La séance est ouverte à onze heures.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
Monsieur le président, avant tout je vous prie de transmettre à M. le rapporteur général, Albéric de Montgolfier, mes vœux de prompt rétablissement puisque je comprends qu’il a dû être hospitalisé en urgence ce matin.
Monsieur le président, monsieur le ministre, cher Gérald, mesdames, messieurs les sénateurs, ce projet de loi de finances pour 2018 est le premier du nouveau quinquennat.
Il traduit la vision économique portée par le Gouvernement. Il s’inscrit dans une stratégie globale clairement annoncée par le Président de la République pendant sa campagne et choisie par les Français : transformer le modèle économique de notre pays.
Partons d’abord de la situation économique internationale.
La reprise mondiale se confirme, avec une croissance globale estimée à 3, 6 % pour 2017. Les prévisions les plus récentes, notamment celles du Fonds monétaire international, le FMI, annoncent un rythme équivalent en 2018.
Le continent européen se place, notons-le, dans le peloton de tête. La reprise économique se poursuit à un rythme solide dans la zone euro. La croissance économique dans l’Union monétaire devrait atteindre 2 %, en moyenne, cette année.
En France, les principaux indicateurs économiques se redressent. En un an, 300 000 emplois ont été créés dans le secteur marchand. L’investissement retrouve un rythme soutenu, la création d’entreprises également. La confiance est donc de retour chez les entrepreneurs et j’estime la croissance française désormais solide.
Dans cette conjoncture favorable, nous voulons accélérer la transformation économique de la France, mais en évitant les erreurs trop souvent commises, quand, à la moindre amélioration de la conjoncture, on reportait la transformation économique nécessaire. Au contraire, c’est parce que les choses vont mieux, estimons-nous, qu’il faut accélérer ce processus, afin que notre pays puisse exploiter à plein ses talents et ses atouts, qui sont immenses.
La réforme du marché du travail, le budget que nous discutons aujourd’hui, la réforme de la formation professionnelle et, demain, de l’assurance chômage marquent notre détermination totale, dans cette majorité, à accomplir cette transformation économique et sociale du pays.
Sous l’autorité du Président de la République et du Premier ministre, nous irons jusqu’au bout de cette démarche nécessaire.
Le monde ne nous attendra pas ! Les autres nations ne nous attendront pas ! Les grandes puissances, comme la Chine ou les États-Unis, ne nous attendront pas !
Si nous voulons rester une puissance économique de premier plan, nous devons saisir les révolutions technologiques en cours. Faute de quoi, nous serons rejetés dans les marges, appauvris, négligés.
Nos choix économiques ont un but clair : permettre à la France de répondre aux défis contemporains et de réussir dans le monde tel qu’il est.
Pour cela, la première exigence est de permettre à nos entreprises d’investir, mais encore faut-il, pour ce faire, qu’elles retrouvent de la profitabilité. C’est pourquoi, mesdames, messieurs les sénateurs, l’allégement de la fiscalité sur le capital est une des décisions majeures qu’avec Gérald Darmanin nous vous proposons.
Alléger la fiscalité sur le capital, c’est renforcer la profitabilité, trop faible, des entreprises et leur permettre d’investir pour innover.
Les solutions du passé ont échoué. Les solutions qui consistaient à redistribuer la richesse avant de la créer ont échoué. Nous vous proposons une autre voie : l’allégement de la fiscalité sur le capital, afin que nos entreprises puissent dégager les moyens nécessaires pour investir, pour innover, pour rester en tête de la course technologique actuelle.
Regardez le niveau actuel des taux marginaux d’imposition sur le capital : 62 % pour les intérêts et 44 % pour les dividendes. En Allemagne, 26 %… Comment voulez-vous que nos entrepreneurs fassent la course en tête avec un tel boulet au pied ?
Nous allons donc alléger la fiscalité sur le capital pour récompenser le risque, faciliter l’investissement et le financement de nos entreprises.
Sans capital, pas d’investissement ! Sans investissement, pas d’innovation ! Sans innovation, pas d’emploi !
Nous voulons rompre avec cette fâcheuse habitude que nous avons en France de redistribuer les richesses avant de les avoir créées, parce que, au bout du compte, cela affaiblit tous les Français, comme cela affaiblit la souveraineté de la France.
L’allégement de la fiscalité sur le capital passe par une décision historique : la mise en place d’un prélèvement forfaitaire unique à 30 % sur tous les revenus du capital. Ce sera un gage de simplicité et de meilleur financement de notre économie. Une fiscalité proportionnelle de ce type a déjà été adoptée dans 80 % des pays européens.
Mais nous avons aussi été attentifs à ne pas pénaliser la fiscalité de l’épargne salariale, pour marquer notre volonté de récompenser le travail.
Travail et capital ne doivent plus être opposés. Travail et capital doivent aller de pair.
Il faut alléger la taxation du capital pour ne pas le faire fuir dans un monde où il est de plus en plus mobile, mais il faut aussi redonner sa valeur au travail. Toutes les Françaises et tous les Français qui aujourd’hui vont travailler, parfois pour de faibles rémunérations, doivent pouvoir se dire que, en travaillant, ils auront la récompense de leurs efforts.
Nous voulons maintenir les avantages des produits d’épargne populaire : le livret A et le livret de développement durable resteront entièrement défiscalisés pour les ménages français. Nous conserverons aussi les avantages des produits fortement investis en actions, comme le plan d’épargne en actions – le PEA –, par souci de cohérence avec le besoin de financement de notre économie.
S’agissant de la fiscalité de l’assurance vie, qui a suscité tant de débats dans cet hémicycle et à l’Assemblée nationale, je rappelle que seuls les revenus des futurs versements seront concernés : nous ne prenons personne par surprise.
Je rappelle également que les mesures proposées ne touchent que les encours supérieurs à 150 000 euros, soit des encours très élevés. La fiscalité ne change pas pour les autres, qui représentent 94 % des contrats.
Il est essentiel de rappeler, enfin, que le prélèvement forfaitaire unique, le PFU, demeure une option et que les contribuables pourront choisir de rester au barème, si cela est plus intéressant pour eux.
Pour faciliter l’accès au capital des entreprises, pour redonner à nos entrepreneurs et à l’ensemble de notre économie les moyens de mieux se financer, nous supprimons l’impôt de solidarité sur la fortune, l’ISF.
Pourquoi cette suppression ? Parce qu’il faut réinjecter des capitaux dans l’économie française. Parce qu’il faut attirer les investisseurs dont nous avons besoin pour développer nos entreprises, les renforcer, créer des emplois en France, enrayer la fuite des talents, récompenser la prise de risque.
Arrêtons avec l’idéologie ! Regardons ce qui est bon pour le pays, bon pour les entrepreneurs, bon pour la création de richesses, bon pour l’emploi, bon pour valoriser le risque et récompenser le travail. Respecter ces valeurs, ce sera respecter le travail des Françaises et des Français tout autant que le goût du risque de nos entrepreneurs.
Je l’ai dit, le capital est de plus en plus mobile. Voulons-nous qu’il parte ou qu’il reste ? Voulons-nous qu’il aille s’investir à l’étranger ou plutôt dans les entreprises françaises, pour qu’elles puissent enfin grandir, et avec elles notre tissu de petites et moyennes entreprises ? Car vous connaissez mieux que personne nos territoires, mesdames, messieurs les sénateurs, et vous savez combien ce tissu est fragile, trop fragile, et combien nos PME sont petites, trop petites, et que, faute de fonds propres suffisants, nos PME dépendent trop de la dette.
Eh bien, redonnons du capital à ces entrepreneurs, et nous leur permettrons de grandir, d’investir, d’affronter la concurrence et de se projeter sur les marchés extérieurs, où se trouvent la croissance et les emplois pour les Français.
Pourquoi maintenir, parallèlement à la suppression de l’ISF, un impôt sur la fortune immobilière ? Tout simplement parce qu’un euro investi dans l’immobilier, notamment ancien, ne crée pas le même effet d’entraînement qu’un euro investi dans une entreprise.
Cet impôt sur la fortune immobilière, je le rappelle, ne fera aucun perdant. Il reprend exactement les règles de l’ISF sur le volet « immobilier » : même seuil et même abattement de 30 % sur la résidence principale.
À tous ceux qui m’objectent que nous allons affaiblir la classe moyenne, je répondrai que nous n’avons pas la même conception de la classe moyenne : l’impôt sur la fortune immobilière ne concernera que les biens immobiliers de plus de 1, 3 million d'euros avec un abattement de 30 %, soit les biens d’une valeur supérieure à 1, 7 million d'euros !
Par ailleurs, le secteur du logement bénéficie déjà d’un certain nombre de dispositifs favorables, avec des incitations fiscales puissantes, comme l’exonération de la plus-value sur la vente de la résidence principale ou le prêt à taux zéro et le dispositif Pinel, que nous allons pérenniser.
Notre modèle social va-t-il pour autant devenir inégalitaire ? Depuis le début des débats sur le PLF pour 2018, Gérald Darmanin et moi-même entendons cette critique. On nous suspecte, au fond, en libérant des capitaux pour les entrepreneurs, en supprimant l’ISF, en mettant en place le prélèvement forfaitaire unique, en allégeant l’impôt sur les sociétés, de créer davantage d’inégalités que d’égalités. C’est exactement le contraire !
Je refuse cette caricature du budget que nous portons, avec Gérald Darmanin. Je n’accepte pas que l’on dise du budget du Président de la République, du Premier ministre et de l’ensemble du Gouvernement qu’il est un budget pour les riches : mesdames, messieurs les sénateurs, c’est un budget pour les Français, un budget pour le travail, un budget pour l’emploi ! Les décisions fiscales que nous prenons permettront enfin à nos entrepreneurs de créer les emplois et les richesses dont les Français ont tellement besoin.
La première des inégalités, c’est le chômage, et la meilleure façon de lutter contre le chômage, c’est de donner à notre économie les moyens de mieux se financer, à nos entrepreneurs la récompense de leur prise de risque et à tous ceux qui travaillent la récompense de leurs efforts !
Telle est la philosophie politique qui nous anime derrière ce projet de loi de finances pour 2018 : la récompense de l’effort et du travail des salariés, la valorisation du risque, le soutien à nos entrepreneurs, la capacité à mieux se financer, l’indépendance et la souveraineté financière d’une nation qui arrête de trop taxer et se donne les moyens de créer les richesses dont elle a besoin.
Je rappelle en outre que la redistribution résulte, pour 66 %, des prestations sociales ; que les prélèvements directs y contribuent à hauteur de 34 % ; que 10 % des contribuables paient 70 % de l’impôt sur le revenu.
Par conséquent, si l’on veut traiter la question, majeure, des inégalités dans notre pays, il ne faut pas se contenter d’examiner ce qui est fait en matière de fiscalité ; il faut également tenir compte de la redistribution sociale, la meilleure façon de lutter contre les inégalités, dont nous maintenons l’architecture principale.
Le budget que nous vous présentons comporte également une ambitieuse politique fiscale en faveur des entrepreneurs.
Nous réduirons l’impôt sur les sociétés de 33, 3 % à 25 % d’ici à la fin du quinquennat, soit une baisse de plus de 11 milliards d’euros de charges fiscales pour les entreprises.
Il s’agit là d’un choix structurant dans le budget, un choix que nous revendiquons avec Gérald Darmanin, le Premier ministre et le Président de la République.
Nos entreprises doivent être plus profitables. Leur taux de marge n’a cessé de se dégrader depuis des années. Il s’est récemment redressé, mais insuffisamment pour leur permettre de dégager les moyens d’investir et de créer de nouvelles richesses. Alléger la fiscalité sur les entreprises, c’est renforcer leur capacité à créer des emplois.
Nous commencerons par un taux de 28 % dès 2018 sur la fraction de bénéfices inférieure à 500 000 euros. Nous baisserons ensuite le taux à 31 % pour tous les bénéfices à partir de 2019, tout en maintenant le taux de 28 % pour les bénéfices inférieurs à 500 000 euros. Ce sera ensuite 28 % en 2020 pour tous les bénéfices, 26, 5 % en 2021 et 25 % en 2022. Le taux de l’impôt sur les sociétés sera alors le plus faible, en France, depuis plusieurs décennies.
Nous maintiendrons évidemment le taux réduit de 15 % pour les PME qui en bénéficient déjà, ayant bien conscience que les PME sont les entreprises qui, actuellement, ont le plus besoin de notre soutien.
Vous me direz que nous avons mis en place, dans un récent projet de loi de finances rectificative, une contribution exceptionnelle allant à l’encontre de cette politique.
M. Bruno Le Maire, ministre. Je ne rouvrirai pas les débats sur cette question, qui nous a déjà pris bien du temps. Mais je ne voudrais pas que cette mesure soit l’arbre qui cache la forêt. Cette contribution exceptionnelle est bien exceptionnelle ! Elle n’a pas vocation à être reproduite.
Sourires ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.
Nous supprimerons également le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi, le CICE, pour le transformer en un allégement de charges pérenne. Son taux passera de 7 % à 6 % en 2019, mais, cette même année 2019, les entreprises bénéficieront à la fois de ce CICE ramené à un taux de 6 % et de l’allégement de charges directes. Leur avantage fiscal, sur cet exercice, sera donc considérable.
Enfin, le Premier ministre a souhaité que nous ouvrions la réflexion sur les allégements de charges sur les salaires dépassant 2, 5 SMIC.
C’est là un changement majeur. Nous considérons – et c’est une première depuis plusieurs années – que les allégements de charges doivent permettre de répondre, non seulement au défi de l’emploi, mais aussi à celui de la compétitivité de notre industrie.
Cette question, qui est aussi majeure, a également déjà été l’objet de débats dans cet hémicycle.
Oui, les allégements de charges ont prouvé leur efficacité sur les bas salaires ; ils permettent aux plus fragiles, aux moins qualifiés de trouver un emploi et une place dans la société française.
Mais oui, nous devons aussi tenir compte de la situation de notre industrie. Nous ne devons pas oublier que l’industrie française a perdu 1, 4 million d’emplois en vingt-cinq ans et que, sur la même période, la part de notre patrimoine industriel dans la richesse nationale est passée de 20 % à 13 %.
Voilà pourquoi, à tous ceux qui m’expliquent qu’il faut continuer comme avant, ne rien toucher, ne rien modifier, je réponds qu’il en est hors de question : le statu quo ne peut pas être une solution pour notre industrie !
Nous avons besoin de regagner en compétitivité. Cela suppose un effort d’innovation, mais aussi l’allégement des charges sur les salaires des travailleurs les plus qualifiés, car ils sont l’avenir de notre industrie.
Nous ouvrirons donc la réflexion sur une mesure de cette nature, mais, comme l’a indiqué le Premier ministre, Édouard Philippe, nous ne la mettrons en œuvre que lorsque la restauration des comptes publics nous le permettra, et seulement à ce moment-là.
Nous maintiendrons également les dispositifs de soutien à la recherche. En particulier, le crédit d’impôt recherche – le CIR – sera sanctuarisé, car il fonctionne, parce qu’il a démontré son efficacité.
Nous mettrons en place, au début de l’année 2018, un fonds pour l’innovation de rupture de 10 milliards d'euros, financé par des cessions d’actifs de l’État dans le secteur concurrentiel. L’argent de l’État sera tout de même mieux employé s’il est investi dans l’innovation et la recherche, en vue de préparer l’avenir de nos enfants, plutôt que s’il permet de toucher des dividendes d’entreprises dont nous ne contrôlons pas suffisamment le fonctionnement.
Telle est notre stratégie fiscale. Telles sont les mesures qui doivent permettre à nos entreprises, à notre économie de réaliser, enfin, leur potentiel, qui est considérable.
Nous sommes convaincus de l’efficacité de ces choix, qui sont, oui, des choix de rupture. Alors qu’ils auraient dû être faits voilà dix, vingt ou trente ans, ils ne le sont qu’aujourd'hui, mais, du fait de leur caractère tout à fait nouveau, nous sommes prêts à les évaluer.
La meilleure réponse aux critiques, et les critiques sont toutes légitimes en démocratie, c’est la transparence, c’est l’évaluation : je suis prêt à engager, d’ici deux ans, une évaluation de notre politique fiscale.
Nous mettrons en place, comme je l’avais promis, une mission de suivi, qui pourra rendre ses premières conclusions à cette échéance.
Cette mission sera composée de parlementaires, de membres de la Cour des comptes, de représentants des administrations compétentes – le Trésor ou encore l’INSEE – et de personnalités qualifiées. Pourquoi, d’ailleurs, ne pas y ajouter des entrepreneurs, qui pourront, eux aussi, participer à cette évaluation et juger des résultats de cette politique fiscale ?
Il s’agira, pour la mission, d’examiner les effets de notre réforme sur l’orientation de l’épargne des Français, sur l’investissement des entreprises, sur l’attractivité du territoire, sur l’emploi et sur les inégalités de revenus et de patrimoine.
Je suis prêt à ce que nous regardions l’ensemble des effets de cette politique fiscale, car réconcilier les Français et l’engagement politique, c’est être capable de rendre des comptes, c’est assumer la transparence et l’évaluation sincère et honnête de nos politiques publiques.
Nous travaillons également avec les institutions bancaires pour que celles-ci proposent des produits adaptés à leur client et qu’ainsi le capital libéré soit effectivement investi dans nos entreprises et dans notre tissu économique.
Un travail de concertation a été organisé en ce sens par les députés de la majorité, notamment Amélie de Montchalin. Il doit permettre de faire évoluer les mentalités et d’orienter l’épargne vers le financement de nos entreprises.
C’est au début de l’année 2018 que nous disposerons des premières propositions sur ce sujet et, avant le 1er avril 2020, un premier rapport sera transmis au Parlement sur l’évaluation de la politique fiscale du Gouvernement.
Comme vous, mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai lu hier les remarques de la Commission européenne sur nos déficits et notre dette.
Je veux redire ici la détermination totale du Président de la République, du Premier ministre, de l’ensemble du Gouvernement à tenir nos engagements vis-à-vis de l’Europe.
Nous tiendrons nos engagements européens ! Nous respecterons les règles de déficit pour 2017, en nous maintenant en dessous de la limite des 3 % qui nous a été fixée et que nous avons, nous-mêmes, acceptée.
La France qui se moque de ses engagements européens, c’est fini !
La France qui balaie d’un revers de la main les critiques de ses partenaires européens, c’est fini !
La France qui estime qu’elle peut, seule, dicter sa propre conduite, sans écouter ce que ses partenaires européens ont à lui dire, alors que nous sommes engagés dans le même projet politique, c’est fini !
La France qui ne se soucie pas de la bonne tenue de ses comptes publics, c’est fini !
La France qui vote des budgets de la Nation insincères, dans lesquels les financements nécessaires aux politiques publiques choisies ne se trouvent pas inscrits, c’est fini !
La France qui ment, la France qui trompe, la France qui triche, c’est fini !
Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. - M. Martin Lévrier applaudit avec force.
Avec le ministre des comptes publics, nous assumons la sincérité de notre budget.
En 2017, nous avons dû absorber 8 milliards d’euros de dépenses qui n’avaient pas été budgétées.
Le contentieux de la taxe à 3 % sur les dividendes a alourdi de 10 milliards d’euros la charge pesant sur les comptes de l’État. C’est un fardeau de 18 milliards d’euros qu’il a fallu intégrer à nos comptes en 2017.
Voilà la stricte réalité des chiffres, mesdames, messieurs les sénateurs !
Je ne suis pas là pour juger…
M. Bruno Le Maire, ministre. … ni condamner qui que ce soit.
Exclamations ironiques sur les mêmes travées.
Mais je suis responsable, avec le ministre des comptes publics, de la bonne tenue des comptes de la Nation, et nous tiendrons bien les comptes de la Nation, mesdames, messieurs les sénateurs.
Oui, un fardeau de 18 milliards d’euros pèse aujourd’hui sur l’État français et, malgré ce fardeau, notre déficit public sera sous la barre des 3 % du PIB en 2017. L’effort est considérable, mais il est juste et nécessaire.
M. Martin Lévrier applaudit. - Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Nos prévisions confirment que nous respecterons la limite des 3 % cette année, permettant à la France de sortir de la procédure de déficit excessif dans laquelle elle se trouve depuis 2009. La Commission européenne a, elle aussi, indiqué que cet objectif était atteignable en 2018.
Notre responsabilité est collective. Que voulons-nous, vous, parlementaires, et nous, membres du Gouvernement, pour la France ?
Je le redis, je ne juge personne.
M. Bruno Le Maire, ministre. Je ne suis pas là pour regarder le passé !
Exclamations sur les mêmes travées.
Voulez-vous un budget sincère ? C’est ce que nous vous proposons ! Voulez-vous respecter les règles européennes ? C’est ce que nous vous proposons ! Voulez-vous que la France sorte de la procédure pour déficit public excessif ? C’est ce que nous vous proposons !
J’espère donc pouvoir, avec Gérald Darmanin, compter sur votre soutien s’agissant de ces ambitions nationales et européennes.
Nous avons fait le double choix de tenir les engagements de campagne du Président de la République et de tenir nos engagements européens. Nous avons pris les mesures nécessaires, en préparant un projet de loi de finances sincère et en proposant un projet de loi de finances rectificative pour tenir compte de l’annulation de la taxe de 3 % sur les dividendes.
Au-delà de 2017, nous continuerons à tenir ce cap économique et politique, avec la baisse des impôts et la maîtrise des dépenses. C’est la meilleure façon de renforcer notre croissance potentielle et de réduire le déficit structurel français.
Nos obligations européennes nous imposent effectivement, au-delà du respect de la règle des 3 % de déficit afin de sortir de la procédure pour déficit excessif, de réduire graduellement notre déficit structurel, et c’est le point sur lequel la Commission européenne s’est arrêtée le plus longuement.
En 2018, nous prévoyons une réduction de 0, 1 % du déficit structurel. L’évaluation de la Commission européenne diffère de la nôtre, mais il est arrivé par le passé que les évaluations de la France soient finalement davantage confirmées par les faits que celles de la Commission européenne.
Nous sommes donc en discussion avec elle pour faire converger nos chiffres. Nous souhaitons qu’elle prenne en compte la sincérité des mesures contenues dans ce projet de loi de finances, ce qui n’est pas encore le cas et ce qui explique largement l’écart entre nos estimations de correction de 0, 1 % du déficit structurel et celles de la Commission, qui estime à l’inverse à 0, 4 % le désajustement.
La Commission doit également prendre en compte l’ensemble des réformes structurelles que nous engageons, et qui vont porter leurs fruits : réforme de la fiscalité, rationalisation des dépenses – qui sera accentuée dès que leur revue aura permis d’identifier précisément les marges –, réforme du code du travail, réforme de l’assurance chômage. Toutes ces mesures structurelles, nous souhaitons que la Commission européenne en tienne davantage compte dans l’évaluation de la réduction de notre déficit structurel. J’en parlerai prochainement à ses membres.
En respectant nos engagements européens, non seulement nous garantissons la bonne tenue des comptes publics de la Nation, mais nous garantissons surtout la restauration de la crédibilité de la parole de la France en Europe. Si le Président de la République a réussi à obtenir une transformation en profondeur de la directive sur les travailleurs détachés, c’est parce que la France a retrouvé de la crédibilité sur la scène européenne. Si nous avons relancé le débat sur la taxation des géants du numérique, débat absolument majeur sur l’avenir de la fiscalité internationale, c’est parce que la France a retrouvé sa crédibilité sur la scène internationale.
Comment voulez-vous que nous expliquions aux entrepreneurs de vos territoires, qu’ils soient dans le bâtiment, dans la restauration, dans la chimie, dans l’industrie automobile, qu’ils auront à payer leurs taxes locales et leur impôt sur les sociétés, alors que Google, Amazon ou Facebook ne paient que des impôts dérisoires au Trésor public français ? Nous ne lâcherons rien, rien, rien sur la taxation des géants du numérique en France et en Europe ! §Nous lutterons également contre le dumping fiscal en Europe. Avec un objectif clair : réduire les écarts entre les taux d’imposition européens à la fin du quinquennat et faire dépendre de cet écart, comme l’a dit le Président de la République, le versement des aides européennes au titre des fonds structurels.
Certains États disent déjà : « Mais notre modèle économique, c’est le dumping fiscal ! » Certes, notre modèle consistant à dépenser plus d’argent et plus de richesses que nous n’en créons n’était pas un modèle qui pouvait être inspirant pour les autres États européens. Eh bien ! de la même manière qu’on a dit à la France que son modèle de dépenses publiques ne pouvait pas être un modèle pour l’Europe, ce qui nous a amenés à faire des efforts, ce qui m’amène aujourd’hui à vous présenter, avec Gérald Darmanin, un budget par lequel nous baissons l’impôt sur les sociétés et le niveau d’imposition, par lequel nous mettons en place un prélèvement forfaitaire unique, je dis non à tous ceux qui font du dumping fiscal le modèle économique de l’Europe : ni le dumping fiscal ni le dumping social ne peuvent être un modèle pour l’avenir de la construction européenne !
À chacun de faire des efforts : nous en faisons ; que nos partenaires en fassent également ! C’est uniquement si chacun fait un pas dans la direction de l’autre que l’avenir de l’Europe se construira de manière positive pour tous les citoyens européens.
Notre budget tente également de transformer notre modèle économique en faisant bénéficier tous les Français des résultats de cette transformation. Le travail doit payer, le travail doit payer pour tous les Français : les salariés verront donc leur salaire net augmenter grâce à la suppression de leurs cotisations chômage et maladie ; les indépendants seront plus nombreux à bénéficier des régimes simplifiés d’imposition et à pouvoir tenir une comptabilité allégée.
Je vous demande également de compléter votre regard sur le projet de loi de finances avec un regard sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, présenté par la ministre de la santé, Agnès Buzyn, et par le ministre de l’action et des comptes publics, Gérald Darmanin : rehaussement du minimum vieillesse, revalorisation de l’allocation aux adultes handicapés, ou AAH, mesures en faveur des familles monoparentales, plan d’accès territorial aux soins.
Nous avons fait en sorte que les Français les plus fragiles, ceux qui sont touchés par le handicap, ceux qui sont touchés par la maladie, ceux qui sont dans les situations les plus précaires, puissent continuer à bénéficier du soutien de la Nation.
Ces mesures redistributives sont importantes et elles sont justifiées quand elles concernent les publics qui en ont le plus besoin. Nous estimons que cette question des inégalités reste une question majeure et que l’on peut concilier ambition économique pour la Nation et réduction des inégalités.
Je vais vous dire ma conviction profonde : c’est justement en retrouvant une ambition économique pour la Nation que nous retrouverons des marges de manœuvre pour réduire réellement les inégalités. Nous retrouverons des marges de manœuvre nationales, mais nous retrouverons aussi une crédibilité internationale pour porter ce combat de la lutte contre les inégalités.
J’ai organisé il y a deux jours au ministère de l’économie et des finances une réunion avec des acteurs de l’économie, des chercheurs, des universitaires, des présidents d’entreprise, des responsables politiques pour ouvrir cette réflexion sur la lutte contre les inégalités face aux ruptures technologiques. Comment faire en sorte que ces ruptures technologiques ne se traduisent pas par toujours plus d’inégalités entre les nations et à l’intérieur des nations ? Comment ne pas être interpellé par la puissance de ces géants du numérique dont je vous parlais à l’instant, par leurs niveaux de capitalisation, jamais atteints, qui se chiffrent en dizaines de milliards de dollars ? Comment ne pas être interpellé par le fait que, sur sept de ces géants du numérique, cinq sont américains, deux sont chinois ? Comment l’Europe peut-elle retrouver sa place dans ce combat économique ? Comment faire en sorte qu’il n’y ait pas, demain, quelques grandes puissances et des dizaines de nations qui perdent leur souveraineté, leur indépendance et leur capacité à créer de la richesse ? Comment éviter qu’il n’y ait, dans une nation, d’un côté, ceux qui gagnent, et d’un autre côté, ceux qui perdent ? Comment éviter que les riches ne soient toujours plus riches et les pauvres toujours plus faibles ?
Exclamations ironiques sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain.
Comment préserver la capacité d’une nation à faire émerger une classe moyenne ?
Mesdames, messieurs les sénateurs, ce n’est certainement pas en redistribuant l’argent que nous n’avons pas, des richesses que nous n’avons pas créées que nous arriverons à lutter contre la pauvreté et contre les inégalités dans notre pays !
Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.
Le projet de budget que Gérald Darmanin et moi-même vous présentons vise précisément à relever ces défis, à retrouver le chemin de la croissance, à retrouver le chemin de l’emploi, à valoriser le risque, à récompenser le travail, à soutenir nos entrepreneurs, à retrouver la crédibilité de la parole française en Europe et la capacité de la France à porter sa voix dans le monde : celle de la justice et celle de la liberté.
Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, du groupe Les Indépendants République et Territoires et sur certaines travées du groupe Les Républicains.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi d’abord d’avoir, comme Bruno Le Maire, une attention particulière pour votre rapporteur général, empêché aujourd’hui – nos pensées les plus affectueuses et les plus républicaines l’accompagnent –, et de saluer Gérard Longuet qui le remplace !
Quelques mots pour compléter, s’il me le permet, les propos de M. le ministre de l’économie et des finances. J’insisterai sur quatre points pour souligner l’action du Gouvernement en matière budgétaire, points qui, me semble-t-il, font écho au débat que nous avons eu lors de l’examen du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 – texte certes non normatif – ou du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 – qui prévoit donc la bascule vers la CSG.
Ces quatre points sont les suivants : la « sincérisation » de ce budget et les efforts que nous faisons dans ce sens ; la politique à destination des collectivités locales – sujet important pour votre assemblée et alors que se tient ces jours-ci le congrès des maires de France – ; la transformation de notre économie ; enfin, le soutien au pouvoir d’achat de nos concitoyens.
Le premier point est sans doute le plus important pour le ministre des comptes publics que je suis, et je sais que votre chambre est particulièrement attentive à la « sincérisation » budgétaire. Il reste sans doute encore beaucoup de travail, étant donné qu’il subsiste une marge importante. Toujours est-il que je remercie le rapporteur général, lors du premier débat que nous avons eu ensemble, ainsi que l’Assemblée nationale, en particulier le président de sa commission des finances, Éric Woerth, et son ancien président, Gilles Carrez, pour qui nous avons tous beaucoup de respect, de même que le Haut Conseil des finances publiques et la Commission européenne, d’avoir souligné le fait que ce budget de la Nation essaie de revenir sur les insincérités les plus flagrantes que les gouvernements ont accumulées, année après année.
La Cour des comptes a rendu un rapport au lendemain de la nomination du Gouvernement dans lequel elle pointe 7 milliards d’euros de sous-budgétisation portant soit sur des dépenses de guichet, notamment l’allocation aux adultes handicapés ou la politique du logement, soit sur des dépenses plus larges d’un montant tel que la sincérité du budget s’en est trouvée entachée. Je pense notamment au ministère de l’agriculture, dont les dépenses ont connu une dérive très importante dans les années précédentes.
C’est désormais chose faite, nous sommes revenus sur ces 7 milliards d’euros de sous-budgétisation, tant pour l’année 2017, bien sûr, que pour l’année 2018, ce qui me paraît normal : les parlementaires – et c’est bien logique –, qui contrôlent l’action du Gouvernement et l’utilisation des deniers publics, doivent évidemment s’appuyer sur les chiffres les plus vraisemblables possible.
Bien sûr, la vie d’un pays, comme la vie d’une commune, comme la vie d’une entreprise, est traversée de difficultés qui ne sont pas toujours prévisibles dans un budget. Il se pourrait que le Gouvernement revienne vers vous pour les expliciter, mais il apparaîtrait anormal et pour le moins irrespectueux du débat parlementaire que le Gouvernement n’applique pas les chiffres qu’il connaît au moment où il vous parle. Je crois que ce travail a été fait et qu’il a été bien fait. Je remercie les services, et également les rapporteurs spéciaux, quel que soit le groupe auquel ils appartiennent, de souligner là où le Gouvernement peut encore faire des efforts. Je serai ouvert évidemment aux critiques lors du débat parlementaire sur cette question.
Je souhaiterais d’ailleurs, monsieur le président de la commission des finances, comme je l’ai évoqué avec le président Gérard Larcher et le président François de Rugy, que nous puissions revoir la procédure parlementaire. Il est évident que, si le Parlement souhaite contrôler davantage l’action du Gouvernement, notamment pour suivre les évolutions budgétaires, encore faudrait-il que nous ayons une discussion commune sur les volets recettes du projet de loi de financement de la sécurité sociale et du projet de loi de finances. Nous parlons du coût du travail d’un côté comme de l’autre, alors que, évidemment, pour les Français, l’argent provient de la même poche et ce sont les mêmes parlementaires qui contrôlent l’un et l’autre de ces budgets.
Il faut également revoir, je crois, notre procédure budgétaire de « sincérisation ». Et l’incroyable originalité qui consiste à voir les ministres une seule fois par an pour parler de leur budget et les rapporteurs spéciaux une seule fois par an au moment de ce contrôle, ne me paraît pas de bonne politique, surtout que nous allons consacrer quelques semaines – voire quelques mois, pour ma part – au débat budgétaire, contre une demi-journée pour la loi de règlement. Cela ne me paraît bon ni pour le Gouvernement, ni pour le Parlement, ni même pour la démocratie.
Plus de temps pour le contrôle de l’action gouvernementale, un petit peu moins de temps pour la discussion du budget, peut-être une plus grande présence des rapporteurs – y compris lorsqu’ils sont membres de l’opposition – dans le débat budgétaire que j’ai avec les ministres : voilà ce que je propose à votre assemblée et à ses rapporteurs, pour un meilleur travail en amont et en aval.
En ce qui concerne la dépense publique, dont nous pensons bien sûr qu’elle est parfois un bien pour notre société, mais malheureusement un peu grossière ces derniers temps, nous devons lutter contre son inflation. Nous allons essayer de tenir la promesse qu’a faite le Premier ministre dans son discours de politique générale de limiter cette dépense publique, en ramenant si possible sa croissance à zéro.
Nous n’avons pas totalement réussi, car c’est difficile. Je lisais encore ce matin un excellent éditorial dans le journal Les Échos, dont l’auteur employait l’expression « drogué à la dépense publique ». Si nous partons du principe que cette dépense publique amène notre pays à être parfois un peu obèse, souvent contradictoire dans la demande de gestion des deniers publics et à refuser les économies lorsqu’elles se présentent, Bruno Le Maire et moi-même sommes fiers de vous présenter un budget qui prévoit une augmentation des dépenses publiques de 0, 5 %. C’est trop par rapport à 0 %, mais c’est deux fois moins que les deux années précédentes. Ce courage est à mettre au crédit du Gouvernement.
Nous sommes persuadés qu’une trop grande dépense publique fait naître une fiscalité trop lourde, est source de trop de déficits et de trop de dettes. Il faut diminuer la dépense publique, le faire évidemment sans mesures paramétriques, avec le plus de transformations possible, pour faire baisser la fiscalité – ce qu’a évoqué M. le ministre de l’économie et des finances – et in fine notre déficit et notre dette.
Le deuxième point que je voudrais évoquer devant vous, sur lequel je m’attarderai un peu, c’est la question des collectivités locales.
Le projet de loi de finances que présente le Gouvernement illustre une nouvelle façon d’imaginer les relations entre l’État et les collectivités locales. Bien sûr, les élus demandent que les efforts qui sont faits par leur propre administration locale soient désormais proportionnés à leur part dans la dépense publique. Ils ont raison : jusqu’à présent, l’État a trop demandé aux collectivités locales par rapport à ce qu’il s’est imposé. Cependant, il faut souligner – et chacun le comprendra – que les dépenses à la charge de l’État diffèrent de celles des collectivités locales : les dépenses régaliennes, d’une part, et les dépenses à destination des collectivités locales – un quart de ses dépenses –, d’autre part.
Mais il est tout à fait vrai que les économies demandées aux collectivités locales sont proportionnellement plus importantes que la part de leurs dépenses dans la dépense publique globale – 20 % –, surtout si l’on considère les années précédentes, notamment les baisses de dotations.
Lorsque nous ciblons une augmentation de 1, 2 % de la dépense – nous y reviendrons pendant le débat –, vous constaterez que cette légère augmentation de la dépense qui pourrait être contractualisée avec les collectivités est deux fois supérieure à ce que l’État va s’imposer lui-même. La part des collectivités locales dans l’effort de réduction de la dépense publique sera d’un sixième, alors qu’elles représentent un cinquième des dépenses totales. L’État fera donc le plus gros de cet effort : il a beaucoup à rattraper, il a beaucoup à changer et à transformer.
Le principe est donc la contractualisation : ne pas toucher à la quasi-intégralité des communes de France et considérer que pour les communes de plus de 50 000 habitants, pour tous les départements, toutes les régions, soit les 319 collectivités que nous évoquions, il y aura non pas une baisse des dotations – pour la première fois depuis 2010 –, mais un encadrement de la dépense publique afin que celle-ci n’augmente pas de manière trop importante – nous aurons l’occasion d’y revenir. Cet encadrement porte sur les dépenses non pas d’investissement, mais de fonctionnement. Il s’agit bien sûr de donner également aux élus les marges de manœuvre nécessaires pour rester dans ce cadre, ce qui veut dire qu’il faudra revoir la façon dont ils peuvent gérer leur masse salariale et notamment le glissement vieillesse-technicité, ou GVT.
Vous constaterez ainsi que ce projet de loi de finances rétablit le jour de carence, tandis que le point d’indice n’augmente pas. C’est une mesure qu’attendaient les élus locaux. En effet, lorsque l’État décide d’augmenter le point d’indice, ce sont souvent les collectivités locales qui paient. Il nous apparaît nécessaire de réformer ce point.
La réforme des collectivités locales est une réforme de confiance : pas de baisse des dotations – et même une légère augmentation de certaines d’entre elles – ; une dotation d’équipement des territoires ruraux, ou DETR, qui reste au même niveau que l’année dernière – alors qu’elle avait été opportunément augmentée la veille de l’élection présidentielle, mais c’était le jeu – ; et une dotation de soutien à l’investissement local, ou DSIL, qui reste identique.
Nous pourrons reposer la question des variables d’ajustement, source de difficultés s’agissant de dotations qui ont peut-être un peu vieilli. J’ai pris l’engagement, devant l’Assemblée nationale en première lecture, de revenir en seconde lecture, au Sénat comme devant les députés, sur la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle, ou DCRTP, qui ne me paraît pas être une bonne variable d’ajustement. Le Gouvernement procédera à la correction.
La question très importante de la transformation de nos politiques publiques a été évoquée. Je voudrais souligner, indépendamment de la baisse de la fiscalité qu’a évoquée le ministre de l’économie et des finances et sur laquelle je ne reviendrai pas, que c’est la première fois qu’est créée dans le budget de la République une ligne de 700 millions d’euros – dont 200 millions d’euros dès l’année prochaine – pour permettre cette transformation : transformation numérique, transformation des services publics. Évitons peut-être des décisions un peu paramétriques : tant la révision générale des politiques publiques que la modernisation de l’action publique ont pu apporter quelques bonnes solutions – mais parfois également des mauvaises, notamment pour la police nationale. Aussi, assignons à la revue des politiques publiques une mission plus intelligente pour savoir ce qu’on doit changer, ce qu’on doit renforcer et ce qu’on doit limiter en adaptant notre pays à la vie des collectivités locales, des entreprises et de nos concitoyens.
Le budget que nous vous présentons prévoit trois grandes transformations et des baisses de crédits budgétaires. Est concernée la politique du logement, où 40 milliards d’euros sont dépensés chaque année pour 4 millions de mal-logés. Il y a donc sans doute des transformations très importantes à faire, ce dont nous aurons l’occasion de parler longuement. Est également concernée la politique du travail, avec la diminution du nombre des contrats aidés et une augmentation des moyens consacrés aux formations qualifiantes, preuve d’une transformation de la politique publique en la matière. Enfin est concernée la politique des transports : nous avions tous de grandes idées de dépenses, sans comprendre que la fin de l’écotaxe a signifié la fin des recettes. Cela ne pouvait donc évidemment pas fonctionner. Nous aurons l’occasion d’y revenir, en écho aux assises nationales de la mobilité.
A contrario, certains budgets augmentent. Je voudrais cependant dire devant votre assemblée qu’il ne me semble pas que je sois un mauvais ministre, et pourtant mon budget baisse ! M. le ministre de l’économie et des finances est d’accord avec moi, l’heure n’est plus à dire : « Je dépense, donc je suis bon. » Il est important de le souligner et ce n’est pas parce qu’un budget baisse qu’il n’est pas prioritaire.
Il y a des dynamiques qu’il ne faut pas ignorer, en premier lieu la dynamique de protection de notre pays. Ainsi nos armées verront leur budget augmenter de 1, 7 à 1, 8 milliard d’euros chaque année pendant cinq ans, ce qui est sans précédent depuis l’époque du général de Gaulle. De même, les ministères de l’intérieur et de la justice voient également leurs moyens augmenter. Le régalien est donc au rendez-vous des augmentations budgétaires.
Ce qui est également sans précédent depuis les années 1980, je le souligne, c’est l’augmentation du budget de l’éducation nationale et de l’université. C’est une priorité gouvernementale. En particulier, les universités doivent faire face, encore cette année, à l’arrivée de 40 000 étudiants supplémentaires.
Enfin, les crédits d’un certain nombre de ministères n’augmentent ni ne baissent. Et vous savez à quel point il est parfois difficile de lutter contre un tendanciel. Je remercie chacun des membres du Gouvernement – ils vous diront tour à tour à quel point ils ont été heureux de ses arbitrages et de la maîtrise de la dépense publique.
Sourires.
Dernier point, la question très importante du pouvoir d’achat, qu’a abordée M. le ministre de l’économie et des finances. Je reviendrai rapidement sur trois de ses aspects.
Le dégrèvement de la taxe d’habitation concernera 80 % des Français, je m’en suis encore expliqué ce matin avec les maires de France. Ce dégrèvement est prévu dans la loi et suivra évidemment une dynamique – habitants, nouveaux locaux – ou ce que décidera la commission des finances. Mais il faut aussi dire – et nous attendons tous le discours du Président de la République – que la taxe d’habitation est un impôt injuste – nous en avons beaucoup parlé ici – et le demeurera tout autant si 20 % des contribuables continuent de l’acquitter.
Nous l’avons toujours dit, monsieur Dallier.
La baisse de fiscalité de 10 milliards d’euros que nous vous proposons pour nos concitoyens dont les revenus n’excèdent pas 2 500 euros net est une bonne mesure en faveur du pouvoir d’achat de l’ensemble des classes moyennes et des classes modestes. La fiscalité locale doit être revue évidemment, et nous y reviendrons avec la question des valeurs locatives.
Il est tellement urgent de réviser les bases locatives que cela fait quarante-cinq ans que cela n’a pas été fait, depuis l’époque où Georges Pompidou était Président de la République et Jacques Chaban-Delmas Premier ministre. Nous devrions le faire dans les six mois qui viennent, alors que c’est si compliqué. D’autant que la réforme de la valeur locative des locaux commerciaux, engagée il y a sept ans et que je suis chargé d’appliquer en tant que ministre, prendra pleinement effet dans douze ans, au terme de la période d’adaptation. C’est-à-dire qu’il aura fallu attendre dix-neuf ans pour que cette réforme de la valeur locative des locaux commerciaux soit achevée. Tout le monde comprend bien la difficulté et qu’il importe de ne toucher que d’une main tremblante à ce genre de fiscalité, tant qu’on ne sait pas exactement quelle sera la fiscalité locale.
Compte tenu du rôle éminent que la Constitution confère à votre chambre, nous étudierons prioritairement cette question avec vous.
Toujours est-il que la baisse de la taxe d’habitation, c’est du pouvoir d’achat pour nos concitoyens, un pouvoir d’achat extrêmement concret. Son montant moyen en France – et je suis bien conscient que c’est une moyenne – est de 600 euros. Dès l’année prochaine, ce sera 200 euros de moins pour 80 % des Français, encore 200 euros de moins l’année suivante, puis plus rien à partir 2020. Je crois que c’est une mesure sans précédent de baisse de la fiscalité pour les classes moyennes.
L’augmentation de l’AAH, pour arriver à 900 euros par mois, est également sans précédent, tandis que le minimum vieillesse augmentera de 100 euros par mois : la chronique budgétaire est inscrite dans le présent projet de loi de finances.
Monsieur le président, j’ai essayé de m’en tenir aux quinze minutes que vous m’avez imposées. « Sincérisation » du budget, limitation de la dépense publique, baisse de la fiscalité, nouveau contrat avec les collectivités locales, transformation de notre pays, notamment par ses missions, et pouvoir d’achat retrouvé, c’est le projet du gouvernement. Je suis sûr que le rapporteur général, le président de la commission des finances et vous toutes et vous tous, mesdames, messieurs les sénateurs, aurez à cœur d’améliorer la copie gouvernementale, ce dont nous serons très heureux.
Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe Union Centriste. – M. le président de la commission des finances applaudit également.
Je salue la présence du président Gérard Larcher, qui m’a fait l’honneur de me céder sa place ce matin au fauteuil de la présidence.
La parole est à M. le président de la commission.
Monsieur le président, je souhaite informer le Sénat que la commission des finances, réunie ce matin, a décidé que, dans la discussion générale, comme pour l’examen des articles, notre collègue Gérard Longuet s’exprimerait en remplacement de notre rapporteur général Albéric de Montgolfier.
Bien sûr, je m’associe au nom de tous nos collègues aux vœux de plein et rapide rétablissement qui lui ont déjà été adressés.
Je m’associe également à ces vœux.
La parole est à M. Gérard Longuet, au nom de la commission des finances.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, à cet instant, mes pensées vont à Albéric de Montgolfier, dont je partage les convictions, ce qui rend ma tâche plus facile, mais dont je n’ai ni le talent ni la compétence. J’espère que vous me pardonnerez d’être moins à l’aise qu’il ne l’aurait été sur ce rapport général.
Cette année 2017, vous l’avez dit, se termine dans un contexte plus favorable : l’économie européenne se porte mieux et nous pouvons espérer une croissance de 1, 7 %. Ce climat permettra naturellement des recettes fiscales plus élevées et nous avons la perspective réjouissante pour le pays, porté par cette conjoncture, que le déficit public global soit inférieur à 3 % du PIB.
Ce qui nous rassemble, c’est le budget pour 2018 et c’est ce budget sur lequel Albéric de Montgolfier, en qualité de rapporteur général, s’exprime.
Albéric de Montgolfier ne discute pas les hypothèses de croissance, même si, comme il le précise dans son rapport écrit, celles-ci sont évidemment soumises à des aléas à la hausse ou à la baisse – nous espérons et préférons les aléas à la hausse.
Compte tenu de ces hypothèses, on s’étonne que le Gouvernement ne prévoie qu’un recul du déficit de très faible ampleur – 0, 1 %, une sorte de statu quo –, après, reconnaissons-le, prise en compte de l’annulation de la taxe de 3 % et de son remboursement, qui est partiellement assuré par l’État, c’est-à-dire par le contribuable et par le déficit en l’espèce.
Le déficit va donc atteindre 2, 8 % du PIB, ce qui est très supérieur à la moyenne européenne, je tiens à le rappeler. Il faut bien se rendre compte que nous sommes encore le mauvais élève de la classe européenne. Ce taux ne nous permet pas, contrairement à l’ensemble des autres pays européens, de commencer à réduire notre ratio d’endettement par rapport au PIB.
Cette faible réduction du déficit structurel ne correspond pas à nos engagements européens. Messieurs les ministres, Albéric de Montgolfier rappelait que nous avons reçu une note de la Commission européenne signalant les risques de déviation significative. Nous sommes sous le regard attentif d’un contrôleur vigilant.
Pourquoi sommes-nous dans cette situation ? Eh bien – et c’est un bon point – parce que vous n’avez pas choisi de différer les baisses de prélèvements obligatoires – et ce n’est pas le libéral que je suis qui vous le reprochera – ; mais vous avez surtout choisi de reporter d’une façon significative la maîtrise de la dépense publique. L’addition des deux aboutit à ce statu quo dans le taux de notre déficit par rapport au PIB.
Cela étant – et c’est un autre bon point –, vous rompez avec la politique de matraquage fiscal des cinq années précédentes et on ne peut pas vous en vouloir. En particulier, nous approuvons le prélèvement forfaitaire unique sur les revenus du capital, qui nous permet d’envisager de nous placer à un niveau européen satisfaisant, au moment même – et les sénateurs franciliens le savent – où nous sommes en compétition pour devenir une place financière attractive. Les mesures qui ont été prises sont donc bienvenues. Seront-elles suffisantes ? C’est un débat que je n’ouvrirai pas à cet instant.
Messieurs les ministres, après les bons points, venons-en aux points de divergence du rapporteur général, qui sont simples.
Premier sujet de désaccord : les familles. Elles continuent d’être matraquées – c’est le mot qu’il emploie –, par exemple à travers la réduction de la prestation d’accueil du jeune enfant, ou PAJE, prévue par le projet de loi de financement de la sécurité sociale. C’est la raison pour laquelle notre commission des finances proposera de relever le plafond du quotient familial pour enfin adresser un geste positif à l’attention des familles.
Le deuxième sujet de désaccord est l’immobilier. Albéric de Montgolfier a présenté un rapport extrêmement documenté sur le caractère parfaitement illusoire du concept de « rente immobilière ». On trouve des rentes dans tous les secteurs de l’économie – je ne connais pas de chef d’entreprise qui ne cherche à organiser sa propre rente –, mais elles sont combattues.
En ce qui concerne la situation des investisseurs, nous soutenons votre choix de permettre à l’investissement mobilier de retrouver une certaine liberté. Nous souhaitons profondément que ce geste significatif encourage les investisseurs français et étrangers à choisir notre pays comme lieu d’investissement.
En revanche, ce que vous faites avec l’immobilier méconnaît gravement son utilité dans notre pays et risque de casser, en quelque sorte, un petit renouveau qui se manifestait dans ce secteur.
Le troisième point de désaccord a trait à la hausse de la fiscalité énergétique. On peut raconter ce que l’on veut, mais le rapprochement de la fiscalité du diesel sur celle de l’essence va sanctionner ceux pour lesquels l’automobile est un outil de travail, ce qui est le cas de l’immense majorité de nos compatriotes vivant en dehors des réseaux de transports en commun.
Ces trois désaccords s’inscrivent dans un contexte général où, selon nous, votre budget, messieurs les ministres, ne se soucie guère de la maîtrise de la dépense collective. En particulier, vous aviez l’objectif, inédit, de stabiliser la dépense publique en volume en 2018 et, tendanciellement, vous envisagiez une baisse de 20 milliards d’euros. Cela signifie non pas 20 milliards d’euros de baisse, mais une hausse inférieure de 20 milliards d’euros à ce qu’elle aurait pu être. Vous réduisez cette différence tendancielle à 14 milliards d’euros, ce qui montre que, dans ce budget, le grand absent est la maîtrise de la dépense publique.
Cette maîtrise de la dépense publique, vous la faites porter principalement par les collectivités locales – ce sujet étant d’actualité, je ne voudrais pas interférer dans un débat qui est organisé au Sénat, mais aussi au congrès des maires au même moment –, collectivités locales dont les dépenses de fonctionnement verraient leur croissance plafonnée à 0, 5 % en 2018, ce qui est parfaitement contradictoire avec les responsabilités sociales que celles-ci prennent pour assurer une certaine harmonie du fonctionnement de la société française. Les collectivités locales sont la porte d’entrée de la vie collective : lorsque l’État est absent, elles sont présentes. C’est pourquoi ce chiffre est ressenti par les élus locaux comme l’expression d’une sorte de désinvolture à l’égard de leur mission.
Vous aviez également envisagé, comme l’a rappelé le président de la commission des affaires sociales, Alain Milon, une maîtrise de la dépense sociale à l’occasion de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Or vous ne la chiffrez pas, vous ne la fléchez pas, vous ne l’identifiez pas. C’est plus un vœu pieux qu’une vérité.
Je relève un bon point dans ce balayage : si vous ne réduisez pas la dépense publique comme vous auriez dû commencer à le faire au début de ce quinquennat, au moins les présentations des chiffres sont-elles plus sincères. La commission des finances estime que les mesures de « rebasage » visant à restituer de la vérité représentent 4, 2 milliards d’euros, ce qui montre l’ampleur de la turpitude précédente résultant de budgets insincères. C’est la raison pour laquelle – c’est une orientation que vous aviez comprise et acceptée en son temps, mes chers collègues – nous avions refusé le débat budgétaire en 2016 pour l’année 2017.
Seulement trois missions verront leurs dépenses diminuer de plus de 100 millions d’euros. Deux d’entre elles ont ouvert un débat, dont la mission Travail et emploi qui verra ses crédits diminuer de 1, 5 milliard d’euros. On sait que les contrats aidés ne sont pas des solutions de long terme, mais vous pouvez comprendre, parce que vous êtes des élus locaux, que l’annonce brutale du recentrage énergique et immédiat de ces contrats aidés pose, notamment aux collectivités locales et à la vie associative, des problèmes absolument sans solution.
De la même façon, l’économie de 1, 7 milliard d’euros que vous proposez sur la mission Cohésion des territoires – Philippe Dallier est plus compétent que moi sur le sujet du logement – ouvre une crise qui, à cet instant, n’est absolument pas réglée. Je ne peux pas vous en vouloir, car il est toujours difficile de diminuer la dépense publique
Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.
La masse salariale, par exemple, va continuer d’augmenter. Les chiffres sont cruels : Emmanuel Macron, lorsqu’il était candidat à la présidence de la République, avait envisagé une diminution durant le quinquennat des effectifs des fonctionnaires de l’État de 50 000 sur un total de 2, 2 millions – je le dis de mémoire.
Cette année, ce budget de l’État envisage une baisse de 1 600 équivalents temps plein, soit 16 % de la diminution annuelle prévue, ce qui est évidemment tout à fait éloigné des objectifs que vous vous étiez vous-même fixés.
C’est la raison pour laquelle la commission des finances proposera au Sénat d’adopter deux amendements : le premier vise à augmenter le temps de travail moyen des salariés du secteur public pour le rapprocher du temps de travail moyen des salariés du secteur privé ; le second tend à porter de un à trois jours le délai de carence, afin d’augmenter la force de travail des fonctionnaires du secteur public pour exercer les missions qu’ils assument avec toujours beaucoup de bonne volonté et dévouement.
J’évoquerai maintenant la taxe d’habitation. Le jugement du rapporteur général est clair à cet égard : cette réforme est injuste et précipitée. Elle est injuste, car il manque le préalable, comme vous l’avez évoqué, monsieur Darmanin, de la remise en cause de la vétusté des valeurs locatives. C’est un serpent de mer, mais puisque le monde a changé et qu’il est « en marche », on aurait pu imaginer un mouvement sur les valeurs locatives.
Or ce mouvement est reporté aux calendes grecques, en vertu d’une tradition forte d’une cinquantaine d’années.
Vétusté des valeurs locatives, injustice et absurdité : la commission des finances a ainsi établi que, dans 3 200 communes, c’est-à-dire 10 % des communes françaises, il n’y aura que cinq contribuables au maximum qui cotiseront à la taxe d’habitation. Et dans certaines communes, il n’y en aura qu’un : imaginez le climat qui en résultera dans ces communes et, surtout, l’injustice qu’entraînera cette décision !
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
J’ajoute que les 20 % de nos compatriotes qui continueront de payer la taxe d’habitation acquittent déjà 80 % de l’impôt sur le revenu. Il faut savoir ce que l’on veut faire : veut-on encourager ceux qui investissent, qui entreprennent, en considérant que ceux qui sont économiquement actifs rendent service à la communauté, même si leur motivation est d’abord personnelle ?
Une motivation personnelle peut avoir des effets parfaitement positifs, d’autant que 22 milliards d’euros de taxe d’habitation représentent un tiers des recettes du bloc communal. Monsieur le ministre, vous allez les prendre en charge par un tour de passe-passe. Vous nous dites que vous augmentez le pouvoir d’achat par la diminution de la taxe d’habitation. Toutefois, dans la mesure où la dépense des collectivités locales ne diminue pas et où l’État devra la rembourser, je serais curieux de savoir qui va assumer ces 22 milliards d’euros, si ce n’est le contribuable de l’État au lieu du contribuable local. C’est un choix qui inquiète les maires, mais ils disposent d’une autre tribune pour vous rappeler à l’ordre sur ce sujet.
M. Gérard Longuet, au nom de la commission des finances. Je dirai un mot sur la procédure budgétaire en m’adressant à l’Assemblée nationale, où une belle majorité composée de gens enthousiastes, passionnés, découvre la vie publique. Ils ont raison, car il faut un renouveau. Ce n’est pas moi qui les condamnerais, j’ai été jeune aussi !
Riressur les travées du groupe Les Républicains.
Certes, l’examen et le vote du budget prennent du temps, mais c’est le prix de la démocratie.
Heureusement, le débat parlementaire est long, minutieux et difficile, car les sommes en jeu sont considérables et emportent avec elles une certaine conception de la vie commune, du respect mutuel, du projet collectif. Outre les débats en séance, le Sénat écrit : la commission des finances a par exemple présenté 41 rapports de contrôle budgétaire ces douze derniers mois.
Vous avez la possibilité, messieurs les ministres, de vous nourrir de ces rapports budgétaires pour faire évoluer la situation, en particulier pour reprendre en main la dépense publique.
En conclusion, mes chers collègues, la commission des finances vous demandera d’adopter ce projet de loi de finances pour 2018, sous réserve que soient votés des amendements concernant les familles, notre compétitivité et, par conséquent, la fiscalité de l’investissement, avec quelques économies sur les dépenses, qui sont certes symboliques, mais montrent que l’on peut faire bouger les lignes en matière de prélèvements publics à partir de la maîtrise de la dépense du budget de l’État.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous poursuivons une session budgétaire au cours de laquelle nous avons déjà examiné de nombreux textes. Cela nous a montré les inconvénients de l’éclatement de la législation fiscale entre lois de finances et lois de financement de la sécurité sociale.
Monsieur le ministre de l’action et des comptes publics, vous avez eu raison de relancer le débat sur les conditions de l’examen des textes financiers au Parlement, débat qui était un peu au point mort depuis l’échec du projet de révision constitutionnelle de 2010.
La commission des finances du Sénat jouera tout son rôle dans ce travail. Nous devrons examiner aussi bien les modalités de discussion des différents textes dans chaque assemblée que leur calendrier de dépôt et d’examen, ainsi que l’organisation de la navette, surtout si l’idée de fusionner les parties recettes des lois financières prospère. Mais ce sont aussi les comportements et les pratiques qui doivent évoluer. Nous devons nous mettre en situation de voter en étant toujours pleinement éclairés, ce qui suppose de recevoir les réponses aux questions que nous posons et d’avoir du temps pour analyser les propositions du Gouvernement qui arrivent encore trop souvent par amendements déposés fort tardivement.
Aujourd’hui, nous sommes saisis du projet de loi de finances de l’année, sur lequel se sont penchées toutes les commissions et, en particulier, les 76 rapporteurs pour avis et les 48 rapporteurs spéciaux, dont je salue l’implication.
L’exécution d’une loi de finances est tributaire du contexte macroéconomique dans lequel elle s’inscrit. C’est sur ce point que je voudrais formuler mes premières remarques.
D’abord, la nouvelle majorité bénéficie pleinement des mesures visant à redresser la compétitivité de l’économie mises en place sous le précédent quinquennat : le Gouvernement bénéficie d’une accélération marquée de la croissance et d’un dynamisme des recettes.
Cette reprise tient notamment aux mesures mises en œuvre depuis 2012 pour redresser la compétitivité et enrichir la croissance en emplois. Le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, et le Pacte de responsabilité ont ainsi largement contribué au net redressement des marges des entreprises observé depuis 2013, soit + 2 points. Les efforts de modernisation du marché du travail commencent à porter leurs fruits, le nombre de déclarations d’embauche en CDI étant désormais à son plus haut historique. Les parts de marché à l’exportation sont stabilisées, après une baisse continue entre 2000 et 2012, et les projets d’investissements internationaux sont en forte hausse : + 34 % en 2016.
Deuxième remarque : pour ramener le déficit public en dessous de 3 % du PIB en 2017, on peut considérer que le Gouvernement s’est contenté de « surfer » sur la reprise. Le Gouvernement a « dramatisé » en juillet les résultats de l’audit des finances publiques de la Cour des comptes, pour finalement mettre en œuvre des mesures de régulation budgétaire d’un montant comparable aux années précédentes – 4, 2 milliards d’euros.
Avec la taxe sur les dividendes, on a retrouvé le même schéma : le Gouvernement dramatise en évoquant un « scandale d’État » avant de déboucher sur des propositions technocratiques et bien modestes de réformes de la procédure d’élaboration de la loi.
En réalité, en l’absence d’embellie conjoncturelle, la prévision de déficit public pour 2017 serait nettement supérieure au seuil de 3 % du PIB. Autrement dit, le Gouvernement, loin d’avoir pris des mesures de redressement « exceptionnelles », s’est contenté de surfer sur la conjoncture.
Troisième remarque : le Gouvernement a même profité de la reprise pour relâcher l’effort de maîtrise de la dépense en 2018, au risque de nous mettre en porte-à-faux par rapport à nos engagements européens. L’an prochain, le Gouvernement s’est fixé pour objectif de contenir la croissance de la dépense publique à 0, 5 %, loin de l’objectif affiché en juillet d’une stabilisation de la dépense. Près d’un tiers des économies programmées est ainsi reporté sur la fin du quinquennat.
Au regard de nos engagements européens, le Gouvernement joue avec le feu. La réduction – et rien n’est fini, monsieur le ministre, quoi que vous en disiez – du déficit structurel prévue l’an prochain, limitée à 0, 1 point de PIB, est ainsi très inférieure à nos engagements européens – 0, 6 point – et à l’objectif fixé par le précédent gouvernement – 0, 5 point. Nous allons saturer dès l’année prochaine les marges de flexibilité que nous permet le pacte de stabilité.
La gravité de cette remarque va au-delà des considérations budgétaires : à l’heure où le Gouvernement entend porter une réforme de la zone euro, c’est la crédibilité de notre pays qui pourrait être atteinte. La France sera le seul grand pays de la zone euro dont le ratio d’endettement ne devrait pas diminuer l’an prochain.
Ma quatrième remarque me conduit à regarder les solutions retenues par le Gouvernement pour éviter une « sortie de route » budgétaire. Si je résume, il a choisi de différer les baisses de cotisations sociales prévues pour les classes moyennes, récupérant ainsi 4, 5 milliards d’euros, plutôt que de reporter les réformes de la fiscalité du capital.
Justement, au-delà du contexte macroéconomique, il faut s’intéresser au budget de l’État et à la politique fiscale.
D’abord, le Gouvernement ne se prive jamais de charger la précédente majorité, alors que ce projet de budget capitalise sur des mesures qui ont été prises sous le quinquennat précédent.
Sur les 12, 4 milliards d’euros de baisses d’impôts contenues dans ce budget, quelque 5, 9 milliards d’euros, donc près de la moitié, correspondent à des mesures prises par le gouvernement précédent. Par exemple, la trajectoire de baisse de l’impôt sur les sociétés est un peu revue par ce projet de loi de finances, mais son principe avait déjà été voté, et c’est la mesure prise par la précédente majorité qui entrera en vigueur en 2018.
Ensuite, en observant ce qui relève des décisions du nouveau gouvernement, la situation est, si j’ose dire, moins rose. Ce projet de loi de finances ne porte pas la marque du sérieux budgétaire.
Regardons d’abord le déficit de l’État : il avait baissé sans interruption entre 2012 et 2016, pour revenir à 69, 3 milliards d’euros. En 2017, la situation se dégrade avec 76, 9 milliards d’euros, dégradation qui s’accentue en 2018 avec un déficit de 82, 9 milliards d’euros !
Je m’inquiète aussi des annonces du Gouvernement consistant à sacrifier le patrimoine de l’État pour débudgétiser le financement d’annonces aux contours flous. Depuis six mois, deux fonds dotés de 10 milliards d’euros issus en tout ou partie de cessions de participations ont été annoncés, sans que l’on sache si l’un se substitue à l’autre, comment ils devraient fonctionner, et sans aucune justification de la rationalité économique et financière de ces cessions.
Ce budget montre que les relations financières entre l’État et les collectivités territoriales doivent être repensées en profondeur. La loi de programmation met en place un mécanisme novateur de contractualisation censé s’appliquer dès 2018. Au 23 novembre, nous ne savons toujours rien de la manière dont il va s’appliquer concrètement. Les collectivités vont voter leur budget sans savoir où elles devront faire des efforts ni comment ils seront mesurés.
Pour le reste, cette année se caractérise, certes, par une DGF qui ne diminue pas, mais les dotations d’investissement, elles, sont réduites de 200 millions d’euros, en raison notamment de la très contre-productive suppression de la réserve parlementaire. La péréquation progresse moins.
En matière de finances locales, arrêtons le bricolage et osons une réforme globale. Nos impôts directs locaux sont à bout de souffle, nos compensations ne font que cristalliser les inégalités de richesse. Il faut changer de logiciel !
Surtout, ce budget n’est pas le budget du pouvoir d’achat.
Le Gouvernement met en avant les quelques mesures favorables qu’il propose, par exemple les revalorisations exceptionnelles de la prime d’activité ou l’augmentation de l’allocation aux adultes handicapés. Mais ces allocations font dans le même temps l’objet de réformes de leurs paramètres qui conduisent à reprendre d’une main ce que l’autre a donné.
Au niveau agrégé, et alors que les crédits des ministères progresseraient dans leur ensemble de 4, 4 milliards d’euros, deux missions verraient leurs crédits baisser très fortement : le logement et l’emploi. À chacun ses priorités !
En dehors de ces deux secteurs, le Gouvernement peine à expliquer comment il va faire des économies sur la suite du quinquennat, s’en remettant au processus Action publique 2022 qui parviendra, à n’en pas douter, à identifier en moins de six mois les leviers d’économie qui permettront de redresser nos finances publiques.
En matière de fiscalité, la réforme emblématique en faveur du pouvoir d’achat des ménages est celle de la taxe d’habitation. Si elle franchit la haie du Conseil constitutionnel, elle bénéficiera à 80 % des foyers qui verront leur impôt réduit de 30 % en 2018 et de 100 % en 2020. Le gain moyen par foyer est estimé à 166 euros en 2018.
Mais ce gain, même cumulé avec celui de la « bascule » des cotisations salariales sur la CSG, ne sera pas forcément un gain net. Il faut le mettre en regard des autres modifications apportées aux prélèvements sur les contribuables modestes ou moyens et en particulier en matière de fiscalité écologique, qui va augmenter de 46 milliards d’euros d’ici à 2024. Compte tenu de la structure de la consommation des ménages, la convergence entre l’essence et le diesel et la nouvelle trajectoire de la contribution carbone vont surtout toucher les ménages pauvres, pour lesquels les mesures de compensation – chèque énergie, prime à la conversion – ne seront pas forcément à la hauteur des surcoûts. On peut aussi mentionner la fiscalité de l’épargne qui soumettra les détenteurs de plans d’épargne en actions, les PEA, et d’assurance vie aux mêmes hausses de CSG que les détenteurs d’autres types d’actifs financiers, tout en enregistrant une hausse des prélèvements fiscaux.
La politique fiscale du Gouvernement se résume donc à des gains relatifs ou inexistants pour les ménages modestes ou moyens et à des gains certains et importants pour les contribuables les plus fortunés. Nous aurons ce débat au moment de la discussion des articles, mais je ne pourrai que m’opposer à la création du prélèvement forfaitaire unique et à la transformation de l’impôt de solidarité sur la fortune, l’ISF, en impôt sur la fortune immobilière, l’IFI, deux réformes dont la combinaison reviendra à accorder aux 100 plus gros contribuables de l’ISF un gain moyen annuel de 1, 5 million d’euros. Cela ne contribuera pas à améliorer significativement notre tissu économique, puisqu’on attend de cette réforme la création à long terme de 50 000 emplois seulement, soit bien peu au regard du coût de la réforme : 4, 5 milliards d’euros, voire plus de 5 milliards d’euros, qui manqueront chaque année au budget de l’État.
Nous reviendrons sur tous ces points lors de la discussion des articles et des missions, car cette année nous allons, selon toute vraisemblance, examiner l’ensemble du projet de loi de finances.
Nous verrons que ce budget est moins celui du nouveau monde que celui des vieilles ficelles, et c’est pourquoi, avec mon groupe, je ne le soutiendrai pas.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable.
Je suis saisi, par MM. Bocquet et Savoldelli, Mmes Assassi, Cohen, Cukierman, Gréaume et Prunaud et MM. Collombat, Foucaud, Gay, Gontard, P. Laurent, Ouzoulias et Watrin, d’une motion n°I-358.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l’article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi de finances pour 2018, adopté par l’Assemblée nationale.
Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour dix minutes, un orateur d’opinion contraire, pour dix minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas deux minutes et demie, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour la motion.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, en préambule, je voudrais adresser au nom de mon groupe tous mes vœux de prompt rétablissement à M. le rapporteur général, qui a été hospitalisé ce matin.
Hier, le commissaire européen à l’économie et aux finances, Pierre Moscovici, a alerté sur le risque de « non-conformité » du budget de la France. La réduction du déficit public serait trop faible, les réformes insuffisantes, etc. Tout est dans cette formule : « non-conformité ». Non-conformité à quoi ? Non-conformité pour qui ? Qui décide de cette non-conformité ?
Bien entendu, il s’agit de la soumission aux fameux critères libéraux qui structurent l’actuelle construction européenne, ces critères que l’on appelle les critères de Maastricht, repris par le traité de Lisbonne.
Ce sont ces critères, refusés par le peuple en 2005, qui placent depuis des décennies maintenant la rentabilité financière au-dessus de la satisfaction des besoins humains, à commencer par le droit au travail, par le libre accès aux services publics.
Aujourd’hui, le Président de la République et son gouvernement répondent avec zèle aux exigences de la Commission européenne : projet après projet, des ordonnances réformant le code du travail à ce budget, en passant par la loi de financement de la sécurité sociale.
De la réduction des APL, calamiteuse pour le logement social, de la sélection à l’université en passant par l’alignement institutionnel sur les desiderata bruxellois, cette politique s’aligne totalement sur les préceptes du traité de Lisbonne.
La surenchère de la commission des finances était donc attendue, elle servira – qui peut en douter – de prétexte pour enfoncer le clou de l’austérité, pour accélérer la casse des services publics, pour passer un cap en privatisant, par exemple, des éléments clés du secteur public.
D’entrée, le groupe communiste républicain citoyen et écologiste entend afficher son désaccord total, son opposition totale à ce cadre contraint, à ce budget qui devient une figure imposée, selon des règles dogmatiques sur lesquelles nous, parlementaires, mais surtout nos concitoyens, n’avons pas de prise.
M. Macron a-t-il été élu pour plus d’austérité ? Pour la destruction du code du travail ? Pour la baisse des APL et l’asphyxie des collectivités territoriales et du secteur public ? Nous ne le pensons pas.
La motion tendant à opposer la question préalable que j’ai l’honneur de défendre aujourd’hui exprime ce rejet global et vous savez tous ici qu’elle n’abrégera pas notre discussion, puisque ses chances d’adoption, d’après mes informations, sont quasiment nulles.
Seul groupe d’opposition déclaré à la politique d’Emmanuel Macron, que l’éditorialiste d’un journal qui ne défend pas nos idées qualifia par le titre « Au bonheur des riches ! », nous utilisons cette procédure pour permettre à l’opposition de s’exprimer clairement et fortement.
Oui, notre groupe refuse cette loi de finances pour 2018, parce qu’elle inaugure, d’une certaine manière, un nouveau quinquennat de sacrifices et de souffrances pour nos concitoyens sans que cela se traduise en plus par une amélioration durable des comptes publics et de la situation économique et sociale.
Cela fait tellement d’années que le chantage est ainsi pratiqué à l’endroit de nos concitoyens qu’il en devient presque indécent de rappeler les contours de cette logique et de ces politiques d’austérité qui ont tant nui à la situation !
Ce projet de loi de finances s’inscrit dans un système idéologique qui, comme je l’ai indiqué, perdure depuis des années.
Mais, mes chers collègues, où vivons-nous ?
Avez-vous oublié que cela fait plus de trente ans que les salariés de ce pays goûtent aux délices de la flexibilité de l’emploi, avec une bonne trentaine de types de contrat de travail existant sur le marché ?
Cela fait plus de trente ans que, sensibles aux sirènes du MEDEF et, à l’époque d’Yvon Gattaz, président du Conseil national du patronat français, le CNPF, les gouvernants successifs ont estimé qu’il était temps de réduire les cotisations sociales, « d’alléger les charges », selon le discours convenu, pour créer de l’emploi.
Nous en connaissons le résultat.
Trente ans après les premiers textes de la loi sur la flexibilité, nous offrons à 6 millions de nos compatriotes l’insécurité de périodes de chômage entrecoupées de petits boulots, de contrats à durée déterminée et autres missions d’intérim !
La transformation prochaine du CICE en allégement pérenne de cotisations sociales – élément du salaire sans cesse réduit depuis quelques années déjà – devrait conduire le SMIC français aux alentours du SMIC de certains pays de l’Est européen, cotisations comprises ! Quel progrès ! Quelle avancée !
Ces cadeaux au patronat, offerts par dizaines de milliards, sans le moindre résultat en matière de politique industrielle et d’emploi doivent cesser.
La flexibilité de l’emploi sur la durée est l’une des causes des maux dont souffre notre économie du point de vue de la compétitivité. Il faut le rappeler, le chômage coûte cher à la Nation, il épuise les comptes publics alors que le licenciement est une variable d’ajustement pour satisfaire des actionnaires.
Oui, nous ne pouvons pas parler de ce budget sans évoquer les choix économiques et sociaux. Ce qui plombe les finances publiques, c’est le maintien dans une économie de rigueur dont l’objet premier est le maintien de la rentabilité financière et la stabilité de l’État. Notre ambition est radicalement opposée. Pour nous, c’est l’humain d’abord et certainement pas le bonheur des riches !
La politique fiscale que vous proposez avec ce budget sert également les intérêts privés minoritaires. Des orateurs ne manqueront pas de relever les points saillants de ce texte, s’agissant de la réforme de la taxe d’habitation, de la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune, des portefeuilles financiers ou de la mise en place du prélèvement forfaitaire unique.
Ce débat est fort éloigné de la situation des 9 millions de personnes vivant sous le seuil de pauvreté !
Mes chers collègues, puisque l’occasion nous en est offerte, comment ne pas pointer qu’il a suffi de l’examen d’un collectif budgétaire pour que nous remarquions qu’un peu plus de 300 grandes entreprises ou groupes généraient, ensemble, rien moins que 1 620 milliards d’euros de chiffre d’affaires, soit 80 % du produit intérieur brut du pays, et s’acquittaient de 94 % de l’impôt sur les sociétés, soit un peu plus de 30 milliards d’euros ? Tout est dit ou presque dans ces deux chiffres : 1 620 milliards d’euros d’un côté et 30 milliards d’euros de l’autre.
Année après année, loi de finances après loi de finances, nous avons vu croître et embellir les allégements de fiscalité des entreprises ayant entraîné des pertes de recettes tant pour l’État que pour les collectivités locales, si bien qu’il est possible de penser que la matrice de nos déficits d’aujourd’hui se trouve là.
Et que fait le Gouvernement, si déterminé à réformer la France ? Eh bien, il continue, et même il prolonge et aggrave les travers du passé !
En valeur brute, l’impôt sur les sociétés, ce sont 57 milliards d’euros. Cette somme doit être comparée à l’excédent brut d’exploitation des entreprises, c’est-à-dire à leurs profits bruts, qui sont évalués à 665 milliards d’euros.
Et dire qu’il y a encore des gens pour affirmer que l’économie manque de fonds pour investir ! Ces 57 milliards d’euros ne seront plus que 28, 5 milliards à l’arrivée… Nous avons aujourd’hui un impôt sur les sociétés qui pèse, au regard du PIB, ce que pèse l’impôt sur les sociétés perçu par le gouvernement de la République d’Irlande !
Nous connaissons effectivement nombre de chefs d’entreprise, de PME pour tout dire, qui expriment un ressenti assez nettement différent. Je les comprends. Ce n’est pas pour eux que l’on a baissé, par exemple, le taux de l’impôt sur les sociétés. C’est d’abord et avant tout pour que la France devienne, ce qu’elle est devenue en réalité, un paradis fiscal pour les grands groupes à vocation transnationale…
… où le gaspillage du capital ira de pair avec les plans sociaux.
Je dirai quelques mots du cadre d’incitation à l’investissement des fameux « premiers de cordée » cités par le Président de la République.
Les Bernard Arnault, aux châteaux juridiquement déplacés, les Marc Ladreit de Lacharrière, généreux mécènes faisant quelques affaires avec les émirats du Golfe, les Patrick Drahi, riches des dettes que vont payer les 5 000 suppressions d’emplois chez SFR… À leur sujet, comme pour d’autres, le temps me manque pour évoquer le scandale inouï de l’évasion fiscale, de ces 1 000 milliards d’euros détournés de l’économie réelle dans le monde pour la satisfaction d’une élite réduite à quelques centaines de personnes.
Il faut dénoncer, oui. Mais maintenant, il faut arranger la loi, rendre illégale l’optimisation fiscale et sanctionner.
Il faut remettre les banques au service de l’intérêt général. Comme le propose mon collègue et ami Éric Bocquet, il faut réunir d’urgence une COP sur l’évasion fiscale, car c’est là un problème planétaire.
Posons la question préalable, là encore.
Voici des gens – le grand patronat, les riches – qui ont bénéficié de la baisse du taux marginal de l’impôt sur le revenu, qui vont tirer parti de la suppression de l’ISF et qui ont su, en leur temps, profiter de la réforme des donations.
Voici des gens qui vont, sans effort excessif, récupérer en 2018 des sommes considérables, sans commune mesure avec l’aumône publique de la baisse de la taxe d’habitation pour les contribuables modestes et moyens, laquelle fait vaciller les collectivités territoriales. Ces dernières sont pourtant au cœur du service public et de l’investissement public.
En cette semaine du congrès des maires, il faut entendre l’alerte envoyée par l’appel de Grigny. Sacrifier les collectivités territoriales, c’est briser le pacte républicain. Avec d’autres, de tous horizons, nous ne laisserons pas faire !
Mes chers collègues, nous ne suivrons pas Emmanuel Macron et le gouvernement d’Édouard Philippe dans le pari sur l’avenir qu’ils viennent d’engager avec ce premier exercice budgétaire. Cadeaux fiscaux consistants, mais incertains en termes d’effets sur l’activité, baisse de la dépense publique, aggravation de la condition des fonctionnaires, absence de réponse aux urgences de la situation sociale du pays, attaques sans précédent contre les collectivités territoriales : tout cela ne peut que justifier l’adoption de la question préalable que nous soumettons à votre vote !
Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Personne ne demande la parole contre la motion ?…
Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Raynal. J’approuve tout à fait l’avis exprimé par notre rapporteur général par intérim. Je suis simplement étonné qu’il n’ait pas dit la même chose l’année dernière…
Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain – Mme Annie Guillemot applaudit.
Bien entendu, les élus du groupe La République En Marche voteront contre cette motion tendant à opposer la question préalable.
Tout d’abord, nous devons respecter le débat parlementaire : dans notre démocratie, il est nécessaire que les différents groupes politiques puissent s’exprimer.
Ensuite, il est opportun que les Françaises et les Français observent la position de ceux qui tiennent un double langage, qui souhaitent peut-être que la France échoue et, surtout, qui n’ont pas su mener les réformes dont notre pays a besoin.
Ce projet de loi de finances, que nous allons étudier, est un budget de transformation. Pour la première fois depuis longtemps, il baisse la fiscalité pesant sur les ménages et sur les entreprises. Il va restituer du pouvoir d’achat à beaucoup de Français : je pense notamment à la réforme de la taxe d’habitation.
Nous aurons le temps, en séance publique, d’évoquer les nombreuses autres transformations assurées par ce budget.
Mes chers collègues, je vous invite à rejeter cette motion !
Mes chers collègues, après avoir écouté l’argumentaire développé par Mme Assassi, les membres du groupe Union Centriste s’opposeront, eux aussi, à cette motion tendant à opposer la question préalable.
Je mets aux voix la motion n° I-358, tendant à opposer la question préalable.
Je rappelle que l’adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi de finances pour 2018.
Je rappelle également que l’avis de la commission est défavorable, de même que l’avis du Gouvernement.
En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 29 :
Le Sénat n’a pas adopté.
Sourires.
Nouveaux sourires.
M. le président. Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Julien Bargeton.
Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.
Monsieur le président, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission des finances, chers collègues, avant tout, permettez-moi de souhaiter un bon rétablissement à Albéric de Montgolfier.
Le texte qui va occuper nos heures et nos journées n’est pas anodin ; mais un projet de loi de finances ne l’est jamais vraiment.
Ce projet de loi de finances s’inscrit dans un contexte européen singulier, qui a de quoi déconcerter : le Brexit qui, comme tous les divorces, n’est pas un moment heureux pour le projet européen, les tensions en Espagne, les incertitudes sur l’avenir budgétaire de l’Italie et, désormais, une crise politique inédite en Allemagne, faute de majorité claire au Bundestag.
Nous n’avons aucune raison de nous réjouir de cette situation, mais nous devons la garder à l’esprit lors de nos débats à venir.
Notre pays, longtemps décrit comme frappé de « fièvre hexagonale » du fait de son instabilité institutionnelle et politique, est à présent un îlot de stabilité sur un continent secoué par les frissons. En effet, l’espoir né de l’élection du Président de la République ne s’arrête pas à nos frontières, et nous avons collectivement l’opportunité de contribuer au retour de la France en Europe. À cet égard, l’avis de la Commission européenne nous pousse à agir, mais pas dans le sens d’une aggravation des déficits.
Nous aurons des débats, parfois techniques, mais cette chance historique est un aiguillon.
La stabilité politique n’est pas synonyme d’inertie. Elle est au contraire une invitation à une transformation profonde de nos politiques publiques et de notre système fiscal.
À présent, nous devons agir à partir d’un diagnostic lucide sur l’état de nos comptes publics, ce qui a été fait par le Gouvernement dès le mois de juillet, sur les freins qui entravent le financement de notre économie, avec un regard critique sur les résultats qui sont en deçà des attentes quotidiennes de nos concitoyens : la politique de l’emploi et la politique du logement.
C’est véritablement le bon moment pour agir. Les signes d’affermissement de la reprise de la croissance sont bien documentés par l’INSEE. Il s’agit de tirer parti de ce contexte économique favorable pour réduire durablement les prélèvements obligatoires et réduire tout aussi durablement certaines dépenses publiques devenues inefficientes.
Cela étant, la dépense publique n’est pas par nature mauvaise. Il n’est d’ailleurs pas rare que ceux qui réclament la réduction de la fiscalité en première partie soient les mêmes qui s’opposent aux mesures d’économies en seconde partie.
À titre indicatif, je rappelle que la dépense publique entre 2002 et 2008 avait progressé en volume de 2, 1 % par an, et que le Gouvernement s’est engagé, avec la trajectoire pluriannuelle des finances publiques, à un ralentissement inédit de la dépense à hauteur de 0, 4 % par an entre 2018 et 2022.
Chers collègues de la majorité sénatoriale, entendons-nous bien sur la notion d’économies. À l’Assemblée nationale, les élus du groupe Les Républicains ont déjà aggravé de 10 milliards d’euros le déficit public en première partie. De votre côté, vous avez creusé le déficit public de 7 milliards d’euros au terme de l’examen du PLFSS au Sénat, et de 5 milliards d’euros au titre du projet de loi de finances rectificative. Je ne doute pas de votre volonté – l’amendement de suppression de l’impôt sur la fortune immobilière, l’IFI, en est déjà un premier témoignage – de faire de même au cours de ce débat.
La semaine dernière, lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2017, relatif à la taxe sur les dividendes, vous nous avez proposé d’utiliser le surcroît de recettes pour régler ce contentieux. Nous ne vous avons pas entendus, mais peut-être était-ce à cause de la fatigue, défendre une réduction de la dépense publique à ce moment-là. « Étonnant, non ? », pour citer Pierre Desproges, que M. le ministre de l’action et des comptes publics affectionne.
Je doute que cette attitude soit à la hauteur des enjeux du moment.
Il est vrai que le moment est un peu long. Âgé de 44 ans, je n’ai vécu que deux ans dans un pays avec des comptes publics en excédent, car depuis 1975 nous sommes systématiquement dans le rouge. C’est dire !
Ne scions pas la branche sur laquelle nous sommes collectivement assis. Le Sénat – et je le regrette – n’est plus une évidence pour nos concitoyens, et nous devons être capables de leur redonner confiance en l’action publique. Je conçois que telle ou telle formation politique puisse avoir son agenda interne. Mais ne donnons pas une image caricaturale : notre assemblée, ce budget et, surtout, nos concitoyens méritent mieux.
La première partie, que nous allons examiner, porte sur la fiscalité, et je souhaite m’y attarder un peu.
La stratégie fiscale du Gouvernement passe d’abord par un allégement de la fiscalité pesant sur les ménages. Le principal, mais non unique levier de cette politique est l’exonération de taxe d’habitation pour 80 % des foyers à l’horizon 2020.
La commission des finances a fait le choix, que je n’approuve pas, d’ajourner ce gain de pouvoir d’achat, …
… qui profitera en priorité aux classes moyennes. Nous aurons, je pense, l’occasion d’y revenir au cours de nos débats, et je ne trahis pas un secret en disant que le chef de l’État abordera ce sujet cette après-midi.
Les membres du groupe La République En Marche souhaitent être partie prenante et force de proposition des initiatives sénatoriales visant à transformer notre fiscalité locale, difficile à piloter pour les élus et incompréhensible pour à peu près tout le monde.
L’exigence de transformation se traduit également dans les mesures relatives à la fiscalité du capital. C’est le cas du prélèvement forfaitaire unique.
L’objectif de cette mesure n’est pas, comme on l’a beaucoup entendu, de faire un cadeau aux Français les plus aisés, …
… mais de faciliter le financement des entreprises.
C’est le même souci qui anime la réforme très commentée de l’impôt de solidarité sur la fortune, l’ISF, laquelle est devenue un totem pour les deux côtés de l’hémicycle. Les uns y voient un moyen de contenir les inégalités de patrimoine, en oubliant au passage que nous sommes en économie ouverte ; les autres souhaitent la suppression totale de l’ISF.
L’ISF est un impôt épouvantail qui n’est pas un atout, dans un contexte de compétitivité internationale. En revanche, l’impôt sur la fortune immobilière, l’IFI, est justifié, car l’investissement immobilier au-delà de la résidence principale, reconnaissons-le, n’est pas celui qui contribue le plus à l’économie de la connaissance et de l’innovation, que le Gouvernement souhaite consolider.
Je suis également satisfait de voir que ce budget comporte des mesures fiscales attendues par les entreprises. Nous aurons l’occasion d’en parler lors de l’examen des articles non rattachés.
Je pense notamment aux mesures relatives à l’impôt sur les sociétés. S’y ajoute la transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, en allégements de charges à l’horizon 2019.
Quelques jours après la désignation de notre capitale comme destination de l’Agence bancaire européenne, la suppression de la tranche additionnelle de 20 % de taxe sur les salaires tire, de façon positive, les conséquences que le Brexit entraîne pour la place financière de Paris.
Sur ce point, mon intervention ne peut être exhaustive. Je rappellerai simplement que la politique fiscale n’est pas un jeu de Meccano.
En décidant de supprimer la hausse de la CSG, la majorité sénatoriale a déstabilisé l’ensemble de l’édifice, car si les textes sont distincts, la stratégie fiscale est cohérente. Il est très facile de se faire le défenseur des retraités en omettant de dire non seulement que l’exonération de taxe d’habitation leur profitera, mais aussi que la hausse de la TVA, que certains proposent, frapperait tous les retraités, y compris ceux qui ne sont pas concernés par la hausse de la CSG.
Telle n’est pas notre philosophie de l’action. Clarté des choix fiscaux, crédibilité des hypothèses retenues, contrôle des deniers publics : les élus du groupe La République En Marche ont toutes les raisons de soutenir le projet de loi de finances issu des travaux de l’Assemblée nationale, car il réconcilie l’eau et le feu
Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.
M. Julien Bargeton. … l’eau et le feu de la politique fiscale française des vingt dernières années, la solidité de notre économie et la solidarité entre les citoyens !
Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.
Monsieur le président, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, au nom du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, permettez-moi de saluer à mon tour, très amicalement, M. le rapporteur général.
Nous entamons aujourd’hui l’examen du premier projet de loi de finances élaboré par ce nouveau gouvernement.
Il s’agit évidemment de donner à l’État un budget pour l’année prochaine. Mais, bien au-delà, ce premier projet de loi de finances fixe clairement les lignes directrices pour le quinquennat qui s’ouvre.
Messieurs les ministres, vous venez d’entrer dans la maison France : aussi pensons-nous qu’il eût été fort utile de procéder à un état des lieux exhaustif de notre société et de la République. Liberté, égalité, fraternité : aujourd’hui, cette magnifique devise est bien souvent remise en cause par la réalité de la vie quotidienne vécue par une très grande majorité de nos concitoyens.
Cet état des lieux eût été facile à établir, compte tenu des nombreux documents disponibles pour ce faire. Je pense aux rapports récents d’organisations non gouvernementales comme OXFAM, le Secours populaire français ou, plus récemment encore, le Secours catholique. Ces organisations sont unanimes, malheureusement, pour relater le constat qu’elles ont pu établir.
Vous nous rétorquerez peut-être, comme d’autres le firent avant vous, que nous ne sommes plus à l’époque de Zola. Certes, et c’est bien là que le bât blesse ! Les données pour 2017 sont absolument effarantes pour un pays comme le nôtre, qui, à ce jour, est encore la sixième puissance du monde.
Nous ne pouvons pas faire l’économie de quelques chiffres. En 2016, les 10 % des Français les plus riches détiennent 56 % des richesses, quand les 50 % les plus pauvres se partagent 5 % de l’ensemble. Plus d’un tiers des Français a « expérimenté » la pauvreté. Le seuil de pauvreté perçu est à un niveau toujours plus élevé, 1 015 euros, et se rapproche dangereusement du niveau du salaire minimum, qui s’établit aujourd’hui à 1 140 euros.
Cette pauvreté qui prend racine dans notre pays a évidemment des conséquences concrètes dans la vie de nos concitoyens : 20 % d’entre eux déclarent avoir renoncé à des soins dentaires du fait de leur coût, 12 % à l’achat de lunettes et 16 % à une consultation chez un médecin spécialiste.
Le concept d’égalité, disais-je en préambule, est quelque peu mis à mal dans notre République : lorsqu’on porte le regard vers le haut de la pyramide, vers les « premiers de cordée », on se dit qu’il y a effectivement quelque argent en ce bas monde.
Un magazine économique aux feuilles de papier glacé publie chaque année, en juillet, un numéro spécial nous présentant le palmarès des 500 premières fortunes de France. Il suffira ici de citer un extrait de l’éditorial du numéro de cette année : « Le constat saute aux yeux, à voir l’évolution du classement des 500 fortunes professionnelles depuis [la] première édition [du magazine] en 1996, le patrimoine des ultra-riches en France a considérablement progressé depuis deux décennies. Les chiffres attestant de leur prospérité impressionnent. Le nombre des milliardaires a explosé, de 11 à 92, et, au total, la valeur des 500 fortunes est passée de 80 à 570 milliards, multipliée par sept. »
En janvier 2015, le ministre Emmanuel Macron conseillait aux jeunes Français d’avoir envie de devenir milliardaires.
M. Gérard Longuet, au nom de la commission des finances. Millionnaire, ça suffit !
Sourires.
Au regard de ces chiffres, l’opération risque, me semble-t-il, de prendre un certain temps…
Nous pourrions également citer, à titre d’exemple, le cas des 3 250 ménages les plus riches de France qui ont transféré 140 milliards d’euros dans les paradis fiscaux de par le monde. C’est l’occasion de rappeler ici le scandale de l’évasion fiscale.
Ce dernier est régulièrement révélé de manière spectaculaire dans les médias. Puis, quand le tumulte médiatique s’apaise au bout de quelques jours, le silence se fait, et le scandale continue.
Mes chers collègues, rappelons-le sans cesse, la République perd chaque année entre 60 milliards d’euros et 80 milliards d’euros : c’est l’équivalent du déficit que vous vous apprêtez à voter.
Mes chers collègues, ce combat doit nous rassembler au-delà de nos sensibilités propres, et il doit être mené sans faiblesse, sans compromission. C’est la mère des batailles, au nom de la République et de la démocratie !
Messieurs les ministres, nous ne pensons pas que votre budget soit la bonne réponse au constat que nous venons d’évoquer.
Nous constatons d’abord qu’il s’inscrit dans la lignée des budgets antérieurs – Éliane Assassi l’a rappelé –, enserré dans les carcans que vous vous êtes donnés, après la révision générale des politiques publiques, la RGPP, la modernisation de l’action publique, la MAP, ou encore le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance, le TSCG. Le dogme de la réduction de la dépense publique a encore été réaffirmé ce matin : comme si celle-ci était nuisible par nature, comme si elle ne contribuait pas, elle aussi, à la croissance et au développement ! Aussi cette continuité se traduit-elle dans vos choix budgétaires.
Nous détaillerons notre propos au cours des jours à venir dans cet hémicycle. Aujourd’hui, nous nous contenterons d’évoquer trois mesures fortes de votre projet, au premier rang desquelles la suppression de la taxe d’habitation.
Le fait de commencer par cette question en cette Haute Assemblée a bien sûr un sens très particulier.
Le sujet a été abondamment débattu lors de la récente campagne des élections sénatoriales, et pour cause, il suscite toujours beaucoup d’inquiétude chez les maires et les élus locaux.
Il y avait certainement une réforme à mener en matière d’impôts locaux : cela ne fait aucun doute. Mais elle ne doit évidemment pas éluder le sujet épineux de la valeur locative.
À nos yeux, cette annonce est démagogique. Qu’en sera-t-il demain de la taxe foncière ? Nos concitoyens auront-ils à subir en conséquence des hausses des taxes locales et des tarifs des services publics locaux ? Cette suppression signifie aussi que, à terme, 20 % des contribuables se retrouveront seuls à payer.
Certes, on évoque les compensations par l’État, mais les élus locaux conservent en mémoire la décision de suppression brutale, unilatérale, de la taxe professionnelle, prise il y a quelques années. Cette suppression devait, elle aussi, être compensée à l’euro près : vous le savez, tel ne fut pas le cas. Le compte n’y est pas.
Que se passera-t-il après 2018 ? Les communes seront privées, à terme, de 10 milliards d’euros de ressources. Or, chacun le sait ici, la taxe d’habitation représente environ 35 % de leurs rentrées fiscales. Ces préoccupations se sont largement exprimées cette semaine dans les travées du congrès des maires de France.
Messieurs les ministres, les collectivités territoriales représentent encore plus de 70 % de l’investissement public dans ce pays et seulement 9 % de la dette globale de la France. Nous vous suggérons de les solliciter comme un levier de sortie de crise et non comme une variable d’ajustement budgétaire.
Enfin, cette mesure est combattue par nombre de personnes, car elle est contraire à l’article 72 de la Constitution, qui sanctuarise le principe de la libre administration des collectivités territoriales en leur garantissant leur autonomie financière.
Oui, il faut une réforme de la fiscalité locale, mais une réforme globale et en concertation. Pour ces raisons, nous proposerons la suppression de l’article 3.
J’en viens à l’article 11, qui met en place le prélèvement forfaitaire unique, ou PFU. Là encore, point de nouveauté : cette disposition figurait par exemple dans les propositions de M. Fillon, candidat du parti Les Républicains lors de la dernière élection présidentielle.
Cette taxation unique à 30 % a pour première conséquence de revenir sur le principe de progressivité de la fiscalité, en vigueur jusqu’à présent. Ainsi, il n’y aura plus de variation en fonction des revenus. Comme tout impôt à taux unique, le PFU sera donc inégalitaire et profitera aux plus aisés.
Cette taxe a deux sources, un taux de cotisations sociales de 17, 2 % et un taux forfaitaire d’impôt sur le revenu de 12, 8 %. À terme, ce dispositif peut donc susciter une forme d’optimisation fiscale, car les revenus du capital seront moins taxés. En conséquence, il s’agit d’une véritable bombe à retardement pour les finances publiques. Le PFU transformera durablement une fiscalité déjà favorable aux plus aisés en une grande machine à redistribuer à l’envers.
Quant à l’article 12, il supprime l’ISF et met en place l’IFI.
Je relève déjà que, symboliquement, le mot « solidarité » disparaît : dans le contexte d’inégalités aggravées que j’ai précédemment évoqué, ce choix prend un sens très particulier. Ni Jacques Chirac ni Nicolas Sarkozy n’avaient osé toucher à l’ISF : M. Macron le fait.
Selon nous, ce n’est pas en supprimant un impôt socialement juste, ce n’est pas en cédant à une « lubie » du MEDEF, comme le disait lui-même Emmanuel Macron en 2014, que la France deviendra plus attractive. Mais, autres temps, autres mœurs !
Notre gouvernement propose de transformer l’ISF en IFI en sortant de l’assiette de l’ISF les valeurs mobilières, détentions d’actions, d’entreprises, d’obligations, de plans d’épargne en actions, ou PEA, d’assurances vie, etc. Le but est de diriger l’épargne vers les investissements productifs et, nous dit-on, de dynamiser l’économie. La perte de ressources pour l’État est estimée à 3, 2 milliards d’euros par an.
L’effet combiné de cet impôt sur la fortune immobilière et du prélèvement forfaitaire unique sur les dividendes sera absolument hallucinant pour les bénéficiaires de ces dispositifs.
Messieurs les ministres, je m’en réfère à la réponse faite par vos services au courrier que vous a adressé le président de notre commission des finances, Vincent Éblé, le 26 octobre dernier. Le président de la commission vous interrogeait quant aux conséquences de la mise en œuvre et de l’IFI et du PFU. Les éléments de réponse sont tout à fait édifiants. Nous en citerons quelques-uns.
Avec le PFU, les 100 premiers contribuables à l’ISF gagneront chacun, en moyenne, 582 380 euros par an.
Pour les 1 000 premiers contribuables, le gain moyen lié au PFU s’élèvera à 172 220 euros par an. Le bénéfice lié à la mise en place du PFU apparaît ainsi extrêmement concentré : 44 % du gain total est capté par le 1 % des ménages dont le revenu est le plus élevé. Cerise sur le gâteau, dernier élément d’analyse, pour les 100 premiers contribuables à l’ISF, le gain total lié aux deux réformes peut être estimé à environ 1, 5 million d’euros par an, soit un montant supérieur à l’ISF qu’ils acquittaient jusqu’à présent !
C’est aussi un symbole sidérant que la sortie des yachts et autres lingots d’or de l’assiette de l’impôt.
Messieurs les ministres, vous allez bientôt ressembler à Don Salluste dans La Folie des grandeurs !
M. Gérald Darmanin, ministre. « Et mes acclamations ? Mon enthousiasme ? »
Souriressur les travées du groupe La République En Marche et du groupe Les Républicains.
Pour illustrer concrètement les effets de notre proposition, citons le cas d’un PDG du CAC 40. Cette personne, qui a souhaité garder l’anonymat, détient un bien immobilier de 1, 5 million d’euros et 15 millions d’euros de valeurs mobilières diverses. L’ISF actuel lui vaudrait une contribution de 195 700 euros ; avec l’IFI, elle paiera la somme de 3 900 euros.
M. le Président de la République aura du mal à se débarrasser, pendant ce quinquennat, du sparadrap du Président des riches, version 2 !
Enfin, je dirai un mot de l’article 15, qui réduit l’assiette de la taxe sur les transactions financières.
Par ce projet de loi de finances, le Gouvernement propose de revenir sur l’une des mesures adoptées dans le cadre de la loi de finances pour 2017 : l’élargissement de l’assiette de la taxe sur les transactions financières française aux opérations dites « intraday ». Ces opérations dénouées au cours d’une même journée sont considérées comme les plus spéculatives.
Cette extension du champ de la taxe sur les transactions financières avait été obtenue de haute lutte, après cinq années d’âpres débats dans l’hémicycle. Elle est censée entrer en vigueur au 1er janvier 2018 et contribuer à l’amélioration du rendement de ladite taxe : de 1 milliard d’euros environ actuellement, celui-ci atteindrait, après l’élargissement aux opérations « intra-day », entre 2 et 4 milliards d’euros.
Chacun se souvient aussi que, en juin dernier, la Cour des comptes a publié un rapport à charge tirant à boulets rouges sur la taxe sur les transactions financières et sur l’éventuelle extension de celle-ci. Sans doute convient-il de rappeler ici que ce sont bien les élus, dans cette République, qui fixent les règles et lèvent l’impôt pour financer l’intérêt général.
On comprend bien le sens de ce signal fort adressé à l’industrie financière européenne, notamment après le Brexit : rendre la place financière de Paris plus attractive – pour les financiers.
Vous nous expliquez, monsieur le ministre, qu’il faut encourager ceux qui prennent des risques et libérer la fortune d’un excès de taxes pour orienter les capitaux vers l’économie réelle.
D’illustres de vos prédécesseurs, en France et ailleurs, ont puisé aux mêmes sources du néolibéralisme. Pensons à Mme Thatcher, qui, dès les années 1980, tenait le même discours, dans les mêmes termes exactement, au sujet de la célèbre théorie du ruissellement que vous nous vendez aujourd’hui, devenue théorie des « premiers de cordée » dans sa version 2017. Premiers de cordée dont on apprend que beaucoup transfèrent leur richesse sous des cieux fiscaux plus cléments, aux Bermudes, à Jersey ou à l’île de Man – pas pour investir, mais pour fuir l’impôt…
Cette théorie du ruissellement n’a jamais fait la preuve de son efficacité. En effet, alors que la distribution des dividendes tend à diminuer partout dans le monde, la France reste championne d’Europe dans ce domaine.
Vous avez raison quand vous exprimez le souhait d’orienter l’argent vers l’économie réelle ; mais votre méthode ne répond pas du tout à cet objectif. Chacun sait pertinemment que moins de 2 % des transactions financières dans le monde ont un lien avec l’économie réelle !
Ce projet de loi de finances aurait dû être l’occasion de s’attaquer frontalement à la question criante des inégalités, au nécessaire renforcement des services publics et à la domination insolente des marchés financiers dans l’économie. Ce n’est pas le chemin que vous avez choisi.
Vos premières mesures montrent déjà leur nocivité. Songeons à la grande inquiétude des élus locaux à la suite des annonces de cet été sur les collectivités territoriales.
Monsieur le ministre, votre budget va aggraver les inégalités. Allez-vous, demain, appliquer la double peine aux plus démunis ? Allez-vous persister dans vos choix généreux à l’endroit des plus aisés ?
L’état des lieux présenté au début de notre intervention n’étant pas pris en compte, vous comprendrez que le groupe CRCE ne puisse pas apporter son soutien à votre projet de loi de finances pour 2018 !
Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, au moment où s’ouvre dans notre assemblée le débat sur le projet de loi de finances pour 2018, je rappellerai la ligne qui sous-tendra l’action de l’Union Centriste et qui guidera nos choix, en toute indépendance – j’y insiste –, lors de l’examen de ce texte comme dans les prochaines années.
Cette ligne repose sur deux idées simples.
Premièrement, nous devons enfin donner un coup d’arrêt à cette sorte de fuite en avant qui nous conduit à accroître sans cesse l’endettement de notre pays : près de 2 200 milliards d’euros…
Au-delà même de nos engagements européens, au-delà même de la crédibilité de la France au sein de l’Union européenne et dans le monde, il s’agit d’abord de la responsabilité que nous portons devant les générations qui viennent.
M. Jean-François Longeot acquiesce.
Bien sûr, mettre fin à cette dérive appelle des décisions courageuses. Je pense que le moment est venu et que les conditions politiques et économiques peuvent être réunies pour prendre une telle orientation de façon durable. Ces décisions-là, nous les devons à nos enfants. Sachez, monsieur le ministre, que nous serons toujours à vos côtés pour les soutenir.
Deuxièmement, la réduction de nos déficits et de notre endettement ne doit en aucun cas avoir pour corollaire d’aggraver la fracture sociale et la fracture territoriale de notre pays, de pénaliser davantage encore les plus fragiles de nos concitoyens, les plus fragiles de nos territoires.
Le risque existe, nous le savons. Il est donc impératif d’accompagner cette politique budgétaire de mesures renforcées de solidarité. Cela s’appelle, tout simplement, l’équité sociale et territoriale. Nous le devons à nos concitoyens, nous le devons aux territoires de France.
Monsieur le ministre, vous l’aurez compris : redresser la situation financière de la France tout en veillant avec exigence à réduire les inégalités, telles sont nos priorités ; telle est la ligne de crête le long de laquelle nous souhaitons vous accompagner.
Notre collègue Michel Canevet évoquera les grands équilibres de ce budget et les données macroéconomiques. Pour ma part, je traiterai plus précisément des collectivités territoriales.
Je commencerai par la suppression de la taxe d’habitation pour 80 % des ménages. Le candidat s’y était engagé, le président honore cet engagement. Tenir les engagements doit devenir une constante, si l’on veut réussir à réconcilier nos concitoyens avec l’action publique.
Sur le fond, nous sommes favorables à un allégement des charges qui pèsent sur les familles les plus modestes, surtout dans un contexte de hausse de la CSG. Je sais que, sur la suppression de la taxe d’habitation, les avis sont partagés. À titre tout à fait personnel, je suis favorable à la suppression de cette taxe qui pénalise plus particulièrement les habitants des territoires les moins peuplés.
Pour autant, deux questions se posent. D’abord, comment peut-on imaginer maintenir durablement cette taxe pour 20 % des ménages, alors que tout le monde s’accorde à dire qu’elle est profondément injuste ?
Ensuite, cette mesure ne doit en aucun cas se traduire par une perte de recettes pour les collectivités territoriales, non plus que par une dégradation de leur autonomie fiscale.
Vous avez pris en compte la réalité de ce risque et l’inquiétude des élus locaux. Vous y avez répondu, d’une part, par un dispositif de dégrèvement et, d’autre part, par la possibilité pour les collectivités territoriales d’augmenter leur taux. C’est une réponse concrète et positive, jusqu’en 2020 ; mais, au-delà, le choix du dégrèvement n’apporte pas suffisamment de garanties aux élus.
Dès lors, monsieur le ministre, cette mesure ne doit-elle pas amorcer une réforme plus globale de la fiscalité locale ? Dans cette hypothèse, seriez-vous disposé à engager une concertation avec le Sénat, représentant des territoires et des collectivités territoriales, notamment via sa commission des finances, avec deux objectifs : rendre la fiscalité locale plus juste et garantir l’autonomie fiscale des collectivités territoriales dans la durée ?
Sur la question des dotations, je le dis comme je le pense : les collectivités territoriales ne pouvaient pas être absentes de l’effort national de redressement des comptes publics. À dire vrai, elles y ont largement contribué, puisque, au terme de ces dernières années, le montant annuel de leur dotation globale de fonctionnement accuse une baisse de près de 11 milliards d’euros par an.
Désormais, il est impératif que les collectivités territoriales conservent leurs marges d’action. Pour 2018, vous nous proposez un pacte global et cohérent : fin de la baisse de la dotation globale de fonctionnement, création d’une ressource dynamique pour les régions par l’attribution à celles-ci d’une part de TVA et hausse de la péréquation verticale, accompagnée toutefois d’un élargissement de l’assiette des variables d’ajustement, qui intègre désormais la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle du bloc communal, ce qui n’est évidemment pas sans incidence sur les dotations d’un certain nombre de collectivités territoriales.
Vous proposez en outre le maintien de la péréquation horizontale, avec un fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales stabilisé, ainsi que celui de la dotation de soutien à l’investissement local créée en 2016, qui subit toutefois une légère baisse cette année.
Enfin, vous proposez aux plus grosses collectivités territoriales un contrat visant à plafonner la hausse de leurs dépenses de fonctionnement. Il sera important que cette démarche contractuelle, que nous soutenons, tienne compte des situations financières de chacune des collectivités territoriales. Je pense en particulier à certains départements, qui doivent faire face à une hausse importante des allocations individuelles de solidarité, des dépenses subies sur lesquelles ils n’ont pas de prise.
Dans l’ensemble, monsieur le ministre, nous partageons les grandes lignes de vos orientations pour les collectivités, même si, sur plusieurs points, nous proposerons des modifications ou des adaptations.
Je veux revenir un instant sur les inquiétudes de nombre de nos élus, que nous saluons à l’occasion du congrès qui les réunit cette semaine. Je pense en particulier aux élus des plus petites communes. Ils ont besoin de visibilité sur la fin de leur mandat ; entre baisses de dotations ces dernières années, incertitudes sur l’avenir et discours ambiant, ils ont besoin d’y voir clair.
Je souhaite, monsieur le ministre, que vous puissiez les rassurer et leur donner de la visibilité, en leur garantissant le maintien de la dotation globale de fonctionnement sur la fin de leur mandat, c’est-à-dire les trois prochaines années.
Le texte dont nous commençons l’examen traduit une volonté de réforme que nous approuvons. Il introduit de nouvelles mesures que nous soutiendrons. En revanche, d’autres dispositions doivent être amendées, et certaines entièrement réexaminées, comme les dispositions touchant au logement, qui ne répondent pas aux enjeux de l’habitat, ne sont pas suffisamment équilibrées et, par ailleurs, pénalisent les territoires ruraux. Nous contribuerons donc activement au débat budgétaire qui s’ouvre.
Soyez assuré, monsieur le ministre, que l’Union Centriste sera un partenaire exigeant et attentif à vos côtés, pour réussir à répondre aux enjeux de notre pays !
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, nous allons débattre du premier budget du quinquennat du Président de la République : c’est un moment politique fort, un moment de dialogue entre l’exécutif et la représentation nationale. Nous espérons qu’il sera l’occasion d’une discussion franche et pragmatique, avec un seul guide : l’intérêt général – et pas les postures.
Nous abordons un texte qui a déjà été abondamment commenté ; il a déjà fait l’objet de critiques, voire de caricatures et même d’annonces martiales de la part des uns et des autres.
Certains fustigent un « budget pour les riches », oubliant au passage où nous a menés la frénésie fiscale du précédent quinquennat.
Comme si le régime de fiscalité punitive duquel nous sortons avait fait la preuve de son efficacité et de sa capacité à relancer la croissance !
Nous, nous saluons au contraire un budget équilibré, qui restaure en partie l’attractivité de notre pays, relance l’investissement dans l’économie réelle et rend du pouvoir d’achat à ceux qui en ont le plus besoin. Le prélèvement forfaitaire unique est en ce sens une bonne mesure, qui nous permet de nous rapprocher du niveau européen de prélèvement sur le capital.
D’autres critiquent la sincérité de ce projet de loi de finances, oubliant que nous sortons d’une ère d’insincérité et d’irresponsabilité budgétaires sans précédent, dont les conséquences, hélas, se font encore sentir aujourd’hui.
Nous, nous saluons au contraire un budget qui est probablement l’un des plus sincères depuis dix ans, tant dans ses hypothèses macroéconomiques que dans les évaluations des dotations budgétaires.
D’autres, enfin, se croient autorisés à donner des leçons de courage politique, oubliant au passage les renoncements du passé : à la tiédeur du pouvoir succède soudain le jusqu’au-boutisme de l’opposition…
Nous, nous saluons au contraire un budget courageux, qui ose aborder de front les grandes questions fiscales et apporte des solutions, bien sûr imparfaites, à de vieux problèmes français.
Madame le président du groupe CRCE, …
Madame la présidente du groupe CRCE, donc, je soulignais un fait sur lequel vous avez vous-même insisté : certains gouvernements de droite n’ont pas pris les mesures qui sont aujourd’hui proposées.
J’étais à Angers et je n’étais pas encore élu, ma chère collègue.
Nous voyons d’un bon œil la suppression des trois quarts de l’ISF, une mesure qu’aucun des gouvernements précédents n’a eu le courage de prendre depuis la création de cet impôt. Nous veillerons néanmoins à ce que le nouvel impôt sur la fortune immobilière remplisse bien sa mission, qui est la réorientation de l’épargne vers les investissements productifs, sans pénaliser à outrance l’investissement immobilier.
M. le ministre de l’économie et des finances acquiesce.
Le groupe Les Indépendants – République et Territoires estime ainsi que plusieurs mesures de ce projet de loi de finances vont dans le bon sens. Je voudrais néanmoins évoquer plusieurs points négatifs ou de vigilance, qui appelleront des propositions de notre part au cours des débats.
Premièrement, les efforts budgétaires consentis, qui sont réels, ne doivent pas nous tromper : le Gouvernement profite de la reprise pour passer sous silence un effort structurel faible et une hausse de la dépense publique qui demeure inquiétante. Les alertes récentes de la Commission européenne révèlent ainsi que la stratégie du Gouvernement de reporter les efforts sur la fin du quinquennat pourrait mettre en péril nos engagements européens.
Nous émettons des doutes sur la soutenabilité des objectifs annoncés et sur les moyens mis en œuvre pour les respecter. À cet égard, le plan Action publique 2022 apparaît modeste en comparaison des efforts que l’État devra consentir.
Nous sommes également préoccupés par le sort réservé aux collectivités territoriales dans ce budget. Les maires, que nous recevons cette semaine, notamment au Sénat, sont les piliers de la République ; avec les autres échelons locaux, ils contribuent à la vitalité de notre démocratie et à la qualité de nos services publics. Nous veillerons à ce que la refondation de la fiscalité locale, que nous savons tous nécessaire, ne se fasse pas au détriment de leur liberté ni de leur capacité d’action.
Dans cet esprit, nous ferons des propositions pour que la suppression de la taxe d’habitation pour 80 % des ménages français ne se traduise pas par une perte d’autonomie financière pour les communes.
Nous ne pourrons pas faire l’économie d’une réforme d’ampleur des valeurs locatives, qui sont obsolètes et injustes. Mais il nous semble que l’on prend trop souvent ce serpent de mer comme prétexte à l’inaction. La mesure du Gouvernement, imparfaite et perfectible, a le mérite de poser les bonnes questions.
Là est peut-être le plus grand mérite de ce projet de loi de finances : il pose de vraies questions de société et prépare l’avenir, après de nombreuses années de faux-semblants, de renoncements ou de facilités. Dans ces conditions, un esprit d’opposition systématique pourrait nous faire manquer, collectivement, un rendez-vous avec la transformation du pays.
Pour cette raison, le groupe Les Indépendants – République et Territoires est prêt, messieurs les ministres, à travailler avec vous pour améliorer ce texte. Nous le ferons en responsabilité, mais sans complaisance, avec la volonté d’agir au service de l’intérêt national !
MM. Claude Malhuret et Didier Rambaud applaudissent.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite à mon tour un prompt rétablissement à M. le rapporteur général.
Je ne tournerai pas autour du pot, le Marseillais que je suis ira droit au but… Ce projet de loi de finances est en opposition complète avec notre vision philosophique et politique de la société française !
Il s’inscrit dans la continuité de ce que vos prédécesseurs infligent à nos compatriotes depuis des décennies.
Tout d’abord, votre budget est résolument tourné vers les plus riches, abandonnant à leur sort les classes moyennes. Que les choses soient claires : je ne suis pas de ceux qui compartimentent et divisent les Français en les enfermant dans des cases ou dans des classes.
Je laisse à d’autres le soin de le faire ; je sais qu’ils sont nombreux à vouloir diviser les Français, y compris dans cet hémicycle.
Force est de constater que votre politique s’attaque aux classes moyennes, alors qu’elle caresse dans le sens du poil les grandes puissances financières ultralibérales, déconnectées et déracinées !
En remplaçant l’ISF par un impôt sur la fortune immobilière, le Gouvernement fait la part belle aux placements financiers, au détriment de ceux qui détiennent un bien immobilier ou plusieurs. Cette volonté de privilégier la détention de valeurs boursières au détriment des biens immobiliers met à nouveau en lumière la philosophie politique d’Emmanuel Macron : partout, il faut détruire les attaches et les liens et s’en prendre à la France durable, qui est aussi la France des propriétaires. La finance n’est pas l’ennemie de l’Élysée ; elle ne l’a d’ailleurs jamais été…
Quitte à envisager une réforme de l’ISF, la formule la plus juste serait, à l’inverse, d’en exonérer la résidence principale, une mesure favorable aux contribuables assujettis à l’ISF essentiellement à cause de la valeur de leur patrimoine immobilier, fruit souvent d’un héritage familial ou d’une vie de labeur. Le maintien de ce patrimoine paraît vital pour notre pays à l’heure du grand déracinement !
C’est toujours la même philosophie qui vous anime lorsque vous instaurez un prélèvement forfaitaire unique de 30 % sur les biens mobiliers, qui favorisera les plus aisés.
Vous choisissez non seulement de ne pas lutter contre l’immigration de masse, …
… mais de la favoriser en augmentant le budget de l’aide médicale de l’État et celui alloué à l’accueil des migrants. M. Macron a beau communiquer, la réalité de votre budget annonce urbi et orbi que la France continuera à accueillir toute la misère du monde !
Vous choisissez toujours plus d’Union européenne, en augmentant de plus de 2 milliards d’euros la contribution de la France à ses institutions.
Vous étranglez toujours plus les collectivités territoriales, en supprimant la taxe d’habitation et en abaissant la dotation globale de fonctionnement.
Vous fermez les yeux sur les vrais problèmes qui polluent nos banlieues et nos quartiers : la politique d’immigration massive, l’insécurité, le communautarisme, la haine de la police et de tout ce qui peut représenter la France et l’État. Vous maintenez coûte que coûte une politique de la ville ruineuse, dont l’inefficacité a pourtant été maintes fois dénoncée par la Cour des comptes.
Pendant ce temps, les classes moyennes et les Français les plus modestes trinquent : augmentations du prix du diesel, du tabac et des péages des compagnies d’autoroutes auxquelles vous avez bradé notre réseau… Bientôt viendra le 1er janvier, avec ce que l’on ose encore appeler les « traditionnelles augmentations ».
Tout cela pour quel résultat ? Une Union européenne qui pourrit littéralement le quotidien de nos compatriotes avec des normes infernales !
Quant à l’armée, si son budget est annoncé comme sans précédent, il reste largement en deçà des besoins réels et urgents de nos forces pour mener à bien leurs missions.
À présent, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi une petite digression pour revenir sur un événement qui s’est produit la semaine dernière, lors de l’examen par notre assemblée du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.
Après que j’eus présenté deux amendements visant respectivement à réserver les allocations familiales aux familles dont un parent au moins est Français et à supprimer ces allocations aux familles dont l’un des membres a été condamné pour terrorisme, notre collègue Alain Milon, membre du groupe Les Républicains, mais dont le cœur est En Marche, a pris la parole pour exprimer son étonnement et saisir la présidence.
M. Philippe Dallier s’exclame.
Voici ce qu’a dit M. Milon : « Ces amendements écrits me semblent discriminatoires, et je me demande comment ils sont arrivés jusqu’ici. »
Je tiens à condamner de la manière la plus ferme qui soit cet appel à la censure et à vous interpeller tous, mes chers collègues – même vous, madame Assassi – : qu’en est-il de la liberté d’expression ? Il est vrai, ma chère collègue, que ce n’est pas votre priorité…
Oui, qu’en est-il de la liberté d’expression dans ce pays, et plus particulièrement dans cet hémicycle ?
Souffrez qu’une voix discordante s’exprime et s’oppose dans ce lieu soi-disant de débat démocratique !
On peut, on doit ne pas avoir la même opinion ; et chacun doit pouvoir exprimer la sienne sans être victime de la censure. Nous ne sommes pas encore à Pyongyang ou à La Havane, madame Assassi !
Souffrez que 11 millions d’électeurs s’expriment ici par mon intermédiaire, alors que, sur 925 parlementaires, députés et sénateurs confondus, 10 seulement représentent le Front national !
Pour conclure, j’en appelle à la raison et à l’honnêteté intellectuelle. Débattons argument contre argument, projet contre projet, projet de société contre projet de société : ce sont les Français, seuls souverains dans ce pays, qui décideront, pas un Fouquier-Tinville d’opérette !
M. Philippe Dallier proteste.
Face à la situation dans laquelle se trouve notre pays et à la guerre que le terrorisme islamiste lui a déclarée, nous estimons, au Front national, que la France doit retrouver sa place dans le concert des nations libres, que notre économie doit se tourner plus particulièrement vers les classes moyennes et les plus modestes et que la fracture entre nos métropoles et nos arrière-pays doit être réduite.
Ce projet de loi de finances est mauvais ; nous le pensons, nous le disons, si toutefois M. Milon et Mme Assassi le permettent !
Monsieur le président, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission des finances, monsieur Longuet, qui remplacez notre rapporteur général - j’ai une pensée pour lui en cet instant -, mes chers collègues, nous débutons l’examen du projet de loi de finances pour 2018 dans un contexte d’embellie économique, qui marque un changement par rapport à ces dernières années de croissance atone, en particulier entre 2012 et 2013.
C’est, à l’évidence, une bonne nouvelle, qui permet au Gouvernement de fonder son budget sur des hypothèses de croissance réalistes, contrairement, là aussi, à ce que nous avons connu au cours des derniers exercices budgétaires.
Vous vous offrez même le luxe – si je puis dire – de rester sur la prévision de 1, 7 % de progression du PIB, au lieu des 1, 8 % finalement attendus ; c’est une décision de sagesse comme on les aime au Sénat. Le Haut Conseil des finances publiques relève aussi un scénario gouvernemental « prudent pour 2017 et raisonnable pour 2018 ».
Pour ma part, je salue cet effort de sincérité budgétaire, car nous ne sommes pas à l’abri d’un aléa ; nous le voyons malheureusement avec le fiasco de la taxe de 3 % sur les dividendes.
Si la France profite de la bonne santé de la zone euro, on peut reconnaître aussi que certaines des mesures du précédent quinquennat portent leurs fruits. Je citerai le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, qui, malgré ses défauts, a permis aux entreprises de reconstituer leurs marges et de reprendre leurs investissements.
Dans ces conditions, que peut-on attendre du budget de l’État ? De l’audace, de la justice et de l’efficacité sans doute.
L’audace, tout d’abord. De ce point de vue, je constate qu’il n’y a clairement rien de révolutionnaire dans le premier projet de loi de finances de la majorité actuelle. On y retrouve des recettes anciennes consistant à aménager, toiletter ou raboter, ce qui conduit à une maîtrise des dépenses encore insuffisante. En effet, si l’on peut se féliciter du retour du déficit sous la barre des 3 % à terme, l’ajustement structurel ne sera que de 0, 1 point.
Le prélèvement à la source est reporté ; nous en prenons acte.
En dehors des principales mesures, comme la création de l’impôt sur la fortune immobilière et celle du prélèvement forfaitaire unique, l’audace a surtout consisté à instaurer un dégrèvement de taxe d’habitation ; mais, comme vous pouvez l’imaginer, messieurs les ministres, nous nous serions bien passés de cette réforme.
Nous sommes en plein congrès des maires, et vous savez combien les efforts sans cesse demandés aux collectivités territoriales ont dépassé la limite du supportable. À travers de nombreux autres dispositifs, c’est le principe d’autonomie fiscale des collectivités territoriales qui est de plus en plus affecté.
Aussi les maires attendent-ils d’être rassurés. J’espère que le Président de la République prendra cet après-midi, porte de Versailles, des engagements pour ne pas décevoir nos élus, confrontés à un quotidien local de plus en plus difficile. Nous aurons sans doute l’occasion d’en reparler dans cette discussion budgétaire.
Est-ce un budget juste ? Certaines mesures vont dans ce sens, si l’on songe aussi à certains dispositifs du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018. Je pense à la revalorisation de la prime d’activité, de l’allocation aux adultes handicapés et de l’allocation de solidarité aux personnes âgées, ainsi, bien sûr, qu’à la baisse des cotisations salariales.
Je m’inquiète toutefois, messieurs les ministres, de la fin des contrats aidés, qui constituaient une opportunité d’embauche pour les plus fragiles.
Enfin, ce budget sera-t-il efficace ? L’avenir nous le dira…
Clairement, le projet de loi de finances pour 2018, notamment avec les deux dispositifs phares auxquels j’ai fait référence, l’impôt sur la fortune immobilière et le prélèvement forfaitaire unique, vise à encourager l’activité économique. C’est un signe fort en direction des entreprises.
Si l’on peut toujours critiquer les contours de ces mesures, comme on l’a fait pour le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, on ne peut pas nier qu’une partie des revenus de l’épargne libérés sera sans doute, du moins l’espérons-nous, réinjectée dans l’économie productive.
Je regrette toutefois que l’agriculture soit souvent oubliée dans les mesures d’encouragement à l’activité, alors que ce secteur, en particulier l’élevage, a connu une grave crise des prix ces dernières années. Mon groupe a déposé quelques amendements visant à mieux prendre en compte les besoins de l’agriculture, notamment l’un portant sur le micro-bénéfice agricole.
Mes chers collègues, comme nous sommes nombreux à le répéter chaque année, notre pays doit retrouver une trajectoire saine de ses finances publiques ; c’est une question de survie dans une compétition mondiale de plus en plus difficile et contrainte.
M. Yvon Collin. La majorité des membres du RDSE regarde ce budget avec bienveillance et devrait l’approuver, mais nous serons bien sûr attentifs aux discussions de ces prochains jours !
M. le président de la commission des finances applaudit. – M. Daniel Chasseing applaudit également.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures, pour les questions d’actualité au Gouvernement, puis, à seize heures quinze, pour la suite de la discussion générale du projet de loi de finances pour 2018.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à treize heures trente, est reprise à quinze heures, sous la présidence de Mme Marie-Noëlle Lienemann.