Intervention de Fabienne Keller

Réunion du 1er décembre 2017 à 15h00
Loi de finances pour 2018 — Compte d'affectation spéciale : transition énergétique

Photo de Fabienne KellerFabienne Keller, rapporteur spécial de la commission des finances :

Madame la ministre, comme vous l’avez dit devant la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable de la Haute Assemblée, l’année 2018 constituera pour les infrastructures et services de transport « un budget de transition », dans l’attente des résultats des assises de la mobilité, que vous avez lancées et dont les conclusions serviront de base au futur projet de loi d’orientation des mobilités que vous présenterez au Parlement au premier semestre 2018.

À ce projet sera annexée une programmation financière pluriannuelle des infrastructures de transport que le groupe de travail, présidé par Marie-Hélène des Esgaulx, de notre commission des finances, sur le financement des infrastructures de transport avait réclamée l’année dernière.

Le programme 203, « Infrastructures et services de transports » ne présente qu’une partie des dépenses consacrées aux transports en raison du rôle majeur joué par l’Agence de financement des infrastructures de transports de France, l’AFITF, dans le financement des grandes infrastructures. Malheureusement, nous ne disposons pas de l’ensemble des informations budgétaires relatives à ce programme. Nous souhaiterions, madame la ministre, que vous vous engagiez à nous les transmettre l’année prochaine.

L’AFITF fait face actuellement à une impasse financière liée aux trop nombreux engagements pris par l’État par le passé, comme vous le rappelez régulièrement, madame la ministre. Ce constat a conduit le Président de la République à annoncer une « pause » en matière d’infrastructures de transport, ce qui s’est notamment traduit par une révision à la baisse de quelque 800 millions d’euros des dépenses initialement prévues pour l’AFITF en 2018, les engagements concernés ayant été repoussés à une date ultérieure.

Les dépenses de cet opérateur augmenteront toutefois de 200 millions d’euros en 2018 pour atteindre 2, 4 milliards d’euros, avec un effort particulier consenti en direction des deux priorités affichées par le Gouvernement, à savoir la régénération des réseaux existants, notamment routier et ferré, et les transports du quotidien. Ces deux priorités, auxquelles nous souscrivons, sont exactement celles qu’avait mises en avant le groupe de travail de la commission des finances que j’ai déjà cité, lequel avait conclu à ces impérieuses nécessités.

L’équilibre financier de l’AFITF demeurera néanmoins précaire avec des restes à payer en augmentation, s’établissant à 12, 3 milliards d’euros, ce qui devra nous conduire à nous poser la question d’une ressource spécifique à affecter à cet établissement public, question jamais véritablement résolue depuis l’abandon par le gouvernement précédent de l’écotaxe poids lourds, qui eût été très précieuse et utile.

La taxation des poids lourds étrangers en transit, qui endommagent notre réseau routier sans participer à son financement, demeure une piste que nous devons creuser. Pourrez-vous nous donner, madame la ministre, des informations complémentaires sur l’avancement de ce dossier, dont vous avez annoncé qu’il serait étudié conjointement par le Gouvernement, les régions et le Parlement ?

Les crédits du programme 203, pour leur part, n’évolueront qu’à la marge en 2018. La subvention à SNCF Réseau diminuera très légèrement, celle de Voies navigables de France, VNF, restera stable, à l’exception des crédits en faveur du dragage des ports.

Quelques mots sur les trois opérateurs qui relèvent du programme 203 : SNCF Réseau, la Société du Grand Paris et Voies navigables de France.

Comme l’a montré l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, l’ARAFER, les hypothèses prévues par le contrat de performance décennal signé l’an dernier par SNCF Réseau avec l’État ne sont guère crédibles, et celui-ci devra rapidement être mis à jour sur la base des conclusions de la mission sur le modèle ferroviaire français que vous avez confiée, madame la ministre, à Jean-Cyril Spinetta.

SNCF Réseau devra poursuivre le grand plan de modernisation du réseau ferroviaire qui impliquera un effort annuel de 3 milliards d’euros, alors que sa dette constitue toujours un fardeau difficilement supportable : elle s’élève à 45, 7 milliards d’euros et les projections la situent à 60 milliards d’euros d’ici à une vingtaine d’années. La question de la reprise, au moins partielle, de cette dette par l’État devra faire l’objet de décisions.

Les coûts du Grand Paris Express sont désormais évalués à 35 milliards d’euros, contre 25 milliards d’euros antérieurement. Les sénateurs franciliens, en particulier, attendent les arbitrages du Gouvernement sur ce dossier.

Pour ma part, je suis attachée au projet initial du Grand Paris Express, soit une double boucle. Renoncer à telle ou telle partie pourrait avoir pour conséquence la remise en cause de l’efficacité du projet dans sa totalité. Même les provinciaux s’y intéressent : lorsque la région parisienne ne fonctionne pas, c’est toute la France qui rencontre des difficultés.

Lors de l’audition du président de la Société du Grand Paris, j’ai eu la surprise d’apprendre que le plafond d’emploi de cet opérateur n’était que de 240 équivalents temps plein pour 2018. Ce chiffre est dérisoire, alors que les risques financiers, mais également techniques et en termes de sécurité sur les chantiers du Grand Paris Express vont se multiplier dans les années à venir.

Je souhaite donc vous inviter, madame la ministre, à envisager rapidement un renforcement des effectifs de la Société du Grand Paris, ainsi que de l’ARAFER, qui se voit dotée de missions supplémentaires. Vous seule pouvez déposer un amendement en ce sens.

Concernant Voies navigables de France, deux enjeux me paraissent particulièrement importants : la taxe hydraulique et les investissements. Mon collègue Michel Vaspart reviendra plus précisément sur ces questions.

Sur le programme « Affaires maritimes », nous sommes tous très heureux de la suppression de l’article 53 et de la réinstauration de l’exonération des charges salariales à l’égard du métier de marin, qui relève trop peu fréquemment du droit français. Compte tenu de la concurrence internationale, cette exonération est indispensable.

Je souhaite souligner les engagements pris par le Gouvernement lors des assises de l’économie de la mer, qui se sont tenues au Havre les 21 et 22 novembre dernier, notamment l’exonération précitée.

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