Monsieur le président, mesdames, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie pour l’ensemble de vos interventions, d’autant que j’ai noté, mesdames, messieurs les rapporteurs, que les commissions compétentes, suivant vos recommandations, ont émis des avis favorables sur la majorité des crédits de cette mission.
Avant de vous répondre – et je crains malheureusement qu’il ne soit pas possible, en vingt minutes, de répondre à l’ensemble de vos interrogations –, je voudrais préciser en quelques mots l’esprit dans lequel ce budget a été construit.
Le budget, vous le savez, est la clé de voûte de l’action politique. Il exprime les ambitions que porte le Gouvernement pour répondre au défi de la transition dans laquelle nous plaçons notre action. Il traduit les grands choix que nous faisons pour la transition écologique et solidaire, et les transports. Il repose sur trois principes : un principe de sincérité et de participation équitable au redressement des comptes publics ; une exigence de continuité des actions engagées pour la transition énergétique et écologique, tant il paraît indispensable de maintenir dans le temps un effort prolongé pour faire face au défi climatique dans toutes ses composantes ; une recherche de mobilisation de moyens complémentaires pour accompagner cette transition, avec la conviction qu’elle doit également être solidaire.
Tout d’abord, le budget du ministère est sincère : il a fallu pour cela consacrer des moyens importants au financement des engagements passés. Le Gouvernement a en effet choisi d’assumer les contraintes budgétaires avec lisibilité et transparence. C’est un exercice difficile, notamment dans le secteur des transports dont j’ai la responsabilité directe, mais il est indispensable. C’est notamment le sens de la pause annoncée par le Président de la République sur nos grands projets : ce n’est pas par plaisir, mais pour permettre de poser des choix en matière d’infrastructures. Je note, à cet égard, l’excellent rapport de votre Haute Assemblée, dont nous pouvons largement nous inspirer pour faire le bilan des choix en termes d’infrastructures.
Ces choix, le Parlement aura à en débattre, notamment dans le cadre du projet de loi de programmation des infrastructures, et cela me semble essentiel, car ils sont fondamentaux. Il faudra en particulier choisir la part allouée à la poursuite des grands projets. Le sénateur Marchand l’a rappelé, nous sommes confrontés à une impasse de 10 milliards d’euros sur le quinquennat du fait des engagements pris précédemment. Il faudra surtout décider quelle part accorder au désenclavement des territoires, à l’aménagement de nos réseaux, afin de les mettre aux niveaux promis de contrat de plan en contrat de plan.
Il s’agit de sortir des promesses non financées et de redonner du crédit à la parole de l’État, et je remercie Mme la sénatrice Keller, ainsi que MM. les sénateurs Corbisez et Cornu, de soutenir cette démarche.
Autre exemple de cette exigence de sincérité budgétaire, l’ADEME, qui illustre les difficultés pouvant résulter d’une budgétisation insuffisante de crédits telle qu’on l’a connue encore au cours de l’année 2017. Vous le savez, l’ADEME avait alerté les élus sur ses problèmes de trésorerie. Pour y faire face, elle bénéficiera, en 2018, d’un important recalibrage de ses crédits de paiement, en augmentation de 31 %, ce qui lui permettra de couvrir ses échéances.
Cette « remise à flot » de l’ADEME était indispensable, car elle est un acteur majeur pour la mise en œuvre de la transition écologique et solidaire, avec des interventions importantes pour soutenir les économies d’énergie et le développement des énergies renouvelables, notamment au travers du Fonds chaleur, le développement de l’économie circulaire par l’intermédiaire du Fonds déchets, le soutien à la mobilité durable et l’innovation dans ces différents domaines, ainsi que des interventions pour la mise en sécurité des sols pollués.
Le budget du ministère permet en outre de poursuivre et d’accentuer l’effort entrepris pour aller vers une économie décarbonée et solidaire. Dans la continuité de l’accord de Paris et pour renforcer l’action de la France au travers du plan Climat, nous avons engagé la sortie des énergies fossiles, en tout cas pour les véhicules, d’ici à 2040. Nous l’avons fait en prévoyant, dans ce projet de loi de finances, une trajectoire d’augmentation du prix du carbone pour inciter les acteurs à réduire leur consommation d’énergies fossiles. La tonne de CO2, qui sert, je le rappelle, de base au calcul des taxes intérieures de consommation, doit ainsi passer de 30, 50 euros en 2017 à 44, 60 euros en 2018, pour atteindre progressivement 86, 20 euros en 2022.
Par ailleurs, nous avons décidé d’accélérer le calendrier de la suppression de l’avantage donné au diesel, qui paraît aujourd’hui totalement injustifié compte tenu de la pollution de l’air par les émissions de particules fines issues de sa combustion ; je sais que c’est un sujet, monsieur le sénateur Husson, auquel vous êtes particulièrement sensible.
Le tarif de la TICPE appliqué au gazole se rapprochera de celui appliqué aux essences de façon à annuler progressivement, d’ici à quatre ans, l’avantage fiscal accordé au diesel. Évidemment, l’augmentation de ces prélèvements se place, je voudrais le souligner auprès du sénateur Gremillet, dans le cadre d’une baisse globale des prélèvements obligatoires. C’est donc l’ensemble de ces équilibres qu’il faut regarder, avec le souci de compenser ces augmentations par des mesures d’accompagnement notamment à destination des ménages modestes, que nous devons accompagner au quotidien dans cette transition énergétique. J’ai bien entendu les différentes interventions à ce sujet. C’est bien le sens du « Paquet solidarité climatique » qui est inscrit dans le budget.
Ce « Paquet solidarité climatique » repose notamment sur trois mesures.
Tout d’abord, la prime à la conversion de véhicules diesel anciens permettra d’accompagner les ménages pour acquérir des véhicules moins polluants, y compris des véhicules d’occasion. Cette mesure devrait permettre le renouvellement de 100 000 véhicules en 2018.
Ensuite, le dispositif du chèque énergie, qui était expérimenté jusqu’à présent dans quatre départements, sera généralisé pour un coût total évalué à 613 millions d’euros. Il permettra d’aider quatre millions de ménages aux revenus modestes à payer leurs factures d’énergie, quelle que soit la source d’énergie. C’était bien le problème posé par les tarifs sociaux précédemment. Ce chèque énergie pourra également soutenir des travaux de rénovation énergétique pour un montant annuel de 150 euros par ménage. J’ai bien noté les attentes concernant le rapport mentionné notamment par M. le sénateur Husson. Je vous confirme que celui-ci a pris du retard et n’est pas totalement finalisé. Il vous sera bien évidemment transmis. Sur le fond, il confirme le bien-fondé de la généralisation et la satisfaction des bénéficiaires.
Le troisième volet concerne l’aide à la réalisation des travaux de rénovation énergétique. Les aides de l’Agence nationale de l’habitat, l’ANAH, seront maintenues et le crédit d’impôt pour la transition énergétique prolongé en 2018, avant la mise en œuvre d’une prime à la rénovation énergétique versée à compter de 2019 dès la réalisation des travaux.
En complémentarité avec cette politique visant à intégrer dans le prix du carbone le coût de ses externalités négatives, le développement de nouvelles sources d’énergie renouvelable continue à constituer une priorité pour le ministère.
Au total, plus de 6, 5 milliards d’euros seront consacrés au développement de l’énergie renouvelable. Ces soutiens sont indispensables au développement des filières qui, derrière ce vocable générique, sont en réalité très diverses – éolien, photovoltaïque, biomasse, géothermie, biogaz, etc. L’enjeu pour le ministère est bien d’optimiser, notamment dans le cadre d’appels d’offres, l’efficacité des aides en tenant en compte des particularités de ces filières.
La transition énergétique, c’est aussi la mobilité durable.
En premier lieu, et en cohérence avec les efforts pour accompagner la conversion du parc automobile, il s’agit de promouvoir une mobilité quotidienne des Français améliorée et apaisée.
Dans nos grandes métropoles, des millions de nos concitoyens sont en effet confrontés à la saturation de leurs réseaux de transport, qu’il s’agisse des routes ou des transports publics.
Dans nos territoires ruraux, des millions de personnes se sentent à juste titre isolées, car les investissements nécessaires au désenclavement – une route correcte, une voie ferrée entretenue – n’ont pas été réalisés.
La qualité et l’optimisation des réseaux et services existants, ferroviaires, routiers ou fluviaux, sont un préalable nécessaire. Le maintien, voire le renforcement des moyens qui leur sont consacrés par le budget de l’État en 2018 est donc une première traduction de nos priorités.
Pour ce faire, les crédits consacrés à la réalisation des contrats de plan État-régions, dont je redis qu’ils ne sont pas concernés par la pause, pourront être augmentés dans le cadre du budget de l’AFITF. Ces contrats constituent un outil précieux permettant la mise en œuvre d’ambitions partagées entre l’État, les régions et les collectivités.
De même, les crédits consacrés à la régénération et à la modernisation du réseau routier national vont connaître une hausse significative de 25 %, soit une augmentation de 100 millions d’euros.
Le mouvement est également engagé sur le fluvial, avec une hausse de 10 millions d’euros, soit 14 %.
Par ailleurs, je peux confirmer à M. le sénateur Cornu et à Mme la sénatrice Keller les commandes de l’État pour les trains d’équilibre du territoire seront honorées pour l’ensemble des régions en 2018.
Vous le savez, les assises de la mobilité qui s’achèvent vont permettre d’identifier les besoins et les attentes prioritaires des Français en termes de mobilité à l’horizon de 2030, mais aussi de faire émerger de nouvelles solutions.
Un projet de loi d’orientation sur les mobilités sera présenté pour être débattu au Parlement au premier semestre de 2018. Pour la première fois, un projet de loi de programmation des infrastructures lui sera adossé, établi sur la base des propositions du Conseil d’orientation des infrastructures, instance au sein de laquelle siège, notamment, M. Maurey.
Sans attendre les conclusions de ces travaux, qui rendront possible la sortie de la pause, et en lien avec la priorité accordée aux réseaux existants, il nous est apparu nécessaire d’augmenter de 200 millions d’euros les recettes de l’AFITF dès 2018.
Je confirme à Mmes les sénatrices Keller et Vullien que je suis favorable à ce que l’on puisse, l’an prochain, communiquer les grandes masses du budget de l’AFITF au moment du vote du projet de loi de finances.
Cette année, il nous faut achever les travaux d’évaluation de ce que nous devons payer, suite à l’impasse que je mentionnais. En revanche, pour l’avenir, il est important que vous puissiez avoir cet éclairage, même si, agissant d’un établissement public, ce budget sera communiqué sous réserve de son vote par le conseil d’administration. Je confirme également qu’il nous faudra évoquer, en début d’année prochaine, les nouvelles ressources.
Vous l’aurez compris, monsieur le président, mesdames messieurs les sénatrices, ce budget traduit dès 2018 les orientations que nous souhaitons prendre tout au long du quinquennat. Je n’aurai certainement pas le temps de répondre à toutes vos questions, mais je voudrais rapidement apporter quelques précisions à certains d’entre vous.
Monsieur le sénateur Husson, nous aurons l’occasion de revenir, lors de l’examen des amendements, sur la question du financement des agences de l’eau et des opérateurs de la biodiversité, de même que sur le compte d’affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale », dit CAS FACÉ.
Je vous ai répondu sur le rapport relatif au chèque énergie : il devrait être publié prochainement.
Nous pourrons également évoquer la prime pour les vélos à assistance électrique lors des amendements.
De manière générale, sur le coût des ENR, la nouvelle programmation pluriannuelle de l’énergie, qui est en cours d’élaboration et qui sera présentée au Parlement, sera l’occasion d’offrir une visibilité aux différentes énergies qui seront soutenues dans les prochaines années.
Madame Keller, je me réjouis de l’avis favorable que vous avez émis sur le programme et le compte d’affectation spéciale. La dette de SNCF Réseau est un sujet majeur. Nous avons souhaité mener une réflexion générale sur le ferroviaire et avons confié une mission à Jean-Cyril Spinetta, avec pour ambition de remettre sur pied ce modèle ferroviaire qui rencontre aujourd’hui de grandes difficultés. Je voudrais aussi vous rassurer sur le réseau de transports du Grand Paris : le schéma d’ensemble, dont la cohérence est absolument essentielle, ne sera pas remis en cause.
Monsieur le sénateur Capo-Canellas, j’ai bien noté les inquiétudes sur les différents opérateurs que sont Météo France, l’IGN, l’Institut géographique national, et le CEREMA.
Pour Météo France, je confirme que le Gouvernement est déterminé à lancer en 2018 l’acquisition du supercalculateur, l’investissement étant inscrit dans la trajectoire budgétaire pluriannuelle.