Intervention de Martial Bourquin

Mission commune d'information sur Alstom — Réunion du 29 novembre 2017 à 18h00
Constitution

Photo de Martial BourquinMartial Bourquin, rapporteur :

Je suis très heureux d'exercer les fonctions de rapporteur au sein de cette mission d'information qui intervient à un moment capital de la transformation de notre secteur industriel, notamment dans le domaine ferroviaire. J'ai posé récemment une question d'actualité sur Alstom, la réponse ne fut guère rassurante.

Avec le cas d'Alstom, l'actualité récente a montré la fragilité de la stratégie industrielle dans notre pays. En 2016, le patron de Siemens disait espérer deux EADS : un groupe dans le secteur de l'énergie, sous pavillon allemand, l'autre dans le ferroviaire, sous pavillon français. Fin 2017, le groupe sous pavillon français risque de se retrouver filiale à 51 % de Siemens. Rien n'est terminé cependant, l'accord n'est pas définitivement scellé, et notre mission peut fonctionner comme force de proposition pour le faire évoluer.

Jadis fleuron de notre industrie, Alstom a vu, dans un premier temps, ses activités scindées et pour partie cédées (je songe au site de Belfort) à un actionnaire américain, General Electric. Dans un second temps, le reste de son activité a fait l'objet d'une fusion avec Siemens, laquelle donne, dans les faits, la majorité du capital et des droits de votes à l'actionnaire allemand. Dans le passé, Alstom faisait partie d'un conglomérat alors aussi puissant que Siemens : la Compagnie générale d'électricité... Les évènements récents apparaissent donc comme l'étape définitive du démantèlement d'un géant industriel français. Nous rencontrerons tous les acteurs : ministres, patrons, syndicats... Quant à l'État, il a approuvé l'accord Alstom-Siemens : la volonté d'agir et de mener une véritable politique industrielle existe-t-elle encore ?

Car ce qui est en cause à travers l'exemple d'Alstom, c'est bien la stratégie industrielle suivie ces derniers temps. Quelle est la stratégie industrielle de l'État ? Dans le cadre de la loi de finances, Alain Chatillon a présenté un avis sur le CAS « Participations financières de l'État », qui pose la même question : quelle part l'État compte-t-il prendre pour soutenir l'ensemble des filières industrielles ? Confrontée à l'automatisation à marche forcée et à la mondialisation, l'industrie française peut-elle effectuer sa mue sans que l'État, et plus largement l'ensemble des pouvoirs publics, soutiennent cette mutation indispensable qui passe par l'émergence des industries du futur, la robotisation, etc. ?

Depuis 1995, la France a perdu environ 1 million d'emplois industriels et notre production industrielle reste encore inférieure de 7 % à ce qu'elle était avant la crise terrible que nous avons traversée. Si la conjoncture internationale en est en grande partie responsable, à l'évidence, notre pays n'a pas su prendre toutes les mesures nécessaires pour donner un nouveau souffle à son industrie. Les crédits des pôles de compétitivité, si structurants, diminueront en 2018. Notre mission devra échafauder des solutions, qui ne relèvent pas uniquement du domaine législatif.

Pour être en mesure de le faire, il nous faudra aborder de nombreuses problématiques : l'essor technologique, l'avantage comparatif que notre industrie peut développer dans la mondialisation, le comportement de l'État actionnaire, les politiques publiques en matière d'emploi, de formation, de fiscalité, d'environnement, de commande publique - celle-ci étant un volet essentiel.

Il conviendra donc d'auditionner largement trois grandes catégories d'acteurs : d'abord, les acteurs industriels, les représentants de grands groupes (dont, bien sûr, Alstom) ou de PME ou ETI industrielles, les représentants d'organismes liés au monde de l'industrie (Conseil national de l'industrie, Cercle de l'industrie, Alliance pour l'industrie, Medef, CPME,...), et les organisations syndicales de salariés ; ensuite, des représentants de l'administration et du Gouvernement, mais également des collectivités locales : ministre chargé de l'industrie, représentants des organismes parapublics comme Bpifrance, gestionnaires du Programme des investissements d'avenir (PIA) ; enfin, des représentants du monde de la recherche et de l'université, non pas seulement des économistes, des juristes ou des financiers, mais aussi des scientifiques, notamment sur le lien entre innovations technologiques et applications industrielles. Si vous avez d'autres propositions à faire, nous les prendrons bien sûr en compte, et entendrons tous les acteurs sans a priori ni parti pris.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion