Monsieur le président, madame la ministre, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je souhaite remercier tout d’abord l’ensemble de mes collègues, les rapporteurs et le Gouvernement pour le travail réalisé dans le cadre de l’examen de ce texte.
La mission « Écologie, développement et mobilités durables » est composée de huit programmes, cela a été dit à plusieurs reprises. Les sujets concernés par ces derniers revêtent tous d’une importance particulière pour notre pays : transition énergétique, climat, biodiversité, mobilité, énergie, entre autres.
Les crédits de la mission sont en hausse pour l’exercice 2018, avec 11, 35 milliards d’euros d’autorisations d’engagement contre 10, 2 milliards d’euros en 2017. Cette augmentation permet simplement à la France de garder un minimum de cohérence avec ses engagements nationaux et internationaux.
C’est un budget qui, après examen approfondi, manque clairement de souffle pour inspirer une politique volontariste sur ces sujets essentiels. J’ai la conviction que ces enjeux méritent davantage de considération.
Cela étant dit, il me serait impossible d’aborder les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilités durables » sans évoquer la première partie du projet de loi de finances. Aussi, permettez-moi de revenir sur la vision politique du Gouvernement concernant ces nombreux sujets, à travers l’examen des crédits.
Pour le secteur des transports, qui est le secteur émettant le plus de gaz à effet de serre en France, à savoir près de 30 % de la totalité des émissions, les mesures concernant le renforcement de la prime à la conversion automobile et son élargissement sont à saluer. Je reviendrai sur le transport tout à l’heure.
Deux sujets de cette mission doivent mobiliser toute notre attention, car ils seront au cœur des discussions de la commission mixte paritaire. Il s’agit du budget des agences de l’eau et du Fonds de prévention des risques naturels majeurs.
Le budget des agences de l’eau a suscité de nombreux débats sur les bancs de l’Assemblée nationale et du Sénat. Le projet de loi de finances initial prévoyait dès 2018 un plafonnement des agences à hauteur de 2, 105 milliards d’euros. L’Assemblée nationale a voté un amendement du Gouvernement rectifiant ce plafond, mais en instaurant, en contrepartie, un prélèvement de 200 millions d’euros sur la trésorerie des agences. Celui-ci intervient en sus des prélèvements visant à financer l’Agence française pour la biodiversité, les parcs nationaux et l’Office national de la chasse et de la faune sauvage. Au total, une grande partie du produit des redevances est détournée des politiques de l’eau. Cette politique rompt très clairement avec le principe « l’eau paie l’eau ».
Prenons comme exemple l’agence de l’eau Loire-Bretagne. Ces prélèvements aboutiraient à ramener la trésorerie de l’agence à 4 millions d’euros et à des reports de paiement de subventions sur 2019. En résumé, ce prélèvement de trésorerie met en difficulté l’ensemble des acteurs de la chaîne, des agences de l’eau jusqu’aux collectivités qui investissent.
Le Sénat a adopté une position de compromis et n’a pas supprimé ce prélèvement. J’invite donc le Gouvernement à être particulièrement attentif – nous le serons pour ce qui nous concerne – sur l’évolution financière des agences de l’eau et sur leur capacité à remplir pleinement leur rôle.
Le second sujet de préoccupation que je souhaite aborder concerne le fonds de prévention des risques naturels majeurs, évoqué à l’instant par mon collègue Ronan Dantec. Je me permets de rappeler que ce fonds, dit fonds Barnier, est entièrement alimenté par un prélèvement sur les primes des bénéficiaires d’un contrat d’assurance habitation ou véhicule au titre de la garantie catastrophe naturelle, c’est-à-dire par l’ensemble des citoyens, des associations, des collectivités et des entreprises. Le Gouvernement prévoyait de plafonner ce fonds dans la limite de 137 millions d’euros, alors que les recettes, en 2018, devraient s’élever à 208 millions d’euros - au passage 71 millions d’euros de trésorerie prélevés pour le budget, après 55 millions d’euros en 2016 et un peu plus en 2017.
Ce projet a logiquement soulevé l’incompréhension sur toutes les travées du Sénat. En effet, comment imaginer plafonner pour la première fois ce fonds au regard des récentes catastrophes climatiques qui ont touché notre pays ! Comment, quelques mois après le terrible ouragan Irma, peut-on défendre l’idée de priver ce fonds des moyens nécessaires pour honorer ses engagements ?
Je remercie sur ce sujet l’ensemble de mes collègues, qui ont largement voté l’amendement de suppression de ce plafonnement que j’avais déposé, de la même façon que mon collègue Ronan Dantec. J’invite le Gouvernement et l’Assemblée nationale à suivre cette décision dans le cadre des discussions à venir.
De nombreux points restent cependant en suspens, cela a été évoqué également à plusieurs reprises. Je pense aux contrats conclus par 500 collectivités dans le cadre du plan Territoire à énergie positive pour la croissance verte. Ces contrats représentent 750 millions d’euros d’engagement de l’État. Or les crédits de paiement prévus se montent à 400 millions d’euros. Malgré l’enveloppe supplémentaire de 75 millions d’euros dégagée par le Gouvernement, nous sommes encore très loin du compte.
La dégradation de la qualité de notre réseau routier doit également être soulignée. Les crédits sont en augmentation de 100 millions d’euros, malgré tout, pour atteindre 802 millions d’euros pour 2018. Cependant, un audit interne du ministère des transports estime, pour sa part, qu’il faudrait 1 milliard d’euros chaque année jusqu’en 2027 pour remettre réellement l’ensemble du réseau routier à niveau.
J’évoquais, au début de mon intervention, un budget qui manque de souffle. Cette expression s’applique parfaitement aux crédits du programme 205 « Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture ». Je remercie à ce titre mon collègue Charles Revet qui, dans son rapport pour avis présenté par Michel Vaspart, met en exergue cette absence totale de vision politique pour l’économie maritime, tout cela un an après la loi Leroy.
En effet, seuls 240 millions d’euros devraient être consacrés à la politique maritime. Ces fonds sont largement insuffisants. À titre d’exemple, l’État s’était engagé à financer le dragage des ports, mais il manquera, au final, 32 millions d’euros à la charge des ports, qui ont parfois des difficultés à boucler leur budget, sur un total de 96 millions d’euros.
Sur le transport fluvial, nécessaire à l’intermodalité entre autres, Voies navigables de France a rappelé qu’un investissement de 100 millions d’euros par an pendant dix ans serait nécessaire pour sécuriser et régénérer l’ensemble des aménagements fluviaux afin d’encourager ce moyen de transport vertueux.
Pour terminer sur ce sujet, permettez-moi de rappeler la volonté initiale du Gouvernement, ou de Bercy, de supprimer l’exonération des charges sociales en faveur des entreprises d’armement maritime battant pavillon français pour leur personnel embarqué, pourtant votée dans la loi pour l’économie bleue de 2016. L’article 53 introduisant la mesure a pu être supprimé, grâce à la mobilisation d’un certain nombre d’acteurs et à la volonté du Gouvernement, par l’adoption d’un amendement à l’Assemblée nationale. Là encore, l’idée même de supprimer une mesure aussi importante pour la compétitivité de notre pavillon montrait l’absence d’une réelle prise en compte de ces sujets.
Je ne peux que déplorer le manque de financements en faveur de l’économie maritime qui, je le rappelle, est l’équivalent de l’aéronautique ou de l’automobile en France, soit 14 % du PIB, 270 milliards d’euros de chiffre d’affaires, en intégrant l’ensemble des activités.
J’aurais pu citer le budget de l’ADEME, le Fonds chaleur, la politique des déchets, le fret ferroviaire, le CEREMA, mais il n’est pas possible de détailler l’ensemble des actions des huit programmes de cette mission.
Pour conclure, le budget de la mission « Écologie, développement et mobilités durables » est un budget sans véritable relief ou réelles perspectives. J’ose espérer que l’écriture de la feuille de route pour l’économie circulaire en cours d’élaboration et les assises nationales de la mobilité donneront du corps à cette politique de transformation annoncée à grand renfort de communication ou de slogans, et que nous appelons de nos vœux. Le budget pour 2019 et les suivants permettront peut-être de le vérifier. C’est en tout cas notre souhait.