Intervention de Éric Lombard

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 28 novembre 2017 à 9h05
Article 13 de la constitution — Audition de M. éric Lombard candidat proposé par le président de la république aux fonctions de directeur général de la caisse des dépôts et consignations cdc

Éric Lombard, candidat proposé par le Président de la République aux fonctions de directeur général de la Caisse des dépôts et consignations :

Monsieur Bocquet, ne croyez pas les journaux qui écrivent que la Caisse des dépôts n'intéresse pas les hauts fonctionnaires ou certaines personnes issues du privé. La Caisse des dépôts et consignations est l'une des plus belles institutions de notre pays, et la direction de cette maison, l'une des plus belles responsabilités qui puisse être.

De fait, le Gouvernement a engagé un processus de sélection. Je ne peux vous dire que ce que j'en sais. De premiers échanges d'informations et de projets ont été organisés par le ministre de l'économie et des finances, Bruno Le Maire. Un certain nombre de candidats, dont je faisais partie, ont été reçus par le Premier ministre, qui, semble-t-il, a fait plusieurs propositions au Président de la République. J'ai eu la chance d'être proposé et j'en suis très fier.

Donc oui, il y avait d'autres candidats, certains, à en croire la presse, ayant une expérience du privé, d'autres n'ayant travaillé que dans le public. Si je bénéficie personnellement de ce changement de culture à l'oeuvre dans notre pays, je trouve que les échanges entre des personnes qui ont une expérience du privé et d'autres, qui sont engagées dans la vie publique, sont assez féconds. Cela permet de croiser les cultures et de s'enrichir mutuellement. Au reste, un certain nombre de fonctionnaires, recrutés dans des entreprises privées, sont sous le contrôle des autorités de déontologie.

Pour répondre à la question de la feuille de route, qu'a également évoquée Julien Bargeton, le processus que le Gouvernement a mis en oeuvre pour choisir son candidat a permis d'élaborer les grands axes de la mission, que je viens de vous présenter. Nous les détaillerons ultérieurement.

Il est de la responsabilité des parlementaires d'élaborer les statuts de la Caisse. Si je suis nommé, je donnerai volontiers mon avis, mais je ne pense pas que le directeur général doive être moteur dans cette affaire.

Pour ce qui concerne les effectifs, le contexte est celui d'un effort général de maîtrise de la dépense publique. Nous devons, comme tous les États, être attentifs à la dépense de l'argent qui, in fine, appartient à l'ensemble du pays. Il me semble que l'on peut tout à fait développer les missions de la Caisse des dépôts en ayant une vision très raisonnable de l'évolution de ses dépenses et probablement en stabilisant, voire en diminuant légèrement ses effectifs. Concrètement, il s'agit, comme dans tous les établissements financiers, de voir dans quelle mesure on remplace les départs à la retraite.

Il y a, sans doute, dans les activités de gestion, des éléments d'automatisation qui permettent de ne pas remplacer toutes les personnes partant à la retraite. Il ne s'agit naturellement pas d'aller au-delà : je ne l'ai jamais fait quand j'étais responsable d'une entreprise privée, et je le ferai encore moins dans le public. En revanche, il faut peut-être stabiliser, voire augmenter les équipes sur le terrain.

Aujourd'hui, nous sommes assez loin d'une présence de la Caisse des dépôts dans les départements. La Caisse est présente dans les régions et dans quelques départements.

Le travail d'information sur l'offre de services doit être poursuivi. Il est d'ores et déjà engagé. Sur le terrain, les différentes équipes doivent faire connaître les activités de la Caisse et rapprocher l'offre des collectivités, des sociétés de HLM, des SEM, etc.

Pour cette raison, je considère, dans mon projet, que le lien avec La Poste peut être utile. En effet, si le centre de gravité du réseau de la Caisse des dépôts doit se rapprocher du terrain, ce réseau n'aura jamais la densité, par exemple, des grands réseaux bancaires nationaux. Cependant, une bonne coordination avec, par exemple, certaines antennes de La Poste peut permettre un partage des rôles sur les produits et services de la Caisse, sous son autorité, en rapprochant ses services du terrain.

De fait, les collectivités territoriales sont soumises à une pression très forte sur leurs dépenses et sur leurs effectifs, qui se traduit, à l'évidence, par une baisse d'expertise - je ne pense pas faire injure aux équipes des collectivités territoriales en le disant. L'expertise de la Caisse des dépôts peut compenser cette baisse. Je pense que tout le monde peut y gagner.

Sur le conflit d'intérêts éventuel avec Gilles Le Gendre, je veux d'abord préciser que celui-ci n'a pas été mon collègue. Sa société avait un contrat avec Generali France - ce n'était sans doute pas l'un des plus gros contrats de cette société, et encore moins de Generali France - depuis cinq ans quand je suis arrivé à la tête de Generali France. Ce contrat existerait probablement toujours si Gilles Le Gendre n'avait pas été élu.

La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique a été saisie de ma situation et a rendu un avis, qui conclut de la façon la plus claire que la relation de travail qui existait entre la société de Gilles Le Gendre et Generali France ne constitue en aucun cas un conflit d'intérêts de nature à rendre ma nomination problématique. En miroir, Gilles Le Gendre a lui aussi saisi la Haute Autorité de sa situation. Il s'est déjà engagé à tirer les conséquences de l'avis que celle-ci rendra. Dès lors, la question est réglée par l'existence de la Haute Autorité de la façon la plus transparente et la plus simple.

Julien Bargeton m'a posé plusieurs questions concernant les ressources humaines. D'après les informations dont je dispose, les points relevés par la Cour des comptes ont naturellement été traités, de façon à mettre la Caisse des dépôts en conformité avec le droit, notamment sur les primes.

Quels profils pour quels métiers ? La question est sensible. Je crois en un principe de gestion simple : il y a, dans toute institution, des hommes et des femmes qui envisagent de faire carrière. C'est une bonne chose, parce que ces personnes connaissent bien l'institution et les services qu'elle rend. Quand un poste est vacant, il faut d'abord se demander s'il y a, à l'intérieur de l'institution, des personnes ayant la maturité et les compétences techniques pour l'occuper. Cela dit, la Caisse peut avoir besoin, pour tel ou tel poste, de recruter des candidats à l'extérieur. À cet égard, le modèle de la Caisse est mixte, puisqu'y travaillent très majoritairement des fonctionnaires, mais aussi, de façon admise et constante, des salariés de droit privé. Je pense que cette dualité peut se poursuivre. Elle est féconde et tout à fait dans la tradition et l'histoire de la Caisse des dépôts.

Oui, nous avons un intérêt très vif à développer, en France, les jeunes pousses que sont les start-up. C'est clairement la mission de Bpifrance, qui y met beaucoup d'énergie et de talent. Ainsi, les équipes de Bpifrance ont réuni, dans une grande salle de la région parisienne, 37 000 entreprises, qui sont venues pour échanger, partager, rencontrer des délégués internationaux, savoir comment se développer.

Les territoires ruraux ont plus besoin de l'aide de la Caisse des dépôts que les grandes métropoles, qui ont à leur disposition des effectifs techniques sur les sujets financiers et peuvent avoir accès aux grandes banques et même aux marchés financiers. Le besoin de soutien qui s'exprime dans les banlieues et dans les communes rurales n'est pas facile à satisfaire, compte tenu du dimensionnement du réseau de la Caisse des dépôts. Il faut progresser sur ce plan.

De ce point de vue, le digital constituera un moyen efficace. Les sites de la Caisse des dépôts et de ses filiales sont d'ores et déjà de très bonne qualité. Il faut veiller à ce que les communes rurales y trouvent l'ensemble des services dont elles ont besoin, quitte à ce qu'elles puissent s'adresser à un spécialiste sur les sujets plus complexes.

Monsieur Patient, vous avez raison, il y a peut-être, dans les collectivités d'outre-mer, un peu de recouvrement entre les missions respectives de l'Agence française de développement, de la Caisse des dépôts et de Bpifrance. Cette situation est sans doute fâcheuse, puisque, sur ces territoires, ces institutions peuvent jouer un rôle tout à fait utile. Encore faut-il que chacun s'occupe de ce qu'il a à faire ! Dans un certain nombre de domaines, et pas seulement pour ce qui touche l'outre-mer, les missions devraient être clarifiées. Je m'y emploierai, en relation avec les responsables de ces deux grandes institutions.

Honnêtement, je ne connais pas le détail du rachat des Sidom par le groupe SNI, qui, effectivement, est une société très importante et très active de la Caisse des dépôts. En revanche, j'ai bien noté votre question. Je vais travailler avec les responsables du groupe SNI pour voir où en est cette affaire. Si vous le permettez, je reviendrai éventuellement vers vous à ce sujet.

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