Madame la présidente, monsieur le ministre, messieurs les présidents de commission, messieurs les rapporteurs pour avis, chers collègues, à la suite de Vincent Delahaye, je vais vous présenter les programmes de la mission « Action extérieure de l’État », qui concernent les Français à l’étranger et les affaires consulaires, d’une part, la diplomatie culturelle et d’influence, d’autre part. Ceux-ci représentent environ un tiers des crédits de la mission.
Le premier constat à la lecture du projet du Gouvernement est la globale stabilité de la prévision budgétaire pour 2018 par rapport à l’année 2017, comme l’a souligné mon collègue Vincent Delahaye. Elle devrait permettre de couvrir les besoins de l’administration consulaire, du réseau culturel à l’étranger et des opérateurs. Mais si ce budget ne présente aucun sacrifice sur les missions essentielles de service public et de diffusion de la culture, et de la langue françaises – hormis l’enseignement français à l’étranger, j’aurai l’occasion d’y revenir –, aucune ambition véritablement nouvelle n’est affichée non plus.
Or la situation financière des acteurs culturels et des opérateurs chargés de la politique d’influence de notre pays demeure fragile. Il sera donc, au-delà de cette année 2018, nécessaire d’établir une stratégie claire de développement du soft power français.
Le Président de la République, dans son discours du 2 octobre dernier devant l’Assemblée des Français de l’étranger, a fait un certain nombre d’annonces qui semblent aller dans ce sens. Néanmoins, elles ne se traduisent pas par un effort particulier inscrit au budget de 2018. Nous ne pourrons donc juger de l’action du Gouvernement dans ce domaine qu’à l’aune du budget 2019 et des suivants du quinquennat.
Certes, la volonté affichée ces cinq dernières années de promouvoir l’attractivité touristique de la France est confirmée : la reconduction des moyens de l’opérateur Atout France est une bonne nouvelle, tout comme la stabilisation des crédits alloués à l’Institut français, aux instituts français et aux alliances françaises. Cependant, ces derniers restent dans l’attente de la mise en œuvre d’une nouvelle impulsion en faveur de l’influence culturelle et de la promotion de la langue française.
Là encore, un plan doit être annoncé au premier semestre 2018, à la fois pour la promotion de la langue française et du plurilinguisme dans le monde, ainsi que sur un possible rapprochement entre l’Institut français et la Fondation Alliance française.
L’exercice 2018 sera également marqué par la poursuite des chantiers de modernisation de l’administration consulaire engagés par les gouvernements précédents. La simplification des démarches – demande en ligne des passeports, répertoire électoral unique, vote électronique – doit ainsi permettre de contenir ces dépenses à un niveau équivalent à celui de 2017.
Ces signaux positifs sont à saluer, mais ils ne doivent pas pour autant nous faire perdre de vue l’inquiétude des opérateurs, en manque de visibilité par rapport aux années qui viennent. À cet égard, les contrats d’objectifs et de moyens pluriannuels qui lient l’État et les opérateurs apparaissent surtout comme des contrats d’objectifs sans garantie sur les moyens accordés.
Je veux revenir, d’abord, sur la situation de plus en plus préoccupante de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’AEFE. Il s’agit d’un des plus grands réseaux d’enseignement public à l’étranger au monde, ce qui en fait un atout très précieux pour le rayonnement de notre pays.
Alors que la Cour des comptes avait déjà pointé sa situation financière précaire dans une enquête remise au Sénat en octobre 2016, l’AEFE a subi une annulation de 33 millions d’euros par le décret d’avance du 20 juillet dernier. Pour y faire face, l’Agence a prévu de relever de 6 % à 9 % la contribution versée par les établissements, ce qui entraînera inévitablement une hausse des frais de scolarité.
Par ailleurs, l’Agence a prévu de réduire le nombre de postes d’enseignants d’encadrement qu’elle finance : 80 postes d’expatriés et 100 postes d’enseignants résidents dès 2018 ; 160 autres postes pourraient disparaître aussi en 2019. Or ces suppressions de postes d’enseignants risquent de nuire à la qualité de l’enseignement. De même, la hausse de la contribution des établissements, qui se répercute naturellement sur les familles, sera préjudiciable aux écoles françaises compte tenu du contexte de forte concurrence.
Les établissements français à l’étranger étaient d’ailleurs en grève lundi dernier, un mouvement très suivi pour protester contre cette coupe budgétaire, mais aussi pour marquer de véritables inquiétudes quant à l’avenir.
Si nous sommes attachés à ce service public exceptionnel de l’enseignement français à l’étranger, cette situation justifie des efforts spécifiques pour en garantir les principes, la qualité et l’attractivité.
C’est pourquoi, sur l’initiative de Vincent Delahaye et de moi-même, la commission des finances vous proposera d’adopter un amendement visant à augmenter de 30 millions d’euros la subvention pour charges de service public à l’AEFE afin de compenser, notamment, les effets de la régulation budgétaire intervenue cet été.
Je dirai aussi un mot de la situation de Campus France, pour lequel les moyens affichés ne sont pas à la hauteur de nos ambitions en matière d’accueil des étudiants étrangers. Dans le contexte mondialisé que nous connaissons, l’Allemagne, mais aussi de nouveaux acteurs, comme la Chine, la Turquie ou l’Arabie Saoudite, misent beaucoup plus que nous sur leur politique d’influence par leur attractivité auprès des étudiants.
Enfin, il faut revenir dans le cadre de ce budget sur les conséquences de la suppression de la réserve parlementaire.