Intervention de François Patriat

Réunion du 7 décembre 2017 à 10h45
Loi de finances pour 2018 — Compte d'affectation spéciale : développement agricole et rural

Photo de François PatriatFrançois Patriat :

… qu’ils font face à des crises structurelles ou conjoncturelles. Je les connais bien, du fait de ma profession, de mon implantation territoriale et de mon expérience ministérielle. Je sais qu’il y a un manque de convergence des normes européennes, et je sais aussi que les Français, même s’ils aiment leurs agriculteurs, sont de plus en plus défiants à l’égard de nos modes de production.

Toutefois, je sais également que l’agriculture est extrêmement diversifiée, et qu’elle est le socle d’une industrie agroalimentaire qui compte 17 000 entreprises et emploie 400 000 personnes pour un chiffre d’affaires de 170 milliards d’euros. Essayons donc de parler de manière juste de l’agriculture.

Les agriculteurs ont le sentiment d’être pris en étau entre la nécessité de renforcer la compétitivité de leurs exploitations, pour faire face aux exigences d’un marché mondialisé, et les exigences sociétales qui leur sont parfois imposées.

Le monde agricole doit relever quatre défis : la compétitivité des exploitations, la sécurité alimentaire, le renouvellement des générations et la transition écologique. Il est donc nécessaire de transformer en profondeur notre modèle agricole ; il est important que nous apportions collectivement des réponses à ces questions et à ces enjeux.

Nos agriculteurs font face à des choix qui peuvent leur offrir de belles occasions ; le Gouvernement doit leur permettre de les saisir, au travers de la mise en place des leviers nécessaires, et c’est à ces défis que répond ce premier budget du quinquennat – je n’ai pas la même lecture que vous, bien entendu, mes chers collègues.

D’abord, les crédits de cette mission passent de 2, 8 milliards à 3, 2 milliards d’euros marquant ainsi une hausse globale de 1, 2 % par rapport à 2017. Néanmoins, le ministère de l’agriculture participe, lui aussi, à l’effort budgétaire collectif voulu par le Président de la République. Cet effort se traduit principalement par une réduction de ses effectifs, à hauteur de 249 équivalents temps plein, au sein du programme 215. Cela permet ainsi de préserver le programme relatif à la sécurité et à la qualité sanitaires, qui voit ses dépenses de personnel augmenter.

En outre, pour avoir une plus grande réactivité en cas de crise sanitaire, économique ou climatique, le Gouvernement vient de créer une réserve d’un montant de 300 millions d’euros – c’est une priorité très marquée – pour faire face aux aléas que nous avons connus.

Pour entrer dans le détail, je dirai que ce budget traduit les ambitions du Gouvernement et les engagements pris par le Président de la République durant sa campagne et lors de son discours de Rungis, le 11 octobre dernier.

En premier lieu, la formation aux métiers de l’agriculture est renforcée ; le budget consacré à l’enseignement et la recherche est en hausse de près de 3 %, afin de proposer des programmes adaptés aux besoins de diversité des filières agricoles. En deuxième lieu, la dotation de l’ANSES augmente, pour assurer la sécurité sanitaire. En troisième lieu, le renouvellement générationnel est favorisé, au travers d’une dotation de 38 millions d’euros destinée à soutenir l’installation des jeunes agriculteurs – vous y tenez tous, je le sais.

Vous le savez comme moi, la transformation profonde de notre modèle agricole ne se fera pas uniquement par des mesures budgétaires ; le budget ne changera en rien le revenu des agriculteurs, bien au contraire. C’est pourquoi il faut inscrire cette mission dans une feuille de route plus large en faveur de nos agriculteurs et de nos territoires.

Le Gouvernement a mis en place d’autres leviers pour permettre cette transformation. Ainsi, au travers des États généraux de l’alimentation, qui ont été mentionnés, le Gouvernement engage une réforme sans précédent de l’agriculture, qui mobilise l’ensemble des parties prenantes. Le Président de la République a souhaité que les agriculteurs vivent de leur revenu et non des aides, et c’est à cette tâche que le Gouvernement s’est attelé.

La première phase des états généraux a abouti à la conclusion qu’il est urgent de redistribuer de la valeur ajoutée aux producteurs, afin de redonner de la compétitivité. C’est pourquoi il est essentiel que toutes les filières prennent leurs responsabilités et établissent de réels contrats de filière, adaptés à leurs enjeux.

La deuxième phase doit déboucher sur l’évolution du modèle agricole, auquel vous travaillez activement, monsieur le ministre – je connais tout votre entrain en ce domaine –, une évolution qui tienne compte de la demande des consommateurs, ou des « consommacteurs », comme on le dit parfois, et des attentes sociétales. Les conclusions se traduiront, l’année prochaine, par des mesures législatives et réglementaires.

Près de 10 % du Grand plan d’investissement seront alloués au secteur agricole, soit 5 milliards d’euros. Cela nous permettra de protéger nos agriculteurs des crises structurelles et d’accompagner les mesures de transformation et d’investissement visant à moderniser l’outil de production.

Par ailleurs, dans le cadre des futures négociations de la PAC, la France devra faire preuve, c’est vrai, de fermeté, pour rendre les aides plus efficaces, plus transparentes et plus agiles.

Enfin, les contraintes administratives doivent être levées, pour faciliter la vie des agriculteurs. Les mesures de simplification annoncées dans le projet de loi sur le droit à l’erreur, présenté par M. Darmanin, vont dans ce sens.

C’est vrai, je n’ai pas abordé la question des produits phytosanitaires, qui inquiètent nos agriculteurs, mais la réponse du Gouvernement en la matière est lucide et efficace. Il ne s’agit pas essentiellement d’interdire, mais d’accompagner toute la filière agricole dans sa transition.

Dans ce contexte tendu, les choix budgétaires du Gouvernement en matière agricole sont courageux, ils sont à la hauteur des ambitions de notre projet. C’est pourquoi le groupe La République En Marche soutiendra et votera les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ».

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