Intervention de Stéphane Travert

Commission des affaires économiques — Réunion du 21 novembre 2017 à 16h45
Projet de loi de finances pour 2018 — États généraux de l'alimentation - Audition de M. Stéphane Travert ministre de l'agriculture et de l'alimentation

Stéphane Travert, ministre :

Je vais essayer de répondre à l'ensemble des questions. Le questionnaire est fourni, technique, précis mais, pour tout dire, je m'y attendais. Tant mieux ! Cela me permet de lever un certain nombre d'ambiguïtés, de répondre à des malentendus, mais aussi de tordre le cou à de vilaines rumeurs.

La question de Mme Férat m'offre la possibilité d'introduire les réponses que je souhaitais vous faire. C'est un honneur pour moi d'occuper les fonctions de ministre de l'agriculture, car nous avons l'agriculture la plus belle et la plus performante du monde. Avec les territoires, les élus, les services et l'ensemble des fonctionnaires de ce beau ministère, je veux faire en sorte que les Français soient fiers de leur agriculture, que les agriculteurs puissent vivre de leur métier et qu'ils soient fiers de ce qu'ils font.

Si nous y parvenons, nous aurons réussi à redonner de la compétitivité à la ferme France.

Je considère que la compétitivité n'est pas un gros mot. Nous en avons besoin pour être responsables face aux défis qui sont les nôtres. La compétitivité permet de mieux résister aux aléas et à une concurrence mondialisée. On le voit à propos de la filière laitière. C'est ce qui va permettre de passer des crises comme on a pu en connaître dans le Sud-Ouest, à la suite de l'influenza aviaire.

Rendre leur fierté aux agriculteurs parce qu'ils pourront vivre dignement de leur travail est l'objectif que nous souhaitons porter. C'est un objectif que nous pouvons partager. Il peut y avoir des dissensus quant aux moyens d'y parvenir. La discussion est là pour essayer de traiter ces problématiques.

Je crois c'est que nous y parviendrons parce que nous aurons réussi à simplifier la vie des agriculteurs et leur travail. On parle beaucoup de contraintes administratives. Il n'y a pas que cela. Peut-être avons-nous eu, depuis un certain nombre d'années, l'envie d'ouvrir les parapluies et de surajouter de la réglementation à la réglementation.

Nous avons besoin de retrouver du pragmatisme et du bon sens. Ceux-ci peuvent parfaitement s'illustrer par des politiques novatrices en matière d'agriculture. Simplifier un certain nombre de démarches, c'est ce que nous allons essayer de faire lorsque nous défendrons la prochaine PAC. Simplifier la réalisation d'un certain nombre de projets, c'est ce que nous allons essayer de faire dans le projet de loi de restauration de la confiance entre les citoyens, l'État et l'administration, plus communément appelé « projet de loi sur le droit à l'erreur ».

C'est avec de telles mesures, qui faciliteront la vie des agriculteurs, leur redonneront plus de temps pour se consacrer à leur métier, l'élevage, la culture ou un certain nombre d'autres systèmes agricoles, que nous réussirons le pari de rendre sa fierté à l'agriculture française et la compétitivité à la ferme France.

La situation d'ensemble, en 2017, a été meilleure qu'en 2016. Sur le plan climatique, nous avons connu des perturbations climatiques de moindre ampleur, à l'exception des gelées de printemps qui ont affecté le secteur viticole et, dans une moindre mesure, le secteur arboricole.

Le secteur laitier se redresse nettement. La crise laitière a des impacts limités sur la viande bovine grâce aux décisions prises par les pouvoirs publics français et européens, avec des cours tirés par l'export. Nous ne connaissons pas de crise d'ampleur particulière sur les fruits et légumes. Quant au prix des céréales, ils sont stabilisés par rapport à 2016 et les cours maintenus.

Nous avons plutôt de bonnes nouvelles en matière d'exportations : réouverture du marché vers la Turquie pour la filière bovine, du marché vers le Vietnam pour le marché de la pomme de terre, du marché vers le Japon pour la volaille et le foie gras.

Ces bonnes nouvelles concourent aux résultats économiques de notre agriculture et à notre balance du commerce extérieur.

Il est vrai que ces éléments montrent une situation contrastée, avec de vraies améliorations, mais nous savons qu'il nous reste beaucoup de travail à faire. La mobilisation des acteurs de la filière est indispensable. C'est le sens de ce qui est engagé avec les interprofessions.

Le Président de la République, dans son discours du 11 octobre, à Rungis, avait demandé que nous puissions mettre en place des plans de filières. C'est ce que nous sommes en train de réaliser. Après avoir signé, la semaine dernière, la charte avec les producteurs, les distributeurs et les transformateurs, nous travaillons actuellement avec les filières, les interprofessions. À quels marchés allons-nous porter une attention particulière ? Quels sont les objectifs de croissance, quelles sont les priorités en matière économique et par rapport aux attentes sociétales ?

On parle beaucoup du bien-être animal, de biosécurité, de sanitaire. Quelles perspectives ces filières vont-elles ouvrir pour que l'État puisse être au rendez-vous de ces engagements pris le 11 octobre dernier, et voir comment articuler, avec des plans de filière validés, un projet de loi qui nous permettra de transformer durablement notre agriculture dès le premier semestre prochain ?

Nous attendons des engagements des acteurs des filières en matière d'organisation des relations économiques. Nous aurons les résultats de ces travaux le 10 décembre prochain. J'ai reçu les acteurs de ces filières hier matin. Je sais que c'est court, mais ils sont fortement mobilisés sur ces questions. Un certain nombre a même pu présenter, à mi-parcours, un travail très intéressant.

Concernant les mesures sur l'influenza aviaire, l'État s'est fortement mobilisé pour accompagner les professionnels et déployer des dispositifs d'aide en faveur de l'amont de la filière avicole et obtenir un cofinancement européen.

Ce sont près de 290 millions d'euros qui vont être mobilisés. Les dispositifs de la crise H5N1 de 2016 à destination de l'amont de la filière sont désormais clôturés. Les 2 500 dossiers ont été soldés le 30 septembre dernier.

Concernant l'indemnisation de l'aval de la filière, un dispositif d'avance remboursable a été rapidement déployé. Une enveloppe de 20 millions d'euros est en cours de déploiement.

Concernant la crise de 2017, 90 % des dossiers pour les animaux abattus dans les foyers infectés, soit 30 millions d'euros sont payés. Les paiements pour compenser l'abattage préventif subi dans les élevages sont désormais finalisés pour 13 millions d'euros. En parallèle, le versement depuis juin d'une avance de 50 % sur les pertes de production des éleveurs situés dans les zones réglementées est en cours de finalisation. Comme cela a été annoncé le 23 juin, une avance de 20 % vient d'être récemment payée.

La semaine dernière, nous avons fait en sorte qu'il puisse y avoir un dispositif de 77 millions d'euros pour prendre en charge une partie des pertes indirectes dues à l'absence de canards ou de palmipèdes dans la plupart des élevages à partir du mois de mai, en raison du vide sanitaire demandé.

Il est important que la filière s'engage dans la mise en oeuvre de mesures de biosécurité. Il est indispensable pour cette filière de réduire les risques.

Nous avons souhaité accompagner la filière avicole dans la difficulté qu'elle a rencontrée. Nous l'avons particulièrement fait là où c'était nécessaire, notamment dans le Sud-Ouest, fortement touché par l'influenza aviaire.

S'agissant de la viticulture j'ai, dès mon entrée en fonction, pris un certain nombre de mesures pour accompagner les viticulteurs les plus touchés par les épisodes de gel du printemps 2016, comme le dégrèvement de la taxe sur le foncier non-bâti. J'ai adressé à mon collègue Gérald Darmanin une demande pour faciliter la prise en compte des pertes importantes subies par les viticulteurs. Nous avons dégagé une enveloppe annuelle de 30 millions d'euros pour prendre en charge les cotisations sociales et tenir compte des besoins des différents départements et des différents types de production.

Un échéancier de paiement des cotisations sociales allant jusqu'à trois ans a été décidé pour alléger la trésorerie des exploitants. Des cellules d'accompagnement ont été mises en place au niveau départemental.

Les viticulteurs disposent aujourd'hui d'outils spécifiques pour faire face aux aléas. C'est le cas des dispositifs d'achats de vendange ou de volumes complémentaires individuels. Les intempéries se multiplient, il ne faut pas le nier. Il est important que les producteurs puissent assurer plus largement leurs récoltes. Nous avons mis en place un dispositif de soutien à l'assurance sur les récoltes qui peut prendre en charge jusqu'à 65 % des cotisations d'assurance. Nous avons besoin de faire la promotion de ce dispositif, que beaucoup de viticulteurs ne connaissent pas ou n'utilisent pas suffisamment.

S'agissant de la PAC, nous avons souhaité que celle-ci fasse partie des priorités budgétaires. La PAC est une sorte de talisman pour l'agriculture. C'est symbolique. Nous avons besoin d'une PAC forte, plus lisible, qui comporte des filets de sécurité. C'est l'objectif que nous fixons à la prochaine programmation. Aujourd'hui, la PAC est une politique totalement indissociable du projet européen. Nous devons faire face à un certain nombre d'enjeux - vous les avez rappelés les uns et les autres - concernant la sécurité alimentaire, l'emploi, la réponse aux enjeux environnementaux et climatiques, et les productions agricoles et alimentaires.

La prochaine PAC doit être simplifiée et modernisée. Nous avons besoin qu'elle protège nos agriculteurs. Nous travaillons sur ces bases avec les autres ministères. Le rapport d'information du Sénat et la proposition de résolution européenne posent des jalons importants pour les prochaines étapes du processus de négociation que nous allons entamer. L'ensemble des travaux que vous menez seront utiles à nos échanges.

Je suis convaincu que la PAC doit demeurer une politique essentielle. L'ampleur des défis nécessite une grande coordination. Nous organiserons, le 19 décembre prochain, une conférence nationale sur la PAC, à laquelle les parlementaires seront invités. Nous aurons l'occasion d'entendre mes homologues européens ministres de l'agriculture.

M. Phil Hogan, commissaire européen en charge de l'agriculture, sera également présent. Ce sera l'occasion pour nous de poser des jalons, de réfléchir ensemble, de trouver des alliés, d'aller chercher des partenaires. C'est ce dont nous avons besoin aujourd'hui.

La France n'est pas seule au milieu des 27 membres de l'Union européenne. Elle a besoin d'alliés pour défendre sa spécificité, cette place forte agricole qui est la nôtre. Je souhaite que ces travaux puissent donner de belles perspectives dans le cadre des négociations qui viendront.

Vous avez évoqué le Brexit. Les négociations se font aujourd'hui à 27. Michel Barnier a mandat pour négocier au nom des 27. Aujourd'hui, nous sommes dans le cadre de la négociation sur les conditions de sortie financière du Royaume-Uni. À ce stade, nous ne les connaissons pas.

Je viens d'un territoire - une presqu'île - où les pêcheurs sont inquiets. Ils se demandent si, demain, ils continueront à avoir accès aux eaux britanniques. C'est la même chose pour les Bretons.

Nous avons aujourd'hui besoin de défendre la spécificité de la pêche française. Je l'ai dit, la pêche française ne constituera pas la variable d'ajustement du Brexit. Elle ne le peut pas, parce que nous négocions dans un cadre global - et c'est bien la mission assignée à Michel Barnier. Nous devons bien évidemment éviter d'exclure un certain nombre de politiques et éviter d'enfoncer un coin entre les différents États. Nous avons besoin de faire bloc jusqu'au bout, sur l'ensemble des missions qui sont les nôtres.

Aujourd'hui, les négociations sur ce point ont peu progressé, et les travaux n'ont pas pu démarrer. Néanmoins, qu'il s'agisse de l'agriculture ou de la pêche, je resterai attentif à ce qui sera négocié, et je veillerai à préserver nos intérêts. Nous aurons l'occasion de revenir vers les professionnels à ce sujet.

Je voulais également aborder le sujet de la gestion des risques et du calendrier de versement des aides PAC. Si certains agriculteurs ne sont pas encore indemnisés, il faut me le dire !

Nous avons arrêté un calendrier le 22 juin dernier. Celui-ci est tenu. Le 19 octobre dernier, nous avons réalisé un versement de 6,3 milliards d'euros, le plus gros que le ministère de l'agriculture n'ait jamais eu à réaliser. Il s'agit du règlement d'une avance de 90 % des aides PAC pour 2017. Bon nombre d'agriculteurs nous ont signalé que ces aides étaient arrivées sur les comptes bancaires.

Les MAEC 2015 sont réglées depuis le 3 novembre. Les paiements ont été réalisés par l'ASP. L'ICHN 2016 a été payée en juillet 2017. L'ICHN 2017 sera payée en février 2018. Les MAEC 2016 seront payées à partir de mars 2018 et les MAEC 2017 à partir de juillet 2018. Ce calendrier sera tenu.

S'il existe des difficultés sur certains territoires, il faut nous les faire remonter. L'objectif est de revenir à un calendrier de versement normal à partir de la campagne 2018. Les avances des aides en faveur des caprins et des ovins pour 2017 ont été payées le 16 octobre dernier, conformément au calendrier. Sans attendre le paiement des aides PAC, le Gouvernement a mis en place des apports de trésorerie remboursables pour chacune des campagnes.

Nous restons à votre écoute. Vous pouvez rassurer les producteurs et les éleveurs : les versements qui devaient l'être ont bien été effectués. Le calendrier sera tenu, et nous reprendrons le versement des aides de 2018 en 2018.

S'agissant de la gestion des risques, compte tenu de l'importance des aléas climatiques ou sanitaires, il convient de se doter d'outils adaptés, comme l'assurance climatique, le dispositif de calamités agricoles, ou les fonds de mutualisation, afin d'indemniser un certain nombre de producteurs. Nous avons engagé une réflexion au sein d'un groupe de travail du Comité supérieur d'orientation pour améliorer et rendre plus cohérent l'ensemble de ces dispositifs. C'est une des préoccupations majeures de la PAC 2020.

Là aussi, nous souhaitons pouvoir faire en sorte que ces risques puissent être pleinement pris en compte dans les mesures que l'on va prendre dans les prochains mois si, demain, nous devons en financer un certain nombre. On a parlé de l'épargne de précaution et de la DPA. Une demande de sincérité budgétaire a été formulée. C'est pourquoi nous avons choisi de créer ce dispositif de 300 millions d'euros de provision.

Il sera là pour répondre à des crises, à des aléas climatiques et si, demain, cette provision ne s'avérait pas suffisante, c'est le budget national, au titre de la solidarité, qui viendrait compenser les difficultés rencontrées. Je tiens à vous rassurer sur ce point. Cette enveloppe de 300 millions d'euros figure dans le budget car nous l'avons estimée nécessaire à la sincérité budgétaire.

Concernant le dispositif des cotisations sociales, quel est le sens de la réforme que nous conduisons aujourd'hui ? Il s'agit d'harmoniser de façon pérenne le régime des cotisations maladie pour l'ensemble des indépendants non agricoles. Dans un cadre de prestations identiques pour tous les indépendants, cette harmonisation relève pour nous de l'équité. Le nouveau barème respecte l'engagement gouvernemental en termes de gain de pouvoir d'achat pour les actifs aux revenus les plus modestes, puisque 60 % des agriculteurs bénéficieront d'une baisse de charges supplémentaires par rapport aux cotisations actuelles.

La réforme ne remet pas en cause le principe des allégements de 2016 : nous les répartissons d'une façon que nous jugeons plus équitable.

En 2016, 60 % des personnes les plus modestes profitaient de moins de 90 millions d'euros d'allégement de charges, soit 17 % de l'effort de solidarité national, les 40 % les mieux lotis bénéficiant de 400 millions d'euros, soit 83 % de cet effort.

Avec cette réforme les 60 % les plus modestes profiteront de 10 millions d'euros d'allégements supplémentaires, soit 26 % des 360 millions de l'effort de solidarité nationale, les 40 % les mieux lotis profitant toujours de la plus grande part de l'effort de solidarité nationale, soit 74 % représentant plus de 250 millions d'euros.

C'est une mesure d'équité que nous essayons de porter.

Nous ne considérons pas aujourd'hui que la crise soit derrière nous, mais cette mesure a été prise alors que la crise était au plus haut, de manière temporaire. C'est un geste qui a été fait par la précédente majorité pour venir en aide aux agriculteurs.

À partir du moment où le Gouvernement a décidé de retravailler sur le régime général des cotisants, de supprimer le RSI et de remettre les indépendants - donc les agriculteurs - dans le régime général, il nous fallait revoir l'ensemble de ces dispositifs afin de leur permettre de retrouver de la justice dans le calcul des charges.

Vous avez évoqué le TO-DE. Le PLFSS prévoit, à partir de 2019, une transformation du CICE en baisse des cotisations sociales. Les employeurs de travailleurs saisonniers bénéficieront de ces baisses de cotisations. La suppression du CICE ne se traduira donc par une perte sèche, mais bel et bien par un soutien. C'est une mesure de justice que nous avons souhaité pouvoir porter.

De la même manière, un effort important a été fait pour revaloriser le montant minimum des retraites agricoles à 75 % du SMIC pour une carrière complète et, pour ce faire, revaloriser le stock et le flux.

L'État a fait appel à parité à l'augmentation du taux de cotisation de retraite complémentaire obligatoire et à la solidarité nationale, soit 10 millions d'euros supplémentaires - 110 millions d'euros par an.

Les propositions que nous pourrions être amenés à faire en matière de fiscalité agricole sont annoncées pour 2018. La fiscalité agricole actuelle repose sur des raisons objectives, comme une intensité capitalistique importante de l'activité agricole, associée à une forte variabilité des revenus tirés de l'exploitation liée aux aléas climatiques, sanitaires ou économiques, une pluriactivité essentielle, et une exploitation individuelle et familiale à la base, mais de plus en plus tentée par des formats sociétaires.

La fiscalité est une matière vivante, qui n'a pas connu beaucoup d'évolutions ces dernières années. Bruno Le Maire l'a indiqué il y a quelques semaines : le Gouvernement va ouvrir un chantier sur la fiscalité agricole pour formuler un certain nombre de propositions innovantes en 2018. Je ne puis anticiper sur les résultats d'un travail qui n'est pas encore lancé, mais les questions que vous posez sur ce sujet méritent toute notre attention. Nous définirons rapidement le périmètre de la réflexion et pourrons revenir devant vous pour traiter ce sujet. Vous aurez peut-être l'occasion de le faire en commission.

Vous m'avez interrogé sur les ICHN. Quel est le calendrier de la réforme ? Le zonage des zones défavorisées simples, hors zones de montagne, pouvant bénéficier de l'ICHN devait être revu pour 2018. Les premières hypothèses, qui avaient été élaborées par le précédent Gouvernement, conduisaient à un surcoût important pour l'État et le FEADER.

Nous devons poursuivre ce travail et ces investigations en prenant en compte les besoins des zones fragiles et les possibilités budgétaires, tant nationales que communautaires. Nous avons obtenu un décalage à 2019 de la révision du zonage dans le règlement omnibus. Il existe aujourd'hui un trilogue entre les institutions européennes et l'ensemble des États membres.

Les travaux pour définir ce nouveau zonage ont été engagés. Ils visent à définir aujourd'hui une carte de zone éligible qui soit claire et qui garde du sens. Des zones sont aujourd'hui éligibles pour des raisons historiques, sans justifier pour autant de critères qui permettent de leur attribuer cette aide. Nous avons pu voir, dans un certain nombre de cas, des zones de plaines bénéficiant de l'ICHN, qui n'avaient strictement rien à y faire.

Avant de retravailler sur le périmètre global, regardons d'abord les zones qui n'ont rien à faire dans le périmètre de l'ICHN, et déterminons où elles sont nécessaires. Il nous reviendra ensuite de paramétrer à nouveau le zonage global. Vous savez que plus on agrandira le périmètre, plus les zones seront faibles.

Nous avons besoin de trouver le système le plus juste et le plus équitable possible. Nous avons aujourd'hui beaucoup de demandes de la part de sénateurs et de députés. Il y aura toujours des « effets de bord » qui ne permettront pas à certains territoires d'entrer dans le zonage, mais nous allons essayer de faire en sorte que le travail que nous allons mener soit le plus juste possible et corresponde aux besoins.

Cela ne va pas faire plaisir à ceux qui vivent dans les zones de plaine, mais il va falloir leur expliquer qu'ils n'ont pas à bénéficier de ces aides.

Quant aux refus d'apurement, leur montant a considérablement augmenté ces dernières années. Je m'inscris en faux par rapport à l'interprétation qui a été avancée : l'augmentation résulte de l'aboutissement d'un certain nombre d'audits relativement anciens, et d'un renforcement des exigences communautaires, notamment sous la pression de la Cour des comptes européenne. Des mesures ont été mises en oeuvre afin de réduire ces refus.

La refonte du registre parcellaire graphique a entraîné nombre de difficultés et les retards que vous connaissez dans le paiement des aides PAC.

Je voudrais rendre hommage aux fonctionnaires, aux directions départementales des territoires et de la mer (DDTM) et aux directions départementales des territoires (DDT), qui sont en première ligne devant les agriculteurs.

Je suis allé voir comment ils travaillaient. Ce n'est pas simple, et j'ai mieux compris pourquoi nous avions un certain nombre de retards...

Pour répondre à la question du sénateur Bertrand, aujourd'hui, c'est bel et bien le ministère de l'agriculture qui assure la tutelle de ces services déconcentrés. Nous leur faisons confiance pour travailler, mais des consignes sont données, et elles doivent être appliquées par les services déconcentrés - et vous pouvez nous faire confiance pour que ce qui est décidé soit suivi d'effet.

J'ai rencontré les directeurs départementaux des territoires la semaine dernière. Je leur ai rappelé la logique de notre action et la manière dont nous devions travailler.

Pour ce qui est de la filière bio, ce secteur enregistre depuis 2015 une croissance très importante. La demande sociale est très forte, et la progression se poursuit d'année en année. Au 30 juin 2017, ce sont plus de 51 000 opérateurs qui se sont engagés dans le bio, dans plus de 35 000 exploitations. Les surfaces cultivées en bio en 2017 sont estimées à 1,77 million d'hectares, en hausse de 15 % par rapport à 2016.

Nous avons demandé des plans de filière avec des objectifs fixés pour cinq ans pour les produits sous signe d'identification de qualité ou les produits bio. Nous ne cherchons pas aujourd'hui à développer un seul et unique modèle. Comme je l'ai toujours dit depuis mon arrivée au ministère, il ne s'agit pas d'opposer les systèmes agricoles les uns aux autres, mais de les faire converger. Comment réussir la transition ? Comment renouveler nos pratiques agronomiques ?

Le développement de ces systèmes doit être en phase avec les attentes des consommateurs, et je souhaite que les acteurs du bio puissent s'engager dans des travaux qui seront conduits dans chacune des filières.

Nous avons besoin d'accompagner la transformation des différents modèles. Concernant le soutien financier aux producteurs qui s'engagent dans le mode de production biologique, l'État recentre ses moyens sur les aides à la conversion. En matière d'aide au maintien, il revient désormais aux régions, avec la connaissance fine qu'elles ont et le maillage des territoires qu'elles constituent, de répondre à la demande. Elles peuvent le faire ou non. Nous n'entrons pas dans ce débat : il en va de la libre administration des collectivités, et c'est aux régions de juger ce qu'elles peuvent faire.

Je sais qu'en matière d'aide à l'agriculture biologique, un certain nombre de régions ne font pas la même chose. Certaines ont plafonné les aides, d'autres ne l'ont pas fait. Nous faisons le pari que nous aurons demain plus d'agriculteurs à se convertir aux filières bio. Nous faisons le pari, demain, parce que la demande sociale est forte, d'augmenter la surface cultivable en bio. Certains peuvent trouver que c'est insuffisant - et M. le sénateur Labbé l'a dit tout à l'heure - mais nous n'allons pas nous priver si nous parvenons à passer de 6 % à 8 % la surface cultivable en bio à l'horizon 2022.

Je suis pragmatique : j'essaye de fixer des objectifs que je puisse atteindre, quitte à les revoir et à pousser derrière. Si nous n'y avions pas cru, croyez-vous que nous nous serions engagés ?

Quelqu'un m'a conseillé tout à l'heure d'aller contre les propos du Président de la République. Cela ne me viendrait jamais à l'idée ! Ce que nous faisons est totalement partagé. L'objectif de voir la restauration collective recourir à 50 % à des produits bio ou issus de circuits courts à l'horizon 2022 est ambitieux. Nous avons besoin que davantage d'agriculteurs se convertissent au bio.

Le crédit d'impôt en faveur de l'agriculture bio a été prolongé par l'Assemblée nationale. Il y a d'ailleurs eu confusion. On a parlé du rétablissement des aides au maintien. Cela n'a rien à voir ! Ce crédit d'impôt est accordé à tous les agriculteurs bio. Ce crédit d'impôt, qui devait s'arrêter au 31 décembre 2017, a été prolongé pour 2018. C'est un signe particulier que nous envoyons à l'agriculture biologique.

Il faut faire confiance au marché. La demande est là. C'est le marché qui la régule. Ce marché peut répondre aux objectifs de croissance et de compétitivité d'une filière dans laquelle nous croyons et sur laquelle nous voulons miser. Nous travaillons avec les régions et nous attendons un prochain comité État-région pour décider ensemble de ce que nous ferons. Des sommes seront affectées aux régions au titre du FEADER. Les régions seront libres de décider ce qu'elles feront de cette manne financière.

Concernant la rémunération des services environnementaux, celle-ci fait l'objet d'une réflexion dans le cadre de la PAC post-2020. Ces services sont aujourd'hui rémunérés à travers le verdissement et les MAEC. On a besoin d'aller beaucoup plus loin pour mieux accompagner les agriculteurs dans l'amélioration de leurs performances économiques et environnementales, et définir des dispositifs dans le cadre d'une réglementation plus adaptée.

L'accord de libre-échange entre l'Union européenne et le Canada est entré en application provisoire le 21 septembre 2017. Une commission d'experts en a examiné l'impact. Un plan d'action est mis en place pour apporter des réponses concrètes et opérationnelles à un certain nombre d'enjeux identifiés. Il s'agit d'assurer concrètement une mise en oeuvre exemplaire du CETA, et d'améliorer la prise en compte des enjeux sanitaires et de développement durable dans les futurs accords commerciaux. Jean-Claude Juncker, dans son discours au Parlement européen, a parlé de réciprocité et souhaité qu'il n'existe pas de concurrence déloyale. Nous serons très vigilants en matière de contrôles. Il existe aujourd'hui des principes fondamentaux dans l'Union européenne.

Les bases de l'accord sur le MERCOSUR remontent à 1999. Depuis, l'économie a changé. À cette époque, l'euro n'avait même pas vu le jour. Je comprends l'inquiétude de la filière bovine lorsqu'on dit qu'on va importer 70 000 tonnes de viande bovine - plus particulièrement les morceaux nobles de l'aloyau.

Le Président de la République a rappelé que nous souhaitions défendre la filière bovine française et la filière européenne. Nous l'avons répété à Jean-Claude Juncker, avec neuf autres ministres de l'agriculture de l'Union européenne, à la suite du dernier Conseil des ministres européens. Nous souhaitons que l'accord ne fragilise pas ces filières.

Les discussions sont en cours. Je serai heureux de pouvoir vous communiquer des informations à ce sujet lorsque vous le jugerez utile.

Pour ce qui est des aides aux CUMA, le dispositif est préservé en 2018. J'y suis très attaché. Je viens de l'Ouest, où les CUMA sont nombreuses. Je sais ce que cela pèse dans notre économie, et les services que cela rend à nombre d'agriculteurs.

Ce dispositif est doté de 1,6 million d'euros, au-delà de l'exécution prévisionnelle de 2017 et au niveau de la réalisation 2016, qui s'établit à 1,8 million d'euros.

Ce soutien actif nous permet de réaliser un certain nombre de diagnostics stratégiques des CUMA afin de permettre une plus grande performance des entreprises. Je souhaite encourager toutes les formes d'investissement collectif. Les CUMA représentent un certain nombre de solutions. J'ai proposé que nous puissions, dans la prochaine PAC, financer ces outils collectifs. Ceci serait de nature à permettre à des agriculteurs et à des producteurs de bénéficier de matériels plus importants et d'envisager d'autres spécificités...

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