Intervention de Pierre-Yves Collombat

Réunion du 5 décembre 2017 à 14h00
Loi de finances pour 2018 — Administration générale et territoriale de l'état

Photo de Pierre-Yves CollombatPierre-Yves Collombat :

Monsieur le président, monsieur le ministre d’État, mes chers collègues, m’étant focalisé voilà quelques instants, par nécessité, sur le côté strictement budgétaire de la mission et la poursuite des réductions d’effectifs qu’elle implique, je vais maintenant revenir sur quelques-uns des aspects qualitatifs de cette évolution.

Je commencerai par évoquer la réorganisation de la délivrance des titres.

J’aborderai, comme premier point, la mise en place des centres d’expertise et de ressources titres, les CERT.

Les demandes de titres formulées par les administrés d’un département ne sont désormais plus traitées par les services de la préfecture de ce département.

Selon le titre concerné, la demande est transmise à un CERT, chaque centre étant spécialisé sur un type de titres, chaque département dépendant de plusieurs CERT. Désormais, 58 CERT délivrent les cartes d’identité, les passeports, les permis de conduire et les cartes grises. Les compétences, les objectifs de production, les départements servis, les moyens dont dispose chaque CERT dépendent largement de l’importance des sureffectifs à réaffecter, concurremment à d’autres options : promotions internes, départs à la retraite, mise en place de pôles départementaux spécialisés dans les sous-préfectures importantes… Félicitons-nous que le volontariat des éventuelles mutations géographiques ait heureusement prévalu.

Pour donner un exemple de cette organisation, le CERT que nous avons visité à Châlons-en-Champagne traite, avec un effectif de 20 équivalents temps plein, ou ETP, les demandes de permis de conduire de cinq départements : la Meurthe-et-Moselle, les Deux-Sèvres, la Haute-Marne, le Lot et les Hautes-Alpes.

Mon deuxième point sera consacré aux problèmes liés à la dématérialisation obligatoire des demandes.

Cette modernisation de la délivrance des titres, par ailleurs souhaitable, représente en même temps un nouvel éloignement des services de l’État. C’est aussi une nouvelle charge pour les collectivités territoriales, s’agissant des nouvelles modalités de demande de la carte nationale d’identité.

Ce sont désormais 2 300 communes qui assument la réception des demandes, au lieu de 35 000, ce qui ne satisfait ni les usagers des zones éloignées de ces points de contact ni les maires qui doivent assumer la tâche. L’augmentation de la compensation de 3 500 euros par dispositif, avec un supplément pour les plus actifs, soit un impact budgétaire de 17 millions d’euros, devrait répondre en partie à leur attente.

J’ai déjà évoqué les problèmes techniques – une qualité insuffisante du réseau – et psychologique – une maîtrise minimale de l’outil informatique –, mais force est de constater que, même là où les réseaux sont suffisants, où les points d’accès supplémentaires sont accompagnés, où le personnel est ouvert à la nouvelle approche, des problèmes embarrassants continuent de se poser.

Ainsi, il nous a été rapporté que, à la préfecture de la Marne, où, par ailleurs, les choses se sont globalement bien passées, une partie non négligeable des usagers vivait comme une discrimination à leur endroit le fait qu’ils ne puissent bénéficier d’un accueil par un agent, alors que ce n’est pas le cas pour les titres de séjour des étrangers ! Cette réaction est évidemment non fondée, mais, en l’occurrence, elle en dit long sur le sentiment d’abandon par l’État des administrés. Comme quoi les réformes apparemment les plus rationnelles peuvent avoir des coûts politiques insoupçonnés…

Mon troisième point concernera le fichier des titres électroniques sécurisés, ou « fichier TES ».

Cette réforme a aussi justifié la création du fichier TES, qui a entraîné de nombreuses réactions. L’audit de ce fichier, que le ministre de l’intérieur avait demandé à la suite des réactions des parlementaires – on se rappelle son audition par la commission des lois du Sénat –, a conclu que la sécurité du système n’était pas parfaite et que celui-ci pouvait être détourné à des fins d’identification. Le ministère nous a informés avoir pris en compte, depuis, les recommandations du rapport. Si nous n’avons aucune raison de ne pas le croire, il n’en demeure pas moins que ce fichier n’est pas le plus sûr possible en l’état des technologies.

Je vais maintenant évoquer les sous-préfectures.

Attendue depuis longtemps, la réforme des sous-préfectures, de leur implantation, a en définitive été très limitée.

Finalement, le plus important est de faire coïncider les limites des arrondissements avec les intercommunalités, qui, comme vous le savez, ont beaucoup bougé. C’est ce qui a été fait.

Au-delà de la carte, il conviendrait de redéfinir et d’adapter les moyens des sous-préfectures, pour leur permettre de remplir concrètement leur rôle de proximité.

Je terminerai par la « vie politique, cultuelle et associative ».

Sur ce plan, le principal chantier est la réforme des modalités d’inscription sur les listes électorales et la mise en place prochaine du répertoire électoral unique. Les deux opérations sont en bonne voie, même s’il ne serait pas inutile de rappeler aux communes qu’une réforme va prochainement modifier la procédure d’inscription sur les listes électorales.

S’agissant de la dématérialisation de la propagande électorale, le Gouvernement, qui semblait décidé à contourner le Parlement une quatrième fois, par le biais d’une demande d’habilitation à légiférer par ordonnance dans le futur projet de loi pour un État au service d’une société de confiance, y a finalement renoncé. Reste à savoir pour combien de temps…

Comme je l’ai dit il y a quelques instants, ne pensant pas que l’on puisse se satisfaire de cette politique récurrente de retrait de l’État des territoires, suivant l’avis de la commission des lois, notre groupe ne votera pas les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».

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