Intervention de Annick Girardin

Réunion du 7 décembre 2017 à 15h00
Loi de finances pour 2018 — Outre-mer

Annick Girardin :

Madame la présidente, monsieur le rapporteur spécial, madame, messieurs les rapporteurs pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, si tous les Français, y compris les Ultramarins, sont appelés à consentir des efforts pour que le budget de la Nation puisse être à la hauteur de nos engagements européens, le Gouvernement a fait le choix de préserver la mission « Outre-mer ». Le soutien à l’emploi et à la jeunesse, l’accompagnement des entreprises, le développement des territoires sont autant de priorités qui sont ici réaffirmées.

Je vous remercie pour l’ensemble de vos observations, pertinentes et légitimes, et je vous redis que le projet de budget que nous présentons aujourd’hui est très positif, eu égard aux mesures de redressement des finances publiques mises en œuvre avec détermination par le Gouvernement.

Ainsi, dans le contexte d’une réduction de 7 milliards d’euros des dépenses, les crédits de la mission « Outre-mer » sont en hausse de 4 %, soit 85 millions d’euros en crédits de paiement.

Madame Dindar, monsieur Artano, je vous remercie de saluer notre effort de sincérité. Je le dis clairement, cette hausse, contrairement à ce que j’ai pu entendre, n’est pas virtuelle, elle est concrète. Dans la loi de finances initiale pour 2017, le ministère s’était vu rattacher des crédits dont il n’avait pas l’usage et qui ont été intégralement rétrocédés au ministère de l’éducation nationale au début de l’année 2017. Ces crédits n’avaient donc pas vocation à rester dans le périmètre de la mission. Ils seront d’ailleurs intégralement reconduits en 2018 dans le budget de l’éducation nationale. Les crédits qui relèvent de responsabilité progressent donc de 85 millions d’euros, soit une augmentation de 4 %.

Cette hausse de crédits consolide pour les années à venir les fondamentaux de l’action du ministère des outre-mer. Il était très important pour moi de pouvoir donner ce premier signal en ce début de quinquennat.

Non, monsieur le sénateur Lurel, ce projet de budget est tout sauf emblématique d’une résignation ! Ce n’est pas non plus un budget d’attente, messieurs Patient et Magras, mais le début d’une nouvelle impulsion. En effet, ce budget, loin de stagner, est en augmentation.

J’ai entendu les inquiétudes exprimées ces dernières semaines dans la presse, à l’Assemblée nationale, dans les territoires à l’occasion de mes déplacements, et ici même voilà quelques instants. Je tiens à vous rassurer et à vous apporter toutes les réponses nécessaires à la bonne compréhension de l’action de l’État. Il faut dire ce que l’on fait. C’est pourquoi je souhaite m’engager résolument dans un discours de vérité, de dignité et de transparence avec les outre-mer, sans entrer dans des jeux de posture politique. Je veux dire avec force et fierté tout ce que nous faisons, mais aussi convenir très honnêtement de ce qui nous restera à faire.

Il convient de se féliciter de ce qui fonctionne, mais aussi de constater ce qui ne marche pas, ce qui mérite d’être revu. Il importe d’assumer tout ce qui relève de notre responsabilité, mais aussi de cesser d’agir ou de décider lorsque l’État n’a pas vocation à intervenir localement. Les collectivités, notamment outre-mer, disposent de compétences essentielles, et de plus en plus larges, en matière de formation professionnelle, d’insertion, de gestion des services publics fondamentaux, de transports ; il ne faut pas l’oublier.

Il nous appartient donc d’accompagner les collectivités dans l’exercice de leurs compétences. J’ai pris des initiatives en ce sens dans le cadre de la Conférence nationale des territoires, en proposant notamment qu’une plateforme d’appui en ingénierie soit développée au profit des collectivités et des élus locaux.

Nous devons renouer une relation de confiance réciproque avec les élus et les populations ultramarines, qui attendent beaucoup, et avec raison, de l’ensemble des décideurs publics.

J’ai déjà annoncé que, avant la fin de l’année, un site internet sera à la disposition du public, afin de permettre à tous de constater les mesures prises et celles qui ont été engagées, par exemple, dans le cadre du plan d’urgence pour la Guyane. Cette initiative, je la conçois comme une première étape vers une plus grande sincérité de notre part.

Ce site a vocation à mettre en lumière l’ensemble des dépenses en faveur de tous les territoires ultramarins. Nous vous devons cette transparence dans tous les domaines : budget, suivi de l’application de la loi de programmation relative à l’égalité réelle des outre-mer, engagements pris en faveur de Saint-Martin.

Nous mettrons en œuvre la loi de programmation relative à l’égalité réelle des outre-mer. J’ai demandé à mes services de se mobiliser en ce sens. Les choses avancent, peut-être pas assez vite, mais le projet de loi de finances contient déjà un grand nombre des dispositions prévues dans cette loi. Près de 20 % des décrets d’application ont été pris, et plusieurs le seront avant la fin de l’année. Je comprends votre impatience, mais rappelons-nous que cette loi a été adoptée voilà seulement neuf mois.

Madame Malet, le ministère des outre-mer n’est pas seul pour mener à bien cette belle mission qu’est le développement des territoires et la satisfaction des besoins essentiels des populations. Les politiques en faveur des seniors, qui relèvent du ministère des solidarités et de la santé, y contribuent.

L’action des autres ministères en faveur des outre-mer se renforce, et les chiffres contenus dans les documents de politique transversale, les DPT, le confirment. Ces documents, qui recensent les crédits de quatre-vingt-sept programmes différents, font état d’une augmentation de 336 millions d’euros entre 2017 et 2018, soit de 2, 2 %. Si les DPT ne couvrent pas l’intégralité des dépenses publiques, loin de là, ils fournissent néanmoins une bonne vision de l’effort strictement budgétaire des différents périmètres ministériels, qui s’établit à 17 milliards d’euros pour 2018. Je vous remercie, monsieur le sénateur Théophile, de l’avoir rappelé.

J’ai souhaité que cet effort soit inscrit dans la durée. La programmation des crédits pour l’outre-mer prévoit une augmentation d’environ 5 % entre 2017 et 2020, et de 10 % à l’horizon de 2022. En d’autres temps, on promettait une augmentation de 12 %, mais la hausse n’était en réalité que de 5 %… Je sais, monsieur le sénateur Longeot, que vous veillerez, ainsi que vos collègues, à ce que cette programmation soit respectée, et que vous soutiendrez tous cette augmentation à venir. Le Président de la République s’est engagé en ce sens avec cette parole forte : il n’y aura pas de promesses non tenues. Trop souvent, les outre-mer ont été déçus de voir les promesses rester lettre morte, faute de financement.

Le Président de la République a aussi clairement indiqué que le prochain projet de loi de finances aurait vocation à traduire financièrement les conséquences des assises. S’y ajoutent les plans et les contrats de convergence prévus dans la loi EROM, dont la signature doit intervenir l’année prochaine. Les conclusions des assises nourriront bien entendu les réflexions et les discussions, mais ne s’y substitueront pas.

La convergence est parfois une notion complexe à cerner, vous le savez. Je n’en remets pas en cause la portée, mais je veux que nous ayons des échanges francs sur son contenu, afin de ne pas être dans l’injonction, de ne pas empêcher les territoires de définir des aspirations et des stratégies distinctes, adaptées à chacun d’entre eux.

Pour l’heure, le budget pour 2018 nous permet de construire une politique cohérente et volontariste. J’ai défini trois priorités.

La première est le développement des territoires. Les engagements des contrats de plan et de développement entre l’État et les collectivités s’élèveront à 152 millions d’euros, en augmentation de 12 % par rapport à l’année passée. Il s’agit ici de routes, de ponts, de réseaux d’eau potable ou de filières de gestion des déchets. Il est en effet vrai, monsieur Patient, que les outre-mer, notamment votre territoire, ont des retards structurels importants qu’il nous faut rattraper. C’est l’objet des contrats de convergence qui seront mis en place.

Pas plus qu’au cours des précédentes mandatures, le Fonds exceptionnel d’investissement, le FEI, dont les crédits sont maintenus à 40 millions d’euros, n’a vocation à résumer l’effort de l’État en matière d’investissements publics. Au-delà des différents outils de la mission « Outre-mer », le Président de la République s’est engagé à ce que les outre-mer bénéficient de 1 milliard d’euros au titre du Grand plan d’investissement. Il vous sera rendu compte régulièrement de l’utilisation de ces crédits.

La deuxième priorité, à laquelle, vous le savez, je suis attachée, c’est la jeunesse.

Je rappelle que les effectifs du service militaire adapté sont en augmentation : 127 emplois supplémentaires seront créés au cours du quinquennat, dont 20 dès l’an prochain. Le Premier ministre s’est engagé cette semaine à développer les capacités d’accueil du SMA en Nouvelle-Calédonie.

Les crédits du FEBECS seront doublés. L’annonce en a été faite, malheureusement après la parution des documents budgétaires. Je vous rassure, monsieur Longeot, le nombre de trajets financés passera bien de 4 000 à 8 000.

S’agissant de l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité, ou LADOM, vous avez été nombreux à exprimer vos préoccupations. Je vous confirme que l’ensemble des besoins présents et à venir seront financés. Vous pouvez compter sur moi, monsieur le sénateur Théophile. La loi EROM a élargi les dispositifs de continuité territoriale. Ces mesures entreront progressivement en vigueur, et nous serons au rendez-vous de ces enjeux essentiels pour les jeunes de nos territoires.

Enfin, la troisième priorité, c’est l’emploi. Plus de la moitié de ce projet de budget est consacrée au remboursement d’exonérations de charges pour les entreprises. Ces dispositifs, couplés avec le maintien, en 2018, du CICE, majoré à 9 % en outre-mer, sont essentiels à la compétitivité des entreprises et à la préservation de l’emploi.

Au-delà de la préservation de ces dispositifs, et parce que les échéances et le contexte nous obligent à penser l’avenir, je veux évoquer plusieurs projets que je promeus, parmi lesquels la réforme des aides aux entreprises.

L’économie est au cœur des Assises des outre-mer. Sans développement économique, il ne peut y avoir ni perspectives d’avenir ni cohésion sociale. Je l’ai dit, on ne peut pas penser l’économie aujourd’hui comme on la pensait hier. Nos sociétés ont changé, et il faut préparer les outre-mer à affronter l’avenir. Clarifier, rendre lisibles les dispositifs, protéger et soutenir les entreprises outre-mer, mais aussi soutenir l’innovation et la recherche pour construire l’économie de demain : voilà mon ambition. Il ne s’agit ni de coups de rabot, ni de rafistolage. L’immobilisme n’est pas dans l’ADN de ce gouvernement, et surtout pas dans le mien. La méthode du Gouvernement, c’est la justice, la sincérité, l’audace. Je veux des outils modernes, ciblés, efficaces, …

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