Intervention de Jean-Pierre Moga

Réunion du 7 décembre 2017 à 10h45
Loi de finances pour 2018 — Compte d'affectation spéciale : développement agricole et rural

Photo de Jean-Pierre MogaJean-Pierre Moga :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’intensification du réchauffement climatique et ses conséquences sur les activités agricoles nous incitent à préparer des solutions pérennes.

Les tensions sur la ressource en eau s’accentueront, avec une diminution importante des débits moyens des cours d’eau, en particulier dans les zones vulnérables. Mon département, le Lot-et-Garonne, sur le bassin Adour-Garonne, en fait partie.

En ce qui concerne l’hydrologie souterraine, le sud-ouest de la France subira une baisse de la recharge des nappes comprise entre 30 % et 50 %, voire plus. La question de la disponibilité de l’eau pour permettre une irrigation correcte des plantations et un abreuvement satisfaisant des animaux se posera de façon de plus en plus aiguë. Dans le même temps, il ne faudra pas altérer les nappes phréatiques ni le débit et la qualité des cours d’eau.

Dans ce contexte, la création de réserves d’eau, notamment collinaires, est primordiale pour les exploitants agricoles. Celles-ci recueillent et stockent les eaux de ruissellement dans des réserves de proximité. Elles sont remplies en hiver, en période d’abondance, pour être utilisées pour l’irrigation pendant l’été.

Un ajustement de la législation existante est nécessaire dans le domaine de l’utilisation et du stockage de l’eau. La réglementation en vigueur est trop contraignante pour être incitative, surtout pour les petits projets individuels, portés par les agriculteurs eux-mêmes.

Il convient donc de veiller à ce que les normes applicables s’en tiennent au respect des directives européennes, sans zèle et sans « surtransposition » de notre part, d’alléger les contraintes d’autorisation et de raccourcir les délais d’instruction pour les dossiers de création de réserves en eau.

Une gestion pragmatique consiste à privilégier la recherche de solutions locales, en associant à la concertation les acteurs locaux, notamment les agriculteurs.

Le Gouvernement doit mettre en œuvre les moyens nécessaires, y compris financiers, pour permettre au secteur agricole de développer ce type de rétention d’eau.

J’aimerais également évoquer la question de la recherche sur les molécules de remplacement des néonicotinoïdes, une classe d’insecticides utilisés dans les filières grandes cultures, fruits et légumes, vignes, etc.

La loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a instauré une interdiction d’utilisation de cette classe d’insecticides dans les cultures agricoles, à compter du 1er septembre 2018.

Des dérogations pourront être accordées jusqu’au 1er juillet 2020 s’il n’existe pas d’alternative.

Dans le cadre de cette interdiction, le Gouvernement a demandé à l’ANSES d’identifier les substituts possibles aux néonicotinoïdes et de vérifier leur efficacité, ainsi que leur éventuel impact sur l’environnement et sur la santé publique. Mais l’ANSES sera-t-elle en mesure de trouver, dans les délais fixés par la loi, des produits de substitution ?

Ces délais sont courts et un très grand nombre de produits sont à examiner. Monsieur le ministre, je ne vois pas de moyens, dans votre budget, pour atteindre cet objectif.

Par ailleurs, l’interdiction des néonicotinoïdes risque de favoriser le recours à d’autres substances d’ancienne génération, présentant d’autres inconvénients, parfois pires, pour l’environnement.

Il faut concilier le niveau élevé d’exigence sanitaire pour l’utilisation de ces produits avec les contraintes économiques des agriculteurs. Leur interdiction ne doit intervenir qu’à la condition que soit mise sur le marché une nouvelle molécule aussi efficace et dans des conditions économiques équivalentes.

L’ANSES et l’INRA, mènent des études pour développer des molécules alternatives. Les fabricants doivent aussi consacrer une partie de leur budget à cette recherche.

Dans un monde agricole en pleine mutation, la multiplication des normes et la baisse des revenus des agriculteurs rendent la situation difficile.

Monsieur le ministre, nous souhaitons, comme vous, que notre agriculture soit dans l’excellence et dans la compétitivité. Une pause normative est donc vitale pour ce secteur, qui représente un enjeu très important de notre économie.

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