Intervention de Alima Boumediene-Thiery

Réunion du 17 février 2010 à 21h30
Récidive criminelle — Article 5 bis

Photo de Alima Boumediene-ThieryAlima Boumediene-Thiery :

La commission des lois a largement récrit cet article, qui porte sur le répertoire des données à caractère personnel collectées dans le cadre des procédures judiciaires.

Si elle a clarifié la nature des données susceptibles d’être collectées et encadré l’accès à ce répertoire, en le réservant à l’autorité judiciaire, il demeure un problème de fond, qui agite d’ailleurs notre commission depuis plusieurs mois. Quel régime souhaitons-nous donner aux répertoires ou aux fichiers ? Quel contrôle le Parlement est-il en mesure d’exercer sur ceux-ci ? Comment s’assurer que ces outils sont compatibles avec le droit de toute personne au respect de sa vie privée ?

Nous sommes parvenus à un consensus : les fichiers doivent être créés par la loi. D’ailleurs, c’est la recommandation qui a été proposée par nos collègues Yves Détraigne et Anne-Marie Escoffier dans leur excellent rapport intitulé : « La vie privée à l’heure des mémoires numériques ».

Lorsque nous revendiquons le droit pour le Parlement d’exercer un contrôle sur ces fichiers ou sur ces répertoires, il ne s’agit pas seulement d’en autoriser le principe : il s’agit également d’en contrôler le contenu.

Dans notre rôle de protection des libertés individuelles, nous ne pouvons nous contenter de donner notre aval à la création de ces fichiers ou de ces répertoires sans contrôler leur contenu et leur compatibilité avec les principes relatifs au respect de la vie privée. Or c’est exactement ce qui nous est proposé avec l’article 5 bis : donner un blanc-seing à un répertoire, dont le contenu sera fixé par le pouvoir réglementaire !

Nulle part dans cet article ne sont précisées les modalités et conditions de fonctionnement de ce répertoire. Ces éléments sont, semble-t-il, renvoyés à un décret en Conseil d’État, avec un contrôle préalable de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL.

Je note la volonté de notre collègue Alex Türk de donner un peu plus de place à la CNIL dans ce processus, mais je crois que nous devons exiger beaucoup plus que cela. Nous devons prévoir dans la loi toutes les modalités, la durée de conservation, les modalités d’effacement, de même que nous devons y inscrire le droit, fondamental, d’accès et de rectification aux données enregistrées.

Si le Sénat, ou plus largement le Parlement, renonce à ces exigences, il renonce de fait à son rôle de protection des libertés fondamentales. Parce qu’il s’agit d’une garantie démocratique, nous ne le souhaitons pas !

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