Séance en hémicycle du 17 février 2010 à 21h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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  • sûreté

La séance

Source

La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt-cinq, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Roger Romani.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

J’informe le Sénat que la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale a fait connaître qu’elle a d’ores et déjà procédé à la désignation des candidats qu’elle présentera si le Gouvernement demande la réunion d’une commission mixte paritaire en vue de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle et portant diverses dispositions de procédure pénale, actuellement en cours d’examen.

Ces candidatures ont été affichées pour permettre le respect du délai réglementaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

J’informe le Sénat que la proposition de loi n° 130 (2009-2010), adoptée par l’Assemblée nationale, de simplification et d’amélioration de la qualité du droit, dont la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale est saisie au fond, est renvoyée pour avis, à leur demande, à la commission des affaires sociales, à la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, à la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire et à la commission des finances.

J’informe le Sénat que le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (292, 2009-2010), dont la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale est saisie au fond est renvoyé pour avis, à leur demande, à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées et à la commission des finances.

(Texte de la commission)

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle et portant diverses dispositions de procédure pénale.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’article 2 bis.

L’article 706-53-19 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le président de la juridiction régionale de la rétention de sûreté avertit la personne placée sous surveillance de sûreté que le placement sous surveillance électronique mobile ne pourra être mis en œuvre sans son consentement mais que, à défaut ou si elle manque à ses obligations, le placement dans un centre socio-médico-judiciaire de sûreté pourra être ordonné dans les conditions prévues par l’alinéa précédent. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L’amendement n° 20, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

L’amendement n° 20 répond à un souci de cohérence générale avec notre position de principe sur la surveillance et la rétention de sûreté : il tend donc à la suppression de l’article 2 bis.

Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai également l’amendement n° 21, qui est un amendement de repli.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je suis saisi de l’amendement n° 21, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« Avant de pouvoir ordonner le placement en centre socio-médico-judiciaire, la juridiction d’application des peines adopte tous les moyens intermédiaires adaptés et prévus dans le cadre de la surveillance de sûreté par le 1° et le 2° de l’article 723-30. »

Veuillez poursuivre, madame Nicole Borvo Cohen-Seat.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

En cas de refus de porter un bracelet électronique, qui constitue un manquement aux obligations de la surveillance de sûreté, nous souhaitons que tous les moyens intermédiaires soient envisagés avant le placement en rétention de sûreté. Celui-ci ne doit intervenir qu’en dernier recours.

Tel est l’objet de l'amendement n° 21.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Par souci de cohérence, la commission a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 20.

Quant à l’amendement n° 21, il vise à instaurer des garanties relatives au caractère subsidiaire d’un placement en centre socio-médico-judiciaire de sûreté qui sont déjà prévues par l’article 2, article que nos collègues du groupe CRC-SPG souhaitaient supprimer par l’amendement n° 19 !

Je précise, par ailleurs, que le placement n’est pas ordonné par le juge de l’application des peines, mais par le président de la juridiction régionale de rétention de sûreté.

La commission demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettrait un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat est logique avec elle-même en proposant la suppression de l’article 2 bis. Je peux le comprendre, car l'amendement n° 20 est également cohérent avec l’amendement n° 14 rectifié qui tendait à supprimer l’ensemble des dispositions de la loi relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental.

Mon raisonnement est tout aussi logique : à partir du moment où l’on admet l’utilité du présent projet de loi, qui peut être aménagé sur certains points et que le travail réalisé en commission a d’ailleurs permis d’améliorer, on ne peut pas accepter un amendement qui vise soit à le supprimer en totalité, soit à en annuler une disposition essentielle.

Comme l’a très justement rappelé M. le rapporteur, l’article 2 bis prévoit que la personne placée sous surveillance de sûreté est informée de droits supplémentaires ou des conditions dans lesquelles vont s’exercer un certain nombre de mesures, il ne serait donc pas logique d’accepter un amendement de suppression.

Je ne vois donc que deux solutions : soit vous retirez cet amendement, madame Nicole Cohen-Seat, mais j’ai cru comprendre, depuis le début de cette discussion, que telle n’était pas votre logique, soit le Gouvernement émet un avis défavorable.

Quant à l'amendement n° 21, il est satisfait ; le Gouvernement y est également défavorable.

L’amendement n’est pas adopté.

L’amendement n’est pas adopté.

L’article 2 bis est adopté.

L’article 706-53-21 du même code devient l’article 706-53-22 et après l’article 706-53-20, l’article 706-53-21 est ainsi rétabli :

« Art. 706-53-21. – La rétention de sûreté et la surveillance de sûreté sont suspendues par toute détention intervenue au cours de leur exécution.

« Si la détention excède une durée de six mois, la reprise de la rétention de sûreté ou de la surveillance de sûreté doit être confirmée par la juridiction régionale de la rétention de sûreté au plus tard dans un délai de trois mois après la cessation de la détention, à défaut de quoi il est mis fin d’office à la mesure. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L’amendement n° 22, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

L’amendement n° 22 vise à supprimer l’article 3, en cohérence avec notre opposition totale à la rétention de sûreté.

Je défendrai en même temps l’amendement de repli n° 23, monsieur le président, qui vise à garantir une égalité de traitement entre tous les condamnés en matière de rétention et de surveillance de sûreté.

Si ces mesures sont seulement suspendues lorsqu’intervient une détention au cours de leur exécution, il faut alors que la juridiction régionale de sûreté confirme leur reprise dans un délai de trois mois après la cessation de la détention, quelle que soit sa durée.

En effet, toute possibilité d’évolution de l’état de santé mentale du condamné doit être prise en compte, quelle que soit la durée de la peine. Si des soins adaptés sont dispensés durant la rétention, ce qui doit ou devrait être le cas, il faut prendre sérieusement en compte les possibilités de progrès des condamnés et l’éventualité que l’évolution de leur état de santé mentale soit suffisamment significative pour justifier la fin du placement en rétention de sûreté. Il n’est pas admissible qu’un condamné subisse le maintien de mesures de sûreté sans que leur absolue nécessité soit avérée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

L’amendement n° 22 reçoit un avis défavorable, puisque la commission n’est pas favorable à l’abrogation de la loi du 25 février 2008 relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental.

En ce qui concerne l’amendement n° 23, il convient d’observer que le texte dont nous débattons a déjà beaucoup évolué. En effet, le projet de loi initial prévoyait que, lorsqu’une personne soumise à une surveillance de sûreté ou à une rétention de sûreté était incarcérée pour une infraction qu’elle avait commise, sa situation devait être réexaminée à sa libération par la juridiction régionale de rétention de sûreté, dès lors que la détention avait excédé un an. La commission a estimé que cette durée était un peu longue, dans la mesure où des soins doivent être délivrés en prison, selon l’exigence du Conseil constitutionnel, pour traiter les troubles dont souffre la personne. Elle a donc ramené ce délai d’un an à six mois.

En revanche, il ne lui paraît pas justifié d’obliger la juridiction à se prononcer de nouveau sur le placement en rétention de sûreté ou en surveillance de sûreté pour une personne condamnée à une très courte durée d’emprisonnement – quelques jours parfois – pendant laquelle, parce que sa situation a peu de chance d’évoluer, les éléments ayant justifié un placement en rétention de sûreté ou en surveillance de sûreté n’ont sans doute pas changé.

Nous pensons donc qu’un délai de six mois correspond à la juste mesure, c’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d’État

L’amendement n° 22 recueille un avis défavorable, puisque l’article 3 du projet de loi reprend les recommandations du rapport Lamanda relatives à la suspension de la mesure de surveillance ou de rétention de sûreté lorsqu’une détention intervient au cours de son exécution.

En ce qui concerne l’amendement n° 23, comme vient de le dire M. le rapporteur, il est extrêmement difficile, pour des raisons objectives, de descendre en dessous du délai de six mois recommandé par la commission. Mon avis est donc également défavorable.

L’amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 23, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer les mots :

Si la détention excède une durée de six mois,

par les mots :

Quelle que soit la durée de la détention,

Cet amendement a déjà été défendu, la commission et le Gouvernement se sont déjà exprimés.

L’amendement n° 43 rectifié, présenté par MM. Anziani et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel et Badinter, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer les mots :

Si la détention excède une durée de six mois

par les mots :

À l’issue de la détention

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

On pourrait se demander pourquoi notre amendement tend à supprimer toute référence à la durée de détention. Il faut savoir que, selon le Conseil constitutionnel, le temps de détention doit permettre une prise en charge effective et adaptée à la personne. Or, les conditions qui ont justifié le placement sous surveillance ou en rétention de sûreté – souvent le refus de soins – pourraient ne plus être réunies à l’issue de la détention.

La commission a ramené le délai d’un an à six mois, ce qui représente une amélioration tout à fait indéniable, mais nous souhaitons aller beaucoup plus loin. Nous proposons donc que la juridiction régionale de la rétention de sûreté se préoccupe de l’évolution de tout ancien condamné nouvellement incarcéré, quelle que soit la durée de la détention. Elle doit en effet vérifier que la personne concernée a effectivement bénéficié d’une prise en charge adaptée en détention, comme le prévoit l’article 1er du projet de loi.

Elle doit également évaluer la pertinence, au regard de ces nouveaux éléments, de son placement ou de son maintien sous surveillance de sûreté ou en rétention de sûreté.

Pour cela, la notion de durée de détention nous gêne et nous jugeons préférable que ces dispositions s’appliquent dans tous les cas.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Comme pour l’amendement précédent, notre avis est défavorable.

D’une part, il faut tout de même songer un peu aux conditions quotidiennes de fonctionnement de la juridiction régionale de la rétention de sûreté.

D’autre part, il ne faudrait pas en arriver au fait qu’une incarcération très courte, de quelques jours, devienne une opportunité pour la personne de voir augmenter ses chances de sortie de surveillance de sûreté.

Un délai de six mois nous semble, dans ces conditions, une bonne mesure.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Nous partageons l’avis défavorable de la commission, pour des raisons pratiquement identiques à celles que j’ai exposées lors de la discussion de l’examen de l’amendement n° 23.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 3 est adopté.

L’article 723-37 du même code est ainsi modifié :

Supprimé

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« La juridiction régionale de la rétention de sûreté peut également, selon les modalités prévues à l’article 706-53-15, ordonner une surveillance de sûreté à l’égard d’une personne placée sous surveillance judiciaire à laquelle toutes les réductions de peine ont été retirées, en application du premier alinéa de l’article 723-35 à la suite d’une violation des obligations auxquelles elle était soumise dans des conditions qui font apparaître des risques qu’elle commette à nouveau l’une des infractions mentionnées à l’article 706-53-13. La surveillance de sûreté s’applique dès la libération de la personne. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 24 est présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 95 rectifié est présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Plancade et Tropeano.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour présenter l’amendement n° 24.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

La commission des lois a fort opportunément procédé au retrait d’une disposition votée par la majorité à l’Assemblée nationale et qui prévoyait de ramener de quinze à dix ans le quantum de la peine susceptible d’être suivie d’une surveillance de sûreté à l’issue de la surveillance judiciaire.

Une telle disposition était à mon sens inconcevable : d’abord, parce que le seuil de dix ans est précisément celui prévu pour la surveillance judiciaire par l’article 723-29 du code de procédure pénale, dans sa rédaction actuelle ; ensuite, comme vous l’avez rappelé, madame le garde des sceaux, et comme l’a également confirmé le Conseil constitutionnel, parce que la surveillance de sûreté est une disposition exceptionnelle pour des faits d’une extrême gravité.

Un tel dispositif juridique est tellement dérogatoire aux principes fondamentaux de notre droit qu’il ne saurait en aucun cas être banalisé. Apparemment, tout le monde est d’accord sur ce point !

Le risque existe pourtant, puisque a été intégré, à l’article 4, une nouvelle extension du champ d’application de la surveillance de sûreté. Cela étend en conséquence la possibilité d’un placement en rétention de sûreté, celui-ci pouvant constituer, selon la loi, la sanction de la violation des obligations de la surveillance de sûreté.

Une sanction extrêmement grave pourra donc être prononcée contre l’intéressé, au seul motif que le manquement à ses obligations ferait apparaître un « risque » de récidive, ce qui n’est pas tout à fait induit.

Outre ces observations, nous sommes évidemment assez hostiles au dispositif de surveillance de sûreté, tel qu’il est issu de la loi du 25 février 2008 relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental.

Nous proposons donc la suppression de l’article 4.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l'amendement n° 95 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Nous partageons les motifs qui viennent d’être exposés. Étant opposés au principe, nous ne pouvons être qu’opposés à l’extension du dispositif !

L’article 4, en dépit des efforts manifestes de la commission des lois pour revenir sur les dispositions retenues par l’Assemblée nationale – efforts que nous saluons –, vise à étendre encore davantage les mesures de sûreté, en abaissant le quantum de peine ouvrant la possibilité de prononcer une mesure de surveillance de sûreté à l’issue d’une mesure de surveillance judiciaire.

Selon nous, le fait d’étendre le dispositif revient déjà à ouvrir la porte à d’autres mécanismes reposant sur le même principe, principe, je le répète, auquel nous nous opposons fermement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

L’article 4 vise effectivement à étendre le régime de la surveillance de sûreté, mais cette extension est bienvenue et remédie à un paradoxe justement dénoncé par le rapport Lamanda.

Je vais m’expliquer, mes chers collègues, tout en vous priant d’excuser de la technicité de mon argumentation : elle est inévitable.

Cet article, que les amendements présentés tendent à supprimer, vise à permettre l’application de la surveillance de sûreté à une personne placée sous surveillance judiciaire à laquelle toutes les réductions de peine ont été retirées.

En effet, une surveillance de sûreté ne pouvant être ordonnée que dans le prolongement d’une surveillance judiciaire, elle ne peut être décidée directement après la libération d’une personne incarcérée en raison de la révocation de l’intégralité des réductions de peine. En d’autres termes, si celles-ci ont toutes été retirées, la surveillance de sûreté ne peut intervenir dans le prolongement de la surveillance judiciaire, celle-ci étant devenue impossible.

Ainsi, paradoxalement, la surveillance de sûreté peut être ordonnée uniquement lorsque la surveillance judiciaire est menée à son terme sans incident et, partant, lorsque l’intéressé présente les meilleurs gages d’une possible réinsertion.

L’article 4 tend à corriger cette anomalie qui, vous l’avouerez, mes chers collègues, était particulièrement choquante.

Notre avis est donc défavorable sur ces deux amendements.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Notre avis est également défavorable puisque l’article 4 vise à tirer les conséquences du rapport Lamanda.

Le travail de M. Vincent Lamanda a été salué et, comme j’ai cru le comprendre, tout le monde s’est à peu près accordé sur un certain nombre de ses recommandations. Il serait tout de même paradoxal qu’on nous demande aujourd’hui de retirer des dispositions tirant les conséquences de ces recommandations.

C’est pourquoi je ne peux qu’être en désaccord avec la suppression de cet article 4.

Les amendements ne sont pas adoptés.

L'article 4 est adopté.

La loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique est ainsi modifiée :

1° L’intitulé de la troisième partie est complété par les mots : « et aux personnes placées en rétention de sûreté » ;

2° Après le deuxième alinéa de l’article 64-3, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le premier alinéa est également applicable aux missions d’assistance à une personne retenue dans un centre socio-médico-judiciaire de sûreté, s’agissant des décisions prises à son encontre pour assurer le bon ordre du centre. » –

Adopté.

Après le titre XX du livre IV du code de procédure pénale, il est inséré un titre XX bis ainsi rédigé :

« Titre XX bis

« Du répertoire des données à caractère personnel collectées dans le cadre des procédures judiciaires

« Art. 706 -56 -2. – Le répertoire des données à caractère personnel collectées dans le cadre des procédures judiciaires, tenu par le service du casier judiciaire sous l’autorité du ministre de la justice et placé sous le contrôle d’un magistrat, est destiné à faciliter et à fiabiliser la connaissance de la personnalité et l’évaluation de la dangerosité des personnes poursuivies ou condamnées pour l’une des infractions pour lesquelles le suivi socio-judiciaire est encouru, et à prévenir le renouvellement de ces infractions.

« Le répertoire centralise les expertises, examens et évaluations psychiatriques, médico-psychologiques, psychologiques et pluridisciplinaires des personnes mentionnées à l’alinéa précédent qui ont été réalisés :

« 1° Au cours de l’enquête ;

« 2° Au cours de l’instruction ;

« 3° A l’occasion du jugement ;

« 4° Au cours de l’exécution de la peine ;

« 5° Préalablement au prononcé ou durant le déroulement d’une mesure de surveillance ou de rétention de sûreté ;

« 6° En application des articles 706-136 ou 706-137 ;

« 7° Durant le déroulement d’une hospitalisation d’office ordonnée en application de l’article 706-135 du présent code ou de l’article L. 3213-7 du code de la santé publique.

« En cas de décision de classement sans suite, hormis les cas où cette décision est fondée sur le premier alinéa de l’article 122-1 du code pénal, de décision définitive de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement, les données concernant la personne poursuivie sont immédiatement effacées.

« Les informations contenues dans le répertoire sont directement accessibles, par l’intermédiaire d’un système de télécommunication sécurisée, aux seules autorités judicaires.

« Les membres de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté, les experts et les personnes chargées par l’autorité judiciaire ou l’administration pénitentiaire d’une évaluation pluridisciplinaire de dangerosité peuvent également être destinataires, par l’intermédiaire de l’autorité judiciaire et pour l’exercice de leurs missions, des informations contenues dans le répertoire.

« Les modalités et conditions de fonctionnement du répertoire sont déterminées par décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés.

« Ce décret précise les conditions dans lesquelles le répertoire conserve la trace des interrogations et consultations dont il a fait l’objet, ainsi que la durée de conservation des informations inscrites et les modalités de leur effacement. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

La commission des lois a largement récrit cet article, qui porte sur le répertoire des données à caractère personnel collectées dans le cadre des procédures judiciaires.

Si elle a clarifié la nature des données susceptibles d’être collectées et encadré l’accès à ce répertoire, en le réservant à l’autorité judiciaire, il demeure un problème de fond, qui agite d’ailleurs notre commission depuis plusieurs mois. Quel régime souhaitons-nous donner aux répertoires ou aux fichiers ? Quel contrôle le Parlement est-il en mesure d’exercer sur ceux-ci ? Comment s’assurer que ces outils sont compatibles avec le droit de toute personne au respect de sa vie privée ?

Nous sommes parvenus à un consensus : les fichiers doivent être créés par la loi. D’ailleurs, c’est la recommandation qui a été proposée par nos collègues Yves Détraigne et Anne-Marie Escoffier dans leur excellent rapport intitulé : « La vie privée à l’heure des mémoires numériques ».

Lorsque nous revendiquons le droit pour le Parlement d’exercer un contrôle sur ces fichiers ou sur ces répertoires, il ne s’agit pas seulement d’en autoriser le principe : il s’agit également d’en contrôler le contenu.

Dans notre rôle de protection des libertés individuelles, nous ne pouvons nous contenter de donner notre aval à la création de ces fichiers ou de ces répertoires sans contrôler leur contenu et leur compatibilité avec les principes relatifs au respect de la vie privée. Or c’est exactement ce qui nous est proposé avec l’article 5 bis : donner un blanc-seing à un répertoire, dont le contenu sera fixé par le pouvoir réglementaire !

Nulle part dans cet article ne sont précisées les modalités et conditions de fonctionnement de ce répertoire. Ces éléments sont, semble-t-il, renvoyés à un décret en Conseil d’État, avec un contrôle préalable de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL.

Je note la volonté de notre collègue Alex Türk de donner un peu plus de place à la CNIL dans ce processus, mais je crois que nous devons exiger beaucoup plus que cela. Nous devons prévoir dans la loi toutes les modalités, la durée de conservation, les modalités d’effacement, de même que nous devons y inscrire le droit, fondamental, d’accès et de rectification aux données enregistrées.

Si le Sénat, ou plus largement le Parlement, renonce à ces exigences, il renonce de fait à son rôle de protection des libertés fondamentales. Parce qu’il s’agit d’une garantie démocratique, nous ne le souhaitons pas !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Guy Fischer applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L'amendement n° 25 est présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 44 est présenté par MM. Anziani et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel et Badinter, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 71 rectifié est présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Plancade, Tropeano et Vall.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° 25.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

L’article 5 bis tend à créer un répertoire des données à caractère personnel collectées dans le cadre des procédures judiciaires.

Si le principe d’une telle base de données n’est pas choquant, cet article 5 bis pose tout de même des problèmes relativement sérieux.

D’abord, il faut être clair : c’est un énième fichier qui est créé !

Ce fichier porte sur des données sensibles – notamment de santé –, données à caractère personnel collectées à toutes les phases de procédures judiciaires antérieures, de l’enquête à l’exécution de la peine. Pourtant, l’avis de la CNIL n’a pas été sollicité.

Seraient inscrites dans ce fichier les personnes condamnées, mais aussi les personnes poursuivies, autrement dit présumées innocentes. S’il est compréhensible que des données recueillies dans une affaire en cours, sur une personne non encore condamnée, puissent faire l’objet d’une consultation par les magistrats et experts, l’inscription au fichier ne saurait être possible avant la condamnation.

Ce fichier a pour finalité une connaissance de la personnalité et de l’évaluation de la dangerosité de ces personnes, poursuivies ou condamnées pour une infraction pour laquelle elles peuvent encourir – je dis bien simplement encourir – un suivi socio-judiciaire. Vous avouerez, mes chers collègues, que ce champ est bien large...

Il en va de même du contenu du fichier ! Celui-ci comprend toutes les pièces des examens et évaluations psychiatriques, médico-psychologiques, psychologiques et pluridisciplinaires. Pourquoi ne pas se contenter de leur liste et de leurs conclusions ? Je note d’ailleurs que la commission des affaires sociales a instauré une limite à cette longue liste.

S’agissant des modalités, l’article 5 bis tend à renvoyer à un décret en Conseil d’État. Rien n’est dit de la durée de conservation. Quant à la « promesse » d’effacement en cas de classement sans suite, de décision de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement, on voit ce qu’il en est du casier judiciaire ou du système de traitement des infractions constatées, le fameux STIC.

Il est totalement illusoire de penser que les moyens actuels de la justice permettront de faire fonctionner ce nouveau fichier dans de bonnes conditions.

Le Comité des droits de l’homme des Nations unies, examinant la situation de la France en matière d’application du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, soulignait dans son rapport de juillet 2008 que la France devait veiller à ce que « la collecte et la conservation de données personnelles dans les ordinateurs, dans des banques de données et selon d’autres procédés, que ce soit par les autorités publiques, des particuliers ou des organismes privés, soient régies par la loi ». Nous en sommes loin !

Par ailleurs, quel droit d’accès pour les personnes concernées ? La commission des lois a réservé l’accès à ce fichier à l’autorité judiciaire. C’est bien le moins !

Enfin, une question : quel est le véritable intérêt de ce répertoire, sachant qu’une expertise se fait à un moment précis, que la situation de la personne concernée peut avoir évolué et nécessite en tout état de cause de nouvelles évaluations, sachant aussi combien la notion de dangerosité est peu fiable ?

Nous proposons donc, pour l’heure, la suppression de l’article 5 bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Alain Anziani, pour présenter l'amendement n° 44.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Ce matin, lors de la réunion de la commission des lois, le président de la CNIL a formulé des observations qui, toutes, nous ont paru pertinentes. Il rappelé avec bon sens qu’un fichier devait toujours être l’objet d’une grande attention et a précisé qu’il existait en France environ soixante-dix fichiers.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Soit. Est-il besoin d’en créer un cinquante-neuvième ? En l’état, ce cinquante-neuvième fichier serait-il entouré de toutes les garanties nécessaires ? Nous craignons que non.

Autre question : ce fichier est-il utile ? Nous disposons déjà d’un nombre considérable de fichiers. La justice elle-même dispose de systèmes informatiques, notamment CASSIOPEE, chaîne applicative supportant le système d’informations opérationnel pour le pénal et les enfants, même si cette application ne semble pas, aujourd’hui, rencontrer un succès fabuleux.

D’autres systèmes aujourd’hui existent en la matière ; la numérisation des pièces de procédure, par exemple, est en cours et l’on peut donc se demander si tout cela n’était pas suffisant.

Enfin, se pose la question du fonctionnement pratique du système ? Un fonctionnement correct suppose que les greffes disposent des moyens nécessaires. Or l’ensemble des organisations que nous avons entendues nous disent que ce n’est pas le cas. Elles ont calculé que, compte tenu des effectifs actuels, les greffes ne peuvent pas prendre en compte 35 000 dossiers de plus par an, qu’il leur faudrait ensuite transmettre pour permettre la mise en place de ce fichier. Ils ne se voient pas manipuler autant de dossiers, auxquels il faudrait peut-être aussi ajouter les 41 000 actes de violences conjugales qui ont été enregistrés en 2007.

Nous ne voyons donc pas la pertinence de ce fichier, qui, comme tout fichier, recèle par ailleurs des dangers, même si l’on essaie de les limiter. Il ne paraît pas utile dans la mesure où d’autres systèmes existent et, de surcroît, il ne pourra peut-être pas être mis en œuvre. La sagesse devrait donc nous inciter à renoncer à la création de ce qui n’est ni utile ni nécessaire !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l'amendement n° 71 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

J’en appelle tout simplement, par cet amendement de suppression, à l’esprit cartésien de notre rapporteur.

En effet, après avoir incité la commission à encadrer ce fichier qui sera réservé à la seule autorité judiciaire, il nous indique, ayant entendu les représentants des organisations de magistrats, que ceux-ci « se sont interrogés sur l’intérêt de ce répertoire ». Je lis le rapport de M. Lecerf : « Ils ont d’abord relevé que la connaissance des expertises antérieures n’éviterait pas de recourir à de nouvelles expertises requises en particulier par la loi pour toutes les infractions de nature sexuelle visées par l’article 706-47-1 du code de procédure pénale.

« En outre, selon la contribution de l'Union syndicale des magistrats, l’USM, avec l'implantation de CASSIOPEE – du moins lorsque cet outil sera opérationnel, car il ne l’est pas encore, comme l’a rappelé le président de la CNIL – “toute juridiction, tout enquêteur et même l'administration pénitentiaire au stade de l'exécution de la peine pourront, à l'échelon national, à moindre frais, être informés de l'ensemble des investigations ordonnées dans le cadre des procédures concernant la personne soupçonnée ou condamnée, à charge pour eux de solliciter la communication du rapport”. »

La conclusion de notre cartésien rapporteur est néanmoins : « les dispositions proposées devraient contribuer à limiter la déperdition des informations ».

Je suis extrêmement étonné par cette conclusion compte tenu des trois paragraphes qui la précèdent. Cela justifie amplement la suppression de cet article.

Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Le rapporteur craint que son cartésianisme n’ait à souffrir !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Le répertoire des données à caractère personnel collectées dans le cadre des procédures judiciaires, répertoire qui a été créé par les députés, centralise des expertises, examens et évaluations psychiatriques, médico-psychologiques, psychologiques et pluridisciplinaires des personnes poursuivies ou condamnées pour l’une des infractions pour lesquelles le suivi socio-judiciaire est encouru.

Le répertoire proposé devrait contribuer à limiter la déperdition des informations que beaucoup des experts psychiatriques que j’ai entendus ont constatée lorsque la même personne était poursuivie dans des procédures distinctes ou même lors des étapes successives d’une même procédure.

Notre commission a, en outre, et vous l’avez reconnu, apporté certaines clarifications et surtout proposé de réserver l’accès direct aux informations contenues dans le répertoire à la seule autorité judiciaire.

Les experts judiciaires et les personnes devant procéder à une évaluation de la dangerosité dans le cadre d’une procédure judiciaire n’accéderaient à ces informations que par l’intermédiaire des magistrats.

J’ai visité, voilà peu, la maison d’arrêt de Rouen : dans cet établissement, deux détenus ont été tués par leurs codétenus à un an d’intervalle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Si certains renseignements avaient pu être communiqués, ce drame aurait peut-être été évité. Je n’en suis pas sûr, mais c’est une possibilité.

Il existe des établissements pénitentiaires où le partenariat, l’échange d’informations opérationnelles se déroulent convenablement entre le corps médical et l’administration pénitentiaire. Dans d’autres établissements – et ces problèmes sont d’abord profondément humains –, cette transmission d’informations ne se fait absolument pas. Par conséquent, si ce répertoire peut éviter certains drames, il serait dommage de s’en priver.

L’avis de la commission est donc défavorable.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Tout d’abord, sur la forme, je souligne que, si le Conseil d’État et la CNIL n’ont pas été consultés sur la création de ce répertoire, c’est que celui-ci a été introduit par voie d’amendement. Mais la CNIL et le Conseil d’État seront bien entendu consultés dans le cadre du décret d’application qui est prévu par le texte. De toute façon, la CNIL n’est saisie que des décrets.

Ensuite, sur le fond, je précise que le répertoire a effectivement pour objet, comme vient de le dire le rapporteur, de faciliter l’évaluation de la personne par le juge. Cela permettra aussi de respecter le principe de la personnalité des peines et facilitera le suivi socio-judiciaire. À cet outil nouveau correspond donc bien une fonction tout à fait spécifique, et toutes les garanties nécessaires ont été apportées.

L’application CASSIOPEE, quant à elle, n’a rien à voir avec la chaîne pénale. L’utilisation de CASSIOPEE, que certaines préconisent, poserait par ailleurs un problème puisque, comme vous l’avez dit vous-même, ce système est accessible à un plus grand nombre de consultants et, dès lors, nous ne pourrions, comme nous le voulons, réserver l’information aux seuls juges.

Par conséquent, c’est au rejet de ces amendements que la rationalité doit conduire.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 45, présenté par MM. Anziani et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel et Badinter, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 4

Supprimer les mots :

poursuivies ou

II. - Alinéa 13

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Alain Anziani.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Je présenterai en même temps les amendements n° 45, 46 rectifié et 47.

Il s’agit d’amendements de repli puisque nous conservons le fichier. Ils visent à en préciser le contenu.

Dans l'amendement n° 45, nous proposons que ne figurent dans le fichier que les informations relatives aux personnes condamnées. Nous pourrions tous souscrire à cet amendement. Mais je vois bien l’argument qui va nous être opposé et qui consiste à dire : « Ne vous inquiétez pas ! Les personnes poursuivies seront fichées, mais dès qu’elles seront mises hors de cause, cela figure dans le texte, elles feront ensuite l’objet d’un effacement. »

Franchement, pouvez-vous nous donner aujourd’hui l’assurance que cet effacement sera automatique ? Cela nécessite des moyens matériels que l’administration n’aura peut-être pas. Nous connaissons d’autres cas dans lesquels l’effacement devait avoir lieu et n’est jamais intervenu.

C’est pourquoi il me semble beaucoup plus sage de réserver l’inscription dans ce fichier uniquement à des personnes condamnées, ce qui devrait d'ailleurs aller de soi.

Dans l'amendement n° 46 rectifié, nous demandons que soient exclues du répertoire créé par l’article 5 bis les personnes qui ont été dispensées de peine pour cause d’irresponsabilité pénale. En effet, si ces personnes ont été dispensées de peine pour irresponsabilité pénale, c’est qu’elles ont été reconnues comme malades. Dans ce cas, les données les concernant sont relatives à leur maladie et doivent figurer dans un dossier médical, non dans un dossier judiciaire. Là aussi, j’en appelle au cartésianisme évoqué tout à l’heure par M. Mézard.

Enfin, l'amendement n° 47 vise à exclure du fichier les personnes condamnées non inscrites au bulletin n° 2 du casier judiciaire. Toutes les personnes condamnées sont inscrites au bulletin n° 1, mais seulement certaines le sont au bulletin n° 2. C’est l’autorité judiciaire qui opère la distinction. Elle peut considérer que les personnes qui ont été condamnées à des peines légères pour des infractions mineures ne doivent pas être handicapées par leur passé judiciaire dans la recherche d’un emploi, notamment dans la fonction publique.

L’autorité judiciaire veut ainsi marquer qu’il y a un devoir d’oubli. Dès lors, pourquoi ce devoir d’oubli voulu par l’autorité judiciaire ne se traduirait-il pas ensuite sur le plan administratif ? Pourquoi devrait-on lui opposer un devoir de perpétuité s’agissant d’une infraction mineure. Cela peut concerner, par exemple, un jeune militant qui, un jour, lors d’une manifestation, commet une infraction mineure et sera finalement dispensé de peine : le voilà pourtant fiché dans le répertoire des personnes qui peuvent présenter une certaine dangerosité. Cela ne correspond pas à notre conception de la démocratie !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 46 rectifié, présenté par MM. Anziani et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel et Badinter, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. - Alinéas 11 et 12

Supprimer ces alinéas.

II. - Alinéa 13

Supprimer les mots :

hormis les cas où cette décision est fondée sur le premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal,

Cet amendement a déjà été défendu.

L'amendement n° 47, présenté par MM. Anziani et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel et Badinter, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 13

Après les mots :

de relaxe ou d'acquittement,

insérer les mots :

ou pour les condamnés non inscrits au bulletin n°2 du casier judiciaire

Cet amendement a également été défendu.

L'amendement n° 96, présenté par M. Türk, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 13

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« La conservation des données concernant les personnes poursuivies ou condamnées pour l'une des infractions pour lesquelles le suivi socio-judiciaire est encouru ne peut excéder une période de trente ans.

La parole est à M. Alex Türk.

Debut de section - PermalienPhoto de Alex Türk

L’objet de cet amendement est de prévoir une durée de conservation maximale des données, conformément à la règle d’or observée dans tous les pays de l’Union européenne, y compris en France. Il ne peut donc s’agir que d’un oubli, car on fixe toujours une limite à la conservation des données.

Ce qui est préoccupant dans cette affaire, c’est que, si nous ne le faisions pas, nous nous distinguerions de nos partenaires européens et nous rejoindrions les États-Unis, qui, précisément, s’opposent au principe européen en affirmant qu’il n’est pas nécessaire de fixer une telle limite.

J’ajoute que, dans la proposition de loi de M. Détraigne et Mme Escoffier, la préoccupation du droit à l’oubli est partout présente et que c’est également une priorité affichée par le secrétariat d’État chargé du développement l’économie numérique.

Je propose donc que l’on s’aligne sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, qui a considéré que, en vertu du principe de proportionnalité, une durée de trente ans était raisonnable. J’ai le sentiment qu’une telle durée ne devrait pas remettre en cause l’efficacité du fichier.

Cette durée doit incontestablement être fixée dans la loi elle-même, de manière à encadrer l’ensemble du dispositif. Cela est d’autant plus important que nous assistons aujourd'hui à une multiplication des fichiers. C’est une évidence que l’on ne peut nier. Si le pouvoir exécutif juge nécessaire de mettre en place ce fichier, il doit donc, en même temps, s’assurer qu’il est parfaitement encadré.

Il faudra également mettre en place les moyens d’assurer la maintenance, car il faut bien reconnaître que c’est souvent par là que pèche le traitement de données personnels dans notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

À propos de l'amendement n° 45, qui est un amendement de repli tendant à réserver le répertoire des données à caractère personnel aux seules personnes condamnées, la commission estime qu’il faut distinguer deux aspects : la consultation des données et la conservation des données.

La consultation des données est surtout – pour ne pas dire exclusivement – pertinente pour les personnes poursuivies. En effet, à quoi sert la consultation des données si la personne est déjà condamnée ?

S’agissant de la conservation des données, des dispositions précises sont prévues au treizième alinéa de l’article 5 bis afin de permettre l’effacement des données en cas de classement sans suite, de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement.

La commission est donc défavorable à cet amendement.

L'amendement n° 46 rectifié tend à supprimer la référence aux décisions d’irresponsabilité pénale lorsqu’elles sont assorties de mesures de sûreté. Les expertises réalisées dans ce cadre peuvent toutefois être utiles pour permettre une meilleure connaissance de la personnalité de l’intéressé, ce qui est le principal objet du répertoire.

C'est la raison pour laquelle la notion de droit à l’oubli ne peut pas être invoquée dans une hypothèse où le contenu du répertoire peut servir la personne concernée, par exemple un malade mental qui bénéficierait tout à fait naturellement de l’irresponsabilité. La commission est donc défavorable à cet amendement.

L’amendement n° 47 vise à écarter du répertoire les données concernant des personnes dont les condamnations ne figurent pas au bulletin n° 2 du casier judiciaire, c'est-à-dire celui qui est également accessible aux administrations. Cependant, le casier et le répertoire n’obéissent pas aux mêmes finalités : le premier doit permettre une meilleure connaissance du passé pénal de l’individu, tandis que le second vise à mieux cerner la personnalité de la personne poursuivie, ce qui, il ne faut pas l’oublier, peut aussi être utilisé pour sa défense. La commission souhaite donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

L’amendement n° 96 prévoit de fixer dans la loi la durée de conservation des données du répertoire. En la matière, le législateur a appliqué jusqu’à présent des règles différentes. Ainsi, les durées de conservation pour le fichier national des empreintes génétiques ont été renvoyées au décret. En revanche, celles visant le fichier des auteurs d’infractions sexuelles sont déterminées dans la partie législative du code de procédure pénale. Il est vrai que, dans ce cas, l’inscription au FIJAIS est source d’obligations pour la personne, ce qui n’est pas le cas d’une mention au répertoire prévu par l’article 5 bis.

Devant ces contradictions, la commission a décidé de s’en remettre à l’avis du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

En préambule, je voudrais préciser à M. Anziani un point qui me paraît essentiel : le répertoire des données personnelles ne vise pas toutes les infractions, mais seulement celles pour lesquelles un suivi socio-judiciaire est encouru, autrement dit les meurtres, les viols et les agressions sexuelles. Il n’est donc ni dans la logique du texte ni dans nos intentions d’inscrire dans ce répertoire les personnes ayant participé à des manifestations !

En ce qui concerne l’amendement n° 45, je précise que toutes les données relatives à des personnes ayant fait l’objet d’un classement sans suite, d’un non-lieu, d’une relaxe ou d’un acquittement seront bien entendu immédiatement effacées. Faut-il pour autant interdire l’inscription dans le répertoire des expertises et des analyses relatives à des personnes poursuivies et en attente de jugement ?

Prenons le cas d’une personne poursuivie dans différentes procédures pour faits de viols. Ne serait-il pas absurde qu’un magistrat instruisant l’une de ces affaires ne puisse avoir accès, par le biais de ce répertoire, aux expertises psychiatriques réalisées dans une autre procédure menée en parallèle ? C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a émis un avis défavorable sur cet amendement.

En ce qui concerne les amendements n° 46 rectifié et 47, auxquels le Gouvernement est défavorable, les explications de M. le rapporteur étaient parfaitement claires et je les reprends à mon compte.

En ce qui concerne l’amendement de M. Türk, je voudrais rappeler, à la suite de M. le rapporteur, que la durée de conservation des données enregistrées dans un fichier ne relève normalement pas du domaine de la loi. Comme les assemblées seront amenées à débattre d’ici peu de la procédure pénale, cette question sera réexaminée en tenant compte de la réalité et des droits ou obligations qui peuvent en résulter.

Bien légiférer implique de distinguer ce qui relève du domaine législatif de ce qui relève du domaine règlementaire ; sinon, nous serons confrontés à un envahissement législatif qui rendra la loi illisible.

De la même façon, le législateur n’a pas à se substituer à la CNIL, qui doit pouvoir, en la matière, jouer son rôle. J’entendais tout à l’heure des propositions qui tendaient à substituer le Sénat et l’Assemblée nationale à cette autorité ! Cela n’est pas une bonne chose, car chacun doit faire son travail.

Sur le fond, la durée de trente ans proposée ne me semble pas acceptable, car elle n’est pas cohérente avec la durée d’inscription au casier judiciaire des faits criminels, qui est de quarante ans.

Imaginons une personne condamnée à une peine de trente ans pour des faits de nature sexuelle, qui ont forcément été particulièrement graves. Si elle commet de nouveaux faits à sa sortie de prison, devons-nous nous priver d’un accès simple et rapide aux expertises qui avaient été réalisées avant et qui peuvent donner un éclairage sur la personnalité de l’intéressé ? De nouvelles expertises seront sans doute menées, mais les anciennes peuvent être utiles pour le juge.

C’est la raison pour laquelle je demanderai à M. Türk de bien vouloir retirer son amendement, d’autant que la CNIL sera saisie des dispositions relatives au fichier. Nous devrons examiner les cas que je viens d’évoquer, mais, je le répète, l’amendement ne me semble pas s’accorder avec le texte. À défaut d’un retrait, je serais obligée d’y être défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Alex Türk

J’accepte de retirer mon amendement, car il me semble difficile d’arriver à mes fins !

Je précise que la durée de trente ans que j’ai proposée fait référence à la jurisprudence de la CEDH. En vertu du principe de proportionnalité, qui est tout de même un principe cardinal en la matière, elle a considéré que cette durée était raisonnable pour le FIJAIS. Ma proposition n’est donc pas extravagante ! Il serait donc bon que, dans le cadre réglementaire, la durée soit aussi limitée que possible ; en tout cas, elle ne devrait pas atteindre quarante ans.

Certes, le droit à l’oubli ne peut être le même pour celui qui n’a rien à se reprocher et pour celui qui a commis des actes tels qu’il représente un danger pour la société. En revanche, il faut admettre qu’il est légitime si, au bout de trente ans, on n’a plus entendu parler de la personne. De toute manière, en cas de récidive à l’issue de la peine, le dossier sera entièrement revu et les expertises faites trente ans auparavant n’auront plus guère de valeur scientifique.

C'est la raison pour laquelle j’estime qu’il serait bon de reprendre dans la partie réglementaire ce délai raisonnable de trente ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 96 est retiré.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Nous examinerons très prochainement une proposition de loi de nos collègues Anne-Marie Escoffier et Yves Détraigne qui donnera l’occasion à M. Türk de déposer un amendement ou d’intervenir pour fixer une règle générale en la matière et ainsi éviter que les décisions ne soient prises au coup par coup.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Nous reprenons l’amendement, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Il s’agit donc de l'amendement n° 96 rectifié.

Vous avez la parole pour explication de vote, monsieur Anziani.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Nous sommes tout à fait favorables à la proposition d’Alex Türk, dont les propos devraient, mes chers collègues, tous vous convaincre. J’entends bien les arguments de M. le rapporteur, mais ce qui pourrait être bon demain l’est déjà aujourd'hui. Pourquoi attendre pour clarifier une situation inacceptable, alors que nous avons la possibilité de le faire dès ce soir ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 4, présenté par M. About, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Supprimer le mot :

, examens

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Chacun reconnaît l’intérêt du répertoire proposé, mais le terme trop vaste d’« examens » laisse planer une ambiguïté sur la nature des documents susceptibles d’y figurer. Mon amendement tend donc à le supprimer.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

La référence aux « examens » est sans doute excessivement large. Il semble suffisant de s’en tenir aux expertises ordonnées dans le cadre de la procédure pénale, ainsi qu’aux évaluations telles que celles qui peuvent être établies par exemple par le centre national d’observation.

La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Le terme « examens » revêt une signification très précise dans le code de procédure pénale. Les articles 60 et 77-1 précisent que le procureur ou les officiers de police judiciaire peuvent faire procéder à tout « examen » technique ou scientifique dans le cadre d’une enquête. Le code prévoit également que les juges d’instruction peuvent ordonner des « examens » médicaux ou psychologiques.

La suppression de ce terme, qui ne me semble pas recouvrir une notion trop large, risquerait d’empêcher, pour des raisons purement formelles, le versement au répertoire d’un certain nombre de données utiles. Sans être dirimante, elle serait dommageable pour la précision et l’exactitude de notre droit.

Je demande donc à M. About de bien vouloir retirer son amendement, même si je comprends tout à fait son point de vue. Il pourrait éventuellement être envisagé de préciser que le terme d’« examens » doit s’entendre au sens du code de procédure pénale.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Si l’on doit entendre le mot « examens » dans un sens large, il faut alors supprimer les autres termes, car il les englobe tous. Madame le garde des sceaux, vous avez indiqué que les examens couvraient notamment les évaluations et les expertises. Cela prouve que le terme « examens » doit être interprété dans son acception médicale.

Je maintiens donc mon amendement.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 72 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi, Baylet et Charasse, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Plancade, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 14

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les personnes visées par le présent répertoire disposent d'un droit d'accès aux informations les concernant, et de rectification de celles-ci, notamment lorsqu'une donnée nouvelle permet de modifier l'appréciation de leur situation et de leur dangerosité potentielle.

La parole est à M. Jacques Mézard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Le droit fondamental pour chacun d'accéder aux données à caractère personnel doit a fortiori être ouvert aux personnes contre lesquelles une mesure de sûreté peut être prononcée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Cet amendement rappelle un principe essentiel déjà posé par la loi informatique et libertés et qu’il ne semble donc pas indispensable de mentionner dans le présent projet de loi.

En conséquence, la commission a émis un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Cette précision sera inscrite dans le décret en Conseil d’État, pris après avis de la CNIL.

En conséquence, monsieur Mézard, je vous invite à retirer votre amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L’amendement n° 72 rectifié bis est retiré.

Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 66, présenté par M. Türk, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 16

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Les modalités et conditions de fonctionnement du répertoire sont déterminées par décret en Conseil d'État, pris après avis motivé et publié de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, en application des dispositions des articles 26 et 29 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée.

II. - Alinéa 17

Après le mot :

précise

insérer le mot :

également

La parole est à M. Alex Türk.

Debut de section - PermalienPhoto de Alex Türk

Ce matin, en commission, le rapporteur de la proposition de loi « Détraigne-Escoffier » m’a demandé si j’accepterais de le retirer, sous le bénéfice qu’il prendrait les initiatives nécessaires afin que l’avis de la CNIL soit publié. Si cette publication est une question de principe, j’admets bien volontiers que la proposition de loi serait un meilleur véhicule législatif.

Mme le ministre d’État a indiqué à l’instant qu’il n’était pas nécessaire de rappeler le droit de chaque personne à accéder à des données à caractère personnel la concernant, à en demander la rectification ou éventuellement l’effacement. Ces dispositions figurent en effet dans la loi de 1978, modifiée en 2004.

C’est pourquoi mon amendement se borne à indiquer qu’il faut se référer à l’article 26 de ladite loi, qui concerne la publication de l’avis motivé de la CNIL, et à l’article 29, qui a plus précisément trait au droit d’accès. Or ce dernier n’est pas visé dans le présent projet de loi. Il ne s’agit pas là d’une simple argutie juridique, il y a un vrai problème d’articulation.

Quoi qu’il en soit, je reconnais que cette question peut aisément être réglée dans le cadre du décret. Je vais donc retirer mon amendement, d’autant que le principe sera examiné dans le cadre de la proposition de loi qui doit venir prochainement en discussion.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L’amendement n° 66 est retiré.

Les amendements n° 48 et 74 rectifié sont identiques.

L'amendement n° 48 est présenté par MM. Anziani et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel et Badinter, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 74 rectifié est présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi, Baylet et Charasse, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Plancade et Tropeano.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 16

Compléter cet alinéa par les mots :

rendu public

La parole est à M. Charles Gautier, pour présenter l’amendement n° 48.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Gautier

L’article 5 bis, introduit par l’Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement, crée un répertoire des données à caractère personnel collectées dans le cadre des procédures judiciaires.

Il faut rappeler que les modalités de recueil et d’effacement des informations ainsi que les conditions du droit d’accès de la personne concernée ne figuraient pas dans le texte issu de l’Assemblée nationale et étaient renvoyées à un décret. Il s’agit pourtant de données sensibles concernant la santé ou les préférences sexuelles.

La commission des lois du Sénat a procédé à une nouvelle rédaction de cet article afin de la clarifier et de renforcer les garanties en matière de libertés publiques. Il est ainsi précisé que les données concernant les personnes ayant bénéficié d’une décision définitive de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement sont immédiatement effacées. En outre, les experts et les médecins ne pourront accéder aux données du répertoire qu’au travers de l’autorité judiciaire et non pas directement. Elle a également mieux encadré l’intervention du pouvoir réglementaire.

Nous regrettons toutefois que la commission n’ait pas retenu la préconisation de notre collègue Alex Türk, par ailleurs président de la CNIL, qui proposait que l’avis de cette dernière, qui doit précéder le décret en Conseil d’État, soit rendu public.

Tel est l’objet de notre amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l'amendement n° 74 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Je fais miennes les observations de M. Gautier.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Ces amendements visent à préciser que l’avis de la CNIL doit être motivé et rendu public.

Le principe de la publicité des avis de la CNIL fait l’objet d’une proposition de loi qui a été déposée par M. Türk, ce qui explique notamment pourquoi il a retiré son amendement. Il n’est donc peut-être pas souhaitable d’anticiper ce débat au détour d’amendements qui réserveraient la publicité de l’avis à un cas précis.

Cela étant, la commission souhaite entendre le Gouvernement sur ce point.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

L’article 26 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés dispose déjà que l’avis de la CNIL doit être publié. Il est inutile d’inscrire que la loi doit être respectée : c’est une évidence !

Ces deux amendements sont donc sans objet. C’est pourquoi le Gouvernement en demande le retrait. À défaut, il émettra un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Nous voterons ces amendements.

Oui, la loi de 1978 prévoit que les avis de la CNIL doivent être publiés chaque année dans un rapport écrit. Mais celui-ci paraît parfois un an, voire plus, après que la CNIL a remis ses avis.

Nous, nous demandons que l’avis devienne public le jour même où il est rendu, ce qui change tout !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Alex Türk, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Alex Türk

M. Alex Türk. Pour répondre à M. Michel, je vais être conduit à prendre la défense du Gouvernement.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Alex Türk

Lorsque Mme le ministre d’État évoque la publication, elle parle du décret spécifique et non du rapport.

Mme la ministre d’État opine.

Debut de section - PermalienPhoto de Alex Türk

Vous avez mille fois raisons, madame le garde des sceaux, l’article 26 vise la publication et la motivation. C’est précisément pourquoi je suis intervenu. J’aurais souhaité en effet que le présent texte fasse référence à cet article afin de bien montrer que l’on est dans son champ d’application.

Si j’ai retiré mon amendement, notamment à la suite de la demande qui m’a été faite ce matin en commission, c’est parce que je sais que cette question sera abordée dans le cadre de la proposition de loi.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 67 rectifié, présenté par MM. Amoudry, Détraigne et Maurey et Mmes Férat et Morin-Desailly, est ainsi libellé :

Alinéa 17

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Les données concernant les mineurs font l'objet d'une durée de conservation spécifique, inférieure à celle applicable aux majeurs.

La parole est à M. Jean-Paul Amoudry.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Amoudry

Cet amendement vise à inscrire dans la loi le principe d’une durée de conservation spécifique pour les données relatives aux mineurs, inférieure à celle prévue pour les majeurs.

Cette mesure s’inspire directement de l’article 29 bis de la proposition de loi de simplification et d’amélioration de la qualité du droit déposée par M. Warsmann, député, et qui a pour objet de modifier l’article 26 de la loi du 6 janvier 1978 afin de préciser que, s’agissant des fichiers liés à la prévention des atteintes à la sécurité publique ou destinés à la réalisation des enquêtes administratives liées à la sécurité publique, les durées de conservation des données relatives aux mineurs doivent être inférieures à celles applicables aux majeurs, sauf à ce que leur enregistrement ait été exclusivement dicté par l’intérêt du mineur.

La distinction entre les données relatives aux majeurs et aux mineurs résulte du principe de proportionnalité, instauré par la loi du 6 janvier 1978. La CNIL, chargée de veiller au respect et à l’application de cette loi, considère que le recueil d’informations relatives aux mineurs doit avoir un caractère exceptionnel et une durée de conservation spécifique.

En référence à ces principes, le projet de décret en Conseil d’État portant création d’un traitement de données à caractère personnel relatif à la prévention des atteintes à la sécurité publique prévoit des durées de conservation plus courtes pour les mineurs.

Si la proposition de loi de M. Warsmann ne concerne que les fichiers de prévention des atteintes à la sécurité publique et non les fichiers de police judiciaire, il convient néanmoins de rappeler que le cadre réglementaire de certains fichiers de police judiciaire prévoit une différence de durée de conservation. Ainsi, le décret relatif au STIC, le système de traitement des infractions constatées, prévoit que les données seront conservées pendant vingt ans pour les majeurs et cinq ans pour les mineurs.

Enfin, il convient de rappeler que les articles 3-1 et 40 de la Convention internationale des droits de l’enfant disposent que l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale dans toutes les décisions des autorités administratives ou des organes législatifs, et reconnaissent à tout enfant convaincu d’infraction à la loi pénale le droit à un traitement qui tienne compte de son âge ainsi que de la nécessité de faciliter sa réintégration dans la société.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Sur le fond, la détermination d’une durée de conservation spécifique pour les mineurs répond à une préoccupation légitime. Faut-il pour autant en poser le principe dans la loi ? La question mérite d’être posée. Sur ce point, la commission souhaite solliciter l’avis du Gouvernement.

Sur la forme, un problème se pose. En effet, aux termes de l’amendement n° 96 rectifié, qui vient d’être adopté, la conservation des données concernant les personnes poursuivies ou condamnées pour l’une des infractions pour lesquelles le suivi socio-judiciaire est encouru ne peut excéder une période de trente ans.

Notre collègue Amoudry devrait donc insérer un alinéa ainsi rédigé : « Pour les mineurs, cette durée de conservation ne peut excéder vingt ans » – je dis vingt ans, mais ce pourrait être une autre durée de même ordre. Sans une telle rectification, son amendement ne serait plus cohérent.

Quoi qu’il en soit, nous attendons du Gouvernement une première réponse sur le fond.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Sur le fond, je rappelle que les fichiers judiciaires ne prévoient pas une durée de conservation moindre pour les mineurs. De même, les condamnations en matière correctionnelle ou criminelle prononcées à l’encontre d’un mineur demeurent au casier judiciaire aussi longtemps que les condamnations prononcées contre un majeur.

Il ne s’agit pas des données relevant de la loi du 2 décembre 2009. Ici, nous sommes sur des faits d’une particulière gravité et pour lesquels, je le répète, il n’y a pas de distinction de la durée dans le cadre du casier judiciaire. Il y a donc une certaine logique à ce qu’il n’y ait pas non plus de distinction quand il s’agit d’un répertoire de données qui permettent à un juge – et uniquement à un juge, je le rappelle – de porter une appréciation sur la personnalité.

Sur la forme, il me paraît que cette précision relève davantage du décret que de la loi.

Pour ces deux raisons, le Gouvernement souhaite le retrait de cet amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Jean-Paul Amoudry, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Amoudry

Je souhaiterais donner mon avis sur la proposition de M. le rapporteur visant à ramener à vingt ans la durée de conservation spécifique aux mineurs. Pourquoi pas quinze ans ? Pourquoi pas vingt-cinq ans ? Décider de cette durée de manière quelque peu hâtive me semble hasardeux.

J’accéderai à la demande de retrait de Mme le ministre d’État si elle veut bien nous assurer que, dans les décrets à venir, le principe d’une durée plus courte que pour les majeurs sera acquis.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Non, je ne peux pas vous donner satisfaction en la matière.

Nous sommes bien obligés de faire un certain parallèle avec le casier judiciaire. Or la législation concernant le casier judiciaire n’opère pas de distinction dans la durée d’inscription des condamnations criminelles. N’oubliez pas que le casier judiciaire sera plus largement ouvert que le répertoire.

Je veux bien que nous réfléchissions à ce problème : nous en aurons le temps au moment de la préparation du décret, et je suis tout à fait prête à en discuter avec vous.

Les dispositions que nous examinons concernent des personnes qui ont commis des actes particulièrement graves ; il s’agit de cas exceptionnels. Le fichier n’est pas destiné à les stigmatiser, mais à permettre à un juge, et uniquement à un juge, de porter un regard éclairé dans le cas où interviendraient d’autres événements de même nature.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Je prie mon collègue M. Amoudry de m’excuser de lui donner un problème complexe à résoudre sur l’heure, en lui demandant de fixer une durée de conservation des données concernant les mineurs au cas où il ne retirerait pas son amendement.

Si ce n’était pas fait, nous nous retrouverions avec un texte incohérent puisque nous aurions fixé dans la loi la durée de conservation pour les majeurs tout en renvoyant aux décrets la durée de conservation pour les mineurs : ce serait quand même un peu surréaliste !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Amoudry

Mme la ministre d’État a fait référence aux règles qui régissent le casier judiciaire. Or je dois rappeler que le raisonnement que je me suis permis de développer repose sur deux références législatives : le principe de proportionnalité, issu de la loi de 1978, et la convention internationale des droits de l’enfant, laquelle fait état d’infractions à la loi pénale dont des mineurs peuvent s’être rendus coupables et pose le principe de la facilitation de leur réintégration dans la société.

Madame le ministre d’État, dans la hiérarchie des normes, la loi en vigueur sur le casier judiciaire l’emporte-t-elle sur les deux autres références législatives que je viens de citer ?

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Je vous rappelle qu’il s’agit ici des délits sexuels et que l’objectif, en la matière, n’est pas de poser un problème aux jeunes ou de les empêcher de se réinsérer. L’objectif est simplement de permettre à un magistrat, confronté à une nouvelle action, d’avoir accès à des données existantes propres à l’éclairer.

Je le répète, ces données ne seront pas diffusées à l’extérieur ! Il ne s’agit pas ici de mettre en cause la protection des mineurs, ou plutôt des « anciens mineurs », car ils ne le sont évidemment plus au bout de vingt ou trente ans. Il s’agit simplement d’aider un magistrat éventuellement amené à choisir entre plusieurs décisions de pouvoir le faire en étant totalement éclairé, et cela éventuellement dans l’intérêt de l’intéressé

Il faut aussi s’en remettre avec confiance au juge qui, en possession de données, saura mesurer si elles peuvent l’éclairer ou non dans sa décision. Voilà comment je vois les choses.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Amoudry

Au vu des explications de Mme la ministre, je retire mon amendement. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 67 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l'article 5 bis, modifié.

L'article 5 bis est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Chapitre Ier bis

Dispositions relatives à l’injonction de soins et à la surveillance judiciaire

I. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l’article 706-47-1 est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« Les personnes condamnées pour l’une des infractions mentionnées à l’article 706-47 peuvent être soumises à une injonction de soins prononcée soit lors de leur condamnation, dans le cadre d’un suivi socio-judiciaire, conformément aux dispositions de l’article 131-36-4 du code pénal, soit postérieurement à celle-ci, dans le cadre de ce suivi, d’une libération conditionnelle, d’une surveillance judiciaire ou d’une surveillance de sûreté, conformément aux dispositions des articles 706-53-19, 723-30, 723-37, 731-1, 763-3 et 763-8 du présent code, dans les cas et conditions prévus par ces articles.

« L’injonction de soins peut également comprendre un traitement anti-hormonal prescrit par le médecin traitant conformément aux dispositions de l’article L. 3711-3 du code de la santé publique.

« Les personnes poursuivies pour l’une des infractions mentionnées à l’article 706-47 du présent code doivent être soumises, avant tout jugement au fond, à une expertise médicale. L’expert est interrogé sur l’opportunité d’une injonction de soins. » ;

2° L’article 706-53-19 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Constitue une méconnaissance par la personne sous surveillance de sûreté des obligations qui lui sont imposées susceptible de justifier son placement en rétention de sûreté, dans les conditions prévues par le troisième alinéa, le fait pour celle-ci de refuser de commencer ou de poursuivre le traitement prévu par le dernier alinéa de l’article L. 3711-3 du code de la santé publique et qui lui a été proposé dans le cadre d’une injonction de soins. » ;

3° L’article 712-21 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Constitue pour le condamné une violation des obligations qui lui incombent, pouvant donner lieu, selon les cas, à la délivrance des mandats prévus par l’article 712-17, à la suspension de la mesure d’aménagement prévue par l’article 712-18, à l’incarcération provisoire prévue par l’article 712-19, ou au retrait ou à la révocation de la mesure prévue par l’article 712-20, le fait de refuser de commencer ou de poursuivre le traitement prévu par le dernier alinéa de l’article L. 3711-3 du code de la santé publique et qui lui a été proposé dans le cadre d’une injonction de soins. » ;

4° Le quatrième alinéa de l’article 717-1 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ce traitement peut être celui prévu par le dernier alinéa de l’article L. 3711-3 du code de la santé publique. » ;

Supprimé

Supprimé

7° L’article 723-29 est ainsi modifié :

a) Le mot : « dix » est remplacé par le mot : « sept » ;

b) Les mots : « ou aux réductions » sont remplacés par les mots : « et aux réductions » ;

8° Après l’article 723-31, il est inséré un article 723-31-1 ainsi rédigé :

« Art. 723 -31 -1. – La situation de tous les condamnés susceptibles de faire l’objet d’une surveillance judiciaire conformément à l’article 723-29 doit être examinée avant la date prévue pour leur libération.

« Le juge de l’application des peines ou le procureur de la République peut, à cette fin, demander le placement du condamné, pour une durée comprise entre deux et six semaines, dans un service spécialisé chargé de l’observation des personnes détenues aux fins d’une évaluation pluridisciplinaire de dangerosité et saisir la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté.

« Le juge de l’application des peines ou le procureur de la République peut également ordonner que l’expertise prévue par l’article 723-31 soit réalisée par deux experts. » ;

Supprimé

10° L’article 723-35 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« La décision prévue au premier alinéa peut également être prise, après avis du juge de l’application des peines, par la juridiction de jugement en cas de condamnation de la personne placée sous surveillance judiciaire pour un crime ou un délit pour lequel le suivi socio-judiciaire est encouru.

« Constitue pour le condamné une violation des obligations qui lui ont été imposées le fait de refuser de commencer ou de poursuivre le traitement prévu par le dernier alinéa de l’article L. 3711-3 du code de la santé publique et qui lui a été proposé dans le cadre d’une injonction de soins. » ;

11°

Supprimé

12° La dernière phrase du dixième alinéa de l’article 729 est ainsi rédigée :

« La personne condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité ne peut bénéficier d’une libération conditionnelle qu’après avis de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté, rendu à la suite d’une évaluation pluridisciplinaire de dangerosité réalisée dans un service spécialisé chargé de l’observation des personnes détenues et assortie d’une expertise médicale ; s’il s’agit d’un crime pour lequel le suivi socio-judiciaire est encouru, cette expertise est réalisée par deux experts et se prononce sur l’opportunité, dans le cadre d’une injonction de soins, du recours à un traitement utilisant des médicaments qui entraînent une diminution de la libido, mentionné à l’article L. 3711-3 du code de la santé publique. » ;

13° Après l’article 732, il est inséré un article 732-1 ainsi rédigé :

« Art. 732 -1. – Lorsque la personne a été condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité pour l’un des crimes visés à l’article 706-53-13, et qu’elle a fait l’objet d’une libération conditionnelle avec injonction de soins, la juridiction régionale de la rétention de sûreté peut, selon les modalités prévues par l’article 706-53-15, décider de prolonger tout ou partie des obligations auxquelles est astreinte la personne, au-delà de la période de libération conditionnelle, en la plaçant sous surveillance de sûreté avec injonction de soins pour une durée de deux ans.

« Le placement sous surveillance de sûreté ne peut être ordonné qu’après expertise médicale constatant que le maintien d’une injonction de soins est indispensable pour prévenir la récidive.

« Les deuxième à cinquième alinéas de l’article 723-37 sont applicables, ainsi que l’article 723-38. » ;

14° Après l’article 723-38, il est inséré un article 723-38-1 ainsi rédigé :

« Art. 723-38-1. – La surveillance judiciaire est suspendue par toute détention intervenant au cours de son exécution et ne découlant pas d’un retrait de tout ou partie de la durée des réductions de peine décidé en application de l’article 723-35, et elle reprend, pour la durée restant à courir, à l’issue de cette suspension. » ;

15° Après le premier alinéa de l’article 733, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Constitue pour le condamné une violation des obligations qui lui ont été imposées le fait de refuser de commencer ou de poursuivre le traitement prévu par le dernier alinéa de l’article L. 3711-3 du code de la santé publique et qui lui a été proposé dans le cadre d’une injonction de soins, conformément à l’article 731-1 du présent code. » ;

16° Après le deuxième alinéa de l’article 763-5, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Constitue pour le condamné une violation des obligations qui lui ont été imposées le fait de refuser de commencer ou de poursuivre le traitement prévu par le dernier alinéa de l’article L. 3711-3 du code de la santé publique et qui lui a été proposé dans le cadre d’une injonction de soins. » ;

17° Le dernier alinéa de l’article 763-6 est ainsi rédigé :

« Après avis du procureur de la République, le juge de l’application des peines peut, après audition du condamné et avis du médecin coordonnateur, décider par ordonnance motivée de mettre fin de manière anticipée au suivi socio-judiciaire comportant une injonction de soins, sans qu’il soit nécessaire de saisir la juridiction de jugement, dès lors qu’il apparaît que le reclassement du condamné est acquis et qu’un traitement n’est plus nécessaire. » ;

18° La deuxième phrase du deuxième alinéa de l’article 763-7 est ainsi rédigée :

« Si elle ne consent pas à suivre un traitement, cette information est renouvelée au moins une fois tous les ans.

19° L’article 763-8 est ainsi modifié :

a)

Supprimé

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Le présent article est applicable y compris si la personne placée sous suivi socio-judiciaire avait fait l’objet d’une libération conditionnelle. » ;

20° Au deuxième alinéa de l’article 786, le mot : « troisième » est remplacé par le mot : « quatrième ».

II. – Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l’article L. 3711-1, les références : « les articles 131-36-4 et 132-45-1 » sont remplacées par la référence : « l’article 131-36-4 » ;

Supprimé

III. –

Non modifié

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Avec cet article 5 ter, vous entendez aller encore un peu plus loin dans ce que de nombreux professionnels de la santé, notamment les psychiatres, appellent « l’instrumentalisation de la médecine ». Ce risque a d’ailleurs déjà été pointé par notre collègue M. About dans le rapport pour avis qu’il a remis au nom de la commission des affaires sociales.

Avec cette injonction de soins, vous êtes parvenus fort habilement à contourner les obstacles législatifs qui vous faisaient face. Vous n’imposez aucun soin aux personnes condamnées, vous les laissez libres de les accepter ou de les refuser. Sauf que leur refus pourrait avoir pour conséquence le placement en rétention de sûreté. Aussi le condamné est-il « libre » d’accepter, ou d’être placé en rétention de sûreté…

Si cette disposition vous permet de satisfaire aux engagements fondamentaux de la France, et d’éviter notamment une sanction de la Cour européenne des droits de l’homme, elle pose tout de même la question de l’efficacité de cette politique. En effet, comme tous les experts le disent, spécialement en prison, un véritable lien de confiance est nécessaire entre le soignant et le soigné.

La rédaction actuelle de l’article L. 131-36-4 du code pénal, comme celle de cet article 5 ter nous semblent créer une ambiguïté entre les missions des magistrats, des soignants et des gardiens. II suffit pour s’en convaincre de lire le quatrième alinéa de cet article et de s’apercevoir que le magistrat est devenu, de fait, un prescripteur de soins.

En réalité, sous couvert de cette approche thérapeutique, le chantage que je viens de dénoncer vise encore une fois à limiter les risques sociaux. Le recours à la rétention de sûreté en est le parfait exemple. Ce faisant, vous accentuez ce qui constitue pour nous l’une des faiblesses de notre système pénal, à savoir la prédominance, pour ne pas dire l’exclusivité, qui est donnée à sa mission de protection de la société, en refusant de donner à la réinsertion et au traitement médical des personnes condamnées la place que ces deux missions devraient avoir dans un système équilibré.

Dans notre groupe, nous sommes convaincus qu’il faut nécessairement agir sur ces deux domaines que sont la réinsertion et l’accompagnement médical et psychologique pour réduire le risque de récidive. Telle n’est pas votre conception, et l’action thérapeutique que vous proposez sert plus à justifier une accentuation des contrôles et des sanctions.

L’accompagnement des personnes condamnées, notamment pour des violences sexuelles, exige que nous inventions, loin des logiques d’affichage, un accueil et un accompagnement médical et psychologique de qualité.

C’est pourquoi nous saluons le rapport remis par M. About. Nous partageons sa conviction de la nécessité de tout mettre en œuvre pour permettre une meilleure prise en charge de la souffrance et de la maladie mentale. Je voudrais rappeler à ce titre que, par deux fois, le manque d’encadrement médical et les conditions d’incarcération des détenus psychiques ont été qualifiés par la Cour européenne des droits de l’homme de « traitements inhumains et dégradants ».

L’article 5 ter n’entraîne en rien une amélioration de l’offre de soins en milieu carcéral. Il n’est que la consécration d’une réponse unique, le traitement inhibiteur de libido, à toutes les personnes visées dans ce projet de loi. Nous y reviendrons par la suite, dans la discussion des amendements que nous présenterons.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Jean-Pierre Michel, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Monsieur le président, je sollicite de votre indulgence l’autorisation de revenir quelques instants sur l’amendement précédent qui a été retiré par M. Amoudry, amendement que nous aurions pu reprendre si nous en avions eu le temps !

En effet, madame le garde des sceaux, il existe tout de même un droit des mineurs qui comporte des dispositions particulières, notamment sur le casier judiciaire. L’article 770 du code de procédure pénale dispose que, à la demande du mineur ou du procureur de la République, le tribunal pour enfants peut, si le mineur devenu majeur a réussi sa réinsertion, enlever du casier judiciaire toute décision – y compris, je le suppose, un arrêt criminel – qui y figurerait.

Les arguments que vous avez employés pour convaincre M. Amoudry ne sont donc pas tout à fait exacts ; je tenais à le dire.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 49 est présenté par MM. Anziani et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel et Badinter, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 75 rectifié est présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Plancade et Tropeano.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

L’article 5 ter vise à généraliser les traitements diminuant la libido, couramment appelés « castration chimique », dans le cadre des injonctions de soins.

Madame la ministre, j’ai le regret de vous dire que c’est vous-même, lors d’une interview au sujet de l’affaire de Mme Marie-Christine Hodeau à Milly-la-Forêt, qui avez nommé ce traitement « castration chimique ». Je ne fais donc que reprendre cette expression, que je trouve fort malheureuse.

Concernant ce traitement chimique, je souhaiterais vous lire une déclaration du docteur Zaguri, qui est chef de service au centre psychiatrique du bois de Bondy et expert psychiatre près la cour d’appel de Paris, qui nous donne beaucoup d’explications. Je le cite :

« Dans l’immense majorité des cas, les délinquants sexuels ne sont pas des malades mentaux. Ils ne relèvent pas d’un traitement psychiatrique. Un traitement prescrit sans leur consentement n’est d’aucune utilité. Il faut expliquer à l’opinion publique que des crimes que l’on dit “sexuels” ne concernent pas la sexualité, ou fort peu.

« En effet, les observations cliniques répétées et les études à grande échelle, comme celles qui ont été réalisées sur tous les criminels sexuels au Québec, montrent que la plupart de ces actes n’ont rien à voir avec le sadisme sexuel. Les viols ne sont pas commis par des hommes sexuellement frustrés, mais par des sujets qui s’emparent de la sexualité comme d’une arme, pour exprimer leur destructivité, leur emprise et leur domination. »

« Autrement dit, l’idée communément partagée qu’il suffirait de tarir les pulsions sexuelles à la source par la castration chimique, voire par la castration physique – débat qui vient d’être relancé – est une lourde erreur dans l’immense majorité des cas. »

Donc, de l’avis même de ces experts, la solution que vous aviez proposée à ce moment-là n’est pas la panacée.

Par ailleurs, ce traitement est inégalement toléré par les patients. Il agit différemment sur les individus et peut même entraîner de nombreux effets secondaires.

Autre difficulté, et non des moindres : ce traitement, qui s’inscrit dans la durée, a un coût indéniable. Certains condamnés, parmi les plus démunis, ne pourront pas payer ces soins, au risque de voir leur sort aggravé. Ou alors, ils devront faire un choix entre les soins et l’indemnisation de la victime. La solution serait le remboursement du traitement par la sécurité sociale, comme c’est le cas en Belgique depuis 2009. Mais aucune étude d’impact n’a été réalisée sur ce point.

Enfin, de nombreux médecins considèrent que les traitements administrés dans le cadre d’une obligation de soins sont inefficaces en ce que le patient n’adhère pas à la thérapie.

Pour toutes ces raisons, nous proposons la suppression de cet article, qui nous paraît de surcroît inutile au regard du droit existant, puisqu’il est déjà tout à fait possible d’administrer ce type de traitement dans le cadre d’une injonction de soins, et que cela se pratique déjà.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 75 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Plancade et Tropeano, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jacques Mézard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Cet amendement tend lui aussi à supprimer l’article 5 ter. Je rappelle que cet article ne figurait pas dans le projet de loi initial et qu’il a été introduit dans le texte par l’Assemblée nationale. Comme l’a relevé M. le rapporteur, il prévoit d’ajouter trois articles au code de procédure pénale et d’en modifier dix-sept autres. En outre, il modifie deux articles du code de la santé publique et un article du code pénal. Il s’agit donc non pas de modifications mineures, mais de changements extrêmement importants.

Cet article comporte deux éléments fondamentaux. D’une part, il prévoit que, lorsqu’une injonction de soins est prononcée, elle « peut comporter un traitement utilisant des médicaments qui entraînent une diminution de la libido ». D’autre part, il prévoit que le fait pour la personne sous surveillance de sûreté de refuser de commencer ou de poursuivre le traitement prévu constitue une méconnaissance des obligations qui lui sont imposées susceptible de justifier son placement automatique en rétention de sûreté. Comme nous l’avons déjà dit lors de la discussion générale, cette disposition tend à banaliser la rétention de sûreté et vise, il faut bien le dire, à contourner la décision du Conseil constitutionnel.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous souhaitons la suppression de l’article 5 ter.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

La commission estime que le traitement antihormonal, ou traitement inhibiteur de libido, ne mérite ni l’excès d’honneur …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

… ni l’indignité dont il est l’objet de la part de certains.

Les médecins que nous avons auditionnés sont tous d’accord sur le fait que ce traitement est non pas une sanction, mais un véritable soin. Le docteur Bernard Cordier par exemple considère qu’il apporte un soulagement effectif et rapide à des patients confrontés à des conflits intérieurs très violents. Ce traitement peut donc être utile dans certains cas, pour certains types de délinquants sexuels, à condition toutefois d’être prescrit pour une durée limitée. Il ne peut en effet pas être suivi pendant des années, car il entraîne alors des effets secondaires particulièrement lourds. Il n’en demeure pas moins que ce traitement a une utilité indiscutable dans un certain nombre de cas.

Par ailleurs, je tiens à rassurer notre collègue Jacques Mézard : il n’y a strictement aucun risque d’automaticité de la sanction. D’ailleurs, même si nos collègues députés ont présumé ce risque, ce dont je ne suis pas du tout sûr, la commission des lois du Sénat a pris des précautions afin que le placement en rétention de sûreté ou l’incarcération ne soient possibles que si un ensemble de conditions sont réunies. Il faudrait par exemple qu’il n’y ait aucun autre moyen d’éviter la récidive et que la surveillance de sûreté et l’inscription au fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ne soient pas suffisantes.

Je le répète : la sanction ne sera pas automatique et ce type de traitement est indiscutablement utile, au moins dans un certain nombre de cas.

Telles sont les raisons pour lesquelles la commission des lois émet un avis défavorable sur ces deux amendements.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Le Gouvernement partage l’avis de la commission.

Permettez-moi de revenir sur le dernier point évoqué par M. le rapporteur. Le projet de loi ne prévoit pas de sanction automatique en cas d’arrêt d’un traitement inhibiteur de libido. Certes, il prévoit de manière explicite que l’arrêt du traitement peut justifier, selon les cas de figure, soit une mesure de rétention de sûreté, soit la délivrance d’un mandat, soit une incarcération, soit la suspension d’une mesure d’aménagement, mais, dans tous les cas, l’opportunité de la sanction relève toujours de l’appréciation du juge, ce qui est primordial.

On ne peut pas, d’un côté, vouloir faire totalement confiance au juge et, de l’autre, refuser de lui laisser la possibilité d’adapter une sanction éventuelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

La méfiance que suscite l’article 5 ter tient à l’importance du débat auquel il a donné lieu à l’Assemblée nationale et à la façon dont s’y est nouée la discussion.

Une idée principale est ressortie de ce débat, puis a ensuite été très médiatisée.

Certes, madame le ministre d’État, vous me direz que vous ne travaillez pas pour les médias, mais vous ne pouvez pas les empêcher de s’exprimer. Même s’il est vrai que, en général, les médias amplifient certains aspects, il n’en demeure pas moins qu’ils s’emparent des traits saillants d’une politique, en la circonstance de la politique pénale. Peut-être ce débat date-t-il un peu désormais, mais, en tant que législateur, nous sommes obligés d’en tenir compte.

Même si M. le rapporteur et la commission des lois ont déposé un certain nombre d’amendements visant à revenir à des dispositions moins extravagantes que celles qui ont été adoptées à l’Assemblée nationale, il n’en demeure pas moins que l’injonction de soins et la « castration chimique » sont apparues comme étant les mesures phares du projet de loi. Si j’emploie l’expression « castration chimique », même si elle est inappropriée, c’est parce qu’elle a été largement utilisée sur les bancs de l’Assemblée nationale, puis reprise à satiété. Cette « castration » a été présentée comme étant la solution miracle, donnant lieu immédiatement, en cas de non respect de l’obligation de soins, à un placement en rétention de sûreté.

Mes chers collègues, nous sommes responsables vis-à-vis de nos concitoyens de ce que nous disons et de ce que nous faisons. Il faut donc cesser de simplifier les problèmes à l’extrême et de faire croire à nos concitoyens, d’une part, qu’il existe des solutions miracles et, d’autre part, que, si les condamnés les refusent, ils n’ont qu’une issue possible : l’enfermement à vie.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je suis saisi de quatorze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 26, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéas 1 à 11, 24, 26, 27 et 34 à 37

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Guy Fischer.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Il s’agit d’un amendement de repli visant à supprimer la totalité des alinéas de l’article 5 ter relatifs au traitement antihormonal.

Avant tout il aurait été opportun de réaliser une étude sur les effets du traitement antihormonal, plus couramment et improprement appelé « castration chimique ». Tel était d’ailleurs le sens de l’un des amendements que nous avions déposés en commission des lois. Avant de généraliser la mise en œuvre de ce traitement, il conviendrait en effet de connaître sa capacité réelle à traiter les problèmes de ceux qui commettent des infractions sexuelles. Le fait que les experts ne soient pas unanimes sur ce sujet devrait nous inciter à la plus grande prudence, notamment sur la possibilité de suivre un tel traitement en prison.

Nous devons légiférer en toute connaissance de cause et ne pas ignorer les effets secondaires, qui sont réels. Nous ne devons pas non plus attendre d’un traitement chimique qu’il résolve des troubles d’origine psychique. Ainsi, selon certains spécialistes, ce traitement ne pourrait soigner que 5 % à 10 % des délinquants sexuels !

Plus précisément, nous nous opposons au dispositif mis en place afin de préserver de manière factice le principe du consentement aux soins du patient. En effet, plusieurs alinéas de l’article 5 ter disposent que le condamné peut refuser de suivre ou de poursuivre un traitement antihormonal mais que son refus sera considéré comme un manquement à ses obligations.

Ainsi, si la personne est sous surveillance de sûreté, elle pourra être placée en rétention de sûreté. Si elle est sous suivi socio-judiciaire, son refus pourra entraîner une suspension des mesures d’aménagement de peine ou une incarcération provisoire. Bref, autant dire que le consentement aux soins risque d’être biaisé, la personne condamnée consentant aux soins afin de ne pas encourir les sanctions prévues en cas de refus ou d’interruption du traitement. Or je rappelle que le consentement aux soins n’est pas seulement nécessaire au regard de la loi, mais qu’il est véritablement indispensable pour des raisons médicales, car de ce consentement découle l’efficacité du traitement.

À la lecture de cet article, il apparaît que ses rédacteurs se soucient moins de la capacité réelle de ce traitement à guérir une pathologie médicale que de la possibilité qu’il représente d’empêcher un criminel de passer à l’acte.

Ainsi le terme de « castration chimique » choisi pour parler de ce traitement est-il révélateur de la véritable intention des rédacteurs du texte : rendre physiquement impossible une infraction sexuelle sans s’attaquer aux causes du trouble comportemental. Traiter les effets et non la cause, voilà l’erreur ! C’est oublier que ce traitement n’est que temporaire et que, une fois interrompu, les troubles psychologiques subsisteront.

Peut-être le fantasme inavoué de certains législateurs en instaurant la castration chimique aujourd'hui est-il de régler définitivement le problème en passant à la castration physique demain ?

Telles sont les raisons pour lesquelles nous estimons nécessaire la suppression de la totalité des alinéas concernant le traitement antihormonal.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 5, présenté par M. About, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Le texte de la commission des lois prévoit que c’est bien le médecin traitant qui prescrit le traitement antihormonal : « L’injonction de soins peut également comprendre un traitement anti-hormonal prescrit par le médecin traitant ». Néanmoins, une ambiguïté demeure dans cette formulation.

Cela signifie-t-il que le traitement a été prescrit avant l’injonction ou cela signifie-t-il que le traitement sera prescrit par le médecin traitant après l’injonction ? Quel est le sens du participe passé ? On ne le sait pas.

Nous ne pouvons pas imaginer qu’il existe une possibilité pour le juge de demander dans le prononcé de l’injonction ou à l’occasion de celui-ci la prescription du traitement antihormonal. Le juge ne doit indiquer aucun traitement, il prononce simplement une injonction de soins sur le conseil d’experts qui lui ont assuré que c’était bon pour la personne concernée.

Dès lors, puisque cet alinéa n’ajoute absolument rien à l’état du droit, si ce n’est une confusion que nous considérons dommageable, nous proposons de le supprimer.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 98, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Rédiger comme suit cet alinéa :

« Lorsqu'une injonction de soins est ordonnée, le médecin traitant peut prescrire un traitement inhibiteur de libido conformément aux dispositions de l'article L.3711-3 du code de la santé publique. »

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Cet amendement vise à rédiger l’alinéa 4 afin d'indiquer sans ambiguïté que, s'il appartient au juge d'ordonner une injonction de soins, le choix d'un traitement inhibiteur de libido relève de la compétence exclusive du médecin traitant.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Le sous-amendement n° 103, présenté par M. About, est ainsi libellé :

Alinéa 3 de l'amendement n° 98

Supprimer les mots :

conformément aux dispositions de l'article L. 3711-3 du code de la santé publique

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

La nouvelle rédaction proposée par la commission des lois pour l’alinéa 4 de l’article 5 ter me paraît satisfaisante, sous réserve que le dernier bout de la phrase soit supprimé afin qu’il ne soit plus fait référence à l’article L 3711-3 du code de la santé publique.

Je le rappelle, cette référence avait été introduite parce que, l’indication n’existant pas alors, il fallait permettre au médecin de prescrire ce type de traitement dans ce type d’indication et d’en permettre le remboursement.

En tout état de cause, il est clair qu’il appartiendra au médecin de mettre en œuvre le meilleur traitement pour son patient et d’adapter, de modifier ou de supprimer – soit temporairement, soit définitivement – ce traitement.

Ce n’est que le refus du patient de suivre le traitement ou d’observer correctement les prescriptions qui devront entraîner sa dénonciation auprès du juge et d’éventuelles sanctions, mais je ne vois pas ce qui peut justifier de faire référence à un traitement plutôt qu’à un autre.

Il n’y a qu’un bon traitement, celui qui doit être administré au patient pour améliorer la situation épouvantable dans laquelle il peut se trouver, et ce n’est pas toujours le traitement inhibiteur de libido, puisque celui-ci n’agit que dans 5 % à 10 % des cas.

Il faut également traiter les 90 % de cas restants et, bien entendu, dans ces cas aussi, quand le sujet n’acceptera pas le suivi ou le traitement, il faudra prendre des mesures à son égard.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 77 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Plancade et Tropeano, est ainsi libellé :

Alinéa 7

Rédiger ainsi le début de cet alinéa :

Peut constituer une méconnaissance...

La parole est à M. Jacques Mézard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Il s’agit de tenter de ne pas tomber dans un système, certes pas forcément d’automaticité, mais de nature tout de même à aboutir à des décisions excessives. Une marge d’appréciation doit subsister.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 6, présenté par M. About, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 7

Remplacer les mots :

prévu par le dernier alinéa de l'article L. 3711-3 du code de la santé publique

par les mots :

prescrit par le médecin traitant

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Les amendements n° 6 à 12 de la commission des affaires sociales sont des amendements de coordination, monsieur le président, et je les considère comme étant défendus.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 7, présenté par M. About, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 9

Remplacer les mots :

prévu par le dernier alinéa de l'article L. 3711-3 du code de la santé publique

par les mots :

prescrit par le médecin traitant

L'amendement n° 8, présenté par M. About, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéas 10 et 11

Supprimer ces alinéas.

Ces amendements ont déjà été défendus.

L'amendement n° 80 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi, Baylet et Charasse, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Plancade et Tropeano, est ainsi libellé :

Alinéa 24

Rédiger ainsi le début de cet alinéa :

Peut constituer pour le condamné...

La parole est à M. Jacques Mézard.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 9, présenté par M. About, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 24

Remplacer les mots :

prévu par le dernier alinéa de l'article L. 3711-3 du code de la santé publique

par les mots :

prescrit par le médecin traitant

L'amendement n° 10, présenté par M. About, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 27

Après les mots :

réalisée par deux experts

supprimer la fin de cet alinéa.

L'amendement n° 82 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi, Baylet et Charasse, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Plancade et Tropeano, est ainsi libellé :

Alinéa 35

Rédiger ainsi le début de cet alinéa

Peut constituer pour le condamné

L'amendement n° 11, présenté par M. About, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 35

Remplacer les mots :

prévu par le dernier alinéa de l'article L. 3711-3 du code de la santé publique

par les mots :

prescrit par le médecin traitant

L'amendement n° 83 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi, Baylet et Charasse, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Plancade et Tropeano, est ainsi libellé :

Alinéa 37

Rédiger ainsi le début de cet amendement :

Peut constituer pour le condamné...

L'amendement n° 12, présenté par M. About, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 37

Remplacer les mots :

prévu par le dernier alinéa de l'article L. 3711-3 du code de la santé publique

par les mots :

prescrit par le médecin traitant

Ces amendements ont déjà été défendus.

Quel est l’avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

La commission est défavorable à l’amendement n° 26.

Elle a en effet elle-même fait en sorte que l’injonction de suivre un traitement antihormonal ne trouve pas à s’appliquer pendant la détention puisqu’il est certain que commencer un tel traitement quinze années avant la libération n’a guère de sens. Il nous a même été indiqué que le mettre en œuvre trop rapidement empêcherait de le faire au moment utile, c'est-à-dire à l’approche de la libération.

Comme notre collègue Guy Fischer, la commission n’approuvait pas le texte sur ce point, mais elle estime que les amendements qu’elle a votés ont permis de régler les problèmes.

De la même manière, elle a précisé que le traitement antihormonal s’intégrait dans un traitement global, dont il n’était qu’une partie, et n’avait donc pas à être distingué d’une manière aussi nette qu’il avait pu l’être.

La commission demande le retrait de l’amendement n° 5 au profit de son amendement n° 98, amendement qu’elle a déposé à la suite du débat en son sein et par lequel elle propose une réécriture de l’alinéa 4 de nature à lever toute ambiguïté.

Elle a émis un avis négatif sur le sous-amendement n° 103, en cohérence avec l’avis négatif qu’elle émettra sur l’amendement n° 13 qui sera très bientôt examiné.

S’agissant de l’amendement n° 77 rectifié, elle estime que le texte proposé par le projet de loi recherche un équilibre délicat entre obligation et libre consentement aux soins. Les inquiétudes de M. Mézard doivent cependant être tempérées par deux considérations.

D’abord, le constat d’une méconnaissance ne contraint jamais le juge à prononcer une mesure. Le juge demeure toujours libre de son appréciation.

Ensuite, comme le prévoit le texte adopté en commission, le refus de suivre ou de poursuivre un traitement ne pourrait entraîner un placement en rétention de sûreté que si les autres conditions prévues pour un tel placement étaient également réunies.

Les préoccupations exprimées par ses auteurs étant ainsi quasi intégralement satisfaites, la commission demande donc le retrait de l’amendement n° 77 rectifié.

La commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° 6.

Le septième alinéa de l’article 5 ter prévoit que le refus ou l’interruption d’un traitement antilibido constitue, pour une personne placée sous surveillance de sûreté, une méconnaissance de ses obligations.

M. About considère qu’il n’y a pas lieu de viser plus particulièrement le traitement antilibido. Son amendement aurait pour effet de considérer comme méconnaissance d’une obligation le refus ou l’interruption de tout traitement. Dès lors que cette prise en charge médicale peut aussi comporter un traitement antilibido, l’amendement ne semble pas appeler d’objection.

Elle est de même favorable à l’amendement n° 7.

Cet amendement, qui répond à la même logique que l’amendement n° 6, a pour effet de considérer comme une violation par le condamné des obligations qui lui incombent tout refus ou toute interruption d’un traitement sans viser en particulier le traitement antihormonal.

La commission est en revanche défavorable à l’amendement n° 8.

L’alinéa que cet amendement a pour objet de supprimer prévoit que le traitement prescrit par un médecin traitant à un condamné détenu peut être un traitement antilibido.

Il ne s’agit là, bien sûr, que d’une simple faculté. Il peut être toutefois intéressant de laisser cette précision dans la loi afin d’indiquer qu’un traitement antilibido peut être engagé dans la perspective de la libération de la personne pour favoriser sa réinsertion dans la société dans les premiers mois de sa sortie, qui constituent, chacun le sait, une période de fragilité.

L’amendement n° 80 rectifié appelle les mêmes observations que l’amendement n° 77 rectifié et donc une demande de retrait ou un avis défavorable.

L’amendement n° 9, autre amendement de coordination, appelle les mêmes observations que les amendements précédents. L’alinéa mentionne ici le refus ou l’interruption d’un traitement antilibido comme une méconnaissance des obligations de la surveillance judiciaire et la commission des lois a émis un avis favorable.

Elle demande le retrait de l’amendement n° 10, contre lequel elle émettra sinon un avis défavorable.

L’alinéa 27 prévoit que, préalablement à la libération conditionnelle d’une personne condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité pour un crime pour lequel le suivi socio-judiciaire est encouru, l’expertise est réalisée par deux experts et se prononce sur l’opportunité, dans le cadre d’une injonction de soins, du recours à un traitement antilibido.

M. About estime que les deux experts n’ont pas à se prononcer sur l’opportunité d’un tel traitement. La commission avait déjà supprimé la précision selon laquelle, au stade présentenciel, l’expert était interrogé sur l’opportunité d’une injonction de soins. En effet, à cette étape de la procédure, il apparaissait prématuré d’envisager un mode de traitement qui ne pourrait être mis en œuvre de manière pertinente qu’à la fin de la détention.

En revanche, dans le cas visé par l’amendement, à savoir la libération conditionnelle toute proche d’une personne condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité et donc appelée à sortir, l’avis des deux experts peut être utile, étant rappelé qu’il ne s’agit que d’un avis destiné à éclairer l’appréciation du médecin traitant.

S’agissant de l’amendement n° 82 rectifié, la commission émet les mêmes observations que pour l’amendement n° 77 rectifié : elle le considère comme quasi intégralement satisfait et en souhaite le retrait ou, à défaut, le rejet.

L’amendement n° 11 est un amendement de coordination, l’alinéa mentionnant ici le refus de l’interruption d’un traitement antilibido comme une méconnaissance des obligations de la libération conditionnelle. La commission a émis un avis favorable.

Toujours comme pour l’amendement n° 77 rectifié, la commission considère que l’amendement n° 83 rectifié est quasi satisfait : elle en souhaite le retrait et, à défaut, son avis sera défavorable.

Enfin, l’amendement n° 12 relève de la même logique que les amendements précédents de M. About, l’alinéa mentionnant ici le refus ou l’interruption d’un traitement antilibido comme une méconnaissance des obligations du suivi socio-judiciaire.

La commission a émis un avis favorable sur ce dernier amendement.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Il sera peut-être plus simple que je dise à quoi je suis favorable et qu’on en déduise à quoi je suis défavorable !

Sourires

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

Ainsi, je suis favorable à l’amendement n° 98. La rédaction proposée est effectivement plus claire et correspond aux objectifs recherchés.

Sur le sous-amendement n° 103 à cet amendement n° 98, j’ai, comme le rapporteur, un avis réservé, car, s’il est vrai que la mention dans le code de la santé publique d’un traitement antihormonal ne répond plus exactement aux mêmes nécessités juridiques qu’en 2005, la suppression de cette mention pourrait être une source d’incompréhension pour les médecins traitants…

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d'État

… et avoir pour effet de freiner la prescription d’un traitement qui peut agir dans certains cas, si ce n’est pas – tout le monde en est d’accord – dans tous cas.

Il me semble par ailleurs également important de conserver dans la loi des mesures qui rejoignent les préoccupations exprimées par le comité consultatif national d’éthique médicale.

Sur l’amendement n° 6, déposé par M. About et accepté par la commission, ainsi d’ailleurs que sur tous les amendements de coordination, je m’en remets à la sagesse du Sénat, en soulignant qu’il s’agit effectivement de sanctionner le refus de suivre tout traitement et non pas uniquement le refus de suivre un traitement antihormonal.

S’agissant ensuite de l’amendement n° 77 rectifié de M Mézard, je crois qu’il importe de rappeler, comme l’a d’ailleurs fait le rapporteur, les dispositions du projet de loi.

Le fait de refuser un traitement antihormonal prescrit par le médecin dans le cadre d’une injonction de soins constitue, de façon évidente, une méconnaissance de ses obligations par la personne sous surveillance et c’est cette méconnaissance de ses obligations qui peut – et c’est bien une faculté que prévoit le texte – justifier le placement de cette personne en rétention de sûreté si le juge l’estime nécessaire.

Le projet de loi est donc bien précis en la matière et, je le répète, il ne saurait y avoir la moindre automaticité. Il me semble donc que cet amendement devrait être retiré.

J’émets donc un avis défavorable sur tous les amendements, excepté sur l’amendement de la commission des lois et sur les amendements de la commission des affaires sociales – en particulier des amendements de coordination – acceptés par M. le rapporteur.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Monsieur le rapporteur pour avis, l’amendement n° 5 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L’amendement n° 5 est retiré.

Monsieur le rapporteur pour avis, le sous-amendement n° 103 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Monsieur le président, je vais le retirer.

Dans la mesure où le rapporteur a donné un avis favorable aux amendements de coordination de la commission, et que le Gouvernement, ayant confiance en la Haute Assemblée, s’en remet à sa sagesse, je considère que nous avons satisfaction au fond. Tous les traitements étant mis sur un pied d’égalité, le médecin pourra choisir et fera ce qu’il doit faire sans avoir à s’attacher à tel ou tel traitement en particulier.

Le retrait de la dernière partie de l’amendement n° 98 serait peut-être incompris par le grand public, mais pas du tout par les médecins, madame la ministre. Pardonnez-moi d’insister, mais vous avez dit tout à l’heure qu’une telle suppression pourrait être une source d’incompréhension pour les médecins ; ces derniers – Dieu merci ! – ont les compétences nécessaires pour comprendre cette décision.

En revanche, le grand public y verrait peut-être un recul du Parlement sur la volonté de s’attaquer à toutes les pathologies visées et de s’interdire d’utiliser certains types de traitements, alors que ce n’est pas le cas.

La logique étant claire pour tous les parlementaires et pour tous ceux qui liront nos débats, je retire le sous-amendement n° 103.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Le sous-amendement n° 103 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 98.

L'amendement est adopté.

L'amendement est adopté.

L'amendement est adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Monsieur About, souhaitez-vous maintenir l’amendement n° 10 ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L’amendement n° 10 est retiré.

Monsieur Mézard, souhaitez-vous maintenir l’amendement n° 82 rectifié ?

L'amendement est adopté.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 27, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéas 14 à 16

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Nous demandons la suppression des alinéas qui abaissent le seuil de la peine pouvant donner lieu à un placement sous surveillance judiciaire de dix à sept ans, généralisant ainsi cette pratique.

On élargit donc le champ d’application de la surveillance judiciaire de manière considérable ! Notre rapporteur estime que l’abaissement de ce seuil aura pour conséquence une augmentation de 51 % du nombre de personnes pouvant être placées sous surveillance judiciaire !

Je ne m’appesantirai pas sur les difficultés des juridictions à faire face à cette considérable augmentation compte tenu de leurs moyens actuels. Mais quelle est la justification de cette mesure, si ce n’est l’élargissement continu des possibilités de surveillance et de rétention ?

Il ne faut en aucun cas céder à la tentation dangereuse et abusive de prévenir le risque de récidive en enfermant et surveillant toujours davantage.

Aucun élément ne permet d’affirmer que le dispositif de surveillance judiciaire n’est pas assez large à l’heure actuelle.

C’est pourquoi nous souhaitons supprimer ces alinéas.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Les amendements n° 50 et 78 rectifié sont identiques.

L'amendement n° 50 est présenté par MM. Anziani et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel et Badinter, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 78 rectifié est présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Plancade et Tropeano.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 15

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Alain Anziani, pour défendre l’amendement n° 50.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Je souscris évidemment aux arguments qui ont été développés par Mme Borvo Cohen-Seat à l’instant.

Je voudrais ajouter une autre considération qui rejoint les débats du début de l’après-midi.

Cet alinéa, comme d’autres, va poser un problème constitutionnel, je regrette de le souligner une nouvelle fois.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Je vais essayer d’être clair.

On voit bien ce qui va se passer. Je reprends l’image que j’ai utilisée tout à l’heure : partons d'un dispositif de surveillance judiciaire ; s’il n’est pas respecté, il pourra glisser vers la rétention de sûreté et s’accompagnera alors de l’application immédiate prévue par l’article 8 ter. Par ce biais, la rétention de sûreté sera d’application immédiate.

J’ai entendu tout à l’heure la réponse du rapporteur. C’est vrai qu’il ne faut pas confondre les dispositions pénales, qui ne peuvent pas être rétroactives si elles sont plus dures pour la personne concernée, et les dispositions du code de procédure pénale qui, elles, n’obéissent pas à la même règle de non-rétroactivité.

On oublie cependant un petit détail : les dispositions de procédure pénale peuvent tomber sous le principe de non-rétroactivité dans la mesure où elles aggravent la situation de la personne et portent atteinte aux libertés.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

De telles dispositions poseront donc à nouveau un problème de constitutionnalité. Nous vous aurons alertés sur cette difficulté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Mes arguments se situent dans la continuité des explications données par M. Anziani.

Je souhaite revenir sur la motivation exprimée par M. Lecerf dans son excellent rapport. J’ai l’impression que le fait de maintenir la disposition ramenant de dix à sept ans le quantum de peine prononcée susceptible de donner lieu à une surveillance judiciaire constitue plutôt une poire pour la soif destinée aux députés, pour qu’il leur reste quelque chose après la destruction partielle de leur travail.

D’ailleurs, monsieur le rapporteur, vous dites vous-mêmes, en vous référant à une décision du Conseil constitutionnel, que « l’extension du champ d’application de cette mesure ne paraît pas poser de problème de droit ». Je vous ai connu plus affirmatif, à juste titre, dans un certain nombre d’autres articles.

Vous ajoutez : « Il peut être utile de soumettre à des mesures de surveillance des personnes condamnées à des peines égales ou supérieures à sept ans d’emprisonnement et présentant encore une dangerosité ». Mais je ne vous sens pas extrêmement convaincu dans ces écrits.

La suite est tout de même inquiétante, puisque vous dites que « la commission n’ignore pas que cette disposition alourdira encore la charge des juges de l’application des peines ». Les informations que vous avez obtenues de la direction des affaires criminelles et des grâces vous permettent en outre d’affirmer que « l’abaissement de ce seuil aurait pour effet d’accroître de 51 % le nombre de personnes éligibles à la surveillance judiciaire », ce qui impliquera, je vous cite encore : « un renforcement des moyens qui leur sont dévolus ». Ce dernier énoncé reste un peu hypothétique, pour ne pas dire « angélique », pour reprendre des propos que j’ai déjà tenus lors de la discussion générale.

Ces modifications ne sont donc absolument pas convaincantes et me semblent dangereuses ; elles ont surtout pour but de faire plaisir à la majorité des députés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Il y a tout de même un élément qui n’est pas contestable, je le rappelle : la surveillance judiciaire a été considérée clairement par le Conseil constitutionnel comme une modalité d’application de la peine.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

L’abaissement du quantum de la peine prononcé permettant l’application de cette mesure peut donc s’appliquer immédiatement, dès lors que la loi le prévoit expressément ; tel sera le cas à l’article 8 ter du projet de loi.

Je reconnais la pertinence de l’argumentation de M. Anziani. Je ne souhaite pas me lancer dans des prévisions sur la jurisprudence du Conseil constitutionnel, mais la différence est tout de même fondamentale entre la modification du quantum prévue pour la surveillance judiciaire, et celle prévue pour la surveillance de sûreté.

Abaisser de quinze à dix ans le quantum de la peine prononcé permettant le placement sous surveillance de sûreté aboutissait au résultat suivant : des personnes non visées par la loi de 2008 pouvaient tomber sous le coup de la surveillance de sûreté et, dès lors qu’elles ne respectaient pas les obligations prévues dans ce dispositif, elles risquaient de basculer dans le régime de la rétention de sûreté. Cette disposition posait un problème constitutionnel particulièrement grave ; j’avais même utilisé à son égard l’adjectif « dirimant ».

Il en va autrement de la surveillance judiciaire. Nous parlons en l’occurrence de modalités d’application de la peine : on se contente de prévoir que la surveillance judiciaire pourra être décidée à partir de sept ans d’emprisonnement, plutôt qu’à partir de dix ans. La surveillance judiciaire est également une modalité de protection de la société et de la personne visée.

Puisqu’il s’agit d’une modalité d’application de la peine, je ne suis pas choqué que l’on envisage de concevoir plus largement ce qui doit relever de la surveillance judiciaire. Le risque d’inconstitutionnalité, que je n’aurais pas pris dans le cas de la surveillance de sûreté, je suis prêt à le prendre pour la surveillance judiciaire, car nous sommes dans le cadre de dispositions de procédure pénale, qui ne sont pas soumises au principe de non-rétroactivité. Il sera d’ailleurs précisé clairement dans la loi que le texte est d’application immédiate.

M. Mézard refuse que nous banalisions un dispositif aussi sévère que celui de la surveillance judiciaire. Or ce qui est particulièrement sévère, selon moi, ce sont les dispositifs, totalement nouveaux dans notre droit, de la surveillance de sûreté et de la rétention de sûreté prévus dans la loi de 2008 et que la commission a repris dans ce texte, en raison de la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Le dispositif de la surveillance judiciaire, qui s’assimile plutôt à celui du suivi socio-judiciaire, en est très éloigné.

J’émets donc un avis défavorable sur ces trois amendements.

Debut de section - Permalien
Michèle Alliot-Marie, ministre d’État

Par souci de cohérence, je tiendrai les même propos qu’à l’Assemblée nationale. J’avais alors émis des réserves quant à l’abaissement des seuils de la surveillance judiciaire et de la surveillance de sûreté. Je me réjouis d’ailleurs que la commission soit revenue sur la baisse du seuil de la surveillance de sûreté, qui me paraissait poser de graves problèmes constitutionnels.

L’abaissement du seuil de la surveillance judiciaire ne me paraît pas nécessaire et semble plutôt poser problème. Cela étant dit, j’ai bien entendu l’argument du rapporteur. Comme je l’ai fait à l’Assemblée nationale, à l’occasion de l’examen d’un amendement similaire, je m’en remettrai à la sagesse du Sénat.

L’amendement n’est pas adopté.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Mes chers collègues, la conférence des présidents a souhaité que, lorsqu’il n’est pas prévu de séance de nuit dans l’ordre du jour, nous levions la séance à vingt-trois heures cinquante. Si nous commencions l’examen des trois amendements qui viennent en discussion commune, nous serions contraints d’interrompre nos débats à un moment inopportun. La suite de la discussion est donc renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au jeudi 18 février 2010 :

À neuf heures trente :

1. Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle et portant diverses dispositions de procédure pénale.

Rapport de M. Jean-René Lecerf, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale (257, 2009-2010).

Texte de la commission (n° 258, 2009-2010).

Avis de M. Nicolas About, fait au nom de la commission des affaires sociales (279, 2009-2010).

À quinze heures et, éventuellement, le soir :

2. Questions d’actualité au Gouvernement.

Délai limite d’inscription des auteurs de questions : Jeudi 18 février 2010, à 11 heures.

3. Suite de l’ordre du jour du matin.

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée à vingt-trois heures quarante-cinq.