Intervention de Hélène Conway-Mouret

Réunion du 4 décembre 2017 à 21h20
Loi de finances pour 2018 — Action extérieure de l'état

Photo de Hélène Conway-MouretHélène Conway-Mouret :

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je souscris aux propos de M. Gilbert-Luc Devinaz.

Je souhaite revenir sur deux points qui me semblent soulever de nombreuses questions, et profiter de ce débat pour souligner très librement les difficultés que ce projet de budget me paraît ignorer.

Ces difficultés sont en premier lieu celles d’un réseau unique, l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, qui scolarise actuellement 350 000 élèves français dans 137 pays et emploie 21 400 personnes. Il constitue aussi, aux dires de tous, un pilier de notre rayonnement en assurant l’éducation de nombreux élèves étrangers.

Or, au lieu d’accompagner la forte croissance des demandes, due à l’excellente réputation de l’enseignement que les élèves reçoivent dans ses établissements, Bercy rogne sa dotation depuis 2009. En 2017, l’annulation de 33 millions d’euros de crédits doublera sa dette structurelle. Pourquoi affaiblir ainsi financièrement ce bel outil, sans qu’aucune rationalité autre que comptable n’appuie ces réductions de crédits ?

Un mouvement de grève très suivi a eu lieu, le 27 novembre dernier, dans les établissements du réseau. Les parents d’élèves et les enseignants se sont mobilisés parce qu’ils sont inquiets pour l’avenir de ce dernier. Le désengagement de l’État fait peser un risque de déconventionnement, donc de privatisation, des établissements, dont la contribution passerait de 6 % à 9 %. Le manque de visibilité sur les efforts financiers qui leur seront demandés risque d’inciter les familles à choisir une autre école.

Si l’État ne peut pas tout, les familles non plus, et encore moins celles, françaises ou étrangères, qui entendent transmettre notre langue et notre culture à leurs enfants. Cette baisse de la dotation entraînera inéluctablement une forte augmentation des frais de scolarité dans de nombreux établissements, qui devront remplacer les professeurs résidants ou détachés par des recrutés locaux. Mais la presse a déjà relevé l’indifférence de Bercy pour un tel mouvement.

Je voudrais ensuite évoquer la situation des recrutés locaux qui ne relèvent pas de la législation française. Le projet de loi de finances pour 2018 ne fait pas mention des 80 postes d’expatrié et des 100 postes de résident qui seront supprimés. Sur trois ans, plus de 500 postes disparaîtront et seront remplacés par des enseignants recrutés localement, qui n’ont malheureusement pas toujours les bonnes qualifications, dont le vivier se tarit au fil des recrutements, et qui sont à la charge des établissements.

Au moment même où les frais de scolarité risquent d’augmenter pour les parents, la qualité du service public –auquel certains croient encore, même si une concertation nationale, à l’instar de celle qui a eu lieu en 2013, serait certainement la bienvenue – est tout simplement remise en question.

Ce plan social déguisé et ces économies, modestes au regard du budget du ministère, risquent de nous coûter fort cher, plus cher en tout cas qu’ils ne nous rapporteront, en matière d’image, de signal négatif, voire de régression, alors même que le Président de la République a affirmé le « souci majeur pour nos compatriotes de l’étranger d’offrir à leurs enfants un enseignement de qualité qui conserve un lien fort avec la France ».

Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, le projet de budget de l’action extérieure de l’État fait peser une menace directe et certaine sur nos outils d’influence, ce qui motivera l’abstention des membres du groupe socialiste et républicain.

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