de leurs accompagnants. Je veux bien entendre l’argument purement comptable, mais je pense que vous auriez dû prendre en compte cet amendement, que je maintiens.
Cet amendement aborde un vrai sujet, comme M. le rapporteur général et M. le secrétaire d’État l’ont indiqué. Or, à mon sens, la réponse purement financière qui est faite sur ce sujet-là me paraît un peu juste, je dois le dire, surtout dans le cadre d’un PLF où, par ailleurs, on abandonne entre 5 milliards à 6 milliards d’euros de recettes fiscales. En l’espèce, on parle, pour rester prudent, de 300 millions d’euros.
De manière générale, il me semble que la question des réductions d’impôt pose en soi un problème. En effet, celles-ci ne touchent, par nature, que ceux qui paient des impôts. Elles ne concernent donc pas forcément ceux qui ont des revenus limités. Cela ne veut pas forcément dire qu’il faut tout rebasculer sous la forme de crédits d’impôt ; il faut regarder au cas par cas. S’agissant de la question posée, qui sous-tend une difficulté sociale, que nous connaissons tous, je pense que la navette pourrait faire son œuvre. Nous pourrions adopter ici l’amendement – c’est ce que j’aurais proposé ! –, pour que le Gouvernement réfléchisse sur le sujet avant la deuxième lecture afin de trouver une solution satisfaisante.
En tout cas, sincèrement, la réponse purement financière me paraît un peu courte.
Je ne cherche pas du tout à évacuer le débat. Comme je l’ai dit – M. le secrétaire d’État a aussi un peu esquissé cette idée –, et, eu égard au temps qui nous est compté, nous ne pouvons pas développer longuement notre argumentation : la réponse en matière de prise en charge de la dépense n’est pas que fiscale.
Voilà quelques jours, j’étais encore président d’un conseil départemental, et il y a ici des élus départementaux qui savent que les départements consacrent une part très importante de leur budget à la dépendance. On entend suffisamment parler de l’APA et du reste à charge.
Il y a également l’intervention du budget de la sécurité sociale, les services d’aide à la personne. Un tel amendement mériterait pour le moins que l’on étudie la question du reste à charge par personne, une fois toutes les aides prises en considération.
Il y a notamment l’APA, qui prend en compte non pas les patrimoines, mais les revenus. Concrètement, une personne à faibles revenus a une allocation plus élevée – c’est normal – qu’une personne ayant des revenus élevés. Je le répète, la réponse au problème de la prise en charge de la dépendance ne peut pas être exclusivement fiscale et se traiter uniquement au travers d’un crédit d’impôt. J’attire aussi votre attention sur le fait qu’avec l’amendement suivant on va être amené à parler d’un autre crédit d’impôt, voté sous le précédent gouvernement.
La réponse au problème de la prise en charge de la dépendance doit être aussi regardée sous le prisme des prestations assurées par la CAF ou le département. Il faut également, à tout le moins, prendre en compte le niveau de revenus, le reste à charge et le degré de dépendance.
Encore une fois, sur un sujet aussi vaste, avec une prise en charge multiforme, la réponse ne peut pas être que fiscale.
L’amendement étant maintenu, le Gouvernement est-il défavorable à l’amendement ?
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° I-381, présenté par MM. Capus, Malhuret, Bignon, A. Marc, Chasseing, Wattebled, Decool, Guerriau, Fouché et Lagourgue et Mme Mélot, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 3 de l’article 199 sexdecies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la fin du premier alinéa, le montant : « 12 000 € » est remplacé par le montant : « 15 000 € » ;
2° Au deuxième alinéa, le montant : « 12 000 € » est remplacé par le montant : « 15 000 € » et le montant : « 15 000 € » est remplacé par le montant : « 18 000 € » ;
3° Au troisième alinéa, le montant : « 20 000 € » est remplacé par le montant : « 23 000 € » ;
4° Le quatrième alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, le montant : « 12 000 € » est remplacé par le montant : « 15 000 € » ;
b) À l’avant-dernière phrase, le montant : « 12 000 € » est remplacé par le montant : « 15 000 € » et le montant : « 15 000 € » est remplacé par le montant : « 18 000 € » ;
c) À la dernière phrase, le montant : « 15 000 € » est remplacé par le montant : « 18 000 € » et le montant : « 18 000 € » est remplacé par le montant : « 21 000 € ».
II. – Le I n’est applicable qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Emmanuel Capus.
J’ai noté l’intérêt de certains pour le crédit d’impôt. Justement, cet amendement vise à élargir le crédit d’impôt « services à la personne », en le portant à 15 000 euros et en le plafonnant à 21 000 euros, contre, respectivement, 12 000 euros et 20 000 euros actuellement.
Cette mesure s’inscrit dans le prolongement de la généralisation de ce crédit d’impôt, étendu en janvier 2017 à tous les contribuables. Cet amendement, s’il est voté, permettra de baisser la fraction des dépenses à la charge de 1, 3 million de ménages aux revenus modestes. C’est une mesure en faveur de l’accompagnement des seniors, puisque plus de la moitié des bénéficiaires sont âgés de plus de quatre-vingts ans. Je ne doute pas qu’elle recueille un avis intéressant de certains de mes collègues…
Cet amendement est certes très sympathique, mais on ne sait pas exactement quel est le coût de cette mesure.
Par ailleurs, cette dépense fiscale augmentera de 1 milliard d’euros en 2018, puisque je vous rappelle que l’on est passé d’une réduction d’impôt à un crédit d’impôt dans le projet de loi de finances pour 2018. Avec cet élargissement, le coût total sera de 4, 7 milliards d’euros. C’est une dépense fiscale intéressante certes, mais élevée.
Comme je l’ai dit précédemment au sujet de l’amendement de Philippe Dominati, cette proposition contribue sans doute à créer des emplois déclarés. En effet, si cette dépense fiscale n’existait pas, l’emploi existerait toujours, mais il ne serait pas déclaré : il s’agirait de travail « au noir ».
Je suis conscient de son intérêt, mais un tel élargissement entraînerait une augmentation du coût. Pour les mêmes raisons que celles qui ont été évoquées précédemment, la commission ne peut pas être favorable à l’élargissement de la dépense fiscale, qui, je le répète, augmentera déjà de 1 milliard d’euros en 2018.
Nous avons déjà acté un surcoût pour les finances publiques d’environ 1 milliard d’euros l’année prochaine pour ce qui concerne les services à la personne, mesure qui représente un effort budgétaire très important, notamment pour les retraités et les couples mono-actifs, comme on les désigne dans notre catégorisation.
Par ailleurs, une augmentation du plafond de dépenses profiterait surtout aux personnes qui disposent de revenus élevés et qui peuvent augmenter encore leurs dépenses dans leur quotidien. Elle n’aurait donc pas en réalité un effet très incitatif sur le développement du secteur des services à la personne et sur le recours de ces services par nos concitoyens qui en ont le plus besoin.
Même si cet amendement a, au départ, du sens, le coût de la mesure est élevé et l’effet incitatif est moindre que celui qui est espéré. Aussi, l’avis du Gouvernement est défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L'amendement n° I-428 est présenté par M. Delahaye.
L'amendement n° I-464 est présenté par M. Dallier, Mmes Delmont-Koropoulis, Di Folco et Deromedi, MM. B. Fournier, Chaize, Brisson, Cambon, de Nicolaÿ et del Picchia, Mmes Imbert et Morhet-Richaud et MM. Paul et Lefèvre.
L'amendement n° I-469 est présenté par M. Patriat et les membres du groupe La République En Marche.
L'amendement n° I-592 est présenté par MM. Lalande, Carcenac, Jeansannetas, Raynal et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le VIII de la première sous-section de la section II du chapitre premier du titre premier de la première partie du livre premier du code général des impôts est complété par un 8 ainsi rédigé :
« 8 : Régime applicable aux revenus perçus par l’intermédiaire de plateformes en ligne
« Art. 155 C. – I. – Sont soumis au régime défini au présent article les redevables de l’impôt sur le revenu qui exercent, par l’intermédiaire d’un ou de plusieurs opérateurs de plateforme en ligne au sens du 2° du I de l’article L. 111-7 du code de la consommation, une activité dont les revenus relèvent de la catégorie des revenus fonciers, des bénéfices industriels et commerciaux ou des bénéfices des professions non commerciales.
« II. – 1. Pour les redevables qui relèvent de l’article 32, de l’article 50-0 ou de l’article 102 ter du présent code, le montant cumulé de la réfaction et des abattements mentionnés au 1 des mêmes articles 32, 50-0 ou 102 ter et appliqués au montant brut des recettes annuelles provenant des activités mentionnées au I du présent article ne peut pas être inférieur à 3 000 €.
« 2. Pour les redevables qui ne relèvent pas des dispositions desdits articles 32, 50-0 ou 102 ter, le montant brut des recettes annuelles provenant des activités mentionnées au I du présent article pris en compte pour la détermination du revenu imposable est diminué d’un abattement forfaitaire de 3 000 €, et seule la fraction des frais et charges supérieure à 3 000 € peut être déduite.
« III. – Le présent article est applicable aux seuls revenus qui font l’objet d’une déclaration automatique sécurisée au sens de l’article 1649 quater A bis. »
II. – Ne sont pas affiliées au régime d’assurance maladie et d’assurance maternité des travailleurs indépendants non agricoles, sauf option contraire de leur part, les personnes dont les recettes annuelles brutes provenant de l’exercice d’une ou de plusieurs activités par l’intermédiaire d’un ou de plusieurs opérateurs de plateforme en ligne au sens du 2° du I de l’article L. 111-7 du code de la consommation n’excèdent pas 3 000 €.
Dans le cas où ces personnes sont par ailleurs affiliées au régime d’assurance maladie et d’assurance maternité des travailleurs indépendants des professions non agricoles en application du code de la sécurité sociale, les revenus qu’elles tirent de l’exercice d’une activité ou de plusieurs activités par l’intermédiaire d’un ou de plusieurs opérateurs de plateforme en ligne sont présumés constituer des revenus à caractère professionnel seulement s’ils proviennent d’activités de même nature que leur autre ou que leurs autres activités professionnelles, ou qui s’y rattachent directement, ou qui sont exercées avec les mêmes moyens que celles-ci.
III. – La perte de recettes éventuelle résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
IV. – La perte de recettes éventuelle résultant pour les collectivités territoriales des I et II est compensée, à due concurrence, par une augmentation de la dotation globale de fonctionnement.
V. – La perte de recettes éventuelle résultant pour l’État du IV est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
VI. – La perte de recettes éventuelle résultant pour les organismes de sécurité sociale des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° I-428 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Antoine Lefèvre, pour présenter l’amendement n° I-464.
Cet amendement vise à simplifier et à clarifier le régime fiscal et social applicable aux utilisateurs de plateformes en ligne en prévoyant un seuil unique de 3 000 euros, ce qui permet d’exonérer les petits compléments de revenus occasionnels et de tracer la frontière entre les particuliers et les professionnels.
Il reprend une proposition du groupe de travail de la commission des finances du Sénat sur la fiscalité du numérique, qui figure notamment dans son rapport du 29 mars 2017 intitulé « La fiscalité de l’économie collaborative : un besoin de simplicité, d’unité et d’équité » et dans la proposition de loi du même jour. Ce dispositif a déjà été adopté plusieurs fois par le Sénat à une très large majorité, et a été porté par des députés issus de plusieurs sensibilités politiques à l’Assemblée nationale dans le cadre du PLF pour 2018.
Si l’économie collaborative crée chaque jour de nouvelles opportunités d’échanges et de services pour des millions de personnes en France, son développement se heurte à l’inadaptation de nos règles fiscales et sociales. Celles-ci prévoient, en matière d’impôt sur le revenu, une imposition au premier euro, sans exception, si ce n’est pour les ventes d’occasion et pour le « partage de frais », au champ très restrictif.
S’agissant de l’affiliation à la sécurité sociale et du paiement des cotisations sociales, tout repose sur la distinction entre les particuliers et les professionnels, laquelle n’est, à ce jour, définie par aucun critère simple et objectif.
Dans le monde « physique », ces règles étaient en fait largement ignorées pour les petits échanges entre les particuliers, dans le cadre de vide-greniers ou d’autres services occasionnels entre voisins. Mais dans le monde « numérique », où les échanges de pair à pair sont devenus un phénomène massif, et bien souvent traçable et standardisé, ces règles ne sont plus tenables. Si elles étaient appliquées à la lettre, des millions de particuliers de bonne foi seraient pénalisés : mais, comme elles ne le sont pas, de nombreux « faux particuliers » échappent à leurs obligations fiscales et sociales, créant ainsi une distorsion de concurrence avec les autres professionnels.
Il est d’autant plus urgent d’agir que la déclaration automatique des revenus des utilisateurs par les plateformes en ligne sera obligatoire à partir du 1er janvier 2019.
Cet amendement prévoit donc d’instituer un régime fiscal et social simple, unifié et équitable pour l’économie collaborative, fondé sur un seuil unique de 3 000 euros.
En matière fiscale, les personnes gagnant moins de 3 000 euros par an via des plateformes en ligne, soit 250 euros par mois ou 60 euros par semaine, seraient exonérées d’impôt sur ces revenus. Au-delà, l’avantage fiscal serait dégressif et s’annulerait progressivement. Par conséquent, les personnes ayant une activité significative sur Internet seraient imposées sur l’ensemble de leurs revenus, sans aucune distorsion de concurrence.
En matière sociale, le seuil de 3 000 euros donnerait, pour la première fois, un critère simple et lisible permettant de distinguer un particulier d’un professionnel. Concrètement, l’affiliation à la sécurité sociale en tant que travailleur indépendant ne serait jamais obligatoire en deçà de ce seuil plancher, mais elle demeurerait toujours possible pour ceux qui se considèrent comme des professionnels et souhaitent bénéficier d’une couverture sociale à ce titre. L’avantage fiscal serait accordé aux seuls revenus faisant l’objet d’une déclaration automatique des revenus par la plateforme en ligne. Ainsi serait créé un cercle vertueux, permettant d’assurer la juste imposition des activités économiques significatives.
Par conséquent, bien que le dispositif proposé soit une réduction d’impôt, qui devrait concerner la grande majorité des utilisateurs de plateformes collaboratives…
Je suis désolé, mon cher collègue, mais votre temps de parole est dépassé !
La parole est à M. Julien Bargeton, pour présenter l’amendement n° I-469.
Oui, effectivement !
Nous avons tous la préoccupation d’équilibrer ce qu’apporte l’économie collaborative avec une régulation, notamment sur certains sujets. C’est le cas des plateformes de location, sujet extrêmement important.
Un rapport très remarqué du Sénat cette année avait évoqué plusieurs pistes, et cet amendement vise à reprendre l’une d’entre elles. Nous y tenons, compte tenu de ce que le développement de ces plateformes peut entraîner dans nos villes, de manière générale, même si les grandes villes, notamment Paris, mais également des villes du Sud et tous les grands centres urbains sont les plus touchés.
La parole est à M. Bernard Lalande, pour présenter l’amendement n° I-592.
L’amendement que nous proposons est une mesure de clarification et de simplification au bénéfice de tous, réclamée par tous.
Il a été excellemment défendu par notre collègue Antoine Lefèvre, qui a bien rappelé qu’il s’inspirait d’un rapport que nous avions commis sur la fiscalité de l’économie collaborative, et qui pointait un besoin de simplicité, d’unité et d’équité.
Le Gouvernement s’est dit opposé à cette mesure, au motif qu’elle serait contraire au principe d’égalité devant l’impôt, car elle serait réservée aux utilisateurs des plateformes.
C’est une analyse qui nous paraît, pour notre part, contestable, et cette discussion est l’occasion de vous demander des réponses à plusieurs questions précises, monsieur le secrétaire d’État.
Je rappelle quand même que le seuil de 3 000 euros représente un complément de revenu de 250 euros par mois. À titre indicatif, pour ceux qui l’auraient oublié, le SMIC net hors CRDS et CSG s’élève à 1 149 euros. Je donne ces chiffres pour bien faire apparaître ce que peut être un revenu de substitution. Cette somme est quand même significative pour des revenus plutôt faibles.
Nous demandons une exonération totale en deçà de 3 000 euros, car, a contrario, si vous n’êtes pas exonéré, vous devez vous inscrire dans un système déclaratif. Or pour des personnes qui éprouvent déjà parfois des difficultés à comprendre des imprimés ou des normes administratives, c’est compliqué.
Je formulerai un certain nombre de remarques à M. le secrétaire d’État.
Tout d’abord, l’avantage proposé est lié non pas à la nature des revenus parce que ceux-ci sont tous traités sur le même plan, mais aux modalités de déclaration. C’est exactement le même principe qui a prévalu pour l’avantage accordé aux adhérents à un organisme de gestion agréé, c’est-à-dire un avantage fiscal lié à une fiabilisation des déclarations.
Ensuite, le principe d’égalité s’apprécie toujours au regard d’autres principes constitutionnels, notamment le principe d’intelligibilité de la loi et le principe de la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales. D’ailleurs, le code général des impôts regorge de régimes dérogatoires.
En outre, le volet social de l’amendement, c’est-à-dire le seuil de distinction entre les particuliers et les professionnels, permet simplement de procéder à une clarification. En quoi serait-il contraire au principe d’égalité ?
Enfin, le Royaume-Uni et la Belgique ont instauré des régimes similaires sans y voir le moindre problème constitutionnel.
Plus fondamentalement, pour conclure, je veux dire que, en conservant le droit en vigueur sans rien faire, on préserve une égalité formelle, mais on aggrave des distorsions réelles.
Monsieur le secrétaire d’État, c’est un chantier de grande ampleur, que nous n’avons pas souhaité préempter, mais nous sommes disposés à travailler avec le Gouvernement sur ce sujet.
Vous vous en doutez, la commission est évidemment très favorable à ces trois amendements identiques, qui émanent de différents groupes politiques. Ils sont tout simplement issus d’un travail en commun que nous avons mené depuis un certain temps, un travail extrêmement approfondi qui a conduit le Sénat, peut-être avant tout le monde, à s’intéresser à la question de l’économie collaborative et aux évolutions de consommation que nous connaissions avec le développement d’Internet.
Ce travail a débouché sur un premier amendement, qui, sur l’insistance du Sénat, a permis l’inscription d’une disposition dans la loi. Je veux parler de l’obligation de déclaration automatique par les plateformes. Cela a constitué une première avancée, mais il faut maintenant envisager le pendant de cette mesure : traiter les revenus une fois qu’ils sont déclarés par les plateformes. Là est la vraie question. Leur applique-t-on la fiscalité dès le premier euro ? Met-on en place un système de franchise ? Quel régime fiscal appliquer ?
Les amendements qui nous sont proposés sont bienvenus en ce qu’ils visent à la simplification et à la clarification.
Vous le savez, ces amendements ont déjà été défendus sur différents bancs de l’Assemblée nationale, mais le Gouvernement s’y est opposé, invoquant notamment le principe d’égalité devant l’impôt. Monsieur le secrétaire d’État, vous n’êtes pas sans savoir qu’il y a d’autres principes constitutionnels. Le Conseil constitutionnel juge toujours par rapport à des objectifs, parmi lesquels figure le principe d’intelligibilité de la loi.
Aujourd’hui, avouez-le, avoir des seuils différents en matière fiscale et en matière sociale ou selon le type d’activité n’est absolument pas intelligible. À lire le guide édité par l’administration, reconnaissez qu’il faut être un peu spécialiste pour savoir si vous entrez dans la catégorie du loueur de voitures occasionnel, du loueur d’appartements occasionnel, etc. Tout cela est très compliqué aujourd’hui. Par ces amendements identiques, nous visons tout simplement à simplifier le régime par une franchise unique.
Autre objectif de valeur constitutionnelle : la lutte contre la fraude fiscale. Aujourd’hui, ces revenus ne sont pas déclarés. J’ai bien entendu notre collègue Julien Bargeton, mais ne se pose pas simplement la question des loueurs d’appartements à Paris, avec Airbnb. C’est toute l’économie collaborative qui se développe, dans tous les secteurs d’activité.
L’objet de ces amendements identiques est de faire le distinguo entre l’activité occasionnelle, qui correspond en quelque sorte à un remboursement des frais, et l’activité qui devient régulière et s’assimile alors à une quasi-activité professionnelle.
En dessous de 3 000 euros, il s’agit pratiquement du remboursement des frais ; au-delà de 3 000 euros, l’activité devient un peu plus récurrente et fournit un véritable complément de revenus. C’est la raison pour laquelle nous proposons de la fiscaliser.
J’en reviens au principe d’égalité : d’autres pays, comme la Belgique et le Royaume-Uni, ont mis en place cette mesure. Par ailleurs, l’exemple des organismes de gestion agréés a été cité à l’instant.
Enfin – et j’en termine, monsieur le président –, si vous arguez, monsieur le secrétaire d'État, que les dispositions prévues sont contraires au principe d’égalité, je déposerai demain – même peut-être ce soir ! – une QPC pour interroger le Conseil constitutionnel sur l’abattement de 20 % pour les organismes de gestion agréés. On verra quelle sera sa décision ! Aussi, vous ne pouvez qu’être favorable.
Sourires.
M. Benjamin Griveaux, secrétaire d'État. Damoclès est donc parmi nous…
Nouveaux sourires.
Je veux d’abord saluer le travail réalisé par le Sénat. Le rapport sénatorial sur cette question, qui date du mois de mars, est excellent.
Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe Les Républicains.
Sourires.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Cela commence mal !
Rires.
Nous partageons une même position sur les questions de lisibilité, de simplicité et – oserai-je le mot ? – d’égalité.
On est, me semble-t-il, d'accord pour dire que la fiscalité actuelle ne permet pas toujours de distinguer très clairement les activités qui sont nées avec l’émergence, la croissance, la diffusion des économies dites de plateforme.
Sur des sites comme Abritel, Drivy, Airbnb – je suis un député parisien d’un arrondissement qui connaît une inflation importante du nombre de locations sur ce site, avec des gens qui en font commerce de manière totalement avérée, quand d’autres s’en servent comme complément de revenus –, on constate, il est vrai, que des particuliers, mais aussi des professionnels ou des semi-professionnels, en bénéficient. La frontière est parfois pour le moins ténue ou, en tout cas, n’est pas prise en compte. Sur tous ces points, je suis d’accord avec vous.
En revanche, la proposition que vous faites appelle une révolution fiscale importante sur l’économie numérique et l’économie de plateforme, et elle mérite une étude, notamment sur les questions du coût, de l’ampleur des effets d’aubaine et des effets d’entrée dans le système.
Avec les cabinets de Bruno Le Maire et Gérald Darmanin, nous avons un dialogue nourri avec les opérateurs et les acteurs de cette économie de plateforme, que nous recevons régulièrement, notamment les acteurs liés à l’activité de location meublée et, particulièrement en ce moment, les acteurs présents sur le marché du covoiturage, comme Drivy et d’autres.
Pour ces raisons, liées à la fois au coût de la mesure et aux effets non identifiés, très spécifiquement des effets d’aubaine qui peuvent découler de cette proposition, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces trois amendements identiques.
En effet, le dispositif proposé crée des différences de traitement qui ne nous paraissent pas toujours justifiées et soulèvent quelques interrogations du point de vue du droit. Il octroie un avantage fiscal au seul motif qu’un revenu est déclaré via une plateforme en ligne.
De plus, le seuil d’exonération de 3 000 euros va bien au-delà de ce que l’on peut parfois qualifier de revenus complémentaires, occasionnels ou accessoires : 3 000 euros, la somme est importante. Ramenée au mois, cela fait, on l’a dit, 250 euros. Ce n’est pas une paille ! Cela représente un peu plus de 15 % du revenu médian. Le dispositif était basé sur un postulat erroné, consistant à considérer qu’en deçà de cette somme les charges engagées excèdent les revenus bruts réalisés.
Pour l’ensemble de ces raisons, parce que ces amendements identiques posent, outre une problématique de distinction, des problèmes de droit et de coût, la position du Gouvernement est plutôt défavorable. Toutefois, nous sommes ouverts au dialogue et avons, je le redis, des échanges nourris avec l’ensemble des opérateurs. Nous le savons, nombreux sont nos concitoyens qui participent à ces plateformes. Il ne faut évidemment pas que des professionnels du commerce interviennent dans la location meublée. Cela serait de nature à détourner l’esprit même de cette économie collaborative, qui n’est pas, à ce stade, totalement présente.
Je voterai ces trois amendements identiques. Nous travaillons depuis fort longtemps sur ce sujet. Ce n’est pas la première fois que, lors de la discussion du projet de loi de finances, les auteurs de tels amendements s’entendent objecter que le dispositif proposé n’est pas tout à fait cadré, qu’il n’arrive pas au bon moment, qu’il n’est pas déposé sur le bon texte, que ce n’est ni le bon jour ni la bonne heure ! En même temps, c’est le bon sujet !
Le Sénat y a travaillé, les amendements ont été déposés par des collègues siégeant sur différentes travées. Je pense qu’il faut lancer un signal, en vue de travailler sur une base plus sûre, celle du vote sénatorial. Ce sont de bons amendements, qu’il faut voter !
Mme Sophie Primas applaudit.
Bien sûr, je veux soutenir les amendements identiques et rebondir sur les propos de Mme Goulet.
On nous rétorque, en effet, à chaque fois, que la proposition n’est pas la bonne, sans jamais nous en proposer d’autres ! On va rediscuter avec les plateformes…
J’observe qu’on a moins de scrupules ailleurs en Europe. Nos partenaires ont l’air d’en avoir discuté – j’imagine qu’ils l’ont fait de la même manière – et ils ont trouvé des solutions. On cite en permanence les exemples européens. Dès lors que la mesure semble efficiente dans certains pays européens, pourquoi ne pas les suivre ? Je ne comprends pas qu’on ne fasse pas au moins cela.
J’en arrive à l’argument constitutionnel, qui est maintenant devenu la tarte à la crème.
Je note que vous ne l’avez pas invoqué, et c’est tant mieux ! J’en déduis donc que, pour vous, cet amendement n’est pas anticonstitutionnel. J’y reviendrai avec les GAFA – Google, Apple, Facebook, Amazon – parce qu’on se sert parfois de ce genre d’argument pour dissimuler l’absence de volonté. En tout cas, d’autres le font !
Voilà plusieurs années que le Sénat vote de telles dispositions, sinon toutes travées confondues, en tout cas, très largement. Les gouvernements et l’administration ne sont pas capables de nous faire une contre-proposition. Tenons-nous-en à celle-là !
Croyez-moi, si nous adoptons ces amendements identiques, peut-être contribuerons-nous à accélérer des décisions qui pourraient être encore plus consensuelles entre l’Assemblée nationale et le Gouvernement !
Je voterai naturellement ces trois amendements identiques, qui ont une vertu, celle de la simplicité absolue du signal que l’on envoie à l’ensemble de nos concitoyens et du commerce susceptible d’être touché par ces transactions. Le commerce attend de notre part un signal de justice, pour effacer un peu la concurrence déloyale.
Parce que ces amendements lancent ce signal et qu’ils conjuguent simplicité et efficacité, je les trouve parfaits et je les voterai !
Bravo ! et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.
Je serai plus nuancé. Peut-être ces amendements ne sont-ils pas parfaits, …
Sourires.
… mais ils ont au moins le mérite de proposer une solution.
Pour ma part, je regrette que le ministre émette un avis défavorable sans, pour autant, nous proposer une alternative. En effet, pour le dire en toute franchise, je rejoins notre collègue Marie-Noëlle Lienemann, je ne me satisfais pas de la promesse d’engager des discussions avec les plateformes.
Si le Gouvernement avait rectifié les amendements en proposant de ramener le seuil de 3 000 euros à 2 000 euros, nous aurions pu en discuter, voire nous y rallier. Je remarque que le Sénat a été le premier à avoir mis en lumière ce sujet. Il a insisté et, à force d’insistance, il l’a fait entrer dans le droit positif. Souvenez-vous de l’obligation de déclaration automatique ! Si le Sénat n’en avait pas parlé, s’il n’avait pas insisté, réinsisté, revu les ministres, persisté lors de la discussion de chaque projet de loi et de chaque projet de loi de finances rectificative, si la Haute Assemblée n’avait pas adopté les amendements à l’unanimité, on n’en serait toujours pas à l’obligation déclarative !
Nous avons été aidés, c’est vrai, par les questions d’Airbnb et de la taxe de séjour – je reconnais de manière très honnête que tout le monde y a contribué. Il faut donc que ce sujet sorte.
On nous objecte une différence de traitement. Oui, elle existe. Mais revenons un instant sur les centres de gestion agréés.
Pourquoi y a-t-il une différence de 20 %, en gros, entre le travailleur indépendant qui adhère à un centre de gestion agréé et celui qui n’y adhère pas ? Cela est tout simplement justifié par le fait que le centre est censé procéder à un certain nombre de contrôles de nature à éviter la fraude. Ils sont donc, en quelque sorte, la contrepartie de la lutte contre la fraude.
Le Conseil constitutionnel, qui poursuit, parmi d’autres objectifs, vous le savez, le respect du principe d’égalité devant la loi et d’intelligibilité des lois, est aussi très attaché à ce motif d’intérêt général qu’est la lutte contre la fraude.
Concrètement, la franchise signifie la reconnaissance des frais qui ne doivent pas être fiscalisés et donne sans doute aussi un avantage à ceux qui, volontairement, décident de déclarer les impôts. Or, on le sait, la fraude est aujourd'hui absolument massive.
Ces amendements identiques sont donc vertueux, ils seront source de recettes fiscales et ils feront entrer une économie collaborative dans une forme de droit commun. Dans cette forme d’économie tout à fait louable, nous avons de très bons champions, que vous soutenez par ailleurs – on a cité des exemples qui méritent d’être soutenus. Mais l’économie collaborative, que nous souhaitons encourager, se développe, et ne doit pas détruire les recettes fiscales.
C’est pourquoi j’invite le Sénat à soutenir ces trois amendements identiques, dont la rédaction pourra, je l’espère, être améliorée dans le cadre de la navette. Si le Gouvernement nous propose un dispositif plus opérationnel, nous l’examinerons. Mais, en l’espèce, je suis très favorable à ces amendements identiques.
Je m’abstiendrai sur ces trois amendements identiques, non pas pour des raisons de fond, que je partage complètement, mais parce qu’ils me paraissent incomplets dans la mesure où ils ne s’imposent pas aux villes. Le seuil est fixé à 3 000 euros de revenus. Or la Ville de Paris, par exemple, exige que les propriétaires puissent acheter un autre bien s’ils mettent le leur en location – cela figure sur le site de la Ville de Paris.
Dès lors, je ne vois pas comment les propriétaires d’un appartement qu’ils habitent de temps en temps pourraient remettre un autre bien sur le marché. Ce sont les dispositions prises par la Ville de Paris, qui impose une obligation d’inscription à partir du 1er décembre. Je vous invite à regarder ce qui se passe.
Il faut compléter la loi pour faire en sorte qu’elle s’impose aussi aux villes, afin de les empêcher de faire uniquement ce qu’elles veulent.
Au 1° du 1 de l’article 80 duodecies du code général des impôts, le mot : « et » est remplacé par le signe : «, » et, après la référence : « L. 1235-13 », sont insérés les références : «, au 7° de l’article L. 1237-18-2 et au 5° de l’article L. 1237-19-1 ». –
Adopté.
Au c du 2° du I de l’article 81 A du code général des impôts, après le mot : « navires », sont insérés les mots : « armés au commerce et ». –
Adopté.
L'amendement n° I-410, présenté par MM. Yung, Mohamed Soilihi, Richard et Gattolin, est ainsi libellé :
Après l'article 2 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - La seconde phrase de l'article 164 A du code général des impôts est complétée par les mots : «, à l'exception de celles supportées par les personnes non résidentes de France dont les revenus de source française sont supérieurs ou égaux à 75 % de leur revenu mondial imposable, et qui ne perçoivent pas, dans leur État de résidence, de revenus suffisants pour y être soumis à une imposition permettant de prendre en considération leur situation personnelle et familiale ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Richard Yung.
En effet, ce n’est pas la première fois que je présente cet amendement.
Il s’agit du problème de la déductibilité des charges supportées par les non-résidents qui tirent de leurs revenus en France l’essentiel de leurs ressources.
Si vous résidez en France ou dans l’Union européenne, vous pouvez déduire de votre base imposable un certain nombre de charges, comme les pensions de réversion. Si vous avez le malheur de traverser le détroit de Gibraltar et de vous installer au Maroc ou en Tunisie, vous ne pouvez pas les défalquer.
Cette situation est tout à fait injuste pour les Français de l’étranger. En effet, la moitié d’entre eux peuvent déduire ces charges, alors que l’autre moitié ne le peut pas, puisque n’est pas alors appliquée la jurisprudence Schumacher, issue d’une décision de la Cour de justice de l’Union européenne. Dans un certain nombre de cas, il y a une double imposition : ces personnes doivent payer les charges en question dans le pays où elles résident sans pouvoir les déduire des revenus qu’ils tirent, pour l’essentiel, de la France.
C’est pourquoi je propose d’intégrer cette déductibilité – en 2014, François Marc, alors rapporteur général, avait apporté son soutien à cet amendement.
Comme vient de le dire notre collègue Richard Yung, il avait déjà défendu cet amendement par le passé et n’avait pas reçu beaucoup de soutien de la commission des finances.
Cette année, je serai un peu plus nuancé. Richard Yung a cité une nouvelle jurisprudence. On peut en effet s’interroger sur les conséquences de la décision du 16 mars 2017 de la cour administrative d’appel de Versailles, la jurisprudence dite « Schumacher ». Il faudrait savoir les conclusions qu’en tire le Gouvernement. La commission des finances n’a pas eu cette nuit le temps d’expertiser l’amendement. Je souhaite donc entendre l’avis du Gouvernement.
Monsieur le sénateur, votre proposition irait au-delà de la jurisprudence administrative récente qui ne concerne que la Suisse du fait des accords passés entre ce pays et l’Union européenne.
L’accord sur la libre circulation des personnes, conclu en 1999 entre la Suisse et l’Union européenne, prévoit de tenir compte de la jurisprudence de l’ancienne Cour de justice des communautés européennes, devenue la Cour de justice de l’Union européenne.
Telle est la raison pour laquelle le juge administratif a ouvert le bénéfice du régime que vous avez mentionné, le régime Schumacher, aux travailleurs qui résident en Suisse. Cela est différent du fait d’accorder le bénéfice de ce régime aux résidents du monde entier.
Sous le bénéfice de ces explications et de l’éclairage sur cette jurisprudence, je vous demanderai, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer votre amendement.
Au bénéfice des explications données par le Gouvernement, l’avis est défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
I. – Au a du 1 de l’article 200 du code général des impôts, après le mot : « salariés », sont insérés les mots : «, mandataires sociaux, sociétaires, adhérents et actionnaires ».
II. – La perte de recettes pour l’État résultant du I est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Je suis très partagé sur cet article. En ma qualité de corapporteur spécial de la mission « Culture », je suis, évidemment, intéressé au fait que les fondations puissent trouver des moyens afin de financer la culture, mais aussi, plus généralement, le domaine social.
En l’espèce, il s’agit d’étendre la défiscalisation des salariés d’une entreprise quand elle soutient la fondation de cette même entreprise.
Autant pour les salariés, cela peut se comprendre parce qu’on incite, dans un esprit d’entreprise, les salariés à participer à l’activité d’une fondation qui est celle de l’entreprise. Mais pour les actionnaires, les mandataires sociaux, le sujet est un peu différent, puisque l’objet d’une fondation n’est pas tout à fait éloigné de la politique de l’entreprise elle-même.
La question posée est celle d’un éventuel effet d’aubaine, d’une possible dynamique. En l’occurrence, l’évaluation s’élève à 50 millions d'euros. Ce genre de dépense fiscale sert à modifier les comportements. Si l’on fait le calcul, toutes choses égales par ailleurs, le mouvement ne va-t-il pas pousser des actionnaires à recourir à ce mécanisme, ce qui aurait pour conséquence de coûter plus cher ?
Je vois bien l’intérêt, pour certains secteurs, comme la culture ou les associations caritatives, à pouvoir bénéficier du travail des fondations. En même temps, autant le dispositif était justifié pour inciter les salariés, autant, pour les actionnaires qui ont un lien direct avec la politique de la fondation elle-même, cela me paraît un peu plus compliqué.
Telles sont les raisons pour lesquelles je serai favorable à l’amendement de suppression du Gouvernement. Il faut peut-être réfléchir au sujet, mesurer les conséquences de la proposition et y revenir plus tard. Ce n’est pas forcément fermer totalement la porte, mais il convient de se demander si l’on a intérêt à aider les actionnaires à financer leur propre fondation.
L'amendement n° I-618, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le secrétaire d'État.
Je ne reviendrai pas sur le fond de l’amendement, qui a été longuement évoqué par M. Bargeton.
L’article 2 quater a été adopté en première lecture par l’Assemblée nationale. Dès lors qu’il s’applique aux dons réalisés en 2017 par les mandataires sociaux, les sociétaires, les actionnaires, les adhérents de l’entreprise fondatrice ou les entreprises du groupe auquel l’entreprise appartient, il ne revêt aucun caractère incitatif. Il pourrait même constituer, dans certains cas, un effet d’aubaine avec un phénomène d’accélération dans les dernières semaines de l’année 2017, élément que vous avez souligné. Se pose donc une difficulté quant à la date de mise en œuvre du dispositif.
Le Gouvernement propose de supprimer l’article 2 quater et de renvoyer son examen en seconde partie du projet de loi de finances afin que cela puisse s’appliquer aux revenus de l’année 2018, ce qui permettra notamment d’éviter les effets d’aubaine que M. Bargeton a mentionnés dans son intervention, que nous avons identifiés et dont le Gouvernement a parfaitement conscience.
Pour être tout à fait direct, la commission n’a pas examiné cet amendement, qui lui est parvenu très tardivement. Aussi, je m’en remets à la sagesse du Sénat.
Je viens d’entendre le ministre s’engager à faire examiner l’amendement dans le cadre de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances. Nous aurons alors le débat de fond et le chiffrage. Vous aurez compris qu’on peut l’adopter !
L'amendement est adopté.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° I-370 rectifié bis est présenté par MM. Capus, Malhuret, Bignon et A. Marc, Mme Mélot et MM. Chasseing, Wattebled, Decool, Guerriau et Lagourgue.
L'amendement n° I-486 est présenté par Mmes Tocqueville, Bonnefoy et Ghali, MM. Jomier et Marie, Mmes Lienemann et Guillemot, M. Iacovelli, Mme Cartron, MM. Tourenne, Dagbert, Madrelle, Tissot et J. Bigot, Mmes Meunier et Espagnac et M. Courteau.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 256 A du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ne sont pas considérés comme effectuant une des activités économiques mentionnées au cinquième alinéa du présent article les exploitants d’installations photovoltaïques dès lors que la puissance installée n’excède pas 6 kilowatts crêtes. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la hausse de la composante carbone intégrée aux tarifs des taxes intérieures sur la consommation des produits énergétiques inscrites au tableau constituant le troisième alinéa du B du 1 de l’article 265 du code des douanes.
La parole est à M. Emmanuel Capus, pour présenter l’amendement n° I-370 rectifié bis.
Cet amendement concerne les exploitations d’installations photovoltaïques.
Vous le savez, si vous êtes considérés comme livrant de l’électricité en plus de votre autoconsommation, vous êtes assujettis à la TVA à un taux de 20 %. En revanche, si vous ne faites qu’autoconsommer, vous êtes assujettis à un taux de TVA de 10 %. La règle veut que, par principe, si votre installation n’excède pas 3 kilowatts crêtes, le taux de TVA est de 10 %.
Or cette règle commence à dater. Elle n’est plus vraiment d’actualité par rapport aux capacités techniques des installations actuelles, plus puissantes. L’amendement vise donc à relever le seuil d’application du taux réduit de TVA de 10 % à 6 kilowatts crêtes dans le cadre d’une installation en autoconsommation, avec revente du surplus.
Tel est le sens de cet amendement.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour présenter l'amendement n° I-486.
Cet amendement vise effectivement à rendre compte de la réalité de ce que sont aujourd'hui les phénomènes d’autoproduction. Il paraît nécessaire de relever le seuil de 3 à 6 kilowatts crêtes afin que nous soyons en situation de favoriser le développement des énergies renouvelables, bien indispensable pour réussir les enjeux de l’accord de Paris.
L'amendement n° I-46 rectifié, présenté par MM. Adnot, Decool et Kern n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission ?
Ces deux amendements identiques visent à relever le seuil en dessous duquel les exploitations d’installations photovoltaïques sont soumises à un taux réduit de TVA de 10 % et non au taux normal de 20 %. Pour ce faire, l’amendement se réfère à un seuil de puissance, qui serait de 6 kilowatts crêtes, contre 3 kilowatts crêtes actuellement, comme l’ont rappelé les auteurs des amendements.
Or ce seuil est fixé, non par la loi, mais par la doctrine de l’administration. Dès lors que nous ne sommes pas dans le droit positif, il serait intéressant d’entendre le Gouvernement pour savoir s’il y a un obstacle au relèvement éventuel du seuil de 3 à 6 kilowatts crêtes.
Un particulier qui produit de l’électricité photovoltaïque et réalise, en plus de son autoconsommation, des livraisons d’électricité dont il tire des recettes est, vous le savez, assujetti à la TVA.
La doctrine administrative admet toutefois qu’un particulier dont la puissance de l’installation photovoltaïque n’excède pas 3 kilowatts crêtes soit présumé comme produisant une électricité intégralement autoconsommée et ne soit pas assujetti à la TVA, ce qui lui permet de bénéficier du taux réduit de 10 % sur son installation photovoltaïque.
Contrairement à ce que laissent penser les éléments exposés, le seuil de 3 kilowatts crêtes n’existe qu’à titre de règle pratique. En fait, un particulier dont l’installation excéderait cette puissance pourrait tout de même bénéficier du taux réduit si son électricité était intégralement autoconsommée.
Cela lève les interrogations soulevées à juste titre par les auteurs des deux amendements identiques. Je demande donc le retrait de ces amendements ; à défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
Je ne suis pas certain d’avoir totalement compris la réponse du Gouvernement. Ces deux amendements identiques tiennent compte de l’évolution des choses. Aujourd’hui, ce qui est proposé pour les particuliers est plus proche des 6 kilowatts crêtes que des 3 kilowatts crêtes.
Si j’ai bien compris – mais peut-être ai-je mal compris ? –, adopter les amendements ne changerait à la limite rien. Je considère donc qu’il vaut mieux donner tout de suite le signal en passant à 6 kilowatts crêtes.
Qu’y a-t-il derrière tout cela ? Aujourd'hui, il faut donner un signal aux particuliers. Ils risquent de se trouver confrontés, sur le marché, à des offres de machines, et ils ne sauront pas si le seuil est de 6 ou 3 kilowatts crêtes. Dans ces conditions, on ne va pas s’en sortir ! Il vaut mieux relever tout de suite le seuil à 6 kilowatts crêtes, d’autant que j’ai cru comprendre que cela ne changerait rien.
Il faut s’en tenir au fond et se dire qu’il y a là un enjeu extrêmement important : les particuliers qui investissent ainsi et font de l’autoconsommation nous rapportent à tous, en produisant une électricité financée par de l’épargne privée.
Elle n’est pas chère et elle ne remet pas du tout en cause la solidarité nationale puisqu’il n’y a pas de découplement du réseau. Donc, il ne faut pas mélanger. D’après vos propos, mieux vaut passer tout de suite à 6 kilowatts crêtes.
Je le maintiens, pour différentes raisons.
D’abord, j’observe que le rapporteur nous dit que la fixation du seuil relève non pas du domaine législatif, mais du domaine réglementaire. Or le Gouvernement ne reprend pas cet argument. J’en déduis donc qu’il y a un doute sur ce point.
Ensuite, comme vient de le dire très bien M. Dantec, la réalité, c’est que nous avons quand même, dans ce pays, des freins historiques considérables à l’autoconsommation et à l’autoproduction. On connaît notre histoire et les relations particulières avec le grand opérateur, EDF. Mais nous avons un retard considérable en la matière.
Enfin, nous avons voté, il y a peu de temps – c’était il y a quelques mois, avant le renouvellement sénatorial – une loi permettant de franchir une étape dans l’autoproduction et l’autoconsommation. Il me semble que la fiscalité autour de cette démarche doit être simple et incitative. À mon sens, cet amendement ne va pas ruiner le pays, mais il lui permettra d’accélérer la transition énergétique, qui est indispensable.
Je suis très réservé parce qu’on touche là au système de distribution de l’électricité. Que se passe-t-il ?
Les gens qui ont de l’argent vont s’acheter des installations pour faire de l’autoconsommation. En effet, pour cela, il faut avoir quelques moyens. Ce sont souvent des gens des villes. Ils ne vont plus consommer régulièrement de l’électricité distribuée par le distributeur unique, qui a le monopole. Ces personnes ne feront appel à l’électricité produite par le réseau que pendant les périodes de pointe, c'est-à-dire en période de canicule ou de grand froid.
Il faudra continuer à entretenir les installations du réseau, et il y aura une perte de recettes. N’oubliez pas que l’électricité domestique a un coût unique au niveau du pays, avec une péréquation des tarifs. Globalement, les villes paient pour les campagnes. Je vous mets en garde, car cela peut être inquiétant. Cela me fait un peu penser aux syndicats d’eau : dans les endroits où il y a beaucoup de sources, les gens ne consomment l’eau distribuée par les syndicats que quand ils ne peuvent pas faire autrement, c’est-à-dire en période de sécheresse. Il n’empêche qu’il faut entretenir les installations et faire des frais tout au long de l’année. J’attire donc votre attention sur les risques de déstabiliser le système actuel de distribution de l’électricité !
Je voterai ces deux amendements identiques. Je pense que se pose ici la question de savoir si ce type de disposition relève du domaine réglementaire ou du domaine législatif.
Je comprends l’argument sur la péréquation du tarif de l’électricité. Mais, comme ce mode de production d’électricité est encore, malheureusement, très faible, je crois que l’impact de cette disposition en la matière ne sera pas très élevé.
Très honnêtement, je préfère une telle mesure, extrêmement pragmatique et incitative, qui aura des effets immédiats sur notre consommation à la loi, adoptée la semaine dernière, sur l’arrêt de l’exploitation des hydrocarbures en 2040.
J’interviens en espérant que cela nous permettra de trouver un accord.
Premièrement, cette disposition relève de l’instruction fiscale, donc du domaine réglementaire, et même de l’infraréglementaire, voire du plus bas niveau réglementaire.
Deuxièmement, à ce stade de nos discussions, nous n’avons pas de chiffrage. Aussi, je vous propose d’engager un dialogue avec la direction de la législation fiscale, la DLF, à Bercy sur ce sujet afin de chiffrer le dispositif. Si vous en êtes d’accord, cela permettra d’avancer sur cette question.
Au bénéfice de l’engagement de demander à la DLF d’accomplir ce travail de chiffrage, je demande aux auteurs des amendements de bien vouloir les retirer.
Monsieur Capus, au bénéfice de cet engagement, l'amendement n° I-370 rectifié bis est-il maintenu ?
J’entends ce que dit M. le secrétaire d’État. Si un travail d’exploration sérieux est réalisé, on pourra réexaminer cet amendement lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative, par exemple, ou à tout moment.
Je suis défavorable à ces deux amendements identiques, car on va inscrire dans la loi ce qui relève aujourd'hui de l’instruction. Je ne souscris pas à ce procédé.
Je mets aux voix les deux amendements identiques n° I-370 rectifié bis et I-486.
Les amendements ne sont pas adoptés.
I. – La deuxième partie du code général des impôts est ainsi modifiée :
1° La première phrase du troisième alinéa de l’article 1407 bis est supprimée ;
2° L’article 1413 bis est ainsi modifié :
a) La référence : « et de l’article 1414 A » est remplacée par les références : «, de l’article 1414 A et de l’article 1414 C » ;
b) Dans sa rédaction résultant du a du présent 2°, la référence : «, de l’article 1414 A » est supprimée ;
3° Le IV de l’article 1414 est ainsi modifié :
a) À la fin, les mots : « au montant de l’abattement fixé au I de l’article 1414 A » sont remplacés par le mot : « à : » ;
b) Sont ajoutés six alinéas ainsi rédigés :
« 1° 5 461 € pour la première part de quotient familial, majoré de 1 580 € pour chacune des quatre premières demi-parts et de 2 793 € pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la cinquième, en France métropolitaine ;
« 2° 6 557 € pour la première part de quotient familial, majoré de 1 580 € pour chacune des deux premières demi-parts et de 2 793 € pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la troisième, en Martinique, en Guadeloupe et à La Réunion ;
« 3° 7 281 € pour la première part de quotient familial, majoré de 1 213 € pour chacune des deux premières demi-parts et de 2 909 € pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la troisième, en Guyane ;
« 4° 8 002 € pour la première part de quotient familial, majoré de 1 333 € pour chacune des deux premières demi-parts et de 3 197 € pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la troisième, à Mayotte.
« Ces montants sont indexés, chaque année, comme la limite supérieure de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu.
« Les montants mentionnés aux 1° à 4° sont divisés par deux pour les quarts de part. » ;
4° L’article 1414 A est abrogé ;
5° L’article 1414 B est modifié :
a) Au premier alinéa, la référence : « de l’article 1414 A » est remplacée par les références : « des articles 1414 A et 1414 C » et les mots : « à cet article » sont remplacés par les mots : « à ces articles » ;
b) Au premier alinéa, dans sa rédaction résultant du a du présent 5°, la référence : « des articles 1414 A et » est remplacée par les mots : « de l’article » et, à la fin, les mots : « à ces articles » sont remplacés par les mots : « à cet article » ;
6° L’article 1414 C est ainsi rétabli :
« Art. 1414 C. – I. – 1. Les contribuables autres que ceux mentionnés au I, au 1° du I bis et au IV de l’article 1414, dont le montant des revenus, au sens du IV de l’article 1417, n’excède pas la limite prévue au 2 du II bis du même article 1417, bénéficient d’un dégrèvement d’office de la taxe d’habitation afférente à leur habitation principale.
« 2. Pour les contribuables dont le montant des revenus, au sens du IV de l’article 1417, n’excède pas la limite prévue au 1 du II bis du même article 1417, le montant de ce dégrèvement est égal à 30 % de la cotisation de taxe d’habitation de l’année d’imposition déterminée en retenant le taux global d’imposition et les taux ou le montant, lorsqu’ils sont fixés en valeur absolue, des abattements appliqués pour les impositions dues au titre de 2017, après application du dégrèvement prévu à l’article 1414 A.
« Toutefois, le dégrèvement est déterminé en retenant le taux global applicable pour les impositions dues au titre de l’année lorsqu’il est inférieur à celui appliqué pour les impositions dues au titre de 2017 et les taux ou le montant, lorsqu’ils sont fixés en valeur absolue, des abattements de l’année d’imposition lorsqu’ils sont supérieurs à ceux appliqués pour les impositions dues au titre de 2017.
« 3. Pour les contribuables mentionnés au 1 dont le montant des revenus, au sens du IV de l’article 1417, excède la limite prévue au 1 du II bis du même article 1417, le montant du dégrèvement prévu au 1 du présent I est multiplié par le rapport entre :
« a) Au numérateur, la différence entre la limite prévue au 2 du II bis de l’article 1417 et le montant des revenus ;
« b) Au dénominateur, la différence entre la limite prévue au 2 du même II bis et celle prévue au 1 du même II bis.
« II. – Pour l’application du I :
« 1° Les revenus s’apprécient dans les conditions prévues au IV de l’article 1391 B ter ;
« 2° Le taux global de taxe d’habitation comprend le taux des taxes spéciales d’équipement additionnelles à la taxe d’habitation ainsi que celui de la taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations.
« Ce taux global est majoré, le cas échéant, des augmentations de taux postérieures à 2017 pour la part qui résulte strictement des procédures de lissage, d’harmonisation, de convergence prévues en cas de création de communes nouvelles, de fusion d’établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ou de rattachement d’une commune à un tel établissement ;
« 3° Lorsque, en application des II quater et II quinquies de l’article 1411 et des articles 1638 et 1638-0 bis, les abattements en vigueur en 2017 ont été réduits, il est fait application de ceux de l’année d’imposition dans la limite de la réduction prévue à ces articles ;
« 4° Lorsque les abattements sont fixés en valeur absolue conformément au 5 du II de l’article 1411, le montant du dégrèvement est déterminé en retenant le montant des abattements appliqués en 2017 ou, s’ils sont inférieurs, le montant des abattements de l’année. » ;
7° Le 2 du I de l’article 1414 C est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, dans sa rédaction résultant du 6° du présent I, le taux : « 30 % » est remplacé par le taux : « 65 % » ;
b) Au premier alinéa, dans sa rédaction résultant du a du présent 7°, les mots : « 65 % de » et, à la fin, les mots : «, après application du dégrèvement prévu à l’article 1414 A » sont supprimés ;
8° L’article 1417 est ainsi modifié :
a) Au II, la référence : « 1414 A » est remplacée par la référence : « 1391 B ter » ;
b) Après le II, il est inséré un II bis ainsi rédigé :
« II bis. – 1. Le 2 du I de l’article 1414 C s’applique aux contribuables dont le montant des revenus de l’année précédant celle au titre de laquelle l’imposition est établie n’excède pas la somme de 27 000 € pour la première part de quotient familial, majorée de 8 000 € pour chacune des deux demi-parts suivantes et 6 000 € pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la troisième, retenues pour le calcul de l’impôt sur le revenu afférent auxdits revenus.
« 2. Le 3 du I de l’article 1414 C s’applique aux contribuables dont le montant des revenus de l’année précédant celle au titre de laquelle l’imposition est établie n’excède pas la somme de 28 000 €, pour la première part de quotient familial, majorée de 8 500 € pour chacune des deux demi-parts suivantes et 6 000 € pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la troisième, retenues pour le calcul de l’impôt sur le revenu afférent auxdits revenus. » ;
c) Aux premier et second alinéas du III, la référence : « et II » est remplacée par les références : «, II et II bis » ;
9° L’article 1605 bis est ainsi modifié :
a) Au 2°, les mots : « II de l’article 1414 A » sont remplacés par les mots : « I de l’article 1414 C » ;
b) Le 3° bis est abrogé ;
10° Le 3 du B du I de l’article 1641 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, la référence : « 1414 A » est remplacée par la référence : « 1414 C » ;
b) Au 1°, la référence : « et 1414 A » est remplacée par les références : «, 1414 A et 1414 C » ;
c) Au 1°, dans sa rédaction résultant du b du présent 10°, la référence : «, 1414 A » est supprimée.
II. – L’article L. 173 du livre des procédures fiscales est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « de la taxe professionnelle, » sont supprimés ;
2° Au second alinéa, après la référence : « 1414 B », est insérée la référence : «, 1414 C » ;
3° Au second alinéa, la référence : «, 1414 A » est supprimée.
III. – 1. Le 1°, le a du 2°, le a du 5°, le 6°, les b et c du 8° et le b du 10° du I et les 1° et 2° du II s’appliquent à compter des impositions établies au titre de 2018.
2. Le a du 7° du I s’applique aux impositions établies au titre de 2019.
3. Le b du 2°, le 3°, le 4°, le b du 5°, le b du 7°, le a du 8°, le a du 9°, les a et c du 10° du I et le 3° du II s’appliquent à compter des impositions établies au titre de 2020.
IV
Nous abordons l’une des réformes majeures de ce projet de loi de finances, la première dans l’ordre de discussion des articles ; je veux parler de la réforme de la taxe d’habitation.
Il y a, si j’ose dire, quatre coins du carré magique, quatre piliers de la politique fiscale. Ce sont les cotisations sociales – avec la CSG –, la fiscalité du capital, la fiscalité des entreprises et cette mesure sur la taxe d’habitation, favorable aux familles et aux classes moyennes.
Sur ce sujet, je voudrais que nous fassions œuvre non pas de démagogie, mais plutôt de pédagogie. Personne ne regrettera la taxe d’habitation – en tout cas, pas moi ! Nous en connaissions, évidemment, les limites et l’incapacité pendant des années à la réformer.
C’est une œuvre majeure que d’alléger cette taxe. En outre, cela redonne du pouvoir d’achat aux Français ; cela a été dit. À terme, les 22 millions de foyers fiscaux concernés économiseront 10 milliards d’euros, soit 600 euros par an et par ménage en moyenne : voilà les trois chiffres clés de cette réforme.
Évidemment, ce doit être une invitation à réfléchir à la suite ; nous devons inventer la fiscalité locale moderne de demain. D’ailleurs, le Président de la République l’a dit devant le congrès des maires de France. On parlait à l’instant du numérique. Or la façon dont il bouleverse notre économie et nos villes est aussi, peut-être, une nouvelle ressource à explorer.
Il faut, à partir de cette réforme, et au-delà de 2020, bâtir une fiscalité locale moderne, c’est-à-dire plus efficace et plus juste, tant pour les ménages que pour les collectivités locales, et surtout une fiscalité qui corresponde au monde tel qu’il fonctionne aujourd’hui.
Certes, je sais bien qu’il existe un débat sur les compensations, …
… mais le choix qui a été fait d’un dégrèvement préserve l’autonomie fiscale des collectivités.
En outre, il existe déjà énormément de dégrèvements et d’exonérations qui pèsent sur la taxe d’habitation et sont remboursés par l’État.
C’est pourquoi, selon moi, au regard des enjeux relatifs à la fiscalité locale, rejeter tel quel l’article 3 n’est pas à la hauteur des attentes de nos concitoyens.
Mme Sophie Primas s’exclame.
Très sincèrement, mes chers collègues, cela fait des années, sinon des décennies, que nous disons de la taxe d’habitation qu’elle est injuste pour les contribuables, qu’elle est inefficace pour les collectivités et que, en tout cas, elle assume des traitements différenciés des collectivités qui sont totalement inexplicables.
Nous avons, les uns comme les autres, retardé maintes fois le travail nécessaire sur les bases fiscales. Nous avons jugé ce sujet tellement difficile que les études que nous avons pourtant réalisées n’ont jamais abouti. Aujourd’hui, on nous propose une réforme, avec un dégrèvement pour l’année 2018. Notre groupe est favorable à ce dégrèvement de la taxe d’habitation pour 2018. Cela ne vaut pas acceptation de l’ensemble de la réforme pour les années 2018, 2019 et 2020. En effet, certains problèmes restent posés.
D’abord, si la taxe d’habitation est un vrai problème, elle ne l’est évidemment pas que pour 80 % des foyers, mais bien pour 100 % d’entre eux.
Nous sommes donc favorables, dès lors qu’on accepte ce principe, à ce que se tienne une réflexion en vue de la suppression totale de la taxe d’habitation pour l’ensemble des Français.
En outre, nous n’acceptons évidemment de suivre ce principe – c’est pourquoi nous n’acceptons ce système que pour une année – que si les collectivités locales ne perdent rien et le système de dégrèvement ne se traduit pas par des difficultés supplémentaires pour les collectivités locales.
Plusieurs questions demeurent. Il s’agit, en particulier, de savoir comment on traitera les nouvelles bases de l’année 2018. La même question se pose quant à l’augmentation possible des taux. Sur ce point, ce projet de loi de finances nous inquiète un petit peu ; nous vous écouterons, monsieur le secrétaire d’État, sur la possibilité de conserver les taux.
Enfin, nous estimons tout de même que l’année 2018 doit être utile. Il faut donc que, dès l’année prochaine, nous engagions la réforme totale de la fiscalité locale.
C’est sous ces réserves que nous avancerons avec vous, monsieur le secrétaire d’État.
Comme vous tous, je me suis penché quelques instants sur le fichier des simulations de la réforme de la taxe d’habitation. Or j’y ai relevé, me semble-t-il, certains effets pervers de la démarche mise en œuvre par le Gouvernement.
On peut, au mieux, reconnaître à ces simulations une qualité : elles nous offrent une sorte de photographie instantanée des inégalités sociales dans notre pays. En effet, plus la proportion d’exonérés s’élève dans la population d’une commune, plus nous en savons sur la modestie des ressources des familles. Jusque-là, il n’y a pas de problème.
Je prendrai l’exemple de mon département, le Val-de-Marne, qui est composé de 47 communes et regroupe 1, 4 million d’habitantes et d’habitants. Ces communes sont fort différentes par leur histoire ; ce n’est pas Mme Procaccia qui me dira le contraire. §Néanmoins, je ne parlerai pas de l’histoire industrielle du département ; je ne regarde que la simulation.
Dans une minorité de communes du département, on compterait, en 2020, au terme de la réforme, un pourcentage de contribuables exonérés inférieur à 50 % §: ce sera le cas à Vincennes, à Saint-Mandé, à Nogent-sur-Marne et dans les communes du plateau briard, Marolles-en-Brie et Santeny. A contrario, certaines communes verront plus de 80 % de leurs contribuables exonérés : 81 % à Vitry-sur-Seine ; 85 % à Orly ; on dépasserait 88 % à Valenton et à Villeneuve-Saint-Georges ; la proportion serait de 84, 75 % à Bonneuil-sur-Marne. La somme de produits fiscaux qui seront ainsi gelés et transformés est, à mon sens, très importante.
Je vous avoue, mes chers collègues, avoir demandé par modestie une note à un administrateur du Sénat parce que, à écouter les propos publics des membres du Gouvernement, une fois on parlait de compensation, une autre de dégrèvement. Seulement, les élus ont une mémoire !
Comme vous tous, j’ai vécu la transformation de la taxe professionnelle en cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, ou CVAE. Que l’on soit de droite ou de gauche, on a tous mis plusieurs années à comprendre les conséquences de ce changement pour nos territoires et les modalités de calcul de cette nouvelle cotisation. Or nous avons tous constaté, sans clivage idéologique ou partisan, qu’il y avait des problèmes d’inégalités suivant les territoires.
Tout cela me fait penser qu’il y aura des manques à gagner. Nous n’avons pas la garantie – veuillez m’en excuser – qu’il n’y aura pas d’impact sur les collectivités, parce que l’article 3 gèlera au niveau de 2020 une partie importante des ressources des collectivités locales et, en particulier, des communes.
J’attire donc l’attention du Gouvernement sur ce danger. Certes, monsieur le secrétaire d’État, vous faites une économie sur les finances, mais prenez garde : si l’on réduit trop les services publics dans les territoires, on perdra en cohésion sociale et on organisera, sans le vouloir, un mouvement social !
Mes chers collègues, je vous demande de bien respecter vos temps de parole, car, même si le sujet est d’importance, il nous reste encore beaucoup d’amendements à examiner.
La parole est à M. Jean-François Rapin, sur l’article.
Monsieur le secrétaire d'État, la précipitation n’est jamais bonne conseillère. Le Sénat est une assemblée remarquablement sage, qui a essayé de vous éclairer, notamment sur cette mesure, lors de l’examen du dernier projet de loi de finances rectificative. Nous recevons aujourd’hui des courriers de certains organismes qui considèrent que le projet de loi de finances rectificative a été très hâtivement élaboré. Certes, nous comprenons les circonstances qui ont déterminé la façon dont cela s’est fait.
Vous nous aviez alors demandé 10 milliards d’euros en urgence. Or vous nous annoncez aujourd’hui que, par une sorte de compensation, on crée un dégrèvement sur la taxe d’habitation qui, sur les trois prochaines années, coûtera 10 milliards d’euros à la France. Pourquoi ne pas avoir attendu ? Nous comprenons bien votre engagement, que je salue, à vouloir réformer cette taxe, mais on aurait pu attendre trois ans et économiser ainsi 10 milliards d’euros. Encore aurait-il fallu écouter le Sénat et, peut-être, engager un travail en profondeur, qui n’a jamais été fait. Je le conçois, mais je pense tout de même qu’il était urgent d’attendre !
Je voudrais réagir en particulier aux propos de M. Bargeton. On voit bien quels arguments sont avancés.
À chaque annonce, on nous promet de donner du pouvoir d’achat à nos concitoyens. C’est évidemment une préoccupation que, comme mes collègues, j’ai au plus haut point.
Simplement, dans toute cette confusion d’annonces, on fait rarement l’agrégat de l’ensemble des dispositions fiscales qui sont prises.
Or, quand on calcule cet agrégat, on constate que les entreprises vont voir leurs impôts baisser de 5, 3 milliards d’euros. On observe que les 20 % de Français les plus riches vont bénéficier d’un allégement fiscal à hauteur de 4, 5 milliards d’euros. Et surtout, suivant cet agrégat, les 80 % de personnes physiques qui ne sont pas les plus riches vont, quant à elles, payer, globalement, 200 millions d’euros d’impôts supplémentaires !
Par un jeu de pirouette, on nous annonce les baisses qui ont lieu et on élude l’effet des hausses. Je prendrai un exemple : parce que je soutiens la taxation écologique, je suis favorable à une fiscalité énergétique représentant 3, 7 milliards d’euros. Pour autant, et comme nous l’avons toujours dit, puisqu’il s’agit d’une taxe à la consommation, il faut qu’elle soit compensée par d’autres baisses fiscales touchant les catégories populaires et la part la plus importante de la population. Or tel n’est pas le cas.
Par ailleurs, quand s’est tenu le débat sur la sécurité sociale, on nous a bien expliqué que, pour l’année en cours, les recettes de la CSG étaient supérieures à ce qui serait nécessaire pour compenser les allégements de cotisation. Comme par hasard, la somme que rapportera, selon les annonces du Gouvernement, la hausse de la CSG est de 3 milliards d’euros, ce qui correspond parfaitement aux 3 milliards d’euros d’allégement de taxe d’habitation.
Que l’on ne nous raconte donc pas de bobards ! L’essentiel des catégories populaires de ce pays et les classes moyennes n’auront pas d’amélioration de leur pouvoir d’achat.
Cela pose la question d’une refonte plus globale de l’impôt local ; je me réjouis que le Président de la République l’ait annoncée. Encore faut-il que cela aille vite, car l’état actuel de dépendance de nos collectivités à l’égard de l’impôt et de l’État n’est pas tolérable.
La question de la suppression de la taxe d’habitation pour 80 % des contribuables est sensible.
Premièrement, il s’agit d’un engagement de campagne fort du Président de la République, engagement validé par les résultats de l’élection présidentielle et des élections législatives. À mes yeux, ce point est important : les promesses doivent être respectées. J’entends çà et là que la participation à ces élections n’a peut-être pas été très forte. Néanmoins, en tout état de cause, le Président de la République a réalisé un score largement supérieur à celui des candidats qui ont été éliminés au premier tour
Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.
Deuxièmement, cette promesse de campagne entraîne, contrairement à ce qui vient d’être dit, une amélioration évidente du pouvoir d’achat des Français.
En outre, personne ici, quelles que soient les travées, ne défend la taxe d’habitation. Tout le monde est d’accord pour reconnaître qu’il s’agit d’un impôt injuste. Si vous la payez à Angers, malgré un taux fixé à 18 %, vous payez beaucoup plus qu’à Paris : cela n’est pas normal. En revanche, selon certains, continuer à faire supporter un impôt injuste par 20 % de la population n’est pas juste non plus. Sur ce point, j’ai bien entendu, hier, tant M. Darmanin que le Président de la République expliquer qu’on va vers une suppression pure et simple de cette taxe ; je pense que c’est une bonne chose.
Toutefois, la commission des finances nous assure que nous ne sommes pas prêts, que le Gouvernement va trop vite et qu’il faut prendre son temps : je l’entends également.
C’est la raison pour laquelle le groupe Les Indépendants – République et Territoires a déposé un amendement. J’en dirai un mot dès à présent, car je crains, compte tenu de l’ordre de discussion des amendements, qu’il ne soit pas du tout examiné. §Notre amendement vise, pour l’année 2018, à satisfaire tout le monde, tant ceux qui veulent supprimer la taxe d’habitation que les collectivités locales, qui s’inquiètent justement de leurs ressources, en diminuant l’impôt sur le revenu du même montant que celui qui résulterait de la suppression de la taxe d’habitation.
Telle est la position de notre groupe.
J’aurais pu m’exprimer sur l’amendement de la commission, mais je le ferai plutôt sur l’article 3, qui est vraiment d’importance. En effet, cet article concerne l’autonomie financière des collectivités locales.
Rappelons que, voilà quelques années, la taxe professionnelle a été réformée. Depuis lors, la plupart de nos collectivités reçoivent le produit de trois taxes : la taxe foncière sur les propriétés bâties, celle sur les propriétés non bâties, et la taxe d’habitation. Parmi ces trois taxes, la dernière est souvent la principale, comme cela a été rappelé, que ce soit pour le bloc communal ou intercommunal.
Par ailleurs, la part régionale a été supprimée voilà bien des années, de même que la part départementale. On parle beaucoup de l’autonomie financière des collectivités locales. La taxe d’habitation représente au total une recette de 21 milliards d’euros.
En outre, le produit de cette taxe varie d’une commune à l’autre. S’il supprime la taxe d’habitation, l’État devra compenser les communes, mais je ne sais trop comment. Je ne suis pas convaincu non plus que cette suppression augmentera le pouvoir d’achat des Français, sachant que tout le monde ne paye pas la taxe d’habitation.
Pour prendre un exemple de l’utilité de cette taxe, la commune dont j’étais maire jusqu’au 20 juin dernier, une petite commune de 170 habitants, a procédé en 2014 à une réforme des bases d’imposition. Ce n’était pas simple, mais nous pouvions nous le permettre. Ainsi, la commission communale des impôts directs a travaillé avec le centre des impôts, aujourd’hui rattaché à la direction générale des finances publiques, pour examiner la situation contribuable par contribuable, à quelque catégorie qu’ils appartiennent. Nous avons tout rétabli sur de bonnes bases : cela a quand même rapporté à la commune 8 000 euros supplémentaires. Certes, tous n’étaient pas contents, mais nous avons agi dans un souci d’équité.
En somme, les recettes en cause sont importantes pour nos collectivités locales. C’est pourquoi je ne suis pas du tout convaincu du bien-fondé de la suppression de la taxe d’habitation, même si elle est étalée sur trois ans. Je soutiendrai donc l’amendement de la commission des finances.
Le candidat s’y était engagé, le Président tient sa promesse ; on ne peut pas le lui reprocher. À mes yeux, d’une façon générale, tenir ses engagements doit être une constante si l’on veut réconcilier nos concitoyens avec l’action publique.
Sur le fond, les avis sont partagés, y compris au sein de plusieurs groupes de la Haute Assemblée.
À titre personnel, je suis favorable à la mise en œuvre de la suppression de la taxe d’habitation de la façon proposée par le Gouvernement. En effet, cela allégera les charges qui pèsent sur les familles les plus modestes, et ce à plus forte raison dans un contexte de hausse de la CSG.
Néanmoins, l’application de cette mesure pose à l’évidence deux problèmes, qui ont déjà été évoqués. En premier lieu, on ne peut pas imaginer maintenir durablement la taxe d’habitation pour encore 20 % des ménages si l’on s’accorde tous à dire que c’est un impôt injuste. En second lieu, il faut garantir la recette financière des collectivités au-delà de 2020. Le dégrèvement proposé par le Gouvernement jusqu’à cette année répond parfaitement à la question de la recette des collectivités locales, mais il faut, selon moi, pouvoir assurer une recette pérenne.
En somme, la mise en application de cette mesure amorce une réflexion et, sans doute, une réforme plus globale de la fiscalité locale. Le Président de la République l’a d’ailleurs annoncé hier au congrès des maires ; nous y prendrons notre part. J’estime en tout cas que la réforme plus globale vers laquelle nous nous engageons avec cette mesure devra permettre aux collectivités d’y retrouver leur compte, d’avoir de la visibilité et d’envisager l’avenir avec sérénité.
Nos débats de cet après-midi auraient peut-être pu être plus courts si le Président de la République, hier après-midi, devant les maires de France, avait été plus clair.
Honnêtement, certains ont conclu de ses propos qu’une grande réforme serait menée en 2020, avec la suppression complète de la taxe d’habitation – je ne sais, mes chers collègues, si vous l’avez tous compris ainsi – et, peut-être, son remplacement – mais cela n’a pas été si clair que cela. Aussi, nous en sommes restés à l’hypothèse du maintien de cette taxe pour 20 % des Français.
Ensuite, je voudrais tout de même rappeler que les promesses d’un candidat, fût-il devenu Président de la République, ne sont pas des ordres pour le Parlement. §Heureusement, nous avons notre libre arbitre et nous avons la possibilité d’amender les textes qui nous sont proposés.
Je veux essayer – je n’y parviendrai pas ! – de convaincre le Gouvernement d’y réfléchir quand même à deux fois.
Si nous allons vraiment vers la suppression de la taxe d’habitation, ce que j’espère pour toutes les raisons déjà évoquées, c’est parce que cet impôt est injuste aujourd’hui. Eh bien, j’ai envie de vous dire : penchons-nous alors sur la réforme des valeurs locatives !
Au moins, on rendrait plus juste la taxe foncière qui, elle, restera. J’avais cru comprendre que le Gouvernement estimait que cette réforme est extrêmement compliquée. Cela fait quarante ans qu’on l’évoque, mais, malgré une expérimentation menée dans cinq départements, on n’en parle plus. Pour ma part, j’espère que ce n’est pas un sujet qu’on mettra de côté. On aurait pu se lancer dans cette direction ; on le fera peut-être.
Cela dit, dans quelle situation le Gouvernement se trouvera-t-il en 2020 ? On supprime aujourd’hui la taxe d’habitation pour 80 % des Français, et puis on trouvera un nouvel impôt en 2020. Mais alors, qui touchera-t-il ? Sera-t-il payé par les 20 % des contribuables qui seront encore soumis à la taxe d’habitation, ou bien par tout le monde ? J’ose espérer que, si jamais le Gouvernement créait cet impôt de remplacement, il ne viserait pas uniquement les 20 % de malheureux qui continueront à s’acquitter de la taxe d’habitation. Ou alors, monsieur le secrétaire d'État, vous aurez un vrai problème politique.
En effet, après avoir affirmé, pendant trois ans, à 80 % des Français qu’ils ne paieraient plus de taxe d’habitation, en 2020, au moment des élections municipales, vous leur révélerez qu’elle sera remplacée par un nouvel impôt. Je vous souhaite bien du plaisir pour aller expliquer tout cela : en matière de pouvoir d’achat, à la veille d’élections locales lors desquelles vous aurez envie de conquérir un certain nombre de communes, je pense que vous aurez bien des difficultés.
En conclusion, mes chers collègues, le groupe Les Républicains se rangera à l’avis du rapporteur général, parce que cela me semble être la meilleure solution.
Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.
Je souscris à 100 %, voire à 150 %, aux propos de M. Dallier. Vouloir tenir ses promesses, c’est bien normal. Il me semble pourtant qu’il y a cinq ans pour les réaliser ; c’est en tout cas ce que je crois. En outre, la brutalité avec laquelle on supprime cette taxe n’est pas utile alors même que s’instaure aujourd'hui une relation de défiance avec les élus locaux.
En effet, mes chers collègues, si la taxe d’habitation est injuste – on peut certes souscrire à cette allégation –, eh bien, la taxe foncière l’est tout autant. Dès lors, allons jusqu’au bout ! Supprimons la taxe d’habitation, supprimons la taxe foncière, et tout sera plus juste !
Pour ma part, tout comme Philippe Dallier, je pense qu’une réforme de la taxe d’habitation et des autres taxes locales est nécessaire, mais qu’elle doit préserver la contribution de chacun aux efforts d’une commune ; cela est extrêmement important.
Il faut également remettre un petit peu de justice dans ce domaine, que ce soit par une refonte des bases ou par un nouvel impôt.
En tout cas, il faut, selon moi, mener une réflexion globale, ce qui nécessite un peu de temps. En effet, une telle réforme affecte les collectivités territoriales. Quand on dit cela, on ne parle pas des maires ou d’une espèce d’organisation suspendue : cela affecte le financement des écoles et des crèches, le soutien social assuré par chacune des communes et donc, en fin de compte, la vie quotidienne des Français.
Alors, bien sûr, les contribuables seront contents de ne plus payer cette taxe la première année. En revanche, quand ils s’apercevront que cette suppression a des conséquences directes sur leur vie quotidienne – parce qu’elle en aura ! –, ils seront beaucoup moins contents.
En outre, tout comme M. Savoldelli, j’estime que cela aura un effet d’entraînement et que les communes habitées par les populations les plus modestes seront de plus en plus abandonnées par les couches moyennes ou aisées. On ira vers un système de paupérisation des communes qui est, à mon avis, à l’opposé de ce que nous essayons de faire depuis des années.
Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.
Je voudrais vous faire un aveu et m’excuser, monsieur le secrétaire d’État : je n’ai pas suivi de cours qui me permettraient de comprendre la langue du nouveau monde ! Comme mon collègue Philippe Dallier, dont j’imagine qu’il ne la comprend pas plus que moi, j’aimerais vous demander de nous expliquer, concrètement, ce qui se passera en 2020. Je n’ai pas compris : reviendra-t-on alors, ou non, sur ce que vous soumettez aujourd’hui à notre vote ?
Par ailleurs, depuis huit jours, vous nous expliquez que nous n’avons pas de raison de nous inquiéter, puisque ce sera un dégrèvement jusqu’en 2020. Cela implique qu’après 2020 ce pourrait bien ne plus en être un. Vous comprendrez nos inquiétudes.
Quant à nos collègues qui nous expliquent doctement qu’il s’agit d’une promesse de campagne qu’il faut tenir, pourquoi pas ? Mais ce sont ceux-là mêmes qui nous expliquent qu’il ne faut pas s’inquiéter, puisque le Président de la République propose une refonte en profondeur de la fiscalité locale ! C’est donc qu’il revient sur sa promesse de campagne !
J’avoue avoir du mal à comprendre cette langue du nouveau monde, qui consiste à dire en même temps tout et son contraire. C’est la raison pour laquelle, pour notre part, nous ne disons pas « en même temps », mais nous affirmons, très clairement, que la réforme n’est pas prête. Par conséquent, nous voterons l’amendement du rapporteur général, ce qui nous laissera du temps.
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Effectivement, Emmanuel Macron a été élu Président de la République. Il avait pris des engagements de campagne.
M. Benjamin Griveaux, secrétaire d'État. Nous parlons la même langue !
Sourires.
J’ignorais en revanche que, sous la Ve République, le Parlement était chargé d’appliquer strictement les engagements de campagne du Président de la République. Je pensais que la séparation entre le législatif et l’exécutif donnait au Parlement un pouvoir de débat et de vote, même si, là où il y a une majorité en faveur du Président, j’imagine qu’elle vote pour ses réformes.
Pour ma part, j’ai relu – peut-être tout le monde ici ne l’a-t-il pas fait ?… – les engagements du Président de la République. Il est vrai qu’il y parlait de la taxe d’habitation. Mais il parlait aussi, et en même temps, d’une réforme globale de la fiscalité, notamment, de la fiscalité locale. C’est très bien.
N’eût-il pas pourtant été plus normal, même dans le nouveau monde, de préciser d’abord ce que seraient les bases de la réforme de la fiscalité avant d’annoncer, à partir de ces réflexions, ce qu’on ferait de la taxe d’habitation, de la taxe foncière et du reste ?
Franchement, ne fait-on pas finalement, comme dans l’ancien monde, les choses à l’envers ? On commence par expliquer comment on va réformer la taxe d’habitation ; vous verrez bien par la suite, nous dit-on, comment on réformera la fiscalité locale. Cela n’a pas de sens ! La réforme de la taxe d’habitation crée des contraintes qui gêneront celle de la fiscalité locale : c’est totalement absurde. Il eût mieux valu faire d’abord la réforme de la fiscalité locale et, en son sein, déterminer le sort de la taxe d’habitation et des autres impôts locaux.
Par ailleurs, monsieur le secrétaire d’État, comme mes collègues l’ont formidablement exposé, vous allez être confrontés à un véritable problème. En effet, vous allez habituer les gens à ne pas payer de taxe d’habitation. Or, en 2020, il faudra bien trouver une ressource pour la remplacer. Pourrez-vous alors dire à 80 % des contribuables qu’ils ne paieront pas non plus le nouvel impôt qu’il faudra bien créer ? Cela n’a pas de sens : forcément, vous ferez beaucoup de déçus. Je crains beaucoup que, à force de vouloir se précipiter, le Gouvernement ne subisse un échec complet sur ce dossier puisque, par définition, certaines choses doivent être établies.
Monsieur le secrétaire d'État, vous êtes un homme respectable, intelligent, modéré et pondéré : faites d’abord la réforme globale de la fiscalité !
Pour la cohérence des débats, je défendrai dès à présent, en partie, l’amendement que je présenterai tout à l’heure.
Monsieur le secrétaire d'État, je considère que la suppression de la taxe d’habitation est une bonne mesure. Pour une fois, un gouvernement supprime une taxe injuste et inique qui était contestée depuis un grand nombre d’années. Je ne peux qu’approuver cette suppression, d’autant que mon collègue Claude Raynal lui-même est d’accord avec moi puisqu’il conteste le maintien de cette taxe pour 20 % des contribuables.
C’est une bonne mesure, monsieur le secrétaire d’État, mais vous n’êtes malheureusement pas allé assez loin : il fallait supprimer totalement cette taxe plutôt que de ne faire que la moitié du chemin. Marc Laménie a évoqué précédemment le débat sur la taxe professionnelle. Rappelons que nous sommes au Parlement pour défendre non seulement les communes, mais aussi les contribuables. Pour la taxe professionnelle, on devait baisser les impôts des entreprises et réinjecter dans l’économie 12 milliards d’euros. Or, à l’issue des débats, seuls 5 milliards d’euros ont été injectés dans l’économie française : on a préféré défendre une fiscalité communale qui est pourtant boiteuse.
Certes, une réforme de la fiscalité communale est nécessaire. Pour autant, la suppression de la taxe d’habitation est une bonne mesure si elle est prise globalement. C’est d’ailleurs le sens de l’amendement de M. le rapporteur général. Selon lui, si l’on prend un peu de temps, on pourra tout traiter d’un seul coup.
C’est pourquoi, tout en attendant de connaître le sort de l’amendement de M. le rapporteur général, sur le fond, j’apprécie fortement la suppression de cet impôt dépassé et inique. Pour une fois, on redonne un peu de pouvoir d’achat au contribuable : c’est une bonne chose, si l’on ne met pas évidemment en péril l’équilibre des finances communales.
Monsieur le président, monsieur le ministre de l'action et des comptes publics, mes chers collègues, annoncer une réforme des ressources des collectivités locales est une bonne chose. On en parle depuis longtemps sans la faire, et on se contente de poser des rustines.
Loin de toute posture politicienne, je tiens à souligner que je partage moi aussi ce constat : la taxe d’habitation est injuste, mais, comme l’a affirmé ma collègue Sophie Primas, la taxe sur le foncier bâti l’est tout autant. Certes, nous allons peut-être supprimer une injustice pour les contribuables, mais force est de constater que nous allons conforter les inégalités entre les communes : il y aura les communes dont les contribuables ne paieront plus du tout la taxe d’habitation et celles dont les contribuables seront plus aisés et qui continueront de prospérer. Résultat : on n’aura pas réglé le problème de l’égalité.
En outre, ce débat nourrit chez moi des regrets – il faut bien de temps en temps regarder le passé – : je suis stupéfiée que l’on ait pu élaborer une loi NOTRe et définir les compétences des différentes collectivités sans jamais parler d’argent.
Aujourd’hui, on se demande avec quel argent nous allons pouvoir payer nos compétences.
Enfin, il ne faut pas considérer le Sénat comme une assemblée conservatrice. Sur ces questions, il est pertinent. On ne peut pas demander aux représentants des collectivités de s’engager dans un tunnel qui nous conduit jusqu’en 2020 sans savoir ce qui nous attend à la sortie.
Le Président de la République a affirmé vouloir entamer une réforme de la fiscalité locale ; je m’en réjouis. Reste que gérer, c’est prévoir. Il eût donc été fort utile que nous sachions la fin de l’histoire avant d’en écrire le premier épisode.
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, que prévoit cet article ? La suppression de la taxe d’habitation. Avec quelle conséquence ? Une augmentation de pouvoir d’achat pour 32 millions de foyers fiscaux.
M. Didier Guillaume. Il s’agit de revenir sur un impôt injuste, tout le monde est d’accord sur ce point. S’il en est ainsi, c’est parce que les gouvernements précédents, de droite comme de gauche, n’ont pas eu le courage de modifier les valeurs locatives et les bases d’imposition
Marques d’approbation sur diverses travées. – M. Philippe Dallier s’exclame.
Prise seule, cette mesure est excellente pour les foyers fiscaux français – on ne peut pas en dire de même de l’ensemble de ce texte budgétaire – : cela représente une augmentation de pouvoir d’achat, ce qui est bien nécessaire.
Certains se sont demandé tout à l’heure pourquoi il fallait faire cette réforme tout de suite. Mais alors, mes chers collègues, pourquoi voulez-vous supprimer tout de suite l’ISF, l’impôt de solidarité sur la fortune, alors que vous ne voterez pas l’IFI, l’impôt sur la fortune immobilière, considérant que cela ne va pas assez loin ? C’est exactement le même argument !
Pour notre part, nous préférons augmenter le pouvoir d’achat pour 80 % de ceux qui paient la taxe d’habitation.
Certes, on aurait pu avancer différemment, mais la voie choisie par le Gouvernement nous convient, parce qu’elle est immédiate. Je le répète, il est nécessaire de redonner du pouvoir d’achat à nos concitoyens.
Il reste toutefois un certain nombre de conditions qu’il faut régler assez vite. Le Président de la République s’est exprimé hier, et il faudra, monsieur le ministre, que vous apportiez des précisions pour éclairer notre assemblée.
Le principe du dégrèvement nous convient : c’est l’assurance que les communes n’y perdront pas.
Nous avons ainsi échappé aux exonérations. C’était notre première condition.
Nous avions posé comme deuxième condition que soit revue chaque année l’évolution de la population, des bases, de l’assiette, de l’indice de construction, pour que, là encore, les communes n’y perdent pas. Sur ce point, le Gouvernement s’est engagé, et cela nous va.
La troisième condition, c’est de ne pas s’en tenir aux 80 %, car cela ne va pas : il faut absolument que la taxe d’habitation soit supprimée pour 100 % de la population. Quand un impôt est injuste, on ne le maintient pas pour 20 % des foyers fiscaux.
M. Didier Guillaume. Je ne fais pas partie de ceux qui pensent que les citoyens sont plus citoyens s’ils payent l’impôt local. Jamais aucun de mes administrés n’a déclaré se sentir véritablement citoyen parce qu’il payait la taxe d’habitation. En revanche, redonner du pouvoir d’achat et faire en sorte que cesse cette inégalité entre les communes, voilà qui va dans le bon sens !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Sophie Primas s’exclame.
Monsieur président, monsieur le ministre, mes chers collègues, étant un jeune parlementaire, …
Sourires.
… j’avais décidé, pour cette première session budgétaire, de me contenter d’observer, d’écouter, d’apprendre. Mais comment le faire après avoir entendu un certain nombre d’arguments, notamment que les parlementaires n’étaient pas là pour obéir au Gouvernement ?
Peut-être !
Mais j’ai fait une campagne sénatoriale qui n’était pas facile – le vent était plutôt de face ! – et j’étais le seul à défendre le principe de la suppression de la taxe d’habitation.
Il s’agit tout simplement aujourd’hui de respecter un engagement pris par le candidat Emmanuel Macron.
M. Didier Rambaud. Cela change de ses prédécesseurs ! Pour une fois qu’un Président de la République respecte ce qu’il a annoncé, réjouissons-nous !
Marques d’ironie sur les travées du groupe Les Républicains.
N’exagérons rien non plus, c’est déjà arrivé ! Avec le président Mitterrand !
Je veux dire à Philippe Dallier, qui a mis en cause le principe du dégrèvement, que, à l’heure actuelle, l’État prend déjà en charge un quart de la taxe d’habitation, …
… avec des exonérations ou des dégrèvements déjà existants, sans que cela suscite des remous chez ceux qui ont instauré ces mécanismes au fil des années.
Avant d’engager des réformes, il faut avoir des principes d’action : comment et pourquoi les faire ?
Du point de vue du contribuable, la taxe d’habitation correspond aux services que la municipalité lui donne sur le lieu où il vit.
C’est aussi un moyen pour lui d’exercer son contrôle démocratique : s’il est content de ses élus, il vote pour eux ; sinon, il change.
Au regard du principe d’autonomie des communes, on peut considérer que la taxe d’habitation est une ressource communale importante et qu’il faut donc la laisser aux villes. Il s’agit là d’un principe fondamental, que tout le monde peut comprendre, les citoyens-contribuables comme les élus que nous défendons.
Ce n’est pas la taxe d’habitation qui est injuste, c’est le mode de calcul ! Ce sont les bases qui sont injustes : elles le sont pour la taxe d’habitation, mais aussi pour la taxe foncière.
Il faut des principes globaux.
Évidemment, on ne parle pas des réformes qui ont été faites n’importe comment : la loi NOTRe, la loi MAPTAM…
On ignore les ressources pour les communes, pour le département, pour la région.
Il faut des principes, il faut une vision des choses. Le contribuable peut comprendre que la taxe d’habitation et la taxe foncière dont il s’acquitte servent à payer les écoles et tout le reste, cela a déjà été dit.
Du point de vue des élus que nous sommes, il nous faut nous en remettre à un Président de la République qui a trouvé cette formule comme, en leurs temps, d’autres présidents avaient trouvé celle des 35 heures, sur un coin de table, ou celle-ci : « Mon ennemi, c’est la finance. »
M. Sébastien Meurant. Ayons des principes, faisons les choses de manière intelligible et sensée. Si le mode de calcul et les bases de la taxe d’habitation sont injustes, ce qui est sûr, c’est que l’on ne peut pas faire une bonne réforme dans la précipitation comme vous nous le proposez !
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Monsieur président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie de m’excuser d’être arrivé au cours de l’intervention de M. Dominati : il le comprendra aisément et sait tout le respect que je lui porte.
Je tiens à répondre avant l’examen des amendements sur cet article, car je connais la sensibilité de la Haute Assemblée sur les questions qui relèvent de la fiscalité locale, d’abord, parce que c’est son rôle institutionnel, ensuite, parce que nous en avons débattu longuement depuis ma nomination au Gouvernement, que ce soit lors des questions d’actualité ou lors des débats sur le projet de loi de finances.
Mme Catherine Procaccia s’exclame.
Avant d’entrer dans le vif du sujet, je tiens à saluer ceux qui se sont exprimés favorablement sur la réforme du Gouvernement, notamment M. le président du groupe socialiste et républicain et M. le représentant du groupe La République En Marche. J’ai bien évidemment entendu les parlementaires qui ont évoqué un certain nombre de difficultés, voire ont exprimé des oppositions assez fortes sur ce sujet.
Cet impôt est-il injuste ? On a entendu un peu de tout, y compris dans les rangs de ceux qui s’opposent à la réforme du Gouvernement : pour certains, il est injuste, mais il faut d’abord savoir où l’on va avant de réformer ; pour d’autres, ce n’est pas injuste, mais les valeurs locatives sont bloquées depuis les années soixante-dix, c’est-à-dire – comme j’ai déjà eu l’occasion de le rappeler ici même – pendant que Georges Pompidou était Président de la République et Jacques Chaban-Delmas Premier ministre.
M. Pierre Charon applaudit .
Vous applaudissez, parce que je cite Jacques Chaban-Delmas, monsieur Charon.
M. Gérald Darmanin, ministre. Oui, la France était à l’équilibre, et mes parents ne s’étaient pas encore rencontrés, cher rapporteur général. C’est dire à quel point ces temps sont immémoriaux !
Sourires.
Nouveaux sourires.
Vous avez raison, aucun gouvernement n’a eu le courage de réformer les valeurs locatives.
En effet !
Il n’est qu’à prendre l’exemple de la réforme locative des locaux commerciaux – je suis le ministre qui l’inaugure après sept années de travail de la direction générale des finances publiques –, lancée par le ministre Éric Woerth ; l’ironie veut qu’il soit aujourd’hui le président de la commission des finances de l’Assemblée nationale qui contrôle la réforme qu’il a engagée. Cette réforme exige douze ans de lissage, auxquels s’ajoutent les sept années de son élaboration – et je ne compte pas les débats parlementaires et les débats préalables. Il aura donc fallu dix-neuf ans, avec des questions extrêmement compliquées de planchonnement et, déjà, des élus m’écrivent pour me demander pourquoi la réforme des valeurs locatives a été engagée. Même avec un lissage de douze ans, certains gagnent et ceux-là ne disent rien, d’autres perdent et se font entendre.
Monsieur Dallier, la réforme des valeurs locatives n’a pas été lancée ; je m’y suis intéressé. Cinq départements, dont le Nord – en tant que maire, j’ai contribué à comprendre le travail de la DGFiP –, ont été impliqués. L’étude ne portait pas sur l’intégralité des valeurs locatives. Des mesures et des données manquent d’ailleurs à la DGFiP. Le directeur général des finances publiques vous expliquerait bien mieux que je ne le fais – vous pouvez l’auditionner – que les résultats étaient extrêmement parcellaires et que l’on estime qu’il faut une bonne dizaine d’années de travail… Voilà qui va encore accentuer la difficulté des politiques d’urbanisme dans les communes et accroître cette injustice.
Peut-être faudra-t-il entreprendre la réforme des valeurs locatives. Quand bien même nous supprimerions l’intégralité de la taxe d’habitation, il restera, beaucoup l’ont souligné, la taxe foncière.
L’argument selon lequel la taxe d’habitation n’est injuste qu’à cause des valeurs locatives est faux. La taxe d’habitation est également injuste parce qu’elle ne prend pas en compte les facultés contributives de chacun.
Monsieur le sénateur, le débat que nous avons actuellement est très intéressant, laissez-moi vous répondre en allant au bout de mon raisonnement.
Mesdames, messieurs les sénateurs, laissez-moi prendre quelques exemples dans vos départements et communes : que ceux que je cite ne m’en veuillent pas, il ne s’agit pas d’attaques ad hominem. Il se trouve juste que je connais souvent les lieux où ils sont élus.
Ce sera toujours la même configuration : un couple avec un enfant qui déclare 45 000 euros de revenus, ce qui est extrêmement moyen, et vit dans un appartement de cinquante mètres carrés en province. Les chiffres proviennent de la DGFiP, je les tiens à votre disposition.
Prenons la ville d’Arras, préfecture du Pas-de-Calais, ville chère à M. Rapin, dont je salue l’expérience et le travail. Pour un appartement construit en 1966 et situé dans la ZUP, plus précisément, dans un quartier prioritaire de la politique de la ville, le montant de la taxe d’habitation s’élève à 769 euros, …
… alors que, pour un appartement construit plus récemment et situé en plein centre-ville, il atteint 680 euros, soit 100 euros de moins.
Prenons, cette fois dans le département de M. Lefèvre, que je salue également, la ville de Laon, qu’il a fort bien administrée.
Pour un appartement de 1958 dans un quartier prioritaire de la politique de la ville, la taxe d’habitation est de 493 euros, contre 307 euros pour le même appartement situé dans le centre-ville – fort sympathique, au demeurant.
M. Gérald Darmanin, ministre. En d’autres termes, un foyer fiscal avec la même rémunération, la même composition familiale, dans un appartement de même surface paye 200 euros de plus de taxe d’habitation.
Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.
Prenons, enfin, Paris, dans le même arrondissement – je ne citerai pas directement M. Dominati, toujours pour éviter les propos ad hominem, et m’adresserai à tous les sénateurs de Paris, pour ne pas déclencher de guerre §–, …
M. Gérald Darmanin, ministre. Je salue tous les parlementaires de la Nation élus dans la circonscription parisienne ! Le sénateur Charon aussi !
Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.
On l’oublie souvent, le sénateur Charon, il ne se réveille que lorsque l’on parle de Jacques Chaban-Delmas !
Rires.
Dans le même appartement de cinquante mètres carrés, disais-je, …
… situé dans le X° arrondissement, pour deux couples de mêmes revenus, la taxe d’habitation s’élève à 386 euros dans un quartier prioritaire de la politique de la ville, contre 196 euros dans un quartier plus chic.
Je ne mentionne pas la ville de Philippe Dallier, mais je pourrais continuer à l’envi. J’ai cité ces chiffres pour que vous ne puissiez pas me dire que je prends des exemples déconnectés de la réalité.
La taxe d’habitation est injuste pour le contribuable, parce que les valeurs locatives sont bloquées depuis les années soixante-dix, vous avez raison, mais aussi parce qu’elle n’est pas calculée selon les facultés contributives de chacun.
Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.
Monsieur le ministre, j’aimerais que l’on puisse conclure sur ce sujet afin de poursuivre le débat.
Cela ne me déplairait pas d’allonger cette discussion, disais-je, car j’ai des contre-exemples.
Vous affirmez que l’on ne connaît pas la fin de ce qui vous est proposé. Depuis hier, le Président de la République a fait des déclarations très intéressantes…
… par construction, mais aussi parce que la révolution fiscale locale mérite d’être amplement engagée.
Elle a déjà commencé. Le gouvernement précédent l’a fait, si j’ose dire, avec le point de TVA que nous avons mis en place dans le projet de loi de finances pour les régions.
La question du financement des départements se pose. Nous en parlerons hors de cette enceinte lors de la Conférence nationale des territoires avec Dominique Bussereau et tous les départements. Elle se pose aussi pour la vie locale.
On ne peut garder un impôt qui ne concerne que 20 % des Français, nous en sommes tous d’accord. Nous devons nous demander ce que sera l’impôt de demain.
Pour conclure mon propos – M. le président m’encourage à terminer, mais c’est dommage, car ce sujet mériterait, me semble-t-il, un long débat –, j’aimerais surtout montrer à quel point nous tenons un engagement présidentiel. Il est parfois un peu contre-productif de soutenir que nous ne baissons les impôts que pour les plus aisés et, dès que l’on propose 10 milliards d’euros de baisses fiscales pour les foyers fiscaux les plus modestes, les classes moyennes, de basculer soit dans le juridisme soit dans l’opposition.
Il y a de l’iniquité entre les territoires. Comme beaucoup d’entre vous, j’ai été maire. Dans ma commune, 65 % de la population ne paie pas la taxe d’habitation, …
Dans des communes où cette charge n’existe pas, les élus peuvent se permettre de baisser la taxe d’habitation, puisque 70 % des habitants la payent.
L’injustice touche non seulement les contribuables, mais aussi les territoires.
M. Gérald Darmanin, ministre. Pour avoir assisté hier au congrès des maires de France, j’ai constaté qu’une partie des maires applaudissaient le discours de M. Laignel, qui dénonçait la réforme de la taxe d’habitation, mais que d’autres – sans doute les élus qui sont concernés par l’iniquité territoriale – applaudissaient le Président de la République.
Applaudissementssur les travées du groupe La République En Marche.
L'amendement n° I-97, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
Pourquoi peut-on applaudir à la fois le Président de la République et le vice-président de l’AMF ? Tout simplement parce que l’on peut tous reconnaître que la taxe d’habitation n’est pas un impôt parfait, qu’elle présente un caractère injuste, qu’il est nécessaire de refonder la fiscalité locale – point sur lequel on peut s’entendre de manière assez large – et, en même temps, …
Sourires.
… considérer que cette réforme est quelque peu précipitée. Pourquoi proposons-nous la suppression de cet article ?
Trois arguments principaux militent en faveur de la suppression de cet article.
Premier argument : aujourd’hui, la taxe d’habitation est injuste – vous avez employé le mot, monsieur le ministre –, car elle repose sur des bases obsolètes ; je suis d’accord avec vous. Pourtant, si elle est injuste aujourd’hui pour 80 % des Français, pourquoi serait-elle juste demain pour les 20 % qui continueront de la payer ?
Monsieur le ministre, vous venez de déclarer que vous alliez tout supprimer ; c’est bien. Pour notre part, nous considérons non pas que tout doit rester en l’état ou que tout est parfait, mais qu’il nous faut un peu de temps – une année de plus – pour proposer la suppression de la taxe d’habitation pour tout le monde et son remplacement par une fiscalité plus juste.
Tel est l’objet de cet amendement présenté par la commission des finances, ni plus ni moins.
Aujourd’hui, concrètement, le caractère injuste de la taxe d’habitation va se concentrer sur les 20 % de Français qui continueront de la payer.
Deuxième argument : la question de l’hyperconcentration. Si 20 % des ménages acquittent 83, 4 % du produit d’une taxe, soit 9 milliards d’euros, c’est une hyperconcentration.
De ce point de vue, j’aimerais que l’on s’interroge sur le problème constitutionnel de l’égalité devant l’impôt.
Vous avez cité des cas pratiques, monsieur le ministre. Pour ma part, j’ai aussi regardé les tableaux. Prenons le département du Nord, qui est un bon exemple. À Tourcoing, votre commune, 91 % de la population seront exonérés, 93 % à Briastre, 94 % à Dechy et 96 % à Denain. Cela signifie que, dans plus de 3 000 communes, moins de cinq contribuables paieront la taxe d’habitation ; dans d’autres, il n’y en aura qu’un, et il se pourra même qu’il n’y en ait pas du tout dans certaines communes !
Imaginons que nous allions jusqu’au bout de la réforme et qu’un seul contribuable soit assujetti à la taxe d’habitation. Si ce dernier pose une QPC pour s’étonner d’être le seul à payer le balayeur ou l’employé municipal de la commune, le Conseil constitutionnel ne considérera-t-il pas que se pose là un problème d’égalité devant l’impôt ? Il serait étonnant qu’il n’émette pas au moins des réserves d’interprétation si la réforme était menée à son terme.
En théorie, l’impôt est universel. Nous sommes donc là face à un véritable problème d’égalité devant l’impôt, les chiffres en attestent.
Troisième argument : cela va accroître les inégalités entre les communes, y compris au sein d’un même département.
Poursuivons avec l’exemple du Nord et prenons des cas extrêmes : à Denain, 96 % de foyers fiscaux seront exonérés, contre seulement 61, 47 % à Marcq-en-Barœul. Ces communes n’auront pas du tout le même pouvoir – c’est déjà le cas aujourd’hui, mais ce le sera encore plus demain –, puisque certaines auront une masse fiscale leur donnant la capacité d’augmenter leurs taux. Je suis d’accord avec vous, monsieur le ministre : on ne peut pas laisser aujourd’hui les choses en l’état, mais il faut aller jusqu’au bout de la réforme et ne pas la faire en trois ans ; il faut la faire en une fois.
Évitons cet engrenage qui finira par accroître les inégalités. Lorsque l’on voit que, à Neuilly-sur-Seine, seuls 35 % des foyers sont exonérés, contre 87 % à Gennevilliers, les inégalités entre les communes s’en trouvent accrues. Il y aura même des communes qui auront jusqu’à 100 % de foyers exonérés.
Non, aujourd’hui, aucune commune n’est dans un tel cas de figure ! Mais ce sera possible demain, parce que, avec le revenu fiscal de référence, dans plus de 3 000 communes, la taxe d’habitation sera payée par moins de cinq contribuables.
Je ne dis pas que la situation est aujourd’hui parfaite. Je ne dis pas qu’elle ne mérite pas qu’on ne s’y s’arrête pas, pas plus que je ne dis que les bases ne sont pas obsolètes. Sur tous ces points, nous pouvons nous rejoindre, monsieur le ministre, et c’est pour cette raison que certains maires ont pu applaudir à la fois le Président de la République lorsqu’il a affirmé que la réforme était nécessaire et ceux dont les discours plaidaient pour une réforme globale, faisant valoir que l’on ne pouvait pas faire cette réforme en trois ans, mais qu’il fallait d’ores et déjà se mettre autour de la table.
C’est la raison pour laquelle, dans sa sagesse, le Sénat ne s’oppose pas à une réforme, mais refuse de mettre la charrue devant les bœufs. Il veut prendre le temps nécessaire pour proposer un dispositif plus juste et plus cohérent. Une telle réforme ne peut s’élaborer en une semaine. Vous l’avez rappelé, monsieur le ministre : pendant trente ou quarante ans on n’a pas fait la réforme des bases locatives ; on ne peut pas en quinze jours accomplir ce qui n’a pu l’être en dix ou vingt ans.
Par conséquent, le Sénat propose en quelque sorte de repousser cette réforme, qui mérite mieux qu’un débat de cinq minutes.
Sourires.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement. Je tiens à répondre avec le plus grand sérieux aux arguments du rapporteur général, que je ne sous-estime pas – ni le rapporteur général ni les arguments !
Qu’allons-nous faire ? Nous allons tenir une promesse présidentielle et législative, qui a été largement débattue, largement contestée et a fait l’objet d’un large débat. Il ne s’agit pas d’un débat de cinq minutes, monsieur le rapporteur général : cela fait six mois que je suis interpellé sur ce sujet au moins deux fois à chaque séance de questions d’actualité au Gouvernement, et je suis à chaque fois très heureux de répondre. Voilà des mois et des mois – cette question était sans doute un peu l’objet de la campagne sénatoriale que certains d’entre vous ont menée – que nous évoquons ce sujet. Pour ma part, je suis prêt pour le débat que vous souhaitez.
Le projet de loi de finances pour 2018 prévoit – c’est la chronique annoncée – que 30 % seront retirés du montant de la taxe d’habitation que les contribuables recevront à l’automne prochain, puis 35 % les deux années suivantes. Ainsi, 80 % de ceux qui s’en acquittent aujourd’hui ne la paieront plus du tout demain.
Aujourd’hui, la taxe d’habitation s’élève en moyenne – par définition, les différences sont importantes – à 600 euros. L’année prochaine, elle coûtera 200 euros de moins. Le contribuable paiera donc à peu près 400 euros, puis 200 euros en 2019, puis zéro euro en 2020.
Le Gouvernement a fait le choix de ne pas augmenter les exonérations. Aujourd'hui, ceux dont le revenu fiscal de référence est inférieur à 10 700 euros ne paient pas de taxe d’habitation.
Monsieur le rapporteur général, vous oubliez de dire que les iniquités territoriales que vous évoquez existent déjà ! À Tourcoing, 60 % de la population ne paient pas la taxe d’habitation, contre seulement 20 % à Marcq-en-Barœul. L’argument d’égalité, notamment devant le Conseil constitutionnel, ne tiendra pas, car l’iniquité est déjà constatée, et elle constitue une atteinte préjudiciable au principe même d’égalité.
Si l’on mettait en place aujourd’hui une taxe d’habitation avec les valeurs locatives des années soixante-dix, le Conseil constitutionnel censurerait certainement une telle disposition ! L’iniquité territoriale et l’inégalité constitutionnelle existent aujourd'hui ; elles n’apparaissent pas dans le texte du Gouvernement. Nous n’augmentons pas les exonérations. Il s’agit, comme vous l’avez compris, d’un dégrèvement.
Vous proposez de différer cette réforme, c’est-à-dire de différer la baisse d’impôts pour nos concitoyens. En d’autres termes, vous nous demandez de répondre à votre interrogation institutionnelle, qui n’est pas à sous-estimer et pour laquelle nous pouvons avancer très vite, en nous demandant de ne pas baisser les impôts de nos concitoyens l’année prochaine.
Monsieur le rapporteur général, vous proposez même – cela m’étonne, au regard de votre rigueur budgétaire et de la grande cohérence de vos propos – de supprimer la taxe d’habitation en une fois pour 100 % des foyers fiscaux, ce qui représente 18 milliards d’euros de fiscalité dans le budget de l’État l’année prochaine ou l’année d’après.
M. Gérald Darmanin, ministre. C’est bien ce qui nous oppose : vous voulez un impôt de remplacement, nous n’en voulons pas.
Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.
Monsieur Dallier, les 3 milliards d’euros de baisse d’impôts…
M. Gérald Darmanin, ministre. Je comprends bien que vous pensiez tous à 2028, 2033, voire 2157 !
Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.
Il est prévu l’année prochaine une baisse d’impôts pour les Français, qui correspond en moyenne à 200 ou 250 euros.
M. Gérald Darmanin, ministre. Vous, vous souhaitez que ce soit remplacé par un autre impôt, c’est votre choix. Ne nous trompons pas de débat. Vous êtes favorables à ce que l’on ne baisse pas les impôts des classes moyennes et des classes modestes cette année. Ce n’est pas le projet du Gouvernement.
Mêmes mouvements.
Madame la sénatrice, les classes modestes la payent. Vous le savez très bien, vous qui êtes une élue de terrain, il y a des employés municipaux, des secrétaires médicales, des personnes au chômage qui habitent dans des quartiers difficiles qui paient aujourd’hui 1 200 euros de taxe d’habitation ; cela existe. Les classes modestes, ce ne sont pas des gens qui gagnent 600 euros par mois, ce sont aussi des gens qui gagnent 1 200, 1 300 ou 1 400 euros par mois…
D’un côté, les retraités les moins modestes sont ceux qui gagnent moins de 2 500 euros par mois. C’est contre-intuitif avec votre discours. Quand on parle de la taxe d’habitation, vous dites que les classes modestes ne sont pas concernées. Voilà un discours politique qui n’est pas très cohérent. Mais ce n’est pas très grave, c’est sans doute la loi du genre…
Monsieur le rapporteur général – c’est important, car le juge constitutionnel lira sans doute le compte rendu de nos travaux –, l’unique contribuable d’une commune – imaginons, et s’il n’y en a plus qu’un seul à Tourcoing, je serais peut-être celui-là, pour reprendre la chanson. §– devra payer le balayeur. Mais enfin, monsieur le rapporteur général, vous ne croyez pas vous-même à cette fable ! Ce sont, en très grande partie, les 70 % de dotations de l’État qui permettent de payer le balayeur à Tourcoing. Dans ma commune, les recettes fiscales représentent un tiers des ressources.
Heureusement qu’il y a la solidarité nationale !
Heureusement qu’il y a l’État ! Heureusement qu’il y a la DGF et la DSU – et je comprends que les élus se battent pour son maintien ! Le fait que la solidarité nationale intervienne dans le fonctionnement des services n’a rien de nouveau, vous voyez bien ce que je veux dire, même si, bien sûr, les recettes fiscales peuvent bien évidemment y contribuer.
Enfin, vous évoquez les taux. Où avez-vous vu qu’il n’y avait pas de liberté de taux dans ce que nous proposons ? La liberté des taux est complète pour les élus. Le principe de libre administration des collectivités – c’est l’article 72 de la Constitution – est totalement respecté. Nous proposons un dégrèvement sur la base de l’année 2017, prenant en compte la revalorisation des bases, les nouveaux habitants, les nouvelles constructions…
Certains élus n’augmentent pas les impôts, monsieur le sénateur ! Vous-même, vous avez été l’un de ceux qui ne les ont pas augmentés, ce qui est très vertueux.
Je le répète, il n’y a pas de limitation du pouvoir pour ce qui concerne les taux. Une telle limitation aurait en effet été contraire à la Constitution.
Enfin, la révolution fiscale que nous souhaitons tous mettre en œuvre et à laquelle la Haute Assemblée, je l’entends, souhaite participer – nous écouterons évidemment avec beaucoup de respect ce que proposeront les sénateurs –, traduit notre volonté d’instaurer un impôt clair pour nos concitoyens. Permettez-moi de vous retourner votre argument, monsieur le sénateur. Objectivement, aujourd'hui, il faut être beaucoup plus intelligent que votre serviteur – ce n’est pas difficile, j’en conviens §– pour expliquer clairement et en quelques mots la taxe d’habitation à nos concitoyens. Quand vous prenez des décisions politiques, y compris budgétaires, il faut les expliquer aux contribuables.
Chaque année, j’ai baissé de deux points la taxe d’habitation dans ma commune en réalisant environ 500 000 euros d’économies au titre des dépenses de fonctionnement. C’est difficile, certes, mais d’autres ont fait mieux que moi. Baisser de deux points la taxe d’habitation, c’est se condamner à ne pas pouvoir l’expliquer à ses administrés, la taxe d’habitation pouvant être revalorisée par le Parlement, ce qui est bien normal, et par d’autres intervenants, pas uniquement les communes. En tant que maire, vous pouvez gérer de manière très vertueuse les finances publiques sans pour autant en récolter les fruits. Les communes ont le choix d’augmenter, de stabiliser ou de baisser les impôts, en fonction de leurs projets. Après tout, je ne vois pas d’inconvénient particulier à augmenter les impôts pour financer un projet.
Aujourd’hui, plusieurs d’entre vous l’ont souligné, cet impôt empêche l’instauration d’un lien direct entre le contribuable et le citoyen. Sachant que, dans une majorité de communes, une majorité de gens ne paient pas cet impôt en raison d’exonérations et de dégrèvements déjà décidés par le Parlement et par l’État et que, par ailleurs, le lien entre le contribuable et la décision politique n’est pas clair, il est temps de prendre la décision courageuse de supprimer cet impôt.
Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.
Le Gouvernement aurait pu imaginer un autre dispositif, tels que ceux qui ont été proposés dans certains amendements. Concrètement, il était possible de mettre en œuvre l’engagement du Président de la République, que l’on comprend très bien – on sait ce qu’est la politique ! –, de redonner du pouvoir d’achat. Le Gouvernement aurait ainsi pu imaginer un mécanisme de crédit d’impôt, certes un peu complexe, équivalant au montant de la taxe d’habitation, sans toucher à la taxe d’habitation. Mais vous mettez le doigt dans un engrenage.
Comme l’a avancé Philippe Dallier, pensez-vous sérieusement qu’il sera possible d’imposer une forme d’impôt rénovée aux 80 % de personnes qui, en moyenne, auront été définitivement exonérées de taxe d’habitation ? Cela sera extrêmement difficile. Par définition, avec cette réforme, qui préempte l’avenir, nous nous condamnons, nous nous limitons nous-mêmes. C’est extrêmement dangereux. Voilà ce que je reproche fondamentalement à cette réforme.
Permettez-moi maintenant de m’arrêter un instant sur ce que vient de dire le ministre, car c’est très important.
Je reconnais, notre approche étant extrêmement pragmatique, que le Gouvernement, en choisissant le dégrèvement plutôt que l’exonération, a heureusement retenu la solution la plus honnête à l’instant t. L’État se substitue au contribuable. En l’espèce, je le concède bien volontiers, le Gouvernement n’a pas de mauvaises intentions, la perte de recettes pour les collectivités sera intégralement compensée.
Cela étant dit, en réponse à Philippe Dallier, le ministre a indiqué qu’il n’y aurait pas de limitation du pouvoir de taux. Or, dans l’étude préalable, à la page 19, le Gouvernement écrit : « Un mécanisme de limitation des hausses de taux décidées ultérieurement par les collectivités et de prise en charge de leurs conséquences […] sera discuté dans le cadre de la Conférence nationale des territoires. »
Pour ma part, je suis un peu inquiet. D’un côté, on nous assure qu’il n’y aura pas de limitation du pouvoir de taux, mais, de l’autre, il est écrit noir sur blanc dans l’étude préalable qu’un « mécanisme de limitation des hausses de taux » est prévu. Monsieur le ministre, oui ou non, un mécanisme de limitation des hausses de taux sera-t-il instauré ? Vous nous dites que non, mais il est écrit le contraire dans l’évaluation préalable.
Jusqu’à preuve du contraire, le pouvoir fiscal appartient au Parlement, non à la Conférence nationale des territoires !
Le débat est passionnant, mais je vais essayer d’être raisonnable dans mon temps de parole, monsieur le président.
Monsieur le rapporteur général, j’entends ce que vous dites sur la difficulté à imposer une nouvelle taxe à ceux qui auront été exonérés de la taxe d’habitation et qu’il ne restera que 20 % de contribuables. Mais vous raisonnez à impôts constants. L’idée du Gouvernement, sur laquelle les élus auront à travailler de façon approfondie cette année, c’est de spécialiser les impôts par collectivité, par exemple la TVA pour la région. Peut-être pourrait-on trouver un impôt national – je dis bien : peut-être – pour les départements, afin de régler leurs problèmes, notamment en reprenant en direct un certain nombre de domaines. Le Président de la République s’est ainsi exprimé sur la situation des mineurs isolés, par exemple. Peut-être pourrait-on affecter une taxe locale, notamment sur le foncier, aux communes et aux EPCI ? Ce sont là des hypothèses sur lesquelles nous pourrions travailler, mais je le répète, ne raisonnons pas à impôts constants.
Enfin, monsieur le rapporteur général, j’ai beaucoup de respect pour le Parlement. Je rappelle que l’étude préalable n’est pas le projet de loi de finances, lequel ne prévoit pas d’encadrement des taux. Vous aurez constaté que, dans l’étude préalable, il est écrit que nous « pourrions » proposer un mécanisme de limitation des hausses de taux dans le cadre de la Conférence nationale des territoires.
Il est écrit qu’un tel mécanisme « sera » discuté, non pas qu’il le « serait » !
Le projet de loi de finances, je vous le répète – j’espère que vous croyez en ma parole et au texte qui vous est présenté –, nous pouvons tous en convenir, ne prévoit aucun mécanisme d’encadrement des taux.
C’est une proposition intelligente qui éviterait nombre de propos démagogiques de quelques élus. Cela étant dit, si jamais la Conférence nationale des territoires ne le souhaitait pas…
M. le rapporteur général s’exclame.
Monsieur le rapporteur général, je vous le dis avec grand plaisir : ce n’est pas proposé dans le projet de loi de finances et vous aurez remarqué qu’aucun amendement en ce sens n’a été adopté en première lecture par l'Assemblée nationale à la suite d’un avis favorable du Gouvernement !
Mes chers collègues, les prises de parole sur l’article ayant été nombreuses, je vous propose de passer au vote.
M. Victorin Lurel. Je demande la parole, pour une explication de vote, monsieur le président !
Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.
Monsieur le ministre, j’avoue que j’approuve le dispositif, même si j’émets quelques réserves sur ce que vous venez de dire.
Si je comprends bien, un maire pourra librement fixer ses taux lorsqu’il préparera son budget primitif. Ceux qui seront exonérés de la taxe d’habitation subiront cette augmentation des taux et les 20 % de contribuables qui n’en seront pas exonérés seront bien obligés de payer.
Or, d’ici à 2020, vous souhaitez supprimer totalement, et non plus simplement dégrever, la taxe d’habitation. J’avoue que cela me paraît un peu difficile. Il sera compliqué d’imposer ensuite ceux qui auront pris l’habitude d’être totalement exonérés. Entre-temps, les maires – en tant que maire, je pense que j’aurais été tenté de le faire pendant trois ans ! – auront tendance à augmenter les impôts en attendant la compensation par l’État.
Il s’agirait en quelque sorte d’augmenter le produit fiscal sachant, à terme, que vous le prendrez en compte. J’approuve la mesure, monsieur le ministre, mais je crains, je tiens à le dire, quelques dérives.
Monsieur le sénateur, je n’aurais pas fait comme vous. Mais chacun ses tendances…
J’entends ce que vous dites. C’est pour cette raison que j’indique à la Haute Assemblée que le montant de la taxe d’habitation des Français sera celui de l’année 2017 au taux normal, diminué des 30 % décidés par la représentation nationale et le Gouvernement – cela sera très clairement mentionné sur l’avis d’imposition. Nous ferons également figurer sur une petite ligne l’augmentation décidée par le maire. Si un maire décide d’augmenter la taxe d’habitation parce qu’il considère que c’est nécessaire pour financer sa vie locale, cela relève de sa responsabilité, et c’est tout à fait juste. Quelle belle démocratie quand les gens voient qui décide d’augmenter les impôts !
Cela étant dit, je ne suis pas certain que tous les élus locaux opteront pour une augmentation. Ils l’auraient fait si nous avions fait le choix d’une exonération. J’avoue que c’est ce qui nous a largement poussés à choisir le dégrèvement. Sans cela, le comportement municipal ou local que vous évoquez aurait été assez justifié, par nature, mais le dégrèvement donne lieu à la même recette fiscale dynamique.
Je précise que l’exonération se faisant par tiers – j’ai expliqué la chronique –, personne ne se retrouvera dans la situation de ne pas payer d’impôt pendant une période avant de devoir en payer de nouveau ensuite du fait de l’augmentation des taux décidée par le maire.
La question qui se pose est celle de savoir ce que l’on fera au bout de trois ans s’agissant de la redevance, qui est attachée à la taxe d’habitation. Peut-être pourrions-nous tous travailler collectivement à cette autre réforme ?
Lorsque nous aurons trouvé, l’année prochaine je l’espère, la forme concrète que prendra le nouvel impôt local et que nous l’aurons voté, en 2019, je l’espère aussi, nous aurons réglé les problèmes que vous soulevez. Cela étant dit, je ne pense pas qu’il soit politiquement intéressant pour les élus d’augmenter les taux.
M. le président. Mes chers collègues, sur ce sujet d’importance, nous allons poursuivre les explications de vote pour permettre à ceux d’entre vous qui ne sont pas exprimés sur l’article de pouvoir le faire.
Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.
L’explication de vote est de droit, mais je vous demande d’être très concis.
La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Nous avons tout de même bien le droit d’expliquer notre vote, surtout que nous allons, comme vous, voter l’amendement de la commission. Ce n’est tout de même pas si fréquent !
Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.
Sourires.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Alors, prenez votre temps !
Nouveaux sourires.
Cela étant dit, ce n’est pas parce que nous allons voter comme vous que nous sommes dans le fusionnel…
Mêmes mouvements.
Je pose la question à d’autres collègues : quelle nouvelle justice fiscale nous apportera l’exonération ?
C’est ce que l’on me répond ! J’ai un petit problème, et ce n’est pas pour polémiquer. Le Gouvernement s’est engagé à réaliser 60 milliards d’euros d’économies au cours du quinquennat. C’est son choix.
J’ai suivi le débat à droite, entre la vraie droite et la droite qui est au gouvernement, et j’ai bien vu qu’il y avait un problème : vous vous renvoyez la question de savoir qui va proposer un nouvel impôt. Pourquoi dis-je cela ?
Comment allez-vous trouver l’argent, monsieur le ministre ? Au travers de la CSG ? Pour l’instant, c’est le cas. Puisque vous êtes allé jusqu’au coude, vous pouvez maintenant monter jusqu’à l’épaule et augmenter la CSG ! Le gain de pouvoir d’achat va vite se réduire comme peau de chagrin, car l’exonération de la taxe d’habitation sera compensée par une hausse de la CSG. C’est déjà le cas dans le projet de loi de finances. Qui me garantit que ce n’est pas là que vous irez chercher l’argent ? Mais peut-être allez-vous me dire que c’est là une affabulation…
Irez-vous chercher l’argent dans la TVA ? Non plus, me dites-vous ! Je vous écoute. Dans la CRDS alors, la contribution au remboursement de la dette sociale ? En tout cas, on le sait, ce ne sera pas dans l’impôt de solidarité sur la fortune. On a compris que cela ne risquait pas d’arriver avec vous au cours du quinquennat !
Telles sont les questions que nous nous posons.
Par ailleurs, on entend tout dire. On est obligé de lire la presse pour savoir ce qui pourrait éventuellement se passer. On a ainsi lu qu’on allait demander au département de partager les droits de mutation avec les communes. Peut-être allez-vous démentir cette information, monsieur le ministre ?… Ai-je de mauvaises lectures ?…
Cela signifie que l’on va opposer les collectivités entre elles pour financer un dégrèvement !
Enfin, accorder aux maires de France la grande liberté de décider du taux de l’impôt sur une assiette très faible, pour 20 % de la population, ne me paraît pas être exemplaire en termes de liberté et de confiance, mais peut-être que je me trompe…
Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et sur des travées du groupe Les Républicains.
Monsieur le ministre, notre groupe n’est pas favorable à l’ensemble de la politique fiscale du Gouvernement. La suppression de l’ISF et la mise en place de l’impôt sur la fortune immobilière, l’IFI, ne sont pas, selon nous, des mesures de justice fiscale ou sociale. Or ce sont précisément ces mesures que nous soutenons.
En revanche, lorsque des mesures nous semblent bonnes, lorsqu’elles vont dans le sens de la justice, nous les votons, sans dogmatisme. À cet égard, Claude Raynal, notre chef de file, s’est exprimé et s’exprimera ultérieurement au nom de notre groupe.
Pour ma part, lorsque je rentrerai ce week-end dans le département de la Drôme, je ne me vois pas dire à un retraité de l’enseignement, qui perçoit 1 600 euros et paie 950 euros de taxe d’habitation, que je n’ai pas voté la suppression de la taxe d’habitation, car je ne suis pas sûr de ce que fera le Gouvernement dans trois ans, et qu’il continuera donc à payer cette somme. Je ne me vois pas non plus dire à de jeunes salariés, mes enfants ou d’autres, que, ne sachant pas ce qui va se passer, je préfère qu’ils continuent de payer une taxe d’habitation injuste et qu’ils ne gagnent pas de pouvoir d’achat !
Avec pragmatisme, parce que cette mesure est bonne – je parle de cette mesure-là – et qu’elle va dans le bon sens, notre groupe votera contre l’amendement présenté par le rapporteur général.
La parole est à M. Claude Raynal, pour une explication de vote synthétique !
Réglementaire tout simplement, monsieur le président !
Je profiterai de l’arrivée de Gérald Darmanin pour lui faire préciser certaines choses.
Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
En cas d’augmentation de taux, M. le ministre vient de nous dire qu’une nouvelle ligne sur les formulaires fiscaux précisera que cette hausse a été décidée par le maire. C’est une bonne nouvelle !
J’ai interrogé tout à l’heure votre collègue sur le mécanisme de limitation des hausses de taux, mais il n’a pas osé me répondre. Pour l’instant, il est écrit dans le PLF qu’un mécanisme de limitation des hausses de taux décidées ultérieurement par les collectivités sera discuté dans le cadre de la Conférence nationale des territoires. Cela signifie qu’il n’est pas garanti dans le texte que nous examinons aujourd'hui que les collectivités seront autorisées à procéder à une hausse des taux. Or vous venez de dire l’inverse, monsieur le ministre : les taux resteront donc libres pour les collectivités durant ces trois ans. Pouvez-vous confirmer cette position ?
Je rappelle tout d’abord, monsieur Savoldelli, que le produit de la CSG va à la sécurité sociale, alors que nous parlons, nous, du budget de l’État.
Vous pouvez éventuellement me reprocher, comme l’a fait le rapporteur général au début de nos débats voilà quelques semaines, d’accroître le déficit de l’État, ce qui est vrai, même si, toutes administrations publiques confondues, le déficit diminue. Mais, voilà, nous avons pris des décisions de « sincérisation » budgétaire et de baisses d’impôts.
Vous ne pouvez pas établir le parallèle que vous avez fait : tout mettre dans un seau, mélanger, puis en faire un discours. Franchement, je vous connais, monsieur le sénateur, vous ne croyez pas vous-même à cet argument !
Il est étonnant que vous nous reprochiez de baisser les impôts pour les plus aisés et que vous ne nous souteniez pas lorsque nous proposons une mesure pour les classes moyennes et populaires. Je le dis avec facétie, sans faire de provocation inutile, au moment où M. Dominati m’écoute : il est curieux que le groupe socialiste et républicain soit favorable à la suppression d’un impôt et que les libéraux veuillent le garder ! J’en perds un peu ma grammaire !
C’était une réponse possible !
Monsieur Raynal, nous avons évoqué dans l’étude préalable, et non pas dans le projet de loi de finances, la possibilité d’instaurer un mécanisme encadré d’augmentation des taux. Cela signifie que, même si ce mécanisme devait être adopté, il serait possible d’augmenter les taux, voire de les baisser, si certains élus tout à fait vertueux le souhaitaient – je n’y crois pas beaucoup –, afin que l’État ait le moins possible à payer. Cela pose d’ailleurs la question de savoir ce qu’on fait pour les 20 % qui continuent de payer.
Monsieur le sénateur, je viens de vous le dire : les élus auront une liberté de taux, conformément au principe constitutionnel de libre administration des collectivités, sauf avis contraire de vos assemblées, mais vous aurez remarqué que cette liberté n’a pas été encadrée en première lecture par l'Assemblée nationale. Simplement, comme je l’ai précisé, l’avis d’impôt de la taxe d’habitation fera apparaître la part entre l’effort de l’État et celui de la commune pour que le contribuable en soit informé.
Monsieur le ministre, je serai bref, car le temps est compté. Je suis évidemment favorable à la proposition du rapporteur général, car je pense qu’il faut se donner du temps. Une promesse électorale a été faite, certes, mais les promesses électorales ne sont pas toujours mises en œuvre dans le mois ou les quelques mois qui suivent une élection. Il faut prendre du temps.
Je l’ai dit, le Président de la République a une légitimité démocratique incontestable, mais les élus locaux, les maires notamment, qui sont les élus préférés des Français, ont la même légitimité, acquise depuis un peu plus longtemps. Aussi, ce que le Sénat dit en même temps au Président de la République est important.
Par ailleurs, vous avez appelé notre attention sur les ménages modestes, avec des revenus moyens, ces Français qui connaissent un certain nombre de difficultés. La taxe d’habitation étant injuste – c’est vrai, je suis d’accord sur ce point, comme tout le monde –, pourquoi ne procédez-vous pas dans le même temps à une réforme de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères, par exemple ? Cette taxe est en effet assise sur les mêmes logiques : elle produit les mêmes injustices, voire plus, car plus le foyer compte de personnes, plus il est pénalisé. En outre, il n’y a aucun lien entre la quantité de déchets produite et la taxe prélevée.
Cet élément devrait être pris en compte dans la réforme et faire l’objet d’une réflexion dans le cadre des ateliers de la Conférence nationale des territoires. Je vous invite, mes chers collègues, à être attentifs à cette question, car les recettes de cette taxe – c’est valable dans un certain nombre de collectivités de France – sont exagérément bénéficiaires par rapport au service rendu. En outre, cette taxe ne fait l’objet d’aucun arbitrage, pour ne pas dire de sanction, ni par le suffrage universel ni par les magistrats.
MM. Gérard Longuet et Sébastien Meurant applaudissent.
Pour les raisons que j’ai évoquées tout à l’heure, je voterai, à titre personnel, contre l’amendement de la commission des finances.
Tout d’abord, il va à l’encontre de l’amendement que j’ai déposé avec le groupe Les Indépendants – République et Territoires, lequel vise à satisfaire à la fois la commission des finances, en imputant la baisse de la taxe d’habitation sur l’impôt sur le revenu – donc sans toucher aux ressources des collectivités territoriales –, et le Gouvernement, en baissant immédiatement l’impôt. Il est donc antinomique avec l’amendement qui nous est présenté.
Pour être tout à fait complet, je précise que telle est ma position personnelle et que l’indépendance d’esprit des membres du groupe Les Indépendants – République et Territoires se traduira également dans les votes. Pour ma part, conformément aux engagements que j’ai pris pendant la campagne électorale devant mes électeurs, je m’opposerai à cet amendement.
Je mets aux voix l'amendement n° I-97.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe La République En Marche.
Je rappelle que l'avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 30 :
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l’article 3 est supprimé et les amendements n° I-346, I-133 rectifié, I-218, I-208, I-562 et I-552 n’ont plus d’objet.
L'amendement n° I-346, présenté par MM. Malhuret, Capus et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Le 2 du I de l’article 197 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les contribuables dont les ressources n’excèdent pas 27 000 euros de revenu fiscal de référence pour une part, majorées de 8 000 euros pour les deux demi-parts suivantes, soit 43 000 euros pour un couple, puis 6 000 euros par demi-part supplémentaire, et qui acquittent la taxe d’habitation, ont droit à une réduction d’impôt égale à un tiers du montant acquitté au titre de la taxe d’habitation l’année précédente. »
II. – Le I s’applique uniquement pour l’imposition des revenus de l’année 2017.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° I-133 rectifié, présenté par MM. P. Dominati, Longuet et Rapin et Mme Boulay-Espéronnier, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Le chapitre premier du titre premier de la deuxième partie du livre premier du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le I de la section I est ainsi modifié :
a) Le 3° du I de l’article 1379 est abrogé ;
b) Après la référence : « 1519 I », la fin du premier alinéa du I de l’article 1379-0 bis est supprimée ;
2° La section III est ainsi modifiée :
a) Les I et II sont abrogés ;
b) Les articles 1409 et 1413 sont abrogés ;
c) Le II bis de l’article 1411 est abrogé.
II. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° I-218, présenté par MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Au premier alinéa du I de l’article 1414 A du code général des impôts, le taux : « 3, 44 % » est remplacé par le taux : « 2, 5 % ».
II. – La perte de recettes découlant pour l’État de l'abaissement du taux de plafonnement de la taxe d'habitation en fonction du plafond de revenu prévu au I de l'article 1414 A du code général des impôts est compensée à due concurrence par une hausse des taux d'imposition des plus-values de long terme prévus par le a de l'article 219 du même code.
L'amendement n° I-208, présenté par M. Daubresse, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Remplacer les références :
, de l’article 1414 A et de l’article 1414 C
par les références :
, de l’article 1414 A, de l’article 1414 C et de l’article 1414 E
II. – Après l’alinéa 34
Insérer cinq alinéas ainsi rédigé :
7° bis Après l’article 1414 C, il est inséré un article 1414 E ainsi rédigé :
« Art. 1414 E. – I. – Les communes peuvent, par une délibération prise dans les conditions prévues à l’article 1639 A bis, minorer la part leur revenant de la cotisation de taxe d’habitation due au titre des logements meublés affectés à l’habitation principale des contribuables, autres que ceux mentionnés au 2° du I de l’article 1414 C. Le taux de la minoration ne peut excéder 30 % pour les impositions établies au titre de 2018 et 65 % pour celles établies au titre de 2019 et peut atteindre 100 % à compter des impositions établies au titre de 2020.
« La minoration s’applique, le cas échéant, après les dégrèvements prévus au I de l’article 1414 A et au 3° du I de l’article 1414 C.
« II. – La minoration prévue au I n’est pas prise en compte pour l’application de l’article 1636 B sexies, du IV de l’article 1636 B octies et de l’article 1636 B decies. Elle n’est pas non plus prise en compte pour l’établissement des taxes spéciales d’équipement prévues aux articles 1607 bis à 1609 G, ni pour l’établissement de la taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations prévue à l’article 1530 bis.
« III. – Le montant de la minoration est mis à la charge de la commune qui l’a instituée. » ;
III. – Alinéa 52
Après la référence :
Insérer les mots :
le 7° bis,
IV. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Par dérogation à l’article 1639 A bis du code général des impôts, les communes peuvent délibérer jusqu’au 15 février 2018 pour instituer la minoration de taxe d’habitation prévues à l’article 1414 E du même code à compter de 2018, ou de moduler, dans le cadre de la politique d’abattement municipal, les abattements des contribuables exclus du dispositif de suppression de la taxe d’habitation.
V. - Pour compenser la perte de recettes résultant des I à IV, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
… – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du présent article est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
… – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° I-562, présenté par MM. Lurel, Raynal, Éblé, Botrel et Carcenac, Mme Espagnac, MM. Féraud, Jeansannetas, P. Joly et Lalande, Mme Taillé-Polian, M. Guillaume, Mmes Meunier et Tocqueville, MM. Sueur, Vaugrenard, Daudigny, Durain, Kerrouche, Roger, Cabanel, Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 10
Supprimer cet alinéa.
II. – Alinéa 11
Remplacer le mot :
Guyane
par les mots :
Guadeloupe, en Guyane, en Martinique et à La Réunion
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° I-552, présenté par M. Tissot, Mmes Taillé-Polian et G. Jourda, M. Marie, Mmes Perol-Dumont et Espagnac, M. Dagbert, Mme Meunier et MM. Courteau et Leconte, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 47
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
11° Le II de l’article 1641 est ainsi rédigé :
« II. – Pour les frais d’assiette et de recouvrement, l’État perçoit 5, 4 % du montant des taxes mentionnées au B du I. Pour les impositions mentionnées au même B et perçues au profit des collectivités territoriales et de leurs groupements, ce taux est réduit à 4, 4 %. »
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
I. – Le IV de la section III du chapitre Ier du titre Ier de la deuxième partie du code général des impôts est complété par un article 1414 D ainsi rédigé :
« Art. 1414 D. – Les établissements mentionnés aux I et II de l’article L. 313-12 du code de l’action sociale et des familles ne se livrant pas à une exploitation ou à des opérations à caractère lucratif peuvent bénéficier d’un dégrèvement de taxe d’habitation égal à la somme des montants d’exonération et de dégrèvement dont auraient bénéficié leurs résidents en application du I, du 1° du I bis et du IV de l’article 1414 du présent code ou des articles 1414 A et 1414 C, s’ils avaient été redevables de cette taxe au titre du logement qu’ils occupent dans l’établissement au 1er janvier de l’année d’imposition.
« Ce dégrèvement ne s’applique pas aux locaux communs et administratifs.
« Le dégrèvement est accordé à l’établissement sur réclamation présentée dans le délai et dans les formes prévues au livre des procédures fiscales s’agissant des impôts directs locaux. La réclamation doit être accompagnée d’une copie de l’avis d’imposition à la taxe d’habitation de l’établissement établi à son nom et de la liste des résidents présents au 1er janvier de l’année d’imposition qui ne sont pas personnellement imposés à la taxe d’habitation. »
II. – La fraction du dégrèvement prévu à l’article 1414 D du code général des impôts calculée en fonction de la situation de chaque résident des établissements mentionnés aux I et II de l’article L. 313-12 du code de l’action sociale et des familles est déduite du tarif journalier mentionné au 3° du I de l’article L. 314-2 du même code, mis à la charge du résident en contrepartie des prestations minimales d’hébergement, dites « socle de prestations », fournies par l’établissement en application du troisième alinéa de l’article L. 342-2 dudit code ou, à défaut, remboursée au résident par l’établissement gestionnaire.
Les établissements mentionnés aux I et II de l’article L. 313-12 du code de l’action sociale et des familles inscrivent sur la facture de chaque résident le montant de la taxe d’habitation à laquelle ces établissements sont assujettis au titre des locaux d’hébergement et le montant de dégrèvement dont ils bénéficient en application de l’article 1414 D du code général des impôts.
L'amendement n° I-145 rectifié bis, présenté par Mme Di Folco, MM. de Legge et Forissier, Mmes Morhet-Richaud, Bruguière et Puissat, MM. Bazin et Huré, Mme Garriaud-Maylam, MM. Paul, Lefèvre, Perrin, Raison et Savary, Mme Procaccia, M. Morisset, Mme Gruny, MM. Laménie, Buffet, Daubresse, Paccaud, Pillet et Leleux, Mme Delmont-Koropoulis, M. Mouiller, Mme Raimond-Pavero, MM. Brisson et Husson, Mme Deromedi, MM. Gremillet, Revet, Pierre et Savin, Mme Lamure et M. Bas, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – L’article 1408 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l’application des dispositions du présent article, les établissements et services sanitaires, sociaux et médico-sociaux gérés par des organismes privés non lucratifs sont assimilés aux établissements publics d’assistance, exerçant une activité essentiellement sanitaire, sociale et médico-sociale. »
II. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Cet amendement traite des EHPAD privés non lucratifs, les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, qui sont l’une des composantes de l’offre d’hébergement des EHPAD, mais aussi des services sanitaires, sociaux et médico-sociaux privés non lucratifs.
Les établissements publics de santé, de même que les établissements publics sociaux et médico-sociaux comme les maisons de retraite publiques autonomes, sont exonérés de la taxe d’habitation. Les EHPAD de statut privé lucratif n’acquittent pas non plus la taxe d’habitation.
Il y a donc là une rupture d’égalité devant les charges publiques pour ces établissements, qui assument pourtant les mêmes missions que les établissements publics et qui ont les mêmes obligations de service public.
Pour les résidents vivant dans des EHPAD privés non lucratifs non assujettis aujourd’hui à la taxe d’habitation, cette position favorable devrait être pérennisée.
À défaut d’emprunter la voie de la simplicité, l’amendement n° I-1363 que le Gouvernement a fait adopter à l’Assemblée nationale sur la répercussion du dégrèvement de la taxe d’habitation dans les EHPAD non lucratifs augmente singulièrement le reste à charge de tous les résidents des EHPAD privés non lucratifs. Par ailleurs, il provoque un ressaut tarifaire dans les quelques EHPAD privés non lucratifs assujettis, au détriment des résidents ne bénéficiant pas du dégrèvement. Enfin, il crée encore plus de complexité.
Cet amendement vise à corriger les dispositions adoptées par l'Assemblée nationale, sur proposition du Gouvernement.
Dans le bref temps dont elle a disposé pour examiner cette nuit cet amendement, la commission s’est un peu interrogée, et je m’interroge aussi à titre personnel. J’entends bien l’argumentation de Catherine Procaccia, qui souhaite exonérer les établissements privés à but non lucratif par parallélisme avec les établissements à but lucratif. Or ces établissements visés devraient en théorie être soumis à la fiscalité, même s’il existe des exonérations de fait. C'est la raison pour laquelle nous sommes un peu dubitatifs.
Par ailleurs, je suis assez sceptique, car l’adoption de cette mesure conduirait tout simplement à une perte de recettes pour les collectivités, en raison de la diminution de nombre d’assujettis. C’est notamment le cas pour celles qui bénéficient notamment de la contribution foncière des entreprises, la CFE.
Pour ces raisons, la commission émettrait plutôt un avis défavorable. Mais nous souhaiterions connaître l’avis du Gouvernement.
Je peux comprendre les raisons de Mme la sénatrice, mais je partage les propos de M. le rapporteur général. Même si vous avez supprimé l’article 3, je tiens à dire que le Gouvernement a pris en considération un certain nombre d’éléments qui concernent les personnes âgées dans les établissements médicaux. Certes, il y a plusieurs types d’établissements, ce qui pose la question que vous évoquez, madame la sénatrice.
L’amendement n°I-1363 du Gouvernement que l’Assemblée nationale a examiné en première lecture répond à votre interrogation. En quoi consiste-t-il ?
Avec le dégrèvement de la taxe d’habitation – si l’on imagine qu’il est mis en place ! –, les députés ont souligné une possible inégalité de traitement pour les personnes âgées se trouvant dans ces établissements. Il y a trois types d’établissements, vous le savez aussi bien que moi.
Premièrement, si la personne jouit totalement de son logement, elle doit, à ce titre, s’acquitter de la taxe d’habitation comme tout citoyen pour n’importe quel appartement ou maison et sera donc concernée par le dégrèvement si celui-ci est mis en place.
Deuxièmement, la personne prise en charge au sein d’un système médico-social ne paye pas de taxe d’habitation, car l’établissement s’en acquitte pour elle en répercutant cette charge sur le prix pratiqué, comme vous l’avez souligné. Le texte du Gouvernement a pris en compte les conséquences de la baisse de la taxe d’habitation, en obligeant les propriétaires et gestionnaires de ces maisons de retraite à diminuer leurs tarifs, car ils peuvent demander le dégrèvement au même titre que n’importe quel contribuable.
Troisièmement, enfin, certains ne paient pas d’impôts, car ce n’est pas prévu dans ces établissements. Dans ce cas, un crédit d’impôt est déjà ouvert, mais il est peu connu. Nous allons le porter à la connaissance de ceux qui pourraient bénéficier de la baisse de la taxe d’habitation, sans, pour autant, la payer aujourd’hui.
La portée de votre amendement est plus large, madame la sénatrice, puisque vous souhaitez exonérer l’intégralité des maisons de retraite médicalisées privées – je ne veux aucunement caricaturer votre proposition.
Nous n’y sommes pas favorables, pour les mêmes arguments que M. le rapporteur. D’abord, cela créerait de nombreux contentieux ; ensuite, de manière générale, nous préférons limiter ce genre d’exonérations. En conséquence, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° I-98, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
ou des articles 1414 A et 1414 C
par les mots :
ou de l'article 1414 A
La parole est à M. le rapporteur général.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° I-561 rectifié, présenté par Mme Gisèle Jourda, MM. Raynal, Éblé, Botrel et Carcenac, Mme Espagnac, MM. Féraud, Jeansannetas, P. Joly, Lalande et Lurel, Mme Taillé-Polian, M. Guillaume, Mmes Meunier et Tocqueville, MM. Sueur, Vaugrenard, Daudigny, Durain, Kerrouche, Roger, Cabanel, Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… - Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation du différentiel de charges fiscales entre les établissements d’hébergement pour personnes âgées de statut public, personnalisés et non personnalisés, établissements publics totalement exonérés de la taxe d’habitation et de la taxe foncière, et les établissements d’hébergement pour personnes âgées de statut privé non lucratif.
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.
Cet amendement prévoit la remise, dans un délai de six mois, d’un rapport d’évaluation du différentiel de charges fiscales entre les établissements d’hébergement pour personnes âgées de statut privé non lucratif et les établissements d’hébergement pour personnes âgées de statut public.
Il s’agit ici de mettre en évidence la différence de traitement entre ces EHPAD qui partagent pourtant les mêmes valeurs de désintéressement et assument les mêmes missions d’intérêt général. Ce rapport permettra certainement d’éclairer cette distorsion et peut-être d’y mettre un terme, si cela est avéré.
La commission pourrait le faire également. Au demeurant, elle émet un avis de sagesse.
J’émets un avis défavorable, et ce pour deux raisons – veuillez m’en excuser, madame la sénatrice.
D’abord, il revient à votre assemblée d’évaluer le travail du Gouvernement, et non à ce dernier de s’autoévaluer. Mais je peux être à votre disposition et à celle de la commission, comme Mme la ministre des solidarités et de la santé, pour évaluer cette politique. Saisissez-vous de cette question ! C’est même le rôle institutionnel qui est le vôtre.
Par ailleurs, la demande de rapport est très restrictive, puisque vous ne parlez que de la fiscalité locale, alors que les établissements visés sont concernés par l’intégralité de la fiscalité.
Sur le fond comme sur la forme, nous ne sommes pas opposés au principe d’évaluer la politique gouvernementale – nous nous y soumettons bien volontiers. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 3 bis est adopté.
I. – A. – Les contribuables qui satisfont aux conditions d’application du 2° du I bis de l’article 1414 du code général des impôts au titre de l’année 2017 sont exonérés de la taxe d’habitation afférente à leur habitation principale établie au titre de la même année.
B. – Les contribuables mentionnés au A du présent I bénéficient, au titre de l’année 2017, du dégrèvement de la contribution à l’audiovisuel public prévu au 2° de l’article 1605 bis du même code.
C. – La perte de recettes résultant de l’exonération instituée au présent I pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre est compensée dans les conditions prévues au II de l’article 21 de la loi n° 91-1322 du 30 décembre 1991 de finances pour 1992 pour l’exonération prévue au I de l’article 1414 du code général des impôts.
II. – Pour les contribuables mentionnés au 2° du I de l’article 1414 C du code général des impôts, dans sa rédaction résultant de la présente loi, et qui bénéficient, pour les impositions établies au titre des années 2018 ou 2019, des dispositions du 2° du I bis de l’article 1414 du même code ou qui ont bénéficié en 2017 du A du I du présent article, le taux du dégrèvement prévu au 2° du I de l’article 1414 C dudit code est porté à 100 % pour les impositions dues au titre des années 2018 et 2019.
L'amendement n° I-99, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
Par cohérence avec la suppression de l’article 3, l’article 3 ter n’a plus d’objet. La commission propose de le supprimer, car le dégrèvement particulier ne se justifie plus dès lors que nous avons voté contre la réforme de la taxe d’habitation.
L’article 3 ter est intéressant, puisque le Gouvernement propose d’exonérer de la taxe d’habitation de nombreuses personnes âgées qui, aujourd’hui, ne la paient pas, mais entreraient dans son champ d’application l’année prochaine.
Nous avons eu, sur ce point, un long débat qui est parti de la demi-part des veuves. Le gouvernement précédent, au moment des élections municipales – cela n’a pas dû arranger les choses ! –, soumis à la pression populaire, a pris une mesure d’exonération de la taxe d’habitation sur trois ans, ce qui prouve que cet impôt est tellement juste que son exonération pour de nombreux contribuables satisfaisait tout le monde…
Si l’on ne fait rien, si l’on suit l’avis de votre assemblée – je caricature vos propos –, de nombreuses personnes âgées vont de nouveau rentrer dans le dispositif de la taxe d’habitation.
Voilà pourquoi nous les exonérons.
Aussi, nous émettons un avis défavorable sur cet amendement. Vous voyez la conséquence de ne pas mettre en œuvre la réforme cette année !
L'amendement est adopté.
L'amendement n° I-494 rectifié, présenté par MM. A. Bertrand, Requier, Collin, Gabouty et Arnell, Mme M. Carrère, M. Castelli, Mme Costes, MM. Gold et Guérini et Mme Laborde, est ainsi libellé :
Après l'article 3 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article L. 2222-23 du code général de la propriété des personnes publiques, il est inséré un article L. 2222-… ainsi rédigé :
« Art. L. 2222-… – Les actes, contrats et conventions qui ont pour objet l’utilisation ou l’occupation par une station de ski des bois et des forêts de l’État ou sur lesquels l’État a des droits de propriété indivis ne peuvent prévoir le paiement d’une redevance supérieure à un pourcentage du chiffre d’affaires de cette station, fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la forêt et du tourisme. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
Cet amendement, déposé sur l’initiative d’Alain Bertrand, élu de la Lozère, plus précisément de La Margeride, au-dessous de l’Aubrac, a déjà été adopté au Sénat lors de l’examen de la loi Montagne.
Les stations de ski implantées sur les bois et les forêts de l'État sont assujetties au paiement de redevances en contrepartie de l'utilisation ou de l'occupation du domaine public, par des actes unilatéraux ou contractuels autorisant cette utilisation ou cette occupation.
Afin d'éviter que ces redevances ne soient fixées de manière trop prohibitive ou hétérogène, le présent amendement vise à encadrer par la loi leurs modalités de mise en œuvre, de sorte qu'elles ne puissent dépasser un pourcentage préfixé du chiffre d'affaires de la station de ski.
Il est prévu que ce pourcentage soit déterminé par un arrêté conjoint des ministres chargés de la forêt et du tourisme, ce qui permettrait de concilier deux objectifs ne paraissant pas antinomiques : la mobilisation de ressources suffisantes par l'État, ou ses opérateurs, pour la préservation des bois et des forêts, d'une part, et la nécessaire modération des coûts d'utilisation et d'occupation du domaine par les stations de ski, d'autre part.
Pour être très direct, à vingt-trois heures hier soir, nous n’avions pas toute l’expertise nécessaire pour savoir si les redevances versées par les stations de ski au titre de l’utilisation des bois et forêts étaient « prohibitives » ou « hétérogènes », comme l’affirment les auteurs de cet amendement… C’est pourquoi nous souhaitons connaître l’avis du Gouvernement.
Toutefois, cet amendement ayant été adopté par le Sénat lors de l’examen de la loi Montagne, nous aurions un a priori favorable. Toutefois, nous aimerions des précisions de la part du Gouvernement : comment ces redevances sont-elles fixées ? Présentent-elles un caractère prohibitif ?
À ma connaissance, ces redevances n’ont pas de caractère prohibitif, monsieur le rapporteur général, même si je comprends l’esprit qui sous-tend cet amendement. Surtout, le plafonnement n’aurait pas beaucoup de sens dans la contribution nécessaire que les redevances offrent à l’Office national des forêts, l’ONF.
Un accord est intervenu entre l’État et l’ONF, et les fameuses communes forestières qui en font partie sont intéressées. Il faut donner les moyens à notre établissement public de fonctionner, sachant que la filière bois connaît, par ailleurs, vous le savez, monsieur le sénateur, de très fortes difficultés.
Il ne nous apparaît pas nécessaire, ou plutôt souhaitable, de plafonner cette redevance.
Par conséquent, nous émettons un avis défavorable.
Puisque cela a déjà été voté par le Sénat dans le cadre de la loi Montagne, nous y sommes plutôt favorables.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 3 ter.
I. – Le second alinéa de l’article 298 septies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après la première occurrence du mot : « portant », sont insérés les mots : « sur les versions numérisées d’une publication mentionnée au premier alinéa du présent article et » ;
2° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Lorsque ces prestations sont comprises dans une offre qui comporte pour un prix forfaitaire l’accès à un réseau de communications électroniques, au sens du 2° de l’article L. 32 du code des postes et des communications électroniques, ces taux sont applicables à la part de l’abonnement égale aux sommes payées par le fournisseur de service, par usager, pour l’acquisition de ces prestations, nettes des frais de mise à disposition du public acquittés par les éditeurs de presse au fournisseur de service. »
II. – Le I est applicable aux prestations de services dont le fait générateur intervient à compter du 1er janvier 2018.
L'amendement n° I-616, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Remplacer cet alinéa par sept alinéas ainsi rédigés :
Le code général des impôts est ainsi modifié :
A. Le b octies de l’article 279 est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le mot : « usagers » est remplacé par le mot : « clients » ;
2° Le second alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque la distribution de services de télévision est comprise dans une offre, composée ou non de plusieurs autres offres, qui comprend l’accès à un réseau de communications électroniques au sens du 2° de l’article L. 32 du code des postes et des communications électroniques ou à un équipement terminal au sens du 10° du même article, le taux réduit est applicable au supplément de prix payé par le client par rapport à une offre identique, mais ne comprenant pas tout ou partie de ces services de télévision, commercialisée dans des conditions comparables. Le cas échéant, cette assiette est majorée de celle établie pour l’application du taux réduit à cette autre offre.
« À défaut d’une telle autre offre, le taux réduit est applicable aux sommes payées, par client, pour l’acquisition des droits de distribution des services de télévision, dans la limite, le cas échéant, du prix auquel les services de télévision afférents aux mêmes droits sont commercialisés par ailleurs par le fournisseur. » ;
B. L’article 298 septies est ainsi modifié :
II. – Alinéa 2
Au début, insérer les mots :
Au second alinéa,
III. – Alinéa 3
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :
2° Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque ces prestations sont comprises dans une offre, composée ou non de plusieurs autres offres, qui comprend l’accès à un réseau de communications électroniques au sens du 2° de l’article L. 32 du code des postes et des communications électroniques ou à un équipement terminal au sens du 10° du même article ou la fourniture de services de télévision au sens de l’article 2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, le taux réduit est applicable au supplément de prix payé par le client par rapport à une offre identique, mais ne comprenant pas tout ou partie de ces mêmes prestations, commercialisée dans des conditions comparables. Le cas échéant, cette assiette est majorée de celle établie pour l’application du taux réduit à cette autre offre.
« À défaut d’une telle autre offre, le taux réduit est applicable aux sommes payées, par client, pour l’acquisition de ces prestations, nettes des frais de mise à disposition du public acquittés par les éditeurs de presse au fournisseur de service, dans la limite, le cas échéant, du prix auquel ces prestations sont commercialisées par ailleurs par le fournisseur. »
IV. – Alinéa 4
Remplacer cet alinéa par un paragraphe ainsi rédigé :
II. – Le A du I est applicable aux prestations de service pour lesquelles l’exigibilité et le fait générateur de la taxe sur la valeur ajoutée interviennent à compter du 1er juin 2018.
Le B du I est applicable aux prestations de service pour lesquelles l’exigibilité et le fait générateur de la taxe sur la valeur ajoutée interviennent à compter du 1er janvier 2018.
La parole est à M. le ministre.
Cet amendement tend à compléter la première proposition du Gouvernement dans le projet de loi de finances.
Les opérateurs téléphoniques proposent parfois des offres de presse en ligne et utilisent la TVA très basse – c’est le principe même de la démocratie de baisser la fiscalité, conformément au vœu des législateurs avant vous, et du Gouvernement avant moi – pour motiver l’achat d’une presse bon marché, dont le rôle est moins important que la fiscalité dans leur offre générale – certains se souviendront des offres groupées triple play avec la télévision.
Nous avons proposé un amendement pour remettre l’église au milieu du village – permettez-moi d’évoquer ce dicton populaire dans cette instance laïque –, en précisant que les opérateurs ont évidemment le droit, en lien avec les organismes de presse, d’utiliser la TVA à 2 % pour l’organe de presse, mais au prorata de l’utilisation de la presse dans cet abonnement.
Nous avons fait adopter cette disposition à l’Assemblée nationale et nous proposons de la compléter aujourd’hui, puisque mes services discutent tantôt, bien sûr, avec l’administration fiscale, tantôt avec les opérateurs, pour intégrer dans ces abonnements des utilisations concernant la télévision que nous pourrions considérer comme abusives, et pour donner à chacun de ces secteurs six mois pour s’organiser.
Cet amendement, attendu par le secteur de la presse, est raisonnable. Il encourage la lecture de la presse sur les offres modernes que rend possible la technologie, et évite la pratique d’une sorte de « dumping fiscal » qui permet d’utiliser la TVA réduite à autre chose qu’à la lecture de la presse. C’est, me semble-t-il, un amendement de bon sens.
Le sous-amendement n° I-631, présenté par M. Karoutchi, est ainsi libellé :
Amendement n° I-616
I. – Dernier alinéa
Remplacer le mot :
janvier
par le mot :
juin
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet amendement par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Pour compenser la perte de recettes résultant du IV, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Roger Karoutchi.
Je suis quelque peu gêné, car l’amendement du Gouvernement ne nous est parvenu que ce matin.
Le rapporteur spécial sur les médias que je suis en est un peu chagrin…
Dans le rapport que j’avais présenté en commission des finances, nous avions acté les mesures prises par le Gouvernement à l’Assemblée nationale. Lors des auditions auxquelles j’avais procédé, j’avais émis des réserves sur la possibilité de mettre en œuvre ce dispositif dès le 1er janvier 2018, car cela imposait à l’ensemble du secteur une espèce de révolution immédiate, de nature à menacer le modèle économique, mais nous l’avions accepté.
Ce qui me gêne dans cet amendement – et c’est pourquoi j’ai déposé un sous-amendement –, c’est que le Gouvernement ne prend qu’une partie du bloc adopté par l’Assemblée nationale : les opérateurs qui sont liés d’une manière ou d’une autre aux télévisions y figurent, mais pas les kiosques numériques ni l’ensemble de ceux qui sont liés à la presse en ligne, dont une centaine de titres de presse écrite.
Monsieur le ministre, je suis prêt à voter votre amendement, mais, comme je l’avais dit aux acteurs du monde des médias, sous réserve du report de la mesure au 1er mai 2018, ce qui favoriserait la clarification et la simplification, car la mise en place au 1er janvier les place dans une situation extrêmement contrainte.
Le sous-amendement vise, en fait, à prendre en compte l’ensemble du bloc, qui devrait s’appliquer non plus au 1er janvier, mais au 1er mai. Cela permettra à l’ensemble du secteur de se réorganiser, aux jeunes lecteurs de la presse écrite attirés par le kiosque numérique et qui, malheureusement, n’achètent pas forcément des journaux écrits de rester connectés à l’ensemble de la presse.
Il s’agit plus là d’un sous-amendement de complément que de contradiction par rapport à l’amendement du Gouvernement.
Cet amendement et ce sous-amendement nous étant parvenus assez tard ce matin, nous n’avons pas eu le temps de les examiner. Nous comprenons le sens de cette proposition.
Par conséquent, nous émettons un avis de sagesse plutôt positive à l’égard de l’amendement du Gouvernement, sous réserve de l’adoption du sous-amendement n°I-631, pour les raisons de report de la mise en œuvre de la mesure évoquées par Roger Karoutchi. Mais nous reconnaissons notre manque d’expertise sur ce sujet.
Le Gouvernement est favorable au sous-amendement n° I-631. Toutefois, pour la clarté de nos débats, et à l’intention de ceux qui nous écouteraient ou nous regarderaient via le numérique, je veux préciser que ce n’est pas parce qu’on décale la date – soyons très clairs ! – que le contrôle fiscal sera suspendu.
L’administration fiscale continue à travailler. Une nouvelle loi clarifie les choses, et je vous ai bien entendu, monsieur le sénateur. Je vous prie de m’excuser si je vous ai chagriné en déposant tardivement cet amendement, mais nous continuons la concertation sur cette question. Je propose que nous adoptions ce sous-amendement, en vous précisant, je le répète, que l’administration fiscale continuera, pendant ce temps, à travailler et n’est pas suspendue à l’éventuelle date que nous déciderions pour une nouvelle loi.
Sous cette réserve, j’émets un avis favorable, et je lève le gage.
Il s’agit donc du sous-amendement n°I-631 rectifié.
La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
Cette intervention est plutôt une demande d’information : comme vous tous, j’ai lu que certaines compagnies recourent allègrement au taux de 2, 1 %.
Pour prendre mon cas personnel, j’ai reçu très récemment une offre comprenant un service de presse, assortie d’un prix global. Si cet amendement est adopté, les opérateurs seront obligés de procéder à une ventilation, puisque vous tentez de clarifier les règles en la matière.
Autrement dit, lorsque le dispositif sera mis en place dans six mois – la disposition entrerait en vigueur le 1er juin 2018 –, ils seront obligés de reformuler leur offre. Les clients, les consommateurs devront payer un supplément pour une offre différenciée, en tout cas à part, ce qui se traduira par une augmentation du prix…
M. Victorin Lurel. … et, donc, une diminution du pouvoir d’achat. J’aimerais que vous me disiez comment les choses vont se passer concrètement, même si vous n’êtes pas un spécialiste de la technologie communicationnelle. Moi, j’ai bénéficié d’une offre globale – je ne l’ai même pas encore vraiment utilisée !
Sourires.
Monsieur le ministre, pourriez-vous nous apporter des précisions sur ce point ?
J’entends votre question, monsieur le ministre. Référons-nous à une situation connue voilà quelques années pour la télévision, avec l’offre triple play.Le Gouvernement avait d’ailleurs appliqué à peu près la même règle, ce qui explique que les débats n’aient pas été très nourris sur la proposition gouvernementale.
Soit il y a une offre à part, soit il n’y en a pas. Commercialement, la proportion, que nous pouvons calculer, est un peu complexe, mais celle-ci présente au moins le mérite de ne pas détourner la TVA réduite de la presse. Si l’on fait un effort fiscal pour la presse, ce n’est pas, d’un point de vue démocratique, pour l’appliquer à d’autres opérations commerciales, certes respectables, mais qui ne méritent pas la dépense fiscale. Nous sommes tous d’accord sur ce point.
Nous ne voulons pas non plus que les opérateurs de presse soient encouragés à faire ce type d’offres, car, comme le dit M. Karoutchi, une nouvelle façon de lire la presse se développe désormais, peut-être plus pratique ou efficace – je ne suis pas sûr que ce soit plus jeune, mais c’est, en tout cas, un autre comportement ! Évitons d’être très dépendants d’une fiscalité incitative que l’État et vous-mêmes avez décidée, avec très peu de retours en termes de retombées économiques.
Soit, il y a une offre à part. Soit, il y a une offre identique, et alors nous vérifierons, quand nous effectuerons des contrôles fiscaux, la part de la TVA dans cette offre. Certains opérateurs proposaient même un remboursement, avec un système assez ingénieux de commercialisation en utilisant cette « optimisation » – c’était assez original de leur part, pour ne pas employer un autre qualificatif. Il n’y aura donc pas d’augmentation, sauf décision contraire de leur part.
Jusqu’à présent, c’est tout de même la presse qui a contribué, grâce à son taux de TVA réduit, à vendre des motifs commerciaux qui n’étaient pas prévus par la loi. Nous avons tous concédé d’un point de vue démocratique qu’il y avait eu là un petit détournement de la fiscalité.
Le sous-amendement est adopté.
L'amendement est adopté.
L'article 4 est adopté.
La première partie du livre Ier du code général des impôts est ainsi modifiée :
1° Au 5 bis de l’article 206, après les mots : « même code », sont insérés les mots : « ou autorisées en application de l’article L. 313-1 du code de l’action sociale et des familles » ;
2° Au 1° ter du 7 de l’article 261, après les mots : « code du travail », sont insérés les mots : « ou autorisées en application de l’article L. 313-1 du code de l’action sociale et des familles ». –
Adopté.
I. – Au 1° du 4 de l’article 261 du code général des impôts, les mots : « ou de chiropracteur et par les psychologues, psychanalystes et psychothérapeutes » sont remplacés par les mots : «, de chiropracteur, de psychologue ou de psychothérapeute et par les psychanalystes ».
II. – Le I s’applique aux prestations pour lesquelles le fait générateur de la taxe sur la valeur ajoutée intervient à compter du 1er janvier 2018. –
Adopté.
L'amendement n° I-219 rectifié, présenté par MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À la fin de l’article 278 du code général des impôts, le taux : « 20 % » est remplacé par le taux : « 19 % ».
II. – Avant l’examen du projet de loi de finances 2019, le Gouvernement transmet au Parlement un rapport évaluant les effets de la disposition prévue au I du présent article sur les prix de vente.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la baisse du taux du crédit d’impôt mentionné au III de l’article 244 quater C du code général des impôts.
La parole est à M. Éric Bocquet.
La mise en place voilà quelque temps du CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, qui a coûté dès sa création 10 milliards d’euros de ressources publiques, a sans doute nécessité de réduire les dépenses publiques dans d’autres domaines et de procéder à certaines augmentations de droits indirects, notamment du taux normal et des taux réduits de la TVA.
La TVA, qui représente aujourd’hui plus de 50 % des recettes fiscales de l’État, figure largement à la première position s’agissant de nos recettes : des recettes à hauteur de 152 milliards d’euros sont attendues dans ce projet de loi de finances, soit cinq fois plus que l’impôt sur les sociétés, qui est, lui, totalement démembré par les niches, les régimes particuliers et les crédits d’impôt divers et variés.
Les mêmes qui subissent depuis des années le poids des mesures d’allégement du coût du travail en étant confinés à des niveaux de rémunération faibles sont donc appelés à solder les conséquences de ces choix fiscaux antérieurs.
Nous vous proposons, avec cet amendement, de donner un signe pour aller vers une forme de rééquilibrage de notre fiscalité, avec la baisse du taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée, pour procéder, en compensation, au relèvement du taux de l’impôt sur les sociétés.
Cet amendement vise à baisser la TVA de 20 % à 19 %, pour un coût de 7 milliards d’euros. Vous pouvez imaginer le sort de cet amendement…
Plus sérieusement, la France a un taux de TVA de 20 %, un peu inférieur au taux moyen européen de 21, 8 %. La France n’est pas simplement au-dessous de la moyenne européenne, elle se caractérise aussi par des exceptions au taux de TVA usuel plus nombreuses qu’ailleurs, avec des taux réduits et des taux super-réduits qui diminuent, sans doute de manière légitime, le produit de cette taxe. Pierre Moscovici, qui est récemment venu devant la commission des finances et la commission des affaires européennes, a rappelé ces exceptions françaises à la TVA, en expliquant que le rendement de cette taxe, comparé au pourcentage du PIB, était sans doute inférieur en France.
D’ailleurs, un certain nombre d’amendements visant à instaurer de nouveaux taux réduits ou super-réduits sur tel ou tel produit nous seront présentés ultérieurement.
La TVA a des inconvénients en termes de pouvoir d’achat, mais elle présente un avantage, très différent comparé à la CSG : elle frappe les produits importés au même taux que les autres. C’est pourquoi les effets de la TVA sont parfois plus vertueux que ceux de la hausse de la CSG, même si le résultat pour chaque foyer est le même : ils subissent sans doute une diminution du revenu disponible.
Nous ne pouvons pas nous permettre ce soir le luxe de perdre 7 milliards d’euros de recettes. Aussi, la commission émet un avis défavorable.
L’avis du Gouvernement est défavorable.
Le montant évoqué est très impressionnant. De plus, monsieur Bocquet, quand bien même nous ferions ce choix, je ne pense pas que la baisse des prix serait au rendez-vous. Or c’est l’effet escompté. Les contribuables s’en apercevraient peu, alors que la baisse fiscale serait extrêmement importante, ce qui serait quelque peu contre-intuitif économiquement.
Enfin, sans refaire le débat sur la CSG et la TVA, ce n’est pas sous cet angle, ni en hausse ni en baisse, que le Gouvernement a choisi de fonder sa fiscalité.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° I-359, présenté par MM. Buffet, Retailleau, Allizard, Bonhomme, Bouchet, Brisson, Calvet et Cambon, Mme Canayer, MM. Charon, Courtial, Cuypers, Danesi, Daubresse et Dallier, Mme de Cidrac, M. de Nicolaÿ, Mmes Delmont-Koropoulis, Deromedi, Di Folco et Dumas, MM. Forissier, B. Fournier, Frassa et Gilles, Mme Giudicelli, MM. Grand, Gremillet et Grosdidier, Mmes Gruny et Imbert, MM. Lefèvre, Leleux, Leroux et Longuet, Mmes Lopez et M. Mercier, M. Meurant, Mme Micouleau, M. Milon, Mme Morhet-Richaud, MM. Morisset, Paccaud, Pierre, Rapin, Reichardt, Savin et Schmitz et Mme Lamure, est ainsi libellé :
Après l’article 6
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 1464 I du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Aux I et IV, les mots : « neufs au détail » sont remplacés par les mots : « au détail et à terme ».
2° Les 1° et 2° du II sont ainsi rédigés :
« 1° L’entreprise réalise un chiffre d’affaires annuel d’au maximum 200 millions d’euros ;
« 2° L’entreprise réalise au moins 50 % au moins de son chiffre d’affaires annuel total avec la vente de livres au détail et à terme, compte non tenu des reventes à des détaillants pratiquant eux-mêmes, à titre accessoire ou principal, la vente de livres ; »
3° Le V est abrogé.
II. – Les 1° et 2° du I s’appliquent à compter du 1er janvier 2018.
III. – Le 3° du I s’applique à compter du 1er janvier 2019.
IV. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
V. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. François-Noël Buffet.
L’article 1464 I du code général des impôts exonère de la cotisation foncière des entreprises, la CFE, une minorité de librairies appartenant à la catégorie des petites et moyennes entreprises et bénéficiant du label « Librairie indépendante de référence ».
Cette exonération peut, dans certains cas, être étendue à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, la CVAE.
Le présent amendement a pour objet d’étendre ce régime d’exonération à toutes les librairies de taille petite et intermédiaire, essentielles au maintien d’un réseau culturel de proximité au sein des centres-villes.
Ces librairies sont confrontées, nous le savons, à une réelle paupérisation en raison des difficultés du secteur de la diffusion du livre, qui est évidemment touché de plein fouet par le recul de la lecture et par la digitalisation de l’économie. La situation s’est aggravée par la concurrence de plus en plus vive de la grande distribution ainsi que par la vente de livres en ligne proposée par des plateformes mondiales, qui bénéficient par ailleurs d’un régime fiscal beaucoup plus favorable.
Alors que le congrès des maires vient de se clôturer et que nous sommes tous engagés dans la dynamisation de nos communes, nous savons tous que les centres-villes ont besoin de cette vie culturelle forte pour pouvoir exister.
La réforme envisagée ne porte atteinte ni à la liberté des collectivités locales d’appliquer ou non le régime d’exonération prévu par l’article 1464 I du code général des impôts, ni aux finances des collectivités locales concernées, l’accroissement du nombre de librairies qui peuvent, par ailleurs, bénéficier du régime d’exonération étant limité.
C’est un vrai sujet. Aussi, la commission a émis un avis de bienveillance.
On ne peut le contester, les librairies indépendantes de centre-ville sont confrontées à de véritables difficultés à cause de la concurrence des grandes plateformes que vous avez citées. Les dispositifs existants méritent d’être revus et étendus à des réseaux de librairies un peu plus importants. La commission voit cet amendement d’un œil très favorable.
Il convient juste de s’interroger – c’est la raison pour laquelle nous souhaitons avoir l’avis du Gouvernement – sur la compatibilité de ce régime avec les règles communautaires applicables aux aides publiques. En fixant un seuil à 200 millions d’euros, ne risque-t-on pas la requalification en aide d’État par rapport au seuil du de minimis ? Cela reste à vérifier.
Sous cette réserve, la commission est favorable à cet amendement, sauf si le Gouvernement fait état d’une difficulté au regard du droit communautaire. Dans ce cas-là, il faudrait alors rectifier le seuil retenu. Sur le fond, il n’y a pas de difficultés majeures.
Monsieur le sénateur, j’ai moi-même eu l’occasion de discuter avec un certain nombre des libraires que vous évoquez. Ce secteur mérite en effet d’être soutenu. Vous l’avez rappelé, les collectivités territoriales sont libres de mener des opérations de cette nature. La rédaction que vous proposez comporte un décalage qui nous permettra de vérifier auprès de la Commission européenne le point évoqué par M. le rapporteur général, s’agissant de la règle de minimis. Il ne nous semble pas qu’il y ait de problème à ce titre, mais nous aurons le temps de nous en assurer.
Le Gouvernement émet un avis favorable et lève le gage.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 6.
Le 2° du A de l’article 278-0 bis du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les appareillages, équipements et matériels mentionnés aux c et f du présent 2°, la taxe sur la valeur ajoutée au taux réduit de 5, 5 % s’applique également aux opérations définies à l’article 1709 du code civil ; ». –
Adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-144 rectifié ter, présenté par Mmes Estrosi Sassone et Primas, MM. Milon, Mouiller, Dallier, Savary, Danesi, de Nicolaÿ, Morisset, Charon et Bazin, Mmes Deroche, Imbert et Garriaud-Maylam, MM. Magras, Savin, Laménie et Revet, Mmes Bories et Deromedi, MM. Pierre et Gremillet, Mme Canayer, MM. B. Fournier, Piednoir, Husson et Vaspart, Mme Lherbier, MM. Lefèvre, Bonne, Longuet, Rapin, Leleux, Paccaud, Paul, Kennel, Saury, Poniatowski, Chaize et D. Laurent, Mmes Di Folco et Lamure et M. Bas, est ainsi libellé :
Après l'article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 278-0 bis A du code général des impôts est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« 4. Sont définis comme travaux induits pour la rénovation de la toiture :
« – les travaux liés au maintien de l’étanchéité consécutifs aux travaux d’isolation par l’intérieur nécessaires pour assurer l’étanchéité au-dessus de l’isolant ;
« – les travaux de toiture consécutifs aux travaux d’isolation par l’extérieur : réfection totale de la couverture de la toiture, réfection totale de l’étanchéité pour l’isolation des toitures terrasses, reprise des raccords de fenêtres de toit, des corniches, des évacuations d’eaux pluviales. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dallier.
Cet amendement vise à préciser les choses en matière de taux de TVA applicable pour les travaux d’isolation des toitures.
A priori, pour l’isolation des murs, que ce soit par l’intérieur ou par l’extérieur, il n’y a pas de problème d’interprétation : on sait quel est le taux de TVA applicable.
En ce qui concerne les toitures, contrairement à une idée répandue, l’isolation peut aussi se faire par l’extérieur. Ce fait ne devrait pas perturber ceux qui sont censés vérifier les dossiers en question, mais, manifestement, ils ne considèrent pas toujours que ces travaux entrent dans le champ d’application de la TVA à taux réduit.
L'amendement n° I-459 rectifié, présenté par Mme Lienemann, M. Tissot, Mme Taillé-Polian, MM. Tourenne et Iacovelli, Mme Ghali, M. Jomier, Mme Tocqueville, M. Cabanel, Mmes Préville, G. Jourda et Meunier, M. Courteau, Mmes Lubin et Monier, MM. Marie et Dagbert, Mme Grelet-Certenais et MM. Temal et Montaugé, est ainsi libellé :
Après l’article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 278-0 bis A du code général des impôts est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« 4. Sont définis comme travaux induits pour la rénovation de la toiture :
« – Les travaux liés au maintien de l’étanchéité consécutifs aux travaux d’isolation par l’intérieur (remplacement des tuiles ou ardoises, etc.) nécessaires pour assurer l’étanchéité au-dessus de l’isolant
« – Les travaux de toiture consécutifs aux travaux d’isolation par l’extérieur : réfection totale de la couverture de la toiture, réfection totale de l’étanchéité pour l’isolation des toitures terrasses, reprise des raccords de fenêtres de toit, des corniches, des évacuations d’eaux pluviales. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Cet amendement est presque identique au précédent.
On a retenu comme principe que les travaux induits par des travaux d’isolation entraient dans le champ d’application du taux de TVA de 5, 5 %. Pour ce qui concerne les murs, les choses ont été assez bien précisées, mais, à l’évidence, de grandes zones de flou demeurent pour ce qui concerne l’isolation des toitures. Les artisans sont donc assez dépourvus pour savoir à quels travaux s’applique le taux de TVA de 5, 5 %. En définitive, les plus prudents n’appliquent pas le taux de 5, 5 % pour ces travaux induits ; le coût des chantiers est renchéri d’autant et la démarche d’isolation des toitures s’en trouve entravée.
Je rappelle que, dans bien des cas, l’isolation des toitures est considérée comme plus efficace, …
… notamment pour l’habitat individuel, que celle des fenêtres et des huisseries.
Il s’agit ici d’une adaptation technique des textes, qui n’est pas de nature à ruiner le pays et favorisera la transition énergétique.
En l’occurrence, nous sommes à la limite entre le législatif et le réglementaire.
L’objectif est que le Gouvernement précise la doctrine fiscale en matière d’isolation : nous n’avons pas eu le temps d’expertiser ce sujet totalement, mais il semblerait que le Bulletin officiel des finances publiques ne soit pas très clair. Si le Gouvernement apporte les précisions nécessaires et s’engage le cas échéant à préciser la doctrine par écrit, via soit une réponse ministérielle, soit une modification du BOFiP, nous pourrons solliciter le retrait de ces amendements. Mais nous souhaitons d’abord connaître l’avis du Gouvernement.
Madame Lienemann, monsieur Dallier, si j’ai bien compris, vous ne proposez pas une baisse de TVA supplémentaire ; vous affirmez que l’interprétation de l’administration fiscale pourrait être différente selon que l’on isole la toiture par l’intérieur ou par l’extérieur.
Mon prédécesseur s’était déjà engagé à modifier ou en tout cas à compléter les instructions fiscales sur ce point. Il ne l’a pas fait.
Si la situation est vraiment telle que l’exposent les auteurs des amendements, je m’en remettrai à la sagesse de la Haute Assemblée. Je demanderai à mon administration de réviser les instructions fiscales d’ici à la deuxième lecture à l’Assemblée nationale. Le dispositif que le Sénat aura adopté pourra alors être supprimé.
En revanche, s’il s’agit simplement d’instituer une nouvelle baisse de TVA, et donc une dépense fiscale, j’émettrai un avis défavorable sur ces deux amendements.
J’aimerais comprendre ce que proposent exactement Mme Lienemann et M. Dallier.
Monsieur le ministre, je vous le confirme, il s’agit non pas de proposer une baisse de la TVA, mais de préciser à quels travaux s’applique le taux de 5, 5 %.
Même pour les toitures couvertes, certains travaux connexes à l’isolation par l’intérieur, par exemple la restauration de l’étanchéité, n’entrent pas clairement dans le champ de la TVA à 5, 5 %. Or on peut considérer qu’il s’agit bien de travaux induits.
Le même cadre doit valoir pour les travaux d’isolation par l’extérieur. C’est déjà le cas pour les murs : les travaux de restauration de l’étanchéité sont considérés comme induits, qu’ils soient réalisés de l’intérieur ou de l’extérieur.
Les artisans demandent une clarification. Financer des travaux d’isolation sans s’occuper de la restauration de l’étanchéité ne paraît guère sensé…
Cet amendement assez technique vise à rendre plus lisible et plus rigoureux le cadre d’application du taux réduit de TVA. Il ne s’agit pas d’ouvrir la porte à n’importe quoi. Si vous nous garantissez, monsieur le ministre, qu’un dialogue avec le Gouvernement permettra de clarifier la situation, je suis prête à retirer mon amendement.
Il s’agit donc bien de demander non pas une baisse de la TVA, mais une clarification du dispositif fiscal existant, qui pour l’heure peut être interprété de diverses manières.
Plusieurs de mes prédécesseurs avaient déjà pris l’engagement de procéder à une telle clarification, mais peut-être n’ont-ils pas suffisamment bousculé leur administration.
Madame Lienemann, monsieur Dallier, pour ma part, je m’engage à écrire, dès lundi, à la direction de la législation fiscale pour que, à la lumière de nos débats, la question que vous posez puisse être éclaircie au plus vite. Bien entendu, je vous adresserai copie de ce courrier et je suivrai attentivement le dossier.
Au bénéfice de cet engagement, j’aimerais que vous retiriez vos amendements. Sinon, je m’en remettrai à la sagesse de la Haute Assemblée.
L’amendement n° I-144 rectifié ter est retiré.
Madame Lienemann, l’amendement n° I-459 rectifié est-il maintenu ?
L’amendement n° I-459 rectifié est retiré.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° I-455 est présenté par M. Dallier, Mmes Estrosi Sassone, Primas, Delmont-Koropoulis, Duranton et Garriaud-Maylam, MM. B. Fournier, Chaize, Mayet, Brisson, Cambon, de Nicolaÿ et del Picchia, Mmes Deromedi et Lavarde et MM. Paul et Lefèvre.
L'amendement n° I-465 est présenté par M. Marseille, Mme Létard, M. D. Dubois et les membres du groupe Union Centriste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au 1° du 3 du I de l'article 257, les mots : « au 2 du III et au IV de l’article 278 sexies et » sont supprimés ;
2° Après la première phrase du II de l'article 270, il est inséré une phrase ainsi rédigée : « Toutefois, la taxe exigible au titre des livraisons à soi-même d'immeubles neufs mentionnées au II de l'article 278 sexies, à l'exception de celles relatives aux locaux mentionnés aux 5 et 8 du I du même article, est liquidée au plus tard le dernier jour du troisième mois qui suit celui au cours duquel est intervenu l'achèvement de l'immeuble. » ;
3° L'article 278 sexies est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Les taux réduits de taxe sur la valeur ajoutée sont ceux mentionnés à l'article 278 sexies 0-A pour les opérations suivantes, réalisées dans le cadre de la politique sociale du logement : » ;
b) Le premier alinéa du I est supprimé ;
c) Au II, les mots : « de 5, 5 % » sont supprimés ;
d) Le 2 du III et le IV sont abrogés ;
4° Après l'article 278 sexies, il est inséré un article 278 sexies 0-A ainsi rédigé :
« Art. 278 sexies 0-A. - Les taux réduits prévus à l'article 278 sexies sont égaux à :
« 1° 5, 5 % pour les livraisons mentionnées aux 4, 5, 8, 11, 11 bis, 12 et 13 du I de cet article et les livraisons à soi-même d’immeubles dont l’acquisition aurait bénéficié de ce taux ;
« 2° 10 % pour les livraisons mentionnées aux 1, 2, 3, 6, 7, 7 bis et 10 du I de cet article et les livraisons à soi-même d'immeubles dont l’acquisition aurait bénéficié de ce taux. » ;
5° À l'article 278 sexies A, après les mots : « lorsqu'ils ne bénéficient pas du taux réduit de 5, 5 % en application », la fin de la phrase est ainsi rédigée : « de l'article 278-0 bis A ou de 10 % en application de l'article 279-0 bis et dans la mesure où ces travaux portent sur les locaux mentionnés aux 2 à 8 du I de l’article 278 sexies. » ;
6° L'article 284 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du II, les mots : « au taux prévu aux 2 à 12 du I ainsi qu'au II et au 1 du III de l'article 278 sexies » sont remplacés par les mots : « aux taux prévus aux 2 à 12 du I ainsi qu'au II et au III de l'article 278 sexies » et les mots : « ce taux » sont remplacés par les mots : « ces taux » ;
b) Au III, les mots : « aux taux prévus au 2 du III et au IV de l'article 278 sexies ou » sont remplacés par le mot : « mentionnés ».
II. – Le I s’applique aux opérations dont le fait générateur intervient à compter du 1er janvier 2018. Toutefois, ils ne s'appliquent pas aux encaissements pour lesquels la taxe sur la valeur ajoutée est exigible avant cette date.
La parole est à M. Philippe Dallier, pour présenter l’amendement n° I-455.
Cet amendement important, qui renvoie au fameux article 52, porte sur un sujet dont on a beaucoup discuté.
Chacun l’a bien compris, la proposition initiale du Gouvernement – réduire de 1, 5 milliard d’euros la dépense consacrée aux aides personnalisées au logement, les APL, et demander aux bailleurs sociaux de bien vouloir payer l’addition via une baisse des loyers – ne convient absolument pas à ces derniers, car sa mise en œuvre réduirait de beaucoup leurs capacités d’autofinancement.
Je sais que les discussions continuent entre le Gouvernement et les bailleurs ; de notre côté, nous nous efforçons, ici au Sénat, de trouver une meilleure solution, dont cet amendement constitue le premier volet.
En l’occurrence, nous proposons que, sur les 1, 5 milliard d’euros que l’État cherche à dégager, 600 millions d’euros proviennent d’une hausse de la TVA s’appliquant à un certain nombre de travaux. Le détail de ces derniers figure dans le texte de l’amendement.
Une telle proposition peut surprendre, car nous avons beaucoup bataillé, lors des débats budgétaires précédents, pour essayer d’obtenir des gouvernements successifs des baisses de TVA en faveur du secteur de la construction, mais nous nous en sommes expliqués. Seraient exclus du champ de la hausse du taux de TVA proposée les centres d’hébergement d’urgence ou temporaire, les centres pour personnes en situation de handicap, les opérations d’accession sociale à la propriété, le logement locatif dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, les QPV, le programme national pour la rénovation urbaine, le PNRU, le nouveau programme national de renouvellement urbain, le NPNRU, l’accession progressive à la propriété et les organismes de foncier solidaire, avec le mécanisme de bail réel solidaire. Les travaux de rénovation énergétique resteraient soumis au taux de TVA de 5, 5 %.
Monsieur le ministre, voilà le premier étage de la fusée. Adopter une telle mesure permettrait d’envoyer un signal positif à l’ensemble du secteur, qui attend de connaître votre position sur cet amendement. Il ne resterait plus ensuite qu’à trouver 900 millions d’euros lors de l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour ne pas dégrader le solde budgétaire. Nous ne sommes pas encore tous d’accord sur les mesures à prévoir à ce titre, mais nous allons travailler pour tenter de parvenir à une solution avec le Gouvernement.
Monsieur le président, je sollicite une suspension de séance de quelques minutes.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-huit heures quarante, est reprise à dix-huit heures cinquante-cinq.
La séance est reprise.
La parole est à Mme Valérie Létard, pour présenter l’amendement n° I-465.
Le présent amendement est identique au précédent. En effet, ces dispositions ont fait l’objet d’un travail collectif visant à répondre aux interrogations du monde du logement et des élus sur la contribution du secteur du logement à l’amélioration de la situation des finances publiques. Il conviendrait à leurs yeux de procéder d’une manière moins brutale, la réduction des APL initialement proposée ne pouvant être compensée uniquement par une baisse des loyers.
L’Assemblée nationale a commencé ce travail en proposant d’instaurer une contribution de la Caisse de garantie du logement locatif social, la CGLLS. Toutefois, le monde du logement et nous-mêmes considérons que cette solution n’est pas satisfaisante. La réflexion n’est pas achevée, mais il nous semble indispensable de commencer aujourd’hui une construction nouvelle qui, nous l’espérons, se pérennisera, afin de rassurer le monde du logement.
Monsieur le ministre, vous le savez, ce qui nous inquiète beaucoup, dans la proposition initiale du Gouvernement de réduire de 60 euros les loyers des bénéficiaires des APL, c’est qu’une telle mesure serait totalement irréversible et ferait perdre définitivement au monde du logement 1, 7 milliard d’euros. Je le rappelle, chaque million d’euros d’autofinancement génère 10 millions d’euros d’investissements dans la construction de logements ou la rénovation urbaine. Vous êtes bien placé pour savoir combien il est nécessaire de mettre en œuvre le PNRU. Or les opérateurs centraux en sont les bailleurs sociaux. Qu’adviendra-t-il si ces derniers voient leurs capacités d’autofinancement définitivement amputées ?
Vous connaissez également l’enjeu que représentent les garanties, se chiffrant en milliards d’euros, apportées par tous les niveaux de collectivités territoriales, des communes jusqu’aux régions.
Il faut résoudre l’équation et répondre aux exigences d’équilibre budgétaire, bien sûr, mais nous sommes convaincus qu’il faut trouver une autre voie, équilibrée, que nous commençons ici à tracer.
J’appelle aussi votre attention sur le danger de recourir à la progressivité : elle est selon nous complètement à proscrire !
Mes chers collègues, quelle que soit l’importance du sujet abordé, je vous appelle à respecter les temps de parole : nous avons énormément d’amendements à examiner.
Quel est l’avis de la commission ?
Je remercie celles et ceux de nos collègues qui, sur toutes les travées, ont essayé d’apporter une réponse à ce vaste problème du financement du logement social. Nous aurons l’occasion d’en discuter de nouveau lorsque nous aborderons l’article 52.
Pour l’heure, la commission émet un avis favorable sur ces deux amendements.
Comme vous le savez, le Gouvernement a ouvert la discussion sur l’article 52, puis sur la politique du logement en général.
Le Gouvernement n’est pas fermé à l’idée de jouer sur la fiscalité, notamment sur la TVA, pour réaliser les économies prévues. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur ces amendements, dont la rédaction peut toutefois inspirer quelques doutes juridiques. Il y est même, dans l’esprit, favorable, mais leur écriture devra sans doute être corrigée juridiquement à l’Assemblée nationale pour assurer le rendement de 600 millions d’euros envisagé.
C’est un moment important du débat, puisque nous évoquons ici l’avenir du logement social. Le dossier est complexe, cette discussion étant indissociable de celle que nous aurons sur l’article 52, lors de l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances.
Ces amendements tendent à relever le taux de TVA à 10 %, contre 5, 5 % actuellement, pour l’acquisition de terrains à bâtir, la construction et la rénovation d’immeubles dans le secteur du logement social.
Cette proposition s’inscrit dans le cadre de la recherche d’une alternative à la décision du Gouvernement de réduire de 1, 5 milliard d’euros le montant des APL dans le parc locatif public, réduction compensée par une baisse des loyers de solidarité pratiqués par les bailleurs.
Le groupe socialiste et républicain est fortement opposé à cette ponction de 1, 5 milliard d'euros sur le logement social, sachant que, dans le même temps, on supprime l’ISF.
On dénombre 4, 2 millions de logements HLM, occupés par plus de 10 millions de personnes, et 15 % des ménages, dont la moitié vit en dessous du seuil de pauvreté, relèvent du logement social. Pratiquant un loyer moyen de 390 euros, contre 570 euros dans le parc privé, les organismes d’HLM répondent déjà à une forte demande sociale.
Il est difficile d’accepter que l’effort de réduction budgétaire continue de toucher les plus pauvres, la mesure envisagée étant en outre en complète contradiction avec la volonté affichée par le Gouvernement, notamment au travers de son projet pour le « logement d’abord ».
En proposant une augmentation de la TVA applicable aux opérations réalisées dans le logement social, les auteurs de ces amendements proposent une première étape vers un compromis. Dont acte ! Mais le Gouvernement, par la voix du Premier ministre, a encore confirmé hier, devant le Sénat, sa volonté de réduire les crédits destinés aux APL de 1, 5 milliard d’euros. Or la baisse des APL couplée à la réduction des loyers de solidarité ne constitue en rien une solution de compromis, car elle pèsera sur les organismes accueillant un grand nombre de ménages bénéficiaires des APL.
L’Union sociale pour l’habitat a avancé une série de propositions alternatives à cette baisse des APL, dont la hausse de la TVA. Parce que cette mesure va de pair avec le vote de la suppression de l’article 52, qui sera examiné lors de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances, nous voterons ces amendements, pour préserver la possibilité d’un accord, ici au Sénat, et pour écarter la menace, inacceptable et irréversible, que fait peser cet article 52 sur le modèle social et républicain du logement social en France. Cependant, que les choses soient claires : nous le ferons dans cette seule et unique perspective !
Je voudrais d’abord rappeler que la ponction envisagée au détriment du logement social est inacceptable : on finance ainsi pour moitié l’allégement de l’ISF, qui coûtera 3 milliards d'euros ! Cela répond-il à une urgence pour notre pays ? Je ne le crois pas !
En outre, le mode opératoire retenu pour ce prélèvement menace structurellement le système du logement social en France, car en s’attaquant au niveau des loyers existants, on fragilise les capacités d’autofinancement des organismes bailleurs sociaux. La fragilisation de leurs fonds propres entraînera une réduction de l’effort de construction et de rénovation, ainsi que du financement des opérations menées par l’ANRU. Cela est injuste, et porte atteinte à l’action des collectivités locales et à notre modèle républicain.
Au travers de leur proposition, M. Dallier et Mme Létard essaient d’éviter la casse, en assurant à l’État le rendement qu’il attend par une voie qui ne remette pas structurellement en cause le modèle du logement social et ne recoure pas à la progressivité.
Nous en débattrons plus en profondeur lors de l’examen de l’article 52. Pour l’heure, au titre de ce « paquet », l’Union sociale pour l’habitat a accepté une hausse de la TVA pour le parc locatif hors quartiers prioritaires de la politique de la ville, mais pas pour l’accession sociale à la propriété, par exemple. Cette acceptation a pour contrepartie l’engagement de l’État de maintenir le taux de rémunération du livret A à 0, 75 %, ce qui favorisera les investissements des organismes d’HLM, à hauteur de 250 millions à 270 millions d’euros. Sachant que les renégociations de prêts leur permettraient de dégager un montant équivalent, la hausse de la TVA proposée serait absorbable pour le mouvement HLM, même si, fondamentalement, nous avons toujours considéré, dans cette assemblée, que ce secteur essentiel pour la Nation devait bénéficier d’un taux réduit de TVA.
La mesure proposée ne provoquera donc pas une déstabilisation majeure du secteur du logement social tout en procurant à l’État un montant de ressources que nous évaluons à 600 millions d’euros environ. Nous pensons que ce dispositif représente une contribution raisonnable du mouvement HLM à la réduction du déficit public. Toutefois, je le dis tout net : nous ne le voterons que dans un esprit de compromis, car nous sommes en désaccord avec le principe !
Notre groupe concentrera toute son énergie sur la suppression de l’article 52 !
Sauf erreur de ma part, la TVA, portée au taux de 10 %, pourra être récupérée par les sociétés anonymes, mais pas par les offices publics, leurs statuts ne le permettant pas.
Ce n’est pas rien ! L’augmentation de la TVA va donc renchérir le coût de la construction pour les offices publics.
Dans nombre de nos villes, on trouve des programmes comprenant à parité des logements en accession à la propriété et des logements destinés à la location. Par conséquent, une baisse des engagements en faveur du logement social aura forcément des conséquences sur l’accession à la propriété, donc sur les promoteurs et les investisseurs.
Cela étant, la proposition qui nous est faite s’apparente à un pansement sur une jambe de bois ! Après avoir supprimé 3 milliards d'euros de crédits en loi de programmation, on essaie à toute force de trouver une solution. Celle que proposent nos collègues a déjà été mise en œuvre dans le passé sous M. Fillon : la droite avait porté le taux de TVA de 5, 5 % à 7 %, avant que la gauche, bien que pas assez à gauche, ne le ramène à 5 % en 2014.
On ne peut donc parler ici d’audace ou de grande innovation ! Il s’agit plutôt de choisir qui paye, qui est mis à contribution dans la société. Nous ne voterons pas ces amendements, mais demanderons, bien entendu, la suppression de l’article 52.
Appartenant au groupe socialiste et républicain, je me range à la position qu’il a arrêtée, non sans émettre les réserves suivantes, à son intention et à celle du Gouvernement.
Alors que les APL ne s’appliquent pas dans les outre-mer, ces derniers vont pourtant devoir payer comme tout le monde. Nous sommes actuellement au taux de 2, 5 % – dans la pratique, c’est même 2, 37 %, grâce à l’intervention de la CGLLS, la Caisse de garantie du logement locatif social – et nous allons passer à 8 %. Par ailleurs, les outre-mer ne bénéficient pas du Fonds national des aides à la pierre.
Nous développerons nos arguments lors de l’examen de l’article 52, mais j’indique d’ores et déjà, par anticipation, que le Gouvernement n’a pas évalué les conséquences de ses choix pour les outre-mer.
S’agissant de la TVA, notamment sur les terrains à bâtir, nous relevons d’une législation particulière. Je n’aimerais pas que, par symétrie et par cohérence, on relève à 5, 5 % le taux s’appliquant dans nos territoires, qui est aujourd’hui de 2, 1 %, au motif qu’il passe de 5, 5 % à 10 % dans l’Hexagone. Je demande au Gouvernement de nous donner quelques garanties sur ce sujet. Je ne cacherai pas que j’ai déjà rencontré les cabinets des deux ministres chargés du dossier et qu’il y a des points à revoir pour les outre-mer.
Sous ces réserves, je me rallierai au quasi-consensus qui se dessine.
Monsieur le ministre, je prends votre avis de « sagesse favorable » comme un signe encourageant. Voilà peu encore, en effet, nous nous demandions si le Gouvernement, apparemment obnubilé par l’objectif de réduire les dépenses de 1, 5 milliard d’euros, accepterait que l’on recherche une partie de la solution dans les recettes, en première partie du projet de loi de finances. La question du montant de recettes est importante à nos yeux, même si j’entends qu’il faut sécuriser le dispositif sur le plan juridique.
Avec bien des difficultés – à 1 heure, dans la nuit de mercredi à jeudi, nous en étions encore à essayer de calibrer ce montant –, nous avons établi une estimation à 600 millions d’euros. Je ne voudrais pas que, sur le fondement d’arguments juridiques, on ramène la somme à 150 millions ou 200 millions d’euros, car il faudrait dès lors aller chercher la différence directement dans la poche des bailleurs sociaux, que nous essayons de préserver autant que possible.
L’avis que vous avez rendu m’apparaît donc comme un signe positif, monsieur le ministre : la solution que nous préconisons est politiquement acceptable pour vous. Il nous faut maintenant garantir un certain rendement, et trouver le complément lors de l’examen de la seconde partie.
Pour nous, il ne peut pas non plus être question d’une montée en charge sur trois ans, d’un jeu de yoyo avec le taux de TVA, comme certains avaient pu l’imaginer.
Mme Valérie Létard approuve.
Je voudrais simplement appuyer les propos de mes collègues.
Monsieur le ministre, nous entendons votre observation sur la nécessité d’une sécurisation juridique du dispositif.
Si nous avons cherché à établir un montant de recettes sur lequel on puisse tabler, c’est bien évidemment dans la perspective d’éviter les baisses de loyers sans que l’équation budgétaire devienne pour autant insoluble.
Surtout, je le redis, nous sommes opposés à la progressivité, qui réduirait à néant tout le travail que nous sommes en train de mener ici, ensemble : on aurait ouvert une voie en relevant le taux de la TVA pour, en définitive, cumuler cette hausse de la TVA avec la baisse des loyers à hauteur de 1, 5 milliard d'euros. Ce n’est pas possible !
Ce que nous voulons, monsieur le ministre, c’est que les solutions que nous allons dégager ici puissent prospérer à l’Assemblée nationale, afin d’aboutir à un dispositif validé juridiquement, mais aussi politiquement. Vous le savez, nous devons trouver très rapidement une solution à un problème d’une complexité monstrueuse, qui pour autant ne pourra être définitivement réglé que lorsque nous aurons mené à bien la réforme du secteur du logement.
Comme vous l’avez dit, il fallait peut-être mettre l’épée dans les reins du monde du logement pour que celui-ci admette la nécessité de se restructurer. Il a maintenant compris qu’il doit faire des efforts. Il a une année devant lui pour cela et nous devons l’accompagner dans sa démarche afin d’aboutir à des solutions construites, tenant compte de la diversité des réalités des territoires et des situations des bailleurs.
Telles sont les intentions qui nous animent. Nous espérons vraiment que le Gouvernement et le Président de la République nous entendront.
M. Gérald Darmanin, ministre. Je voudrais tout d’abord indiquer, à l’attention du sénateur Lurel, que le taux de TVA de 2, 1 % s’appliquant en outre-mer ne serait pas affecté par l’adoption de ces amendements.
M. Victorin Lurel acquiesce.
On ne peut pas dire que la politique du logement fonctionne aujourd'hui très bien. Il est quelque peu excessif d’affirmer que la République entière reposerait sur la politique du logement et sur les bailleurs sociaux !
Il se trouve que, sur un total de 40 milliards d'euros de dépenses, 18 milliards d'euros sont consacrés aux APL, ce montant allant croissant.
Néanmoins, il y a toujours 4 millions de mal-logés et si des bailleurs sociaux travaillent tout à fait correctement, prenant notamment le risque de s’adresser aux plus pauvres de nos concitoyens, chacun peut constater que les personnes les plus en difficulté trouvent souvent plus facilement un logement dans le parc privé, parfois même chez les marchands de sommeil. C’est en tout cas ce que m’a appris mon expérience de maire d’une ville à « caractère difficile », comme on dit.
Des restructurations s’imposent donc, sachant que certains bailleurs sociaux se permettent d’avoir des « dodus dormants », fait que mon ministère dénonce depuis très longtemps. En effet, on a 11 milliards d’euros mis de côté, 3 milliards d’euros de résultat net, pour 800 bailleurs, dont vingt et un dans la seule agglomération d’Évry, par exemple.
On peut toujours imaginer qu’augmenter chaque année les crédits budgétaires suffira à régler les problèmes, mais force est de constater que, jusqu’à présent, cela n’a pas tellement fonctionné ! Une réforme du secteur du logement est donc nécessaire.
Cela étant, on peut juger que les évolutions proposées sont trop brutales et risquent de mettre en danger un certain nombre de bailleurs, qu’il y a une difficulté en termes de péréquation. Les propos du sénateur Dallier sont frappés au coin du bon sens : il faut une loi d’ensemble, et pas simplement des dispositifs fiscaux ou budgétaires. Le Gouvernement a annoncé cette loi, mais le calendrier veut que l’on parle maintenant des dispositifs fiscaux. D’ailleurs, madame Létard, votre groupe politique, comme celui de M. Dallier, nous réclame sans cesse des baisses de dépenses, mais quand nous en proposons, ce n’est jamais le bon moment, et une grande réflexion préalable est nécessaire !
En tout état de cause, la fiscalité ne peut être le seul levier d’action. Je pense que M. Dallier et Mme Létard seront d’accord avec moi : ce n’est pas en alourdissant la fiscalité sans reconsidérer la dépense publique que l’on pourra transformer le pays ou faire évoluer les politiques sectorielles.
Nous n’allons pas faire maintenant le débat sur l’article 52. Vous discuterez ultérieurement de l’offre, de la construction, de la situation des bailleurs, de la péréquation avec les ministres compétents, mais sur le principe nous nous retrouvons, monsieur Dallier, pour rechercher un équilibre entre crédits budgétaires et recettes fiscales. Il faut le faire correctement, en élaborant un dispositif juridiquement sécurisé. Par conséquent, ne soyez pas surpris si ce dernier fait l’objet d’une réécriture à l’Assemblée nationale dans cette perspective.
J’y insiste, nous avons avancé sur l’idée d’une augmentation de TVA pour le secteur du logement, mais il ne m’appartient pas de préciser davantage les choses aujourd'hui. Les discussions vont se poursuivre. Nous sommes également d’accord sur la nécessité d’une transformation d’ensemble du secteur.
Pour que tout soit bien clair, je réitère mon avis de sagesse…
Je l’ai dit tout à l’heure, monsieur le sénateur, mais il est vrai que la répétition fixe la notion !
Les amendements sont adoptés.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 6 bis.
L'amendement n° I–590 rectifié, présenté par M. Tissot, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Sueur, Raynal, Guillaume et M. Bourquin, Mme Artigalas, M. Cabanel, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis, Duran, Montaugé, Éblé, Botrel et Carcenac, Mme Espagnac, MM. Féraud, Jeansannetas, P. Joly et Lalande, Mmes Taillé-Polian, Meunier et Tocqueville, MM. Vaugrenard, Daudigny, Durain, Kerrouche, Roger et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article 278 sexies du code général des impôts est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« … – Les livraisons de logements neufs mentionnés à l’article 279-0 bis A et situés, à la date du dépôt de la demande de permis de construire, dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville définis à l’article 5 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine qui font l’objet d’un contrat de ville prévu à l’article 6 de la même loi. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.
Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai simultanément l’amendement n° I–591 rectifié.
J’appelle donc en discussion l'amendement n° I-591 rectifié, présenté par M. Tissot, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Sueur, Raynal, Guillaume et M. Bourquin, Mme Artigalas, M. Cabanel, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis, Duran, Montaugé, Éblé, Botrel et Carcenac, Mme Espagnac, MM. Féraud, Jeansannetas, P. Joly et Lalande, Mmes Taillé-Polian, Meunier et Tocqueville, MM. Vaugrenard, Daudigny, Durain, Kerrouche, Roger et les membres du groupe socialiste et républicain, et ainsi libellé :
Après l'article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article 278 sexies du code général des impôts est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« … – Les livraisons de logements neufs mentionnés à l’article 279-0 bis A et situés, à la date du dépôt de la demande de permis de construire, dans les zones de revitalisation rurale mentionnées à l’article 1465 A du code général des impôts. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
Il ne s’agit pas pour moi de relancer le débat sur le taux de TVA appliqué dans le secteur du logement. Toutefois, nous souhaitons attirer l’attention sur la nécessité de trouver des moyens d’aider le financement de logements intermédiaires, tant dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville que dans les zones de revitalisation rurale. Tel était l’objet de ces deux amendements.
Nous aurons, je pense, l’occasion de reparler de ces sujets, mais, eu égard au débat plus global que nous venons d’avoir, nous ne souhaitons pas aller plus loin à ce stade. Je retire ces deux amendements.
Les amendements n° I-590 rectifié et I-591 rectifié sont retirés.
L'amendement n° I–586 rectifié, présenté par Mme Guillemot, M. Iacovelli, Mme Lienemann, MM. Sueur, Raynal, Guillaume et M. Bourquin, Mme Artigalas, M. Cabanel, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis, Duran, Montaugé, Tissot, Éblé, Botrel et Carcenac, Mme Espagnac, MM. Féraud, Jeansannetas, P. Joly et Lalande, Mmes Taillé-Polian, Meunier et Tocqueville, MM. Vaugrenard, Daudigny, Durain, Kerrouche, Roger et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au 13 du I de l’article 278 sexies du code général des impôts, les mots : « ainsi que les cessions, prévues à l’article L. 255-3 du même code » sont remplacés par les mots : «, les redevances perçues par l’organisme de foncier solidaire au titre du bail réel solidaire, ainsi que les cessions prévues aux articles L. 255-2 et L. 255-3 du même code ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Cet amendement, ainsi que l’amendement n° I-587 rectifié, que nous examinerons un peu plus tard, traite du dispositif récemment adopté des organismes de foncier solidaire.
Dans ce dispositif, des organismes à but non lucratif, agréés par les préfets, sont créés en vue d’acheter du foncier ou des biens immobiliers afin, ensuite, de mener des opérations d’accession sociale à la propriété sous l’appellation de « baux réels solidaires », ou BRS. Cela permet, en particulier, de dissocier l’acquisition du foncier et l’accession à la propriété. C’est un moyen de solvabiliser les acquéreurs au titre de l’accession sociale à la propriété.
Dans le cadre d’un bail réel solidaire en vue d’une accession à la propriété, le taux de TVA applicable a été fixé à 5, 5 %. Mais, là aussi, des problèmes d’interprétation se posent. Lorsque l’organisme de foncier solidaire consent le bail, le taux de 5, 5 % s’applique, mais lors de la cession au locataire, c'est-à-dire au moment de la finalisation de l’opération, il semblerait que le taux applicable soit de 20 %. Cela ne correspond pas à la volonté du législateur, puisque le principe était que la cession soit simplement différée : il ne s’agit pas d’un changement de nature de l’opération.
Au travers du présent amendement, nous proposons donc que le taux de TVA de 5, 5 % s’applique tant lors de l’acquisition par l’organisme de foncier solidaire que lors de la cession au titulaire du bail réel solidaire.
Comme vient de l’indiquer notre collègue Lienemann, le bail réel solidaire est un dispositif encore assez récent. Nous ne disposons pas de toute l’expertise nécessaire pour déterminer si cette extension de l’application du taux réduit de TVA apporterait une amélioration du dispositif. La question est très ciblée. En général, la commission n’est pas particulièrement favorable à de telles extensions, mais nous voulons bien envisager cette proposition avec bienveillance. Nous souhaiterions entendre le Gouvernement sur le sujet.
Il est défavorable, monsieur le président.
Le taux réduit de TVA s’applique déjà aux livraisons de terrains à bâtir et d’immeubles aux organismes de foncier solidaire, ainsi qu’aux cessions de droits réels immobiliers par le preneur opérateur titulaire.
Le régime des BRS a été créé voilà un an dans une optique de lisibilité et de stabilité de la norme fiscale. N’ayant pas le recul nécessaire sur sa mise en œuvre, je ne crois pas opportun de changer la norme fiscale.
L’application du taux de TVA de 20 % ne me semble pas avoir été voulue par le législateur. Elle tient à un manque de précision dans la définition du champ d’application du taux de 5, 5 %.
Franchement, adopter la mesure proposée ne ruinerait pas l’État ! La seule crainte que l’on puisse avoir, c’est que le dispositif du bail réel solidaire ne soit pas utilisé, du fait de l’incertitude actuelle !
Cette proposition ne doit pas être balayée d’un revers de main. Il s’agit ici, je le rappelle, d’accession très sociale à la propriété.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-263 rectifié est présenté par MM. Pemezec et Daubresse, Mme Lavarde, MM. Karoutchi, Paul et Charon, Mmes Micouleau et Deromedi et MM. Priou, Pointereau, Savin, de Legge et Revet.
L'amendement n° I-427 rectifié est présenté par MM. Dallier, Bazin, Bonhomme, Brisson et Chaize, Mme de Cidrac, MM. de Nicolaÿ et del Picchia, Mmes Delmont-Koropoulis, Deroche, Di Folco et Duranton, M. B. Fournier, Mmes Garriaud-Maylam et Gruny, MM. Hugonet, Husson et Kennel, Mme Keller, MM. D. Laurent et Lefèvre, Mmes Lopez et Malet, MM. Mandelli et Milon, Mme Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller et Poniatowski, Mme Primas, MM. Rapin, Vaspart, Vogel, Laménie, P. Dominati et Gremillet et Mmes Imbert et Lamure.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° L’article 279-0 bis A est ainsi modifié :
a) Avant le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit de 10 % en ce qui concerne : »
b) Le premier alinéa est ainsi modifié :
- Le début est ainsi rédigé : « 1° Les livraisons de logements… (le reste sans changement). » ;
- Après les mots : « des établissements publics administratifs », sont insérés les mots : « ou des caisses de retraite et de prévoyance telles que visées à l’article 219 quater » ;
c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« 2° Les cessions de droits immobiliers démembrés de logements neufs à usage de résidence principale satisfaisant aux conditions prévues aux a, b et c du 1°, lorsque l’usufruitier est une personne morale visée au 1°. » ;
2° Le II bis de l’article 284 est ainsi rédigé :
« II bis. – Toute personne qui a acquis des logements ou des droits immobiliers démembrés au taux prévu à l’article 279-0 bis A est tenue au paiement du complément d’impôt lorsque tout ou partie des logements cessent d’être loués dans les conditions prévues au c du même article dans les vingt ans qui suivent le fait générateur de l’opération de construction, sauf si cette cessation résulte, à compter de la onzième année, de cession de logements ou de l’usufruit de ces logements.
« Jusqu’à la seizième année qui suit le fait générateur de l’opération de construction, les cessions de logements ou du seul usufruit de ces logements ne peuvent porter sur plus de 50 % des logements. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Pemezec, pour présenter l’amendement n° I-263 rectifié.
Le présent amendement vise à apporter une précision sur l’application du taux de TVA de 10 % s’agissant de la production de logements locatifs intermédiaires neufs. L’adoption de cette disposition permettrait aux caisses de retraite et de prévoyance du secteur privé d’intervenir de nouveau dans le financement de ces logements selon le dispositif de l’usufruit locatif, qui est tout de même un bon outil, comme c’est déjà le cas pour le logement social, au titre de l’article 278 sexies du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dallier, pour présenter l'amendement n° I-427 rectifié.
Cet amendement est défendu. Le retour des investisseurs institutionnels dans le secteur du logement serait une bonne chose, d’autant que nous nous inquiétons de la capacité à investir des autres acteurs. L’usufruit locatif peut effectivement constituer une solution, d’où cette proposition d’uniformiser les règles.
Ces amendements visent à étendre le bénéfice du dispositif aux caisses de retraite et de prévoyance, et à préciser que le dispositif s’applique aux droits immobiliers remembrés. La commission les accueille favorablement.
Il me semble qu’ils avaient déjà été présentés à l’occasion de l’examen d’un précédent projet de loi de finances. M. Christian Eckert avait alors indiqué qu’ils étaient partiellement satisfaits par le droit existant.
Sauf que ce point est peut-être à vérifier !
Sans doute l’écriture de ces mesures pourra-t-elle être améliorée au cours de la navette. Pour cette raison, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
Il est défavorable, monsieur le président.
Les auteurs de ces amendements souhaitent faire bénéficier du taux réduit de TVA des investisseurs privés qui ne sont pas passibles de l’impôt sur les sociétés. Or, tels qu’ils sont rédigés, les amendements visent à renvoyer à l’article 219 quater du code général des impôts, lequel prévoit expressément l’assujettissement à l’impôt sur les sociétés des caisses de retraite et de prévoyance.
De plus, s’agissant de l’application du dispositif de l’usufruit locatif social au logement intermédiaire, l’article 257 du code général des impôts prévoit déjà que les droits réels immobiliers suivent le régime de l’immeuble auxquels ils se rapportent.
Par conséquent, la nue-propriété et l’usufruit de logements intermédiaires bénéficient déjà du taux de TVA de 10 %, pourvu que les titulaires de ces droits démembrés respectent les mêmes conditions que celles qui sont prévues pour que l’immeuble lui-même bénéficie du taux intermédiaire.
L’amendement est donc partiellement déjà satisfait : je ne peux que confirmer les propos de mon prédécesseur.
Enfin, le champ des investisseurs institutionnels est déjà très large. Il ne semble pas opportun de l’étendre davantage.
Je mets aux voix les amendements identiques n° I-263 rectifié et I-427 rectifié.
Les amendements sont adoptés.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 6 bis.
L'amendement n° I-587 rectifié, présenté par Mme Guillemot, M. Iacovelli, Mme Lienemann, MM. Sueur, Raynal, Guillaume et M. Bourquin, Mme Artigalas, M. Cabanel, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis, Duran, Montaugé, Tissot, Éblé, Botrel et Carcenac, Mme Espagnac, MM. Féraud, Jeansannetas, P. Joly et Lalande, Mmes Taillé-Polian, Meunier et Tocqueville, MM. Vaugrenard, Daudigny, Durain, Kerrouche, Roger et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 6 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le dernier alinéa du II de l’article 284 du code général des impôts est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Dans ce dernier cas, le complément d’impôt est diminué d’un dixième par année de détention au-delà de la cinquième année. Lorsque le non-respect des conditions auxquelles est subordonné le taux réduit ne concerne que certains logements au sein d’un ensemble de logements, le complément d’impôt est calculé au prorata de la surface des logements concernés rapporté à la surface de l’ensemble des logements. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
J’espère avoir un peu plus de succès avec ce nouvel amendement relatif au bail réel solidaire…
Les organismes de foncier solidaire bénéficient d’un taux réduit de TVA de 5, 5 % au démarrage des opérations menées dans le cadre du dispositif du bail réel solidaire. À juste titre, l’article 284 du code général des impôts prévoit un complément d’impôt à la charge des organismes fonciers solidaires ayant bénéficié de ce taux réduit si les conditions d’octroi de ce taux n’ont pas été remplies dans un délai de cinq ans ou ont cessé de l’être dans un délai de quinze ans.
Mais que recouvre la notion de conditions d’octroi ? Si, par exemple, neuf des dix logements concernés par une opération répondent parfaitement aux conditions d’application du taux de TVA de 5, 5 % et pas le dixième, les services fiscaux considèrent aujourd'hui que le compte n’y est pas.
Nous proposons donc que, si une partie d’une opération n’entre pas strictement dans le cadre d’application de la TVA à 5, 5 %, du fait par exemple de l’augmentation des revenus des personnes, le complément d’impôt dû soit calculé au prorata de la surface des logements concernés, et ne porte pas sur l’ensemble de l’opération.
D’après ce que je comprends, le dispositif de cet amendement constituerait une remise en cause du droit commun pour le reversement de la TVA dans les cas où les conditions requises ne sont pas entièrement remplies.
Le dispositif proposé paraît, à première vue, assez complexe. Le complément d’impôt serait diminué d’un dixième par année de détention au-delà de la cinquième année, alors qu’actuellement il est entièrement dû. Lorsque les conditions prévues pour bénéficier du taux réduit de TVA ne sont pas respectées par certains logements, le complément d’impôt serait calculé au prorata de la surface des logements concernés rapportée à la surface de l’ensemble des logements…
Un tel système nous semble très compliqué à mettre en œuvre. La commission a donc jugé qu’il n’était pas opportun de revenir sur le dispositif de reversement de la TVA en cas de non-respect des conditions requises. Elle est plutôt défavorable à cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
I. – Au b de l’article 279-0 bis A du code général des impôts, le taux : « 50 % » est remplacé par le taux : « 35 % ».
II. – La perte de recettes pour l’État résultant du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° I-636, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le ministre.
L’article 6 ter a été introduit par voie d’amendement à l’Assemblée nationale lors de l'examen en première lecture du présent projet de loi de finances.
Dans sa rédaction actuelle, le code général des impôts dispose que, pour être éligible au taux réduit de TVA de 10 %, tout programme de construction de logements intermédiaires doit comporter au minimum une surface de 25 % de logements sociaux, sauf dans les communes comptant plus de 50 % de logements sociaux.
À l’Assemblée nationale, le député François Pupponi a présenté un amendement visant à abaisser à 35 % le seuil d’exemption de cette condition. Or, comme je l’ai rappelé à l’occasion de l’examen de cet amendement, le Gouvernement a un doute sur la possibilité qu’auraient les États membres de l’Union européenne d’appliquer un taux réduit de TVA aux opérations de livraison, construction, rénovation et transformation de logements fournis dans le cadre de la politique sociale.
Dans le contexte d’une remontée à 5, 5 % du taux de TVA applicable au logement locatif social, le Gouvernement souhaite d’abord s’assurer de la compatibilité de cette disposition avec le droit communautaire. Aussi le Gouvernement présentera-t-il, lors de l’examen de la seconde partie, un amendement de création d’un nouvel article prévoyant l’entrée en vigueur du dispositif au 1er janvier 2019.
Concernant cet article 6 ter, la commission des finances a souligné dans son rapport le risque d’un contentieux communautaire, qu’il faudra sans doute examiner en détail. C'est probablement la raison pour laquelle le Gouvernement en propose la suppression.
L’amendement nous est parvenu assez tardivement en séance et nous n’avons pas eu le temps de l’examiner. C’est pourquoi je m’en remets à la sagesse du Sénat.
L'amendement est adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-264, présenté par MM. Pemezec et Daubresse, Mme Lavarde, MM. Karoutchi, Paul et Charon, Mmes Micouleau et Deromedi, MM. Priou, Pointereau, Savin, de Legge et Revet et Mme Bories, est ainsi libellé :
Après l’article 6 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le premier alinéa du 1° du 5 de l’article 13 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Cette dérogation n’est pas applicable aux cessions simultanées des droits d’usufruit et de nue-propriété d’un même bien sous réserve que l’usufruit soit cédé à un organisme d’habitations à loyer modéré mentionné à l’article L. 411-2 du code de la construction et de l’habitation, à une société d’économie mixte, à un organisme disposant de l’agrément prévu à l’article L. 365-1 du même code ou une personne morale bénéficiant d’une intervention des ressources de la participation des employeurs donnant lieu à des contreparties visée à l’article L. 313-3 du même code. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Pemezec.
Cet amendement vise à supprimer une anomalie en matière d’imposition des plus-values et à préciser les modalités applicables aux cessions temporaires des droits d’usufruit de logements produits en diffus réalisées au profit de bailleurs sociaux comme des sociétés d’économie mixte ou certains organismes agréés.
Ainsi, les bailleurs sociaux pourraient proposer des loyers inférieurs de 20 % aux loyers de référence sur le marché libre et développeraient un dispositif d'usufruit locatif institutionnel s’appuyant sur les offres de vente des pavillons des particuliers concernés.
L'amendement n° I-435, présenté par MM. Dallier, Bazin, Bonhomme, Brisson et Chaize, Mme de Cidrac, MM. de Nicolaÿ, Daubresse et del Picchia, Mmes Delmont-Koropoulis, Deroche, Deromedi, Di Folco et Duranton, M. B. Fournier, Mmes Garriaud-Maylam et Gruny, MM. Hugonet, Husson, Karoutchi et Kennel, Mme Keller, MM. Laménie et D. Laurent, Mme Lavarde, M. Lefèvre, Mmes Lopez et Malet, M. Mandelli, Mme Micouleau, M. Milon, Mme Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller et Paul, Mme Primas, MM. Rapin, Revet, Savin, Vaspart, Vogel et P. Dominati, Mmes Imbert et Lamure et M. Gremillet, est ainsi libellé :
Après l’article 6 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le premier alinéa du 1° du 5 de l’article 13 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Cette dérogation n’est pas applicable aux cessions d’usufruit temporaire à un organisme d’habitations à loyer modéré mentionné à l’article L. 411-2 du code de la construction et de l’habitation, à une société d’économie mixte, à un organisme disposant de l’agrément prévu à l’article L. 365-2 du même code ou à une personne morale bénéficiant des ressources de la participation des employeurs. »
II – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dallier.
Je comprends l’intérêt de ces amendements, dont le dispositif semble assez bien encadré juridiquement, mais on peut toutefois s’interroger sur les risques d’abus. Compte tenu de leur caractère assez technique et de l’heure tardive à laquelle la commission en a été saisie, je souhaiterais connaître l’avis du Gouvernement…
À cette heure préprandiale, je vous dispenserai de la lecture de l’excellent argumentaire de quatre pages que les services de mon ministère m’avaient préparé.
En effet, après avoir vainement espéré que le rapporteur général m’éclaire, il me faut le confesser : je n’ai pas compris vos amendements, messieurs les sénateurs ! Pourriez-vous me fournir de plus amples explications sur le sens de ce que vous proposez, car je ne peux pas me prononcer sur des dispositions que je ne comprends pas. Le fait que le rapporteur général, malgré toute son intelligence, en soit au même point que moi me rassure quelque peu…
Sourires.
Il a dit qu’il n’avait pas eu le temps de les examiner, ce n’est pas pareil !
Il s’agit d’un dispositif assez novateur. Certains organismes sont spécialisés dans la construction de logements locatifs provisoires. Certains particuliers préfèrent leur céder pour un temps l’usufruit de leur bien plutôt que de vendre celui-ci au prix souvent élevé du marché, ce qui permet d’accroître le nombre de logements sociaux.
M. Gérard Longuet. Je crois comprendre qu’il s’agit de dissocier la propriété et l'usage d’un logement, de façon à permettre un usage social de ce dernier pendant un temps assez long, avant que le propriétaire ne retrouve la pleine jouissance et la pleine liberté d’utilisation de son bien.
MM. Philippe Dallier et Philippe Pemezec opinent.
Je ne comprends pas bien le mécanisme de cet amendement. À ma connaissance, l’usufruit à vocation locative sociale existe déjà !
L’action des organismes de foncier solidaire repose également sur une dissociation entre propriété et usufruit. En quoi le dispositif proposé est-il novateur par rapport à l’usufruit locatif social existant ? J’ajoute que ce type de mécanisme a déjà suscité un certain nombre de craintes, notamment sur un manque d'éthique, même si aucun cas avéré de dérive n’a été mis en évidence à ce jour.
Pour ma part, je trouverais prématuré de voter des amendements de cette nature sans avoir fait un tour d’horizon des dispositifs du même ordre et des améliorations pouvant leur être apportées.
M. Gérard Longuet. Cette étude doit figurer dans le fameux argumentaire de quatre pages du ministre !
Sourires.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Si j’ai bien compris, l’objectif serait de faire en sorte que les bénéficiaires du dispositif soient imposés au titre non plus de l’impôt sur le revenu, via leurs revenus fonciers, mais des plus-values immobilières, ce régime étant plus favorable en raison des exonérations qu’il comporte.
M. Philippe Dallier acquiesce.
Les deux amendements sont très proches. Faute d’expertise suffisante, la commission peine à se prononcer. C’est pourquoi je suggère à leurs auteurs de bien vouloir les retirer pour les retravailler.
À cette heure avancée, il faut en finir !
L'usufruit est peut-être une solution que l’on n’a pas suffisamment creusée pour permettre la mise sur le marché, pour une période donnée, de logements à caractère social au regard du loyer demandé. On sait que construire davantage est parfois difficile. Modifier la destination de logements existants via un conventionnement, sous une forme ou sous une autre, présente un intérêt.
Je veux bien entendre que nos amendements sont juridiquement un peu fragiles, mais le sujet n'est pas à écarter d’un revers de la main, car il existe peut-être là un gisement à exploiter. Pour l’heure, je retire mon amendement.
L'amendement n° I-264 est retiré.
L'amendement n° I-270 rectifié, présenté par MM. Panunzi, Longuet, Charon, Grosperrin, Castelli, H. Leroy, Frassa et Pointereau et Mme Lherbier, est ainsi libellé :
Après l’article 6 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À compter du 1er mars 2018, le II de l’article 575 E bis du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le taux : « 75 % » est remplacé par le taux : « 70 % » ;
2° Au deuxième alinéa, les mots : « aux deux tiers » sont remplacés par le taux : « à 60 % » ;
3° Au dernier alinéa, le taux : « 85 % » est remplacé par le taux : « 80 % ».
II. – À compter du 1er avril 2019, le II de l’article 575 E bis du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le taux : « 70 % » est remplacé par le taux : « 68 % » ;
2° Au deuxième alinéa, le taux : « 60 % » est remplacé par le taux : « 58 % » ;
3° Au dernier alinéa, le taux : « 80 % » est remplacé par le taux : « 78 % ».
III. – À compter du 1er novembre 2019, le II de l’article 575 E bis du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le taux : « 68 % » est remplacé par le taux : « 65 % » ;
2° Au deuxième alinéa, le taux : « 58 % » est remplacé par le taux : « 55 % » ;
3° Au dernier alinéa, le taux : « 78 % » est remplacé par le taux : « 75 % ».
IV. – À compter du 1er avril 2020, le II de l’article 575 E bis du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le taux : « 65 % » est remplacé par le taux : « 63 % » ;
2° Au deuxième alinéa, le taux : « 55 % » est remplacé par le taux : « 53 % » ;
3° Au dernier alinéa, le taux : « 75 % » est remplacé par le taux : « 73 % ».
V. – À compter du 1er novembre 2020, le II de l’article 575 E bis du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le taux : « 63 % » est remplacé par le taux : « 60 % » ;
2° Au deuxième alinéa, le taux : « 53 % » est remplacé par les mots : « la moitié » ;
3° Au dernier alinéa, le taux : « 73 % » est remplacé par le taux : « 70 % ».
VI. – La perte de recettes résultant pour la collectivité de Corse des I à V est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
VII. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus à l’article 265 du code des douanes.
La parole est à M. Gérard Longuet.
Je présente cet amendement au nom de notre excellent collègue Jean-Jacques Panunzi, sénateur de la Corse.
La Corse, nous le savons tous, bénéficie de dérogations et de singularités fiscales. Le Gouvernement a l'intention d’engager, en accord avec l'Assemblée de Corse, qui, je crois, se renouvellera bientôt, une réflexion d'ensemble sur la pertinence de leur maintien. M. Panunzi a déposé un amendement visant à surseoir à la convergence du prix du tabac entre la Corse et le continent, afin que cette question soit discutée dans le cadre de cette réflexion d'ensemble sur la remise à plat d’un ensemble de dérogations fiscales auxquelles il serait sans doute raisonnable, dans nombre de cas, de mettre fin.
Le dépôt de cet amendement est sans doute lié, en effet, au calendrier politique corse.
Cela étant, un amendement identique déposé à l’article 12 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui traite du prix du tabac, a été rejeté après avoir reçu un avis défavorable de la commission des affaires sociales. Par cohérence, la commission des finances sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, elle y sera défavorable.
Même avis.
La fiscalité du tabac est effectivement différente en Corse. L’une des premières choses que m’a dites le commissaire européen Pierre Moscovici, c’est que la France devrait sans doute devoir payer des amendes pour ce motif. Le rapporteur général a raison de dire que ce sujet relève du projet de loi de financement de la sécurité sociale. J’ajoute que c'est à la collectivité de Corse que reviennent les recettes. Il faut souligner que la Corse connaît une situation sanitaire tout à fait préoccupante en matière de cancers liés à la consommation de tabac. La ministre de la santé et des solidarités et moi-même l’avons d’ailleurs évoquée devant les élus corses.
I. – À la fin du II de l’article 61 de la loi n° 2016–1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016, l’année : « 2017 » est remplacée par l’année : « 2018 ».
II. – La perte de recettes pour l’État résultant du I est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° I-612, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. le ministre.
Au travers de cet amendement, le Gouvernement souhaite lever le gage d’un amendement relatif aux autotests de dépistage du VIH adopté par l’Assemblée nationale en première lecture.
L'amendement est adopté.
L'article 6 quater est adopté.
L'amendement n° I-187 rectifié, présenté par Mme Férat, M. Détraigne, Mmes N. Goulet et Vullien, MM. Henno, Cigolotti et Janssens, Mme Joissains, MM. Kern et Savary, Mme Létard et M. Moga, est ainsi libellé :
Après l'article 6 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le b du 4° de l'article 261 D du code général des impôts est ainsi rédigé :
« b. À la location de logements meublés ou garnis à usage d'habitation mis à disposition pour l'hébergement d'une durée consécutive qui n'excède pas sept jours. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Valérie Létard.
Le développement de la location de meublés touristiques perturbe de plus en plus les règles de concurrence avec les professionnels du secteur de l’hôtellerie.
Cet amendement a pour objet d’atténuer les distorsions de concurrence qui existent entre le secteur de l’hôtellerie, soumis à la TVA, et celui de la location de meublés touristiques, qui en est exonéré.
De fait, la France a une interprétation très restrictive de la notion de fonction similaire à celle de l’hôtellerie, prévue notamment par la directive européenne du 28 novembre 2006 relative au système commun de TVA. En France, pour être assujetties à la TVA, les locations de meublés touristiques doivent en effet être accompagnées d’au moins trois prestations proposées par les hôtels : service de petit-déjeuner, nettoyage des locaux, fourniture de linge…
Cette transposition du droit européen antérieure à l’explosion de la location de logements par l’économie collaborative n’est à l’évidence plus adaptée à la réalité du secteur. Échappent ainsi à la taxation les personnes qui mettent à disposition des meublés touristiques, la plupart du temps pour des locations de courte durée.
Ainsi, pour rétablir une égale et saine concurrence entre les hôtels et les locations de meublés touristiques, on pourrait introduire, comme l’a fait l’Allemagne par exemple, un critère unique qui serait fonction de la durée de la location. Ce critère serait d’ailleurs plus conforme au droit de l’Union européenne, la Cour de Justice de l’Union européenne l’ayant elle-même jugé plus pertinent.
La commission reconnaît le caractère un peu obsolète des critères cumulatifs requis pour que les locations de logements de meublés touristiques soient assujetties à la TVA : service de petit-déjeuner, nettoyage régulier des locaux, fourniture de linge de maison, réception de la clientèle, et j’en passe.
L’amendement tend à simplifier les conditions d’assujettissement à la TVA en remplaçant les critères actuels par une condition de durée de location inférieure à sept jours. A priori, la commission considère cet amendement avec bienveillance. Toutefois, elle n’a pas pu chiffrer les conséquences d’une telle mesure et en faire l’expertise, compte tenu de l’heure tardive à laquelle l’amendement a été déposé. C’est pourquoi je souhaiterais connaître l’avis du Gouvernement.
Le Gouvernement est défavorable à l’amendement, même si je comprends la philosophie qui le sous-tend.
Le dispositif d’assujettissement à la TVA des locations de meublés offrant des prestations similaires à celles de l’hôtellerie a été justement conçu pour prémunir le secteur hôtelier contre une concurrence déloyale.
La réponse doit surtout être européenne, s’agissant notamment de plateformes numériques. Je ne pense pas qu'une législation spécifique nationale puisse suffire. Le ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire, a eu l'occasion de dire qu’une taxation européenne était nécessaire et qu’il fallait éviter une fausse concurrence avec l’hôtellerie.
Par ailleurs, l’amendement ne permet pas d'atteindre l'effet recherché, dans la mesure où il exonère de TVA l'ensemble des locations para-hôtelières de plus d'une semaine, qui sont aujourd'hui taxées. J’ajoute que, aux termes d’une disposition introduite dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale en première lecture à l’Assemblée nationale et confirmée par le Sénat, les particuliers dont les revenus tirés de la location de locaux d'habitation meublés à la journée, à la semaine ou au mois sont supérieurs à 23 000 euros seront affiliés au régime social des indépendants, ce qui réduira la concurrence malsaine que vous évoquez, madame la sénatrice. Ces particuliers sont donc désormais redevables des cotisations sociales, comme tout hôtelier. Ainsi, au-delà de la fiscalité des locations meublées, l’imposition des revenus ou les cotisations sociales entrent également dans le champ de la problématique.
Enfin, comme l’a souligné le rapporteur général, nous ne parvenons pas à mesurer les conséquences fiscales qu’entraînerait l’adoption de votre amendement.
Dans ces conditions, je vous demanderai, madame la sénatrice, de bien vouloir retirer votre amendement, faute de quoi j’y serai défavorable.
Non, monsieur le président. Les explications données sur les mesures prises récemment par le Gouvernement sont de nature à atténuer nos craintes.
Je retire l’amendement.
L'amendement n° I-187 rectifié est retiré.
L'amendement n° I-393, présenté par MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l'article 6 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 262 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ces dispositions ne s'appliquent pas lorsque l'opération se déroule depuis ou à destination d'un État ou territoire non coopératif au sens de l'article 238-O A. »
La parole est à M. Éric Bocquet.
Nous proposons que le régime « TVA exportateurs » ne s’applique pas lorsque l’opération concerne la vente d’un bien ou la prestation d’un service en direction de l’un ou l’autre des États ou territoires dits « non coopératifs » sur le plan fiscal, les ETNC, c’est-à-dire, en langage moins technocratique, les « paradis fiscaux ».
Nous préférerions que l’on se réfère à la liste des États et territoires non coopératifs établie par l’OCDE, beaucoup plus complète que la liste française, qui est quelque peu maigrichonne !
Comme je l’ai dit ce matin, la commission considère cet amendement plutôt avec bienveillance. Il convient simplement de vérifier s’il est possible de mettre en œuvre cette préconisation au regard des règles communautaires. La France peut-elle décider seule de suspendre l’application du régime « TVA exportateurs » ou l’accord de L’Europe est-il nécessaire ? Je souhaiterais connaître l’avis du Gouvernement sur cette question.
Monsieur le ministre, je m’étonne tout de même de la brièveté de votre réponse sur un tel sujet ! Il existe bien des listes d’États et de territoires non coopératifs. La liste française est très limitée, puisque n'y figurent ni les Bermudes, ni Jersey, ni beaucoup d’autres territoires. Je m'étonne de cette absence d'argumentation à l’heure où tout le monde veut combattre l’évasion et l’optimisation fiscales, et s’émeut des révélations liées à la publication des « Paradise papers », dont on ne parle plus guère dix jours après…
Monsieur le sénateur, je ne voulais pas vous vexer. Il me semblait que vous aviez déjà entendu les explications du Gouvernement sur ce sujet à plusieurs reprises, notamment par ma voix.
Si l’on ne parle plus tellement des « Paradise papers », j’ai moi-même salué, au nom du Gouvernement, l’action des lanceurs d’alerte et des journalistes qui a permis leur publication. Le précédent gouvernement avait tiré des conclusions assez fortes de celle des « Panama papers » puisque la France, alors qu’elle était pourtant assez peu concernée par ces révélations, a été le premier pays à multiplier les interventions particulières et à procéder à des vérifications. Nous continuerons d’agir en ce sens. Cela est d’autant plus vrai, monsieur le sénateur, que l’administration fiscale dispose désormais à la fois de moyens humains – je suis le ministre qui a fermé le service de traitement des déclarations rectificatives, le STDR et qui réaffectera des moyens aux contrôles fiscaux – et de moyens informatiques pour récupérer les données, collecter les renseignements fiscaux, appliquer les conventions fiscales. Certaines de celles-ci, qui avaient été signées récemment par le précédent gouvernement, sont maintenant applicables, d’autres viennent d’être conclues par nos soins, par exemple avec la Suisse.
Par ailleurs, je souhaiterais évoquer l’initiative du groupe La République En Marche de l’Assemblée nationale, qui propose d’instituer la déchéance des droits civiques pour les particuliers reconnus coupables de fraude fiscale caractérisée. Je veux saluer cette proposition, qui devrait prochainement être soumise à votre examen, mesdames, messieurs les sénateurs, et à laquelle le Gouvernement sera évidemment favorable.
On ne peut donc soupçonner le Gouvernement de pusillanimité sur ce sujet.
Cependant, monsieur le sénateur, votre proposition est contraire au droit européen, lequel impose aux États membres d’exonérer de TVA les opérations effectuées à destination des États n’appartenant pas à la Communauté. J’ai déjà eu l’occasion de le dire à l’Assemblée nationale : nous souhaiterions que l’on revienne sur la règle de l’unanimité sur un certain nombre de questions de fiscalité, afin qu’il soit possible d’avancer plus concrètement. Votre engagement est connu et reconnu, mais à quoi servirait-il de voter des mesures nationales dépourvues d’effet, parce que contraires au droit européen ? Il est préférable de se battre au niveau européen pour revenir sur la règle de l’unanimité et imposer un dispositif de lutte contre la fraude fiscale, comme le fait le Gouvernement aujourd’hui.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° I-502, présenté par MM. Gabouty, Requier, Collin, Arnell et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Castelli, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mmes Guillotin et Jouve, M. Labbé et Mme Laborde, est ainsi libellé :
Après l’article 6 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le 1° du A de l’article 278-0 bis du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les produits et matériels utilisés pour l’incontinence ; »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
J’appelle donc également en discussion l'amendement n° I-503, présenté par MM. Gabouty, Requier, Collin, Arnell et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Castelli, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gold et Guérini, Mmes Guillotin et Jouve, M. Labbé et Mme Laborde, et ainsi libellé :
Après l’article 6 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le 1° du A de l’article 278-0 bis du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les couches pour nourrissons ; »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Veuillez poursuivre, monsieur Requier.
Au travers de l’amendement n° I-502, nous demandons la baisse du taux de TVA de 20 % à 5, 5 % pour les produits destinés aux personnes souffrant d’incontinence urinaire. Il s’agit de produits de première nécessité, qui relèvent d’un enjeu sanitaire : pensons plus particulièrement aux personnes âgées résidant chez elles ou dans des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes.
Après les plus âgés, les plus jeunes
Sourires.
L’an dernier, nous avions eu un très long débat sur les serviettes hygiéniques. Cette année, ce sont les couches ! Plus sérieusement, la commission est défavorable à ces amendements pour deux raisons.
Premièrement, le taux moyen de TVA est plus faible en France que dans les autres pays européens. De plus, la France est l’un des pays où il existe le plus d’exceptions du fait de l’application de taux réduits. Chaque fois qu’un tel amendement, aussi justifié soit-il au demeurant – je ne conteste pas le caractère de première nécessité de ces deux types de produits –, est adopté, cela entraîne une perte de recettes, alors même que nous n’avons de cesse de nous élever contre les niches fiscales.
Deuxièmement, je crains qu’une telle baisse du taux de TVA ne soit mise à profit par les producteurs, qui sont bien souvent des multinationales, et les distributeurs des produits concernés pour gonfler leurs marges.
Je ne suis pas du tout certain que la baisse du taux de TVA se retrouverait dans le prix payé par le consommateur. Elle risque d’être absorbée par les industriels et la grande distribution, sans aucun bénéfice pour le consommateur. En revanche, ce qui est certain, c’est la perte de recettes pour l’État !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt-et-une heures trente, sous la présidence de M. Thani Mohamed Soilihi.