Intervention de Claude Raynal

Réunion du 28 novembre 2017 à 14h30
Loi de finances pour 2018 — Vote sur l'ensemble de la première partie du projet de loi

Photo de Claude RaynalClaude Raynal :

… et s’y opposera même avec plus de conviction encore qu’il ne le faisait au début de l’examen du texte.

Certes, on peut noter quelques avancées, mais elles sont bien peu nombreuses. Ainsi, nous pouvons nous réjouir de l’exclusion de certaines compensations d’exonération du périmètre des variables d’ajustement. Mais nous sommes sans illusion sur la suite qui sera donnée aux amendements concernés. Plus généralement – cela vient d’être dit, et chacun le sait sur ces travées –, ces replâtrages ne peuvent plus masquer les difficultés d’un système à bout de souffle.

Nous sommes également satisfaits du rétablissement des crédits manquants par rapport à l’ancienne réserve parlementaire.

S’agissant des agences de l’eau, la suppression de la baisse du plafond de la taxe qui leur est affectée, assortie du maintien du prélèvement sur le fonds de roulement, nous paraît en définitive constituer un bon compromis.

S’agissant toujours des opérateurs de l’État, et plus particulièrement des chambres de métiers et de l’artisanat, le maintien du déplafonnement des contributions des chefs d’entreprise permet de maintenir les fonds en faveur de la formation des artisans, comme le prévoit la loi Travail de 2016.

Dans un domaine bien différent, nous nous réjouissons que le régime fiscal applicable aux utilisateurs de plateformes en ligne soit simplifié par application d’un seuil unique d’exonération d’impôt à 3 000 euros. Cette disposition, fruit d’un amendement de compromis auquel nous sommes parvenus dans le cadre d’un groupe de travail de la commission des finances, constitue une mesure de clarification nécessaire.

Enfin, un amendement visant à doter les collectivités chargées de l’élaboration des schémas environnementaux, notamment des plans climat, nous paraît aller dans le bon sens ; il en va de même pour le maintien du dispositif ZRR pour les communes qui n’y sont plus éligibles, jusqu’au 30 juin 2020.

Autant d’améliorations, donc ; mais celles-ci ne peuvent faire oublier que ce texte, dans la version qu’en propose la majorité sénatoriale, sera lourd de conséquences pour les moins aisés des ménages.

Vous le savez, mes chers collègues, nous nous sommes prononcés favorablement sur la proposition de dégrèvement de taxe d’habitation, du moins sur les dispositions prévues pour 2018. Du point de vue des ménages, la réforme proposée est partielle : si la taxe d’habitation est injuste, elle doit être supprimée pour 100 % des foyers, et non pour 80 % d’entre eux. Du point de vue des collectivités locales, le dégrèvement proposé pour 2018 nous convient. Mais il faut comprendre notre position comme un engagement à se lancer sans tarder dans une réforme en profondeur de la fiscalité locale.

Certes, certaines critiques peuvent à juste titre être émises, mais nous regrettons la décision de la majorité sénatoriale de priver nos concitoyens de ce supplément de pouvoir d’achat, dont ils auraient pu bénéficier dès 2018. Cette décision est lourde de sens, s’appliquant à un texte déjà par trop favorable aux plus favorisés de nos concitoyens. Je rappelle d’ailleurs que cette baisse de 3 milliards d’euros suit d’autres baisses, de 3 milliards d’euros en 2016 et de 2 milliards d’euros en 2017, ces différentes baisses ayant été décidées par le précédent gouvernement.

Nous regrettons également vivement le vote d’un amendement créant une nouvelle tranche d’imposition sur le revenu à 5, 5 %. Cela fera entrer de nouvelles personnes, les plus pauvres, dans l’impôt. Faut-il rappeler que tous participent déjà à l’effort public, par d’autres types de prélèvements que l’impôt sur le revenu, notamment la TVA et la CSG ?

À l’issue de l’examen de cette première partie, le projet de loi de finances est plus que jamais celui de l’injustice fiscale. Il était déjà très favorable aux contribuables les plus aisés, et la majorité sénatoriale n’a fait que renforcer ce travers. Elle a ainsi choisi, sous couvert de redonner du pouvoir d’achat aux classes moyennes, de relever l’avantage fiscal lié au plafonnement du quotient familial. Ce faisant, elle s’adresse en réalité aux ménages appartenant au décile le plus élevé des revenus. Et puis, elle a finalement réalisé un vieux rêve : elle a enfin trouvé le courage de supprimer l’impôt de solidarité sur la fortune sans d’ailleurs ne gager aucunement cette perte de ressources.

Pour notre part, nous ne partageons en rien la confiance du Gouvernement quant à l’effet positif à attendre de la limitation de l’ISF à l’immobilier ou de la mise en place du prélèvement forfaitaire unique. Ces mesures, profondément inégalitaires, ne constituent que des allégements massifs de fiscalité. Nul ne peut garantir qu’ils permettront d’assurer un quelconque dynamisme à l’économie française. Le Gouvernement ne nous a apporté aucun élément concret en ce sens durant les débats.

Plus que tout, ces mesures sont choquantes, au vu des efforts qui sont demandés en parallèle au monde du logement social, aux collectivités territoriales. Elles sont choquantes aussi quand on diminue, pour des raisons plus idéologiques que réellement étayées, les budgets de politique de l’emploi.

Je le disais en introduction, au-delà d’une mesure sur le pouvoir d’achat des Français que nous pouvons, avec quelques réserves, partager, nous ne saurions approuver le triptyque suppression de l’ISF, prélèvement forfaitaire unique, impôt sur la fortune immobilière et, bien entendu, encore moins le volet « recettes » du projet de loi de finances tel qu’il a été voté par la majorité sénatoriale.

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