Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le présent projet de loi de finances pour 2018 constitue une traduction du plan Climat, même s’il manque de cohérence sur certains aspects et paraît en deçà des ambitions politiques affichées par le Gouvernement.
S’agissant des moyens budgétaires, je relève plusieurs points de satisfaction : les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » vont augmenter de 6, 6 % à périmètre courant – ce n’est pas habituel dans ce projet de loi de finances –, et le budget triennal s’inscrit dans une trajectoire de progression des crédits de la mission.
Mais « en même temps », en matière de fiscalité énergétique, je l’ai rappelé lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances, c’est un véritable « coup de massue fiscal » de 46 milliards d’euros qui attend les Français ces cinq prochaines années.
Madame la ministre, je n’adhère pas à cette nouvelle version de la vision punitive de la fiscalité énergétique portée votre gouvernement qui se traduit par l’accélération de la trajectoire carbone et la convergence par le haut des fiscalités de l’essence et du gazole.
D’abord, je regrette profondément que les évolutions du financement des opérateurs proposées dans le projet de budget aient pour trait commun de constituer de vrais trompe-l’œil, laissant croire à une augmentation des moyens des opérateurs, alors qu’il n’en est rien.
Votre gouvernement affirme que l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, voit ses moyens renforcés de 36 %, grâce à la rebudgétisation de son financement. Or l’augmentation de son budget sera presque totalement absorbée par le règlement des restes à payer issus des engagements passés ! J’ai eu l’occasion de dire que vous n’en étiez pas responsable ; vous en êtes cependant comptable.
Comment pouvez-vous, dans ce contexte, affirmer soutenir le développement de la chaleur renouvelable et de la politique de prévention et de valorisation des déchets ?
De même, la suppression des subventions aux opérateurs de la biodiversité permet à l’État de faire des économies sur le dos des agences de l’eau, qui financeraient, dès 2018, l’Office national de la chasse et de la faune sauvage et l’Agence française pour la biodiversité.
Votre gouvernement, madame la ministre, propose de doubler la contribution des agences de l’eau en 2018, ce qui va totalement à l’encontre du principe de la redevance, selon lequel l’eau paye l’eau.
L’Agence française pour la biodiversité n’est même pas gagnante, puisqu’elle va devoir reverser une partie de la contribution acquittée par les agences de l’eau aux parcs nationaux. Circuit court, ou court-circuit ? Vous nous donnerez certainement la réponse…
Comme si cela n’était pas suffisant, votre gouvernement prévoyait initialement de diminuer le plafond des recettes affectées aux agences de l’eau. L’Assemblée nationale a repoussé cette diminution à 2019, mais le Sénat l’a tout simplement supprimée.
J’en viens aux charges liées au service public de l’énergie, qui représenteront près de 8 milliards d’euros en 2018, soit une hausse de 10 % par rapport à 2017, principalement due à l’augmentation du coût du soutien aux énergies renouvelables électriques en raison du très fort dynamisme de la filière photovoltaïque.
Les projections réalisées par la Commission de régulation de l’énergie, la CRE, montrent que ces charges s’élèveront à plus de 10 milliards d’euros en 2022, soit 2, 2 milliards de plus qu’en 2018, et que le total cumulé atteindra 44, 9 milliards d’euros sur la période 2018-2022.
Il devient urgent que le Parlement joue un rôle beaucoup plus actif dans la détermination de ces charges, en votant une loi de programmation pluriannuelle de l’énergie, qui fixerait notamment le plafond par filière des nouvelles capacités de production d’électricité issues de sources d’énergie renouvelable.
Le 1er janvier 2018, le chèque énergie sera généralisé, en remplacement des tarifs sociaux de l’électricité et du gaz. La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte prévoyait que le Parlement disposerait du rapport d’évaluation de l’expérimentation de ce nouveau dispositif dans quatre départements. Je serai ravi d’en prendre connaissance, et ce d’autant que vous nous avez laissé entendre, madame la ministre, que ce dispositif coûterait 581, 1 millions d’euros en 2018, soit 80 millions de plus que les tarifs sociaux de l’énergie.
En ce qui concerne le compte d’affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale », dit aussi FACE, le montant des aides versées aux autorités organisatrices de la distribution d’électricité pour le financement des travaux d’électrification en zone rurale diminuera de 4, 5 % en 2018.
Tous les postes de dépenses de ce compte d’affectation spéciale seront touchés, le Gouvernement ayant décidé de jouer du rabot, cet instrument qui permet de repousser, uniformément et aveuglément, les choix.
Ce non-choix aura des conséquences pour les territoires ruraux, puisqu’ils seront moins en mesure d’accompagner leur développement démographique et économique en matière de réseaux électriques.
Le compte d’affectation spéciale « Aides à l’acquisition de véhicules propres » va voir ses crédits augmenter de 11, 8 % en 2018, ce qui est une bonne nouvelle.
Les bonus automobiles seront recentrés sur les véhicules électriques. Le Gouvernement voulait mettre fin à l’aide à l’achat d’un vélo à assistance électrique, qui devrait coûter 50 millions d’euros en 2017, mais l’Assemblée nationale a souhaité prolonger le dispositif. Nous vous proposerons de le supprimer, car il est inapproprié. En effet, le marché fait son travail. En outre, nous ne disposons pas de rapport sur ce point.
Alors que seules 21 000 primes à la conversion des véhicules ont été versées depuis avril 2015, le Gouvernement se fixe l’objectif très ambitieux de 100 000 primes versées en 2018, notamment un doublement au bénéfice des ménages à faibles revenus. C’est aujourd’hui la seule dépense significative prévue dans votre projet de budget, puisque ces crédits sont en augmentation de 100 millions d’euros.
La commission des finances a décidé de s’en remettre à la sagesse du Sénat sur le vote des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », et lui propose d’adopter les crédits des comptes d’affectation spéciale « Transition énergétique », « Aides à l’acquisition de véhicules propres » et « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale ».