Monsieur le président, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, au nom du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, permettez-moi de saluer à mon tour, très amicalement, M. le rapporteur général.
Nous entamons aujourd’hui l’examen du premier projet de loi de finances élaboré par ce nouveau gouvernement.
Il s’agit évidemment de donner à l’État un budget pour l’année prochaine. Mais, bien au-delà, ce premier projet de loi de finances fixe clairement les lignes directrices pour le quinquennat qui s’ouvre.
Messieurs les ministres, vous venez d’entrer dans la maison France : aussi pensons-nous qu’il eût été fort utile de procéder à un état des lieux exhaustif de notre société et de la République. Liberté, égalité, fraternité : aujourd’hui, cette magnifique devise est bien souvent remise en cause par la réalité de la vie quotidienne vécue par une très grande majorité de nos concitoyens.
Cet état des lieux eût été facile à établir, compte tenu des nombreux documents disponibles pour ce faire. Je pense aux rapports récents d’organisations non gouvernementales comme OXFAM, le Secours populaire français ou, plus récemment encore, le Secours catholique. Ces organisations sont unanimes, malheureusement, pour relater le constat qu’elles ont pu établir.
Vous nous rétorquerez peut-être, comme d’autres le firent avant vous, que nous ne sommes plus à l’époque de Zola. Certes, et c’est bien là que le bât blesse ! Les données pour 2017 sont absolument effarantes pour un pays comme le nôtre, qui, à ce jour, est encore la sixième puissance du monde.
Nous ne pouvons pas faire l’économie de quelques chiffres. En 2016, les 10 % des Français les plus riches détiennent 56 % des richesses, quand les 50 % les plus pauvres se partagent 5 % de l’ensemble. Plus d’un tiers des Français a « expérimenté » la pauvreté. Le seuil de pauvreté perçu est à un niveau toujours plus élevé, 1 015 euros, et se rapproche dangereusement du niveau du salaire minimum, qui s’établit aujourd’hui à 1 140 euros.
Cette pauvreté qui prend racine dans notre pays a évidemment des conséquences concrètes dans la vie de nos concitoyens : 20 % d’entre eux déclarent avoir renoncé à des soins dentaires du fait de leur coût, 12 % à l’achat de lunettes et 16 % à une consultation chez un médecin spécialiste.
Le concept d’égalité, disais-je en préambule, est quelque peu mis à mal dans notre République : lorsqu’on porte le regard vers le haut de la pyramide, vers les « premiers de cordée », on se dit qu’il y a effectivement quelque argent en ce bas monde.
Un magazine économique aux feuilles de papier glacé publie chaque année, en juillet, un numéro spécial nous présentant le palmarès des 500 premières fortunes de France. Il suffira ici de citer un extrait de l’éditorial du numéro de cette année : « Le constat saute aux yeux, à voir l’évolution du classement des 500 fortunes professionnelles depuis [la] première édition [du magazine] en 1996, le patrimoine des ultra-riches en France a considérablement progressé depuis deux décennies. Les chiffres attestant de leur prospérité impressionnent. Le nombre des milliardaires a explosé, de 11 à 92, et, au total, la valeur des 500 fortunes est passée de 80 à 570 milliards, multipliée par sept. »
En janvier 2015, le ministre Emmanuel Macron conseillait aux jeunes Français d’avoir envie de devenir milliardaires.