Monsieur le Ministre, ne pensez-vous que le Gouvernement, en matière de logement, a mis la charrue devant les boeufs ? Après trois années difficiles, entre 2013 et 2015, le secteur connaît une certaine embellie depuis deux ans. Nous revenons de loin, en partie en raison de l'application de la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) qui a effrayé un certain nombre d'investisseurs. N'êtes-vous pas en train de prendre le même type de risque ? En effet, si je liste les différentes dispositions de ce projet de loi de finances : si l'on supprime l'impôt sur la fortune, on ne garde que l'impôt sur la fortune immobilière. On supprime la taxe d'habitation et on ne garde que la taxe foncière qui sera la variable d'ajustement des communes qui n'en auront plus d'autres. On supprime l'aide aux maires bâtisseurs. On recentre le Pinel et le PTZ, même s'il me faut reconnaître, Monsieur le Ministre, que vous les avez sauvés, puisqu'ils devaient s'éteindre. Vous supprimez la prime d'Etat pour les titulaires des plans d'épargne logement. Vous supprimez l'APL-Accession, alors que, dans le même temps, vous incitez les bailleurs à vendre. Quelle est donc votre logique ? Vous abaissez à 50 millions d'euros la participation de l'Etat au FNAP : vous rompez ainsi la promesse de parité, tout en demandant aux bailleurs sociaux de payer l'addition. Vous pérennisez le coût de rabot de cinq euros sur les APL, en plus du 1,5 milliard d'euros sur le fameux article 52. Nous avons là un ensemble de signaux qui s'adressent aussi bien aux investisseurs publics et privés qu'aux collectivités territoriales appelées souvent en garantie d'emprunt, et qui risquent de produire un coup de frein à la production. C'est là le paradoxe : vous parlez de réformes structurelles et nous sommes sans doute unanimement d'accord pour réformer le secteur des bailleurs sociaux. Action Logement l'a fait très vite et sans doute efficacement. Les bailleurs doivent se réformer, mais une telle démarche prend du temps ! Avant que des économies ne soient dégagées par cette réforme, que va-t-il se produire ? C'est une inquiétude réelle. Est-il encore temps de faire machine arrière au Sénat et d'adoucir la peine pour les bailleurs sociaux ? Par ailleurs, je vous entends sur l'article 52, Monsieur le Ministre, après avoir écouté le Premier ministre lors du congrès des maires de France. Je n'ai pas bien compris si le Premier ministre, Edouard Philippe, commentait la solution issue des débats de l'Assemblée nationale qui consiste à lisser le 1,5 milliard d'euros sur trois ans, avec en contrepartie une augmentation à titre transitoire de la taxe sur la valeur ajoutée pour le logement social. Si tel s'avérait le cas, nous sommes dans le schéma arrêté par nos collègues députés, et je ne vois guère ce que le Sénat peut y apporter. Si tel n'était pas le cas, la logique qui prévaut est bel et bien celle développée par ma collègue Dominique Estrosi Sassone. Vous avez acquiescé à la TVA, mais est-ce de manière pérenne ou temporaire ? Si c'est pour trois ans, le temps d'atteindre 1,5 milliard d'euros avec la RLS, nous ne sommes pas d'accord ! Si nous sommes d'accord pour trouver quelque 700 millions d'euros en première partie du projet de loi de finances, c'est pour adoucir la peine des bailleurs sociaux sur l'article 52 ! Plusieurs options s'ouvrent et nous n'avons pas encore trouvé le bon calibrage ; j'espère que nous y parviendrons ! C'est là un point crucial, Monsieur le Ministre : si le Gouvernement en est d'accord, nous trouverons une solution. Mais s'il s'agit d'étaler la mesure sur trois ans, avec le risque de freiner concomitamment le marché, je ne vois effectivement pas comment nous pourrions aller dans cette direction. Juste un mot sur l'hébergement d'urgence. Je salue l'effort de rebasage des crédits du programme 177. Malgré celui-ci, ces crédits restent inférieurs de 40 millions d'euros à l'exécution de 2017. Lors des auditions que j'ai organisées, on m'a répondu que des économies étaient attendues. Il faut aller au bout de la logique, avec l'enquête nationale des coûts. Il n'est pas acceptable que certains établissements refusent de répondre de peur d'être obligés de caler leurs tarifs sur les tarifs moyens. Ces économies seront-elles trouvées en 2018 ? Je n'en suis nullement certain. Enfin, l'hébergement des migrants, pour la seule région Ile-de-France, représente un coût de 150 millions d'euros inscrits sur le programme d'hébergement d'urgence. Il m'a été indiqué qu'une telle somme serait transférée sur le bon programme relevant du ministère de l'Intérieur. Est-ce que ces 150 millions d'euros vous paraissent suffisants ? Pensez-vous que le Ministère de l'Intérieur paiera enfin sa part, ce qu'il n'a jamais fait jusqu'à présent ?