Il existe des priorités géographiques et thématiques en ce qui concerne les contrats aidés. Les priorités géographiques sont l'outre-mer, les communes rurales et les quartiers prioritaires de la politique de la vile. Parmi les priorités thématiques, figure l'accompagnement des élèves handicapés. Nous avons voulu assurer la rentrée scolaire, mais un plan d'intégration est mis en place au sein de l'Éducation nationale où la logique est un peu différente : ce ne sont pas les personnes en difficulté qui ont vocation à accompagner les élèves handicapés.
Il existe une priorité dans le secteur social et sanitaire, notamment pour accompagner l'insertion, l'apprentissage des codes sociaux, la formation. Le secteur associatif, très mobilisé sur les publics les plus en difficulté, possède une expertise qu'il faut valoriser. Il est choquant de constater que certaines structures recourent systématiquement aux contrats aidés, qui sont par nature des contrats précaires, pour répondre à des besoins durables. Les préfets, les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte) et Pôle emploi devront se livrer à une appréciation qualitative pour identifier les secteurs où des contrats aidés doivent être prescrits. Une circulaire sera adressée très prochainement en ce sens aux différents services.
Nous privilégions désormais une approche qualitative nous ne supprimons que les contrats aidés dans le secteur marchand. L'investissement doit être efficace pour les personnes concernées. Le pire serait d'engendrer de faux espoirs en ne créant que des emplois précaires alors que les personnes sont désireuses de réintégrer le marché du travail. Le contrat aidé est un sas et non une fin en soi : il doit être efficace et déboucher sur un emploi durable. L'année 2018 nous permettra de mieux calibrer le volume des contrats aidés les années suivantes.
Les investissements massifs en matière de qualification et d'apprentissage doivent permettre notamment aux jeunes non diplômés de s'orienter vers une formation qualifiante, préférable aux contrats aidés : la meilleure protection contre le chômage, c'est la compétence.
Le marché du travail va mieux mais nous devons veiller à ne pas substituer de l'emploi aidé à de l'emploi réel.
Les associations bénéficieront l'an prochain d'aides financières importantes via le crédit d'impôt sur la taxe sur les salaires, soit environ 500 millions d'euros en 2018. En 2019, elles bénéficieront de la transformation en baisse de charges du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), soit près de 1,5 milliard d'euros. Quoi qu'il en soit, il faut bien distinguer la problématique du financement des associations de celle de l'accès à l'emploi pour les personnes en difficulté.
La transformation de l'Afpa en établissement public au 1er janvier 2018 constitue un changement culturel majeur. Vous avez évoqué la pyramide des âges ; mais les missions de l'Afpa ont aussi évolué car le monde de la formation et les besoins ont changé. L'Afpa n'exerce pas que des missions de service public mais elle est aujourd'hui trés concurrencée par des organismes privés. Vous m'avez interrogée sur le profil du nouveau président. Celui-ci sera nommé prochainement ; il ne devra pas s'occuper de l'opérationnel mais devra animer la réflexion stratégique du conseil d'administration.
En ce qui concerne les emplois francs, l'expérimentation coûte assez cher, sauf si elle fonctionne ! L'idée est de toucher 25 % de ces quartiers et d'obtenir un effet de masse. Il est important de démontrer que ce n'est pas parce qu'on habite tel ou tel quartier qu'on a moins de chance d'avoir un emploi. Il faut créer une dynamique pour prouver que la vision a changé. Aujourd'hui, le taux de chômage est deux fois plus important dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville qu'ailleurs. Nous devons donc engager une action assez vigoureuse si nous voulons des résultats. Avant de généraliser le dispositif en 2020, le Gouvernement remettra un rapport au Parlement.
Effectivement, les critères retenus sont peu restrictifs, preuve qu'il est possible d'apprendre des erreurs des autres. De trop nombreux critères avaient été retenus en 2013. Du coup, moins de 300 personnes ont pu bénéficier du dispositif sur la France entière ! Nous souhaitons pour notre part produire un effet de masse. Il n'y a aucune raison notamment de prévoir des discriminations selon l'âge.
En ce qui concerne la réforme de l'apprentissage, vous m'avez demandé quelle place il fallait accorder aux régions et aux branches. À l'heure actuelle, notre pays compte seulement 7 % d'apprentis parmi les 16-26 ans. Pourtant, même si son image est négative auprès de certains de nos concitoyens, l'apprentissage est une voie de réussite : 69 % des apprentis ont un contrat de travail après six mois de recherche. De plus, les pays européens les moins frappés par le chômage de masse des jeunes ont tous développé l'apprentissage. En Suisse, par exemple, 65 % des jeunes passent par l'apprentissage, les passerelles étant nombreuses avec les autres modes de formation. Cette idée de passerelle sera inscrite au coeur de notre réforme car il ne paraît pas raisonnable de demander à des individus si jeunes de choisir définitivement une option, d'autant que nombre d'entre eux devront changer plusieurs fois de métier au cours de leur vie professionnelle.
Aujourd'hui, 1,3 million de jeunes n'entrent dans aucune case : ils n'ont pas d'emploi mais ne sont inscrits ni à l'école, ni à l'université, ni en formation. C'est un gâchis humain énorme, une perte de compétitivité pour l'économie et un risque pour la cohésion sociale.
Voilà pourquoi nous appelons à une révolution copernicienne sur l'apprentissage car il ne se passera rien si les lignes ne bougent qu'à la marge. Des concertations ont été ouvertes en ce sens il y a quelques semaines et dureront jusqu'à la fin du mois de janvier. Nous élaborerons ensuite un projet de réforme que nous présenterons au mois d'avril.
Rien n'est encore décidé mais, dans les pays où l'apprentissage est développé, les entreprises et les branches jouent un rôle beaucoup plus important que chez nous. En France, elles ont à l'heure actuelle un rôle secondaire. On pourrait même dire qu'elles sont assises sur un strapontin ! Certes, elles sont consultées mais elles sont peu responsabilisées. Or un contrat de travail est un engagement. Nous devons donc modifier notre façon d'envisager les choses, tout en respectant la compétence décentralisée des régions afin que les stratégies des différents acteurs déployées ne se nuisent pas.