La séance, suspendue à treize heures trente, est reprise à quinze heures, sous la présidence de Mme Valérie Létard.
La séance est reprise.
J’informe le Sénat que des candidatures ont été publiées pour siéger au sein, d’une part, de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 et, d’autre part, de l’éventuelle commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur le projet de loi de finances pour 2018, en cours d’examen.
Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.
Ce rappel au règlement s’inscrit dans la droite ligne de celui qu’a fait ce matin notre collègue Nathalie Goulet.
Donald Trump, hier, a reconnu Jérusalem comme capitale de l’État d’Israël. Il a ainsi mis fin à une pratique engagée par Bill Clinton, consistant à maintenir Tel-Aviv comme capitale reconnue et siège de l’ambassade américaine en Israël, malgré le Jerusalem Embassy Act de 1995.
Cette décision constitue une véritable faute politique, heureusement très largement condamnée dans le monde et en France. Après une première réaction timide hier soir, notre diplomatie a pris la mesure de la provocation du locataire de la Maison-Blanche : la France fait ainsi partie des huit pays demandant en urgence la réunion du Conseil de sécurité de l’ONU.
Cette annonce et cette décision du président américain constituent une véritable provocation, et mettent le feu aux poudres dans une région qui, clairement, n’a pas besoin de cela : provocation vis-à-vis des Palestiniens tout d’abord, qui, depuis des décennies, luttent pour leur intégrité territoriale, reconnue par l’ONU, et pour leurs droits ; provocation, ensuite, vis-à-vis des Israéliens désireux d’arriver à un accord de paix et qui, chaque jour, luttent contre les groupes violents et haineux de tous bords et de toutes nationalités ; provocation, enfin, vis-à-vis de l’ensemble de la communauté internationale, dont les décisions et prises de position s’accumulent, de la reconnaissance de Jérusalem comme ville internationalisée, en 1949, à l’initiative de Paris, en 2017, sur la nécessité de conclure un accord instituant deux États indépendants et libres, en passant par la reconnaissance de Jérusalem-Est comme occupée en 1967.
Reconnaître Jérusalem comme capitale de l’État d’Israël, c’est réitérer l’échec de Camp David II, en 2000-2001, et éloigner encore toute perspective d’une paix durable et solide entre les Israéliens et les Palestiniens, perspective qui ne se concrétisera que par l’instauration de deux États indépendants dans les frontières issues de la résolution onusienne de 1967.
Donald Trump a agi en va-t’en-guerre patenté en prenant cette décision ; cet acte insensé ne peut avoir pour conséquence qu’une nouvelle flambée de violence, dont personne ne sortirait vainqueur.
Au vu de la gravité de la situation, madame la présidente, le Sénat, dont l’expertise en politique internationale n’est plus à démontrer, s’honorerait à provoquer rapidement une réunion de sa commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, afin que la voix de notre chambre résonne fortement dans le débat public.
Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste – Mme Nathalie Goulet, ainsi que MM. Roland Courteau et Xavier Iacovelli applaudissent également.
Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2018, adopté par l’Assemblée nationale.
Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.
Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Économie » (et articles 54 quinquies, 54 sexies, 54 septies et 54 octies) et du compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés ».
La parole est à Mme la rapporteur spécial.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la mission « Économie », qui est créditée à hauteur de 1, 9 milliard d’euros, est une mission très éclatée, sur laquelle il est difficile de porter une appréciation d’ensemble. Elle porte en effet une multitude de dispositifs en faveur des entreprises, et notamment des PME, dans les secteurs de l’artisanat, du commerce et de l’industrie, mais comprend aussi les crédits des administrations, autorités administratives indépendantes et opérateurs chargés de la mise en œuvre de ces diverses politiques.
C’est d’ailleurs cet éclatement qui explique, très largement, la stabilité de l’ensemble des crédits d’une année sur l’autre.
Je me limiterai donc à quelques remarques ciblées sur les points qui ont retenu notre attention, et celle de la commission des finances dans son ensemble.
Tout d’abord, les instruments de soutien aux TPE-PME, regroupés au sein du programme 134, prennent la forme d’aides directes ou indirectes, de prêts, de garanties, de contributions à des actions collectives de formation, de promotion ou de mutualisation des moyens à l’échelle d’une filière. Ils portent sur des secteurs très divers, allant de la petite industrie aux métiers d’arts, en passant par les commerces de centre-ville, les services à la personne ou encore les jeunes PME innovantes.
Le plus souvent, il s’agit d’aides indirectes versées à des intermédiaires, qui sont tout aussi nombreux : opérateurs de l’État, chambres de commerce et d’industrie, chambres de métiers et de l’artisanat, centres techniques industriels, organismes de formation professionnelle, etc.
Dans ces conditions, les arbitrages budgétaires de ces dernières années ont surtout consisté à réduire progressivement le format de ces multiples dispositifs, selon une logique de rabot. Les crédits afférents sont ainsi passés de 113 millions d’euros en 2015 à 81 millions d’euros en 2018, soit une baisse de 28 % en trois ans. L’année prochaine, la baisse devrait être de 12 %.
L’exemple le plus significatif est celui du Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce, plus connu sous le nom de FISAC, dont la dotation a tellement baissé, ces dernières années, que l’on en vient à se demander si ce n’est pas comme si ce fonds n’existait plus. Nous vous proposerons donc tout à l’heure, madame la secrétaire d’État, un amendement à ce sujet.
Ceci dit, cette logique de rabot finira bien par trouver ses limites : au lieu de réduire chaque année un peu plus le budget de tel ou tel instrument sans trancher sur sa pertinence, il serait préférable d’engager une réflexion d’ensemble, et de faire des choix politiques clairs et volontaristes. À force ne pas choisir entre les outils, on finit par ne plus pouvoir mener une politique ambitieuse.
Pourriez-vous donc nous dire, madame la secrétaire d’État, quels sont les choix du Gouvernement en la matière ? Quels sont les dispositifs que vous entendez maintenir, et ceux que vous entendez supprimer ? Allez-vous engager une rationalisation des moyens ?
Tous ces dispositifs d’intervention, toutefois, ne comptent que pour un tiers des crédits de la mission « Économie ». Celle-ci est également constituée, pour moitié, de crédits de personnel, par nature assez rigides, en dépit d’efforts réels, et, pour un cinquième, de crédits de fonctionnement.
Les économies de fonctionnement sont elles aussi entravées par la multiplicité des structures. Dans le détail, toutefois, la situation varie. Je voudrais en particulier souligner que les crédits alloués à l’INSEE – programme 220 – baissent assez peu cette année, mais que cela s’explique par des surcoûts ponctuels, liés au déménagement d’une partie des services de l’institut au centre statistique de Metz, en voie d’achèvement après bien des difficultés, et au déménagement du siège à Montrouge en 2018.
Quant à la légère hausse des crédits des services économiques de la Direction générale du Trésor – programme 305 –, elle est en grande partie exogène, liée au taux de change de l’euro, qui fait mécaniquement augmenter le montant de l’indemnité versée aux fonctionnaires en poste à l’étranger.
Un mot, pour conclure, sur le plan France Très haut débit, porté par le programme 343. En juillet dernier, ici même au Sénat, lors de la conférence des territoires, le Président de la République a réaffirmé l’objectif d’une couverture à 100 % du territoire en 2022, mais sans annoncer de financements supplémentaires.
La participation de l’État reste fixée à 3, 3 milliards d’euros, sur les 20 milliards d’euros prévus à l’horizon 2022, dont 208 millions d’euros d’autorisations d’engagement sont prévus pour 2018.
Pourtant, madame la secrétaire d’État, le plan France Très haut débit prend du retard. Je ne parle évidemment pas des « zones denses » – comprenez : « zones rentables » –, où les opérateurs investissent et où 66, 2 % des locaux sont d’ores et déjà couverts. Je parle des « réseaux d’initiative publique », les RIP, dans les zones non denses : à ce jour, seuls 31, 2 % des locaux ont accès au très haut débit, dont seulement 5, 5 % à la fibre optique.
Dans ce contexte, et compte tenu de l’absence de nouveaux moyens financiers, pourriez-vous nous dire, madame la secrétaire d’État, ce qu’entend faire le Gouvernement ?
En particulier, comptez-vous utiliser la possibilité, prévue par les textes depuis 2016, d’obtenir des engagements contraignants de la part des opérateurs, assortis, le cas échéant, de sanctions financières ?
Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, un mot, pour commencer, sur le compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés » : dans le projet de loi de finances initiale, il correspondait presque exclusivement au Fonds de développement économique et social, dit FDES. Bien que doté de 100 millions d’euros pour 2018, celui-ci n’est plus guère utilisé, et son taux de consommation est de l’ordre de 0, 3 %.
Est-ce à dire que les crédits alloués à ce fonds n’ont pas trouvé preneur ? Pas du tout : une grande partie de ce fonds a été, d’une part, affectée au financement par l’État de la liaison CDG Express et, d’autre part, allouée à Bpifrance, à hauteur de 100 millions d’euros. Nous y reviendrons tout à l’heure dans le cadre de l’examen du financement d’une opération actuellement menée sur l’Iran.
Pour en revenir à la mission « Économie », je souhaite, madame la secrétaire d’État, insister sur deux sujets particuliers.
Premièrement, la politique de soutien à l’internationalisation des entreprises, et notamment des TPE-PME : celles-ci sont trop peu nombreuses à se lancer à l’export. La France compte 125 000 entreprises exportatrices, contre 360 000 en Allemagne et 200 000 en Italie. La création par le précédent gouvernement de Business France et de Bpifrance a constitué un progrès important pour toutes ces entreprises.
Néanmoins, le dispositif public de soutien à l’exportation demeure dans l’ensemble défaillant – il suffit d’ailleurs, pour s’en convaincre, de regarder les résultats de notre commerce extérieur. On constate, phénomène bien connu dans notre pays, une superposition des compétences et des talents ; mais jamais une superposition n’a fait une addition. En additionnant les talents et les compétences, on pourrait peut-être trouver une issue à ce déficit, qui devient structurel.
À cette fin, la commission des finances a mené une réflexion et formulé des propositions.
Il y a quelques jours, le directeur général de Business France a remis au Gouvernement ses propositions visant à mettre l’agence au cœur d’une « équipe France » capable de faire travailler ensemble tous les acteurs, à l’étranger comme dans les territoires où se trouvent nos potentiels exportateurs. L’idée serait en particulier de s’appuyer sur un outil digital innovant, une plateforme en ligne unique constituant un véritable système de gestion de la relation avec les usagers. Madame la secrétaire d’État, pourriez-vous nous donner une première idée des suites que le Gouvernement entend donner à ces propositions ?
Une question particulière, et cruciale, a retenu notre attention : comment organiser un tel dispositif dans les territoires ?
Si Business France a su s’imposer, à l’international, comme un acteur incontournable, il existe une défaillance dans le système : ce sont les chambres de commerce qui connaissent les territoires, donc les entreprises exportatrices, notamment les TPE-PME, qui y sont installées.
En fin de compte, 400 conseillers de chambres de commerce et d’industrie, les CCI, travaillent sous l’autorité d’un organisme ayant vocation à être en relation avec Business France. C’est ce qu’on appelle une superposition ou si l’on préfère un filtre. Or, lorsque l’on filtre les compétences ou les talents, on obtient certes une synthèse, mais cela nous amène aussi à considérer que le déficit du commerce extérieur de la France doit être structurellement à regarder d’un œil nouveau.
C’est là que les complémentarités entre Business France et les agents des CCI devraient permettre de définir une autorité nouvelle. Nous vous ferons une proposition en ce sens et nous attendons votre avis sur cette initiative.
Le second sujet, madame la secrétaire d’État, sur lequel je souhaitais attirer votre attention est le French Tech Central. J’ai eu l’occasion, avec mon collègue Thierry Carcenac, de visiter dans le XIIIe arrondissement de Paris la Station F. Cet espace offre un avantage extraordinaire : il permet de réunir en un même lieu non seulement des entreprises innovantes, des start-up, mais également une somme de services publics qui sont à la disposition de ces entreprises. Cela crée une légèreté, une fiabilité de l’information, en direct. Quelques éléments sont encore à parfaire, néanmoins les utilisateurs, qu’il s’agisse des entreprises ou des acteurs, c’est-à-dire les services publics, sont plutôt satisfaits du mode opérationnel entre les services publics et les TPE-PME.
M. Bernard Lalande, rapporteur spécial. J’aimerais connaître l’avis du Gouvernement sur l’agilité de ce dispositif. Peut-il émerger de ce type d’initiative une disposition d’ordre général ?
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le Gouvernement nous invite à adopter une mission dont les crédits sont stables, avec une légère baisse de 1 % des crédits de paiement.
De fait, elle ne comporte pas de bouleversements profonds pour les entreprises, les mesures qui les affecteront l’an prochain relevant essentiellement soit de la première partie du présent projet de loi, soit du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Si bien que la commission des affaires économiques a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de cette mission.
Elle a également procédé à l’examen des moyens mis en œuvre par l’État pour garantir la conduite des politiques en faveur des entreprises, dans le cadre des financements assurés par la mission.
À ce titre, la commission a considéré que le fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce, le FISAC, était un instrument qui avait fait ses preuves, et qui devrait constituer un élément majeur de la stratégie de revitalisation commerciale des centres-bourgs et des centres-villes. Elle a regretté le caractère particulièrement modique de la dotation prévue pour 2018 et s’apprêtait à l’abonder sur ma proposition avant que les députés ne se saisissent du sujet et votent une augmentation de 2 millions d’euros. Malgré cela, je rappelle que le FISAC est le dernier instrument de soutien opérationnel du budget de l’État en la matière : il mérite qu’on lui accorde bien davantage.
C’est pourquoi je suis totalement favorable à l’amendement de la commission des finances qui vise à aller encore plus loin dans cette voie. Je précise que la commission des affaires économiques souhaite ardemment que ces fonds soient majoritairement orientés vers la revitalisation des centres-villes et des centres-bourgs.
La commission des affaires économiques du Sénat s’était également inquiétée de la diminution drastique des crédits d’intervention accordés aux instituts de consommation et aux associations de consommateurs. Cette baisse, de l’ordre de 40 %, aurait conduit le monde de la consommation dans une impasse financière immédiate. L’Assemblée nationale a finalement limité la diminution des crédits à 5 %. Pour autant, il est nécessaire d’engager très rapidement une réflexion de fond sur le rôle des différents acteurs de la consommation et sur les conditions dans lesquelles les pouvoirs publics doivent leur apporter un soutien.
Enfin, malgré une augmentation des crédits budgétaires pour financer l’activité de garantie de Bpifrance, cette dernière devra malheureusement revoir son offre à la baisse. Cela pose la question préoccupante de la pérennité d’une politique favorisant l’accès au crédit des entreprises, notamment les plus concernées d’entre elles, c’est-à-dire les PME et TPE.
L’existence d’un mécanisme de garantie « de masse » sur fonds publics reste essentielle. Il conviendra donc d’être vigilant sur les choix du Gouvernement à l’avenir.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, l’analyse du volet « numérique et poste » de la mission « Économie » conclut à un avis favorable. Elle fait émerger quatre points qu’il convient de souligner.
Le premier point concerne le transport de la presse par La Poste, qui apparaît toujours problématique. Cette activité de service public est structurellement déficitaire pour La Poste et les tarifs postaux pratiqués faussent visiblement la concurrence entre les différents types de presse. La méthode unilatérale et sans concertation choisie par l’État pour prendre la suite des accords dits « Schwartz » n’est pas satisfaisante.
Le deuxième point concerne le fonds d’accompagnement de la réception télévisuelle, qui sera mis en place en janvier prochain. Géré par l’Agence nationale des fréquences, il prendra en charge les coûts de la lutte contre les brouillages de la télévision diffusée par voie hertzienne terrestre de plus en plus fréquents du fait, notamment, du déploiement de la 4G. Il conviendra donc, madame la secrétaire d’État, de doter ce fonds de façon suffisante afin de répondre aux nombreuses déficiences constatées.
Le troisième point concerne la subvention de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP. Cette subvention est également satisfaisante. Mais l’Autorité s’est vu notifier un schéma d’emplois à moins trois. Cette situation m’apparaît peu compatible avec le fait de confier régulièrement de nouvelles missions à l’Autorité.
Le quatrième point concerne le Plan France Très haut débit, qui devrait faire l’objet de certains ajustements dans les semaines à venir. À cette occasion, il serait souhaitable que le Gouvernement établisse une trajectoire de financement au-delà de 2022 et revoie la question de la fiscalité des opérateurs télécoms, à ce jour contre-incitative.
J’en viens au point approfondi : la place du satellite dans la couverture numérique.
Le déploiement des technologies filaires fait aujourd’hui face à des difficultés physiques et financières, qui ne permettent pas d’atteindre les territoires peu denses et les habitats isolés. Afin de remplir les objectifs de bon haut débit en 2020 et de très haut débit en 2022, il convient de s’appuyer sur un bouquet technologique comprenant l’ensemble des technologies hertziennes. Le satellite est une de ces solutions. Il présente plusieurs avantages : il ne nécessite pas de recourir aux fonds publics pour financer l’infrastructure ; il peut être déployé rapidement en France, mais aussi dans les territoires ultramarins ; il est repositionnable en fonction de l’avancée de la fibre.
Un travail préalable d’identification des besoins de chaque territoire est, bien sûr, nécessaire et devra être conduit afin de bien choisir les options technologiques les plus rationnelles d’un point de vue économique.
Alors que certains industriels envisagent de développer l’offre avec un satellite américain, il est absolument nécessaire, madame la secrétaire d’État, de privilégier le recours à un satellite de fabrication franco-européenne. L’ensemble des acteurs – constructeurs, opérateurs, fournisseurs d’accès à internet – doivent rechercher un accord sur ce sujet stratégique pour l’indépendance technologique de la France et de l’Union européenne.
En ce sens, le Plan France Très haut débit doit positionner la solution satellitaire dans des conditions optimisées. Il s’agit d’améliorer la commercialisation du satellite, sachant qu’un seul des quatre grands opérateurs propose aujourd’hui des offres, et de favoriser l’information des collectivités locales comme des utilisateurs pour expliquer les progrès de l’internet par satellite et les enjeux autour de cette industrie en devenir.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, mon rapport pour avis porte cette année sur un axe émergent et à mon sens essentiel des politiques de soutien à l’industrie, à savoir le projet « Industrie du futur ».
Ce projet, issu des trente-quatre plans de la nouvelle France industrielle, est l’équivalent français du plan Industrie 4.0 de l’Allemagne. Il vise à accompagner l’industrie française dans son virage vers le numérique, avec des enjeux forts en termes de gains de productivité, de montée en gamme et certainement de relocalisation de nombreuses activités industrielles.
Ce projet comprend principalement deux volets. Le premier volet vise à favoriser l’émergence d’une offre française de solutions « 4.0 » pour l’industrie, par exemple dans le domaine de la cobotique ou de la fabrication additive. C’est le volet des start-up et de la French Tech et, plus largement, des politiques de soutien à l’innovation. Je n’y insiste pas.
Le second volet, moins médiatique, mais tout aussi important, vise à accompagner le déploiement des solutions techniques de l’industrie du futur dans l’ensemble du tissu industriel, toutes branches confondues. Or, si les grands groupes ont déjà pris le virage de l’industrie du futur, les entreprises de plus petite taille sont beaucoup moins mobilisées, surtout pour des raisons financières, sur cet enjeu.
Je tiens donc à saluer le travail de conseil et d’accompagnement réalisé, avec peu de moyens, par les régions et l’alliance « Industrie du futur » pour aider les entreprises à s’engager sur cette voie : 5 000 PME et ETI ont déjà bénéficié d’un accompagnement personnalisé. Il faut, madame la secrétaire d’État, amplifier cet effort.
Concernant l’aspect financier, tout en saluant l’intérêt des prêts « Industrie du futur » distribués par Bpifrance, je souhaite attirer votre attention sur l’intérêt de créer un dispositif de suramortissement. Ce dispositif a été voté au Sénat ; à l’Assemblée nationale et au Gouvernement maintenant de l’étudier. S’il faut le recentrer sur l’industrie du futur et le réserver aux PME et aux ETI, discutons-en. Une mesure générale de suramortissement pourrait sembler coûteuse. Mais il me paraît nécessaire d’aider l’industrie du futur et de donner une chance à ces entreprises de s’équiper, qu’il s’agisse de la digitalisation, de la robotique ou de la cobotique.
La France achète toujours sept fois moins de robots que l’Allemagne et deux fois moins que l’Italie. Un mécanisme de suramortissement ciblé pourrait permettre à notre industrie de s’équiper réellement avec les technologies du futur.
M. Martial Bourquin, rapporteur pour avis. Il y va, à côté de nos grands groupes, de tous les équipementiers qui ont beaucoup de mal à prendre le virage extraordinaire que représente cette nouvelle révolution industrielle !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, comme chaque année, la commission des lois a examiné les crédits du programme « Développement des entreprises et régulations », au titre de ses compétences en matière de droit des entreprises et de la consommation.
Je ne reviens pas sur la baisse, cette année encore, des crédits de paiement, car cela a déjà été souligné. Ce programme reste fortement mis à contribution par l’effort budgétaire, mais en 2018 cette baisse affectera lourdement certaines administrations en charge de ce programme.
Elle affectera aussi les crédits destinés à soutenir nos entreprises à l’export, alors qu’il s’agit d’une priorité. Une telle évolution ne peut, bien entendu, que susciter des interrogations.
Premièrement, nous nous interrogeons sur l’Autorité de la concurrence. En dépit d’une hausse optique du plafond d’emploi, ses crédits de fonctionnement vont diminuer de près de 1 million d’euros, empêchant en réalité d’atteindre ce plafond. Madame la secrétaire d’État, comment justifier cette situation contradictoire avec l’accroissement des missions confiées à l’Autorité, en particulier depuis deux ans, à l’égard des professions réglementées du droit ? Nous voyons bien que la mise en œuvre de la réforme de ces professions, à commencer par les notaires, est assez éloignée des objectifs affichés, qu’il s’agisse du renouvellement de la profession ou de la viabilité économique des nouveaux offices.
Deuxièmement, nous nous interrogeons sur la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF. Celle-ci va connaître en 2018 une forte baisse de 45 emplois et de 4, 3 % de ses crédits de paiement. Aujourd’hui, déjà, les agents dans les services déconcentrés ne sont plus assez nombreux pour assurer une vraie protection des consommateurs. Année après année, en observant les indicateurs d’activité de cette direction, nous faisons le constat que son organisation administrative accentue les effets négatifs de la fonte des effectifs. Le ministre, dans le cadre du plan Action publique 2022, a proposé une réorganisation de ces services afin de rétablir la chaîne hiérarchique sur le terrain. Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous nous en dire plus ?
Troisièmement, nous nous interrogeons sur la Direction générale des entreprises. Là encore, nous constatons une nouvelle baisse des crédits et des effectifs. Les services déconcentrés, dans les pôles 3E, entreprises, emploi et économie, des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, les DIRECCTE, qui n’ont déjà plus de crédits d’intervention, vont en pâtir.
On ne peut pas avoir durablement, d’un côté, des services déconcentrés de l’État en voie de nécrose, par l’attrition de leurs effectifs et de leurs crédits, et, de l’autre, des acteurs dynamiques, qui se coordonnent mieux et qui prennent des initiatives. Je pense, par exemple, à Business France et aux chambres de commerce et d’industrie sur l’internationalisation. Je pense aussi aux régions et aux compagnies consulaires pour l’élaboration et la mise en œuvre des fameux schémas régionaux de développement économique d’innovation et d’internationalisation…
En matière d’accompagnement des entreprises, à la faveur de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi « NOTRe », une clarification des responsabilités est nécessaire entre l’État et les régions. L’État doit rester responsable des priorités nationales et des politiques de soutien des filières, mais le rôle d’impulsion et de coordination des régions est reconnu par tous les acteurs au niveau local : il faut désormais en tirer toutes les conséquences.
Quatrièmement, nous nous interrogeons sur Business France. Le niveau des subventions de l’État va aussi nettement baisser, restreignant les capacités d’accompagnement des entreprises.
Dans ce contexte de baisses de crédits plus marquées en 2018, la prise de conscience est faite de la nécessité de revoir singulièrement l’organisation territoriale des services de l’État.
En outre, le dynamisme des autres acteurs redonne confiance dans une amélioration à venir de l’accompagnement de nos entreprises, dans les territoires comme à l’étranger.
Au vu de ces perspectives et dans l’attente de leur concrétisation – nous posons là, madame la secrétaire d’État, un acte de foi et c’est la foi qui sauve ! –, la commission des lois a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits du programme.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.
Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Noëlle Rauscent.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous examinons là une mission qui est centrale. Centrale parce qu’il s’agit de l’autorisation parlementaire d’une stratégie économique concrète, efficace, capable de répondre aux défis contemporains.
À travers quatre programmes, cette mission a pour ambition de favoriser l’emploi, la compétitivité des entreprises, le développement des exportations ainsi que d’assurer la protection des citoyens consommateurs. Dit autrement, il s’agit de l’une des pierres à l’édifice de transformation de l’environnement économique français que porte le Gouvernement.
Nous avons des champions nationaux, qui signent des contrats en milliards d’euros. Mais nous avons aussi un vivier d’entreprises dans nos territoires, qui les font vivre. Dans l’Yonne, l’entreprise RB3D, qui fabrique des exosquelettes, n’a rien à envier technologiquement aux pépites américaines ou chinoises.
Parce qu’elles dépendent moins de gros contrats, les petites et moyennes entreprises ont une activité plus stable, ce qui est important pour les territoires qui ont souffert de fermetures de grosses unités.
Mes chers collègues, beaucoup a déjà été fait pour les petites et moyennes entreprises depuis l’été, comme la création d’un code du travail numérique, la primauté donnée au fond sur la forme en cas de prise de décision, l’ouverture du dialogue social dans les petites entreprises.
Le projet de loi de finances complète ces mesures. Citons, par exemple, la transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, en baisse de charges pérennes ou encore la baisse de l’impôt sur les sociétés, qui concerne en tout premier lieu les PME puisque le taux normal d’impôt sur les sociétés passe de 33 % à 28 % dès 2018 pour les 500 000 premiers euros de bénéfice des entreprises.
Par ailleurs, un volet important à destination des entreprises et des territoires concerne un aspect central pour l’attractivité de ces derniers et pour leur développement économique : la question du très haut débit.
Lors de la conférence des territoires, en juillet dernier, notre Président de la République a annoncé que la couverture de notre pays en très haut débit serait une priorité.
Le but est donc de poursuivre le plan France Très haut débit initié dès 2010, en ayant pour objectif de couvrir la totalité du territoire à l’horizon 2022.
Rappelons que, selon l’Agence du numérique, ce qui a été souligné par le récent rapport des députés Laure de La Raudière et Éric Bothorel, 13 millions de Français n’auraient pas accès à un débit internet fixe de qualité. Dans certaines zones, les connections internet restent aléatoires, voire impossibles, et il n’est parfois même pas possible de téléphoner d’un portable.
Seulement 50 % de la population bénéficie du service de très haut débit essentiel aux entreprises.
La fracture numérique entre les territoires existe bel et bien. Au XXIe siècle, nous ne pouvons laisser les utilisateurs dans cette situation d’inégalité, que cela concerne la sphère privée ou la sphère professionnelle.
À l’heure où la numérisation des services se généralise et devient même obligatoire, nous ne pouvons pas abandonner une partie de nos territoires au bord de la route.
La couverture numérique est essentielle à la survie des territoires ruraux et à leur développement.
Un document, publié il y a quelques jours par l’Association des maires de France, l’AMF, diffuse une carte de France éditée par l’ARCEP. Elle permet de visualiser très clairement le déploiement de la fibre optique dans notre pays. La prédominance des zones non couvertes saute aux yeux. La carte par commune est essentiellement blanche, car 95 % des communes ne sont pas concernées par la fibre. À de rares exceptions, seules les villes, grandes et moyennes, sont fibrées et le monde rural reste presque totalement déserté.
N’oublions pas l’outre-mer, où seule La Réunion est assez bien pourvue alors que les autres territoires sont presque totalement privés de fibre.
On ne peut envisager que des professionnels souhaitant poursuivre leur activité ou s’implanter dans des zones rurales ne puissent bénéficier de réseau internet et de téléphonie mobile. Nous savons tous que le numérique est un enjeu de croissance et de compétitivité, particulièrement dans nos territoires ruraux qui se dépeuplent.
Nous connaissons par ailleurs les faiblesses actuelles au niveau local : plans d’affaires trop optimistes des réseaux d’initiative publique, manque de moyens des collectivités pour contrôler l’action des entreprises auxquelles elles délèguent la construction ou l’exploitation de leurs réseaux.
Est-il réaliste de penser que la fibre optique pourra être amenée vers les zones blanches et les zones grises d’ici à 2022, soit dans quatre ans ?
La Cour des comptes a estimé récemment que le coût du plan s’élèverait à 35 milliards d’euros au lieu des 20 milliards prévus, avec un objectif tenu autour de 2030 plutôt que de 2022.
À certains endroits, les travaux de mise en place de la fibre ont été entamés, mais stoppés par manque de financement.
Afin de garantir la compétitivité des entreprises installées dans des zones mal couvertes, comme cela peut être le cas dans mon département de l’Yonne où la couverture est parfois aléatoire, voire inexistante, il est indispensable de s’appuyer sur un mix technologique, c’est-à-dire sur un schéma intégrant des techniques de transition.
La couverture numérique doit véritablement toucher tous les territoires. Il est donc nécessaire d’engager des négociations avec les opérateurs pour que ceux-ci assurent à tous un accès égal au numérique.
… telles que le satellite, pour répondre à la situation de chaque territoire. Il faut aller plus loin, et ce quinquennat doit nous permettre la réussite de ce défi.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, lors de la présentation de la première partie du budget, M. le ministre de l’économie nous avait donné sa vision de l’économie et le fil rouge de ce budget : « Il faut libérer le capital ! »
Je citerai deux chiffres pour illustrer mon propos. Premièrement, 56 milliards d’euros ont été versés aux actionnaires en 2016, soit 13 milliards d’euros de plus qu’en 2015. Deuxièmement, le pay out ratio est de 57 %, c’est-à-dire que 57 % des bénéfices des entreprises sont absorbés par les dividendes, et l’autofinancement recule. On est donc loin, comme le démontrent ces chiffres, de l’emprisonnement du capital !
Mais puisqu’il faut le libérer ou plutôt le débrider, vous y allez franchement. Au moins, je dois vous reconnaître de la cohérence et de la ténacité : économie fondée entre autres sur la cession d’actifs de l’État, suppression de l’ISF, réduction de l’impôt sur les sociétés, cotisations sociales considérées comme des charges, remise en cause du droit du travail.
Je dois vous avouer une chose : je ne suis pas un grand spécialiste de l’alpinisme – cela se voit
Sourires.
–, alors peut-être pourrez-vous me réexpliquer cette théorie du premier de cordée ?
Nouveaux sourires.
Pour ma part, j’ai toujours préféré les sports collectifs, notamment le rugby, où chacun donne en fonction de ses moyens et récolte en fonction de ses besoins.
Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain.
Nous considérons que ce projet de loi de finances favorise les rentiers et les spéculateurs, et non l’économie réelle !
L’État renonce à plus de 5 milliards d’euros de recettes annuelles en espérant que cet argent sera réinvesti par les ménages pour développer des entreprises françaises. Mais cet espoir est bien léger lorsque l’on sait que rien n’oblige à investir dans notre tissu de PME ni en France.
Ainsi, ce budget, loin de soutenir massivement nos entreprises, est le prolongement des politiques austéritaires du précédent quinquennat.
Pourtant, nos entreprises ont besoin d’un accès massif au crédit, d’interlocuteurs étatiques fiables, d’un encadrement de la sous-traitance, d’investissements pérennes. Or l’État ne se donne pas la capacité d’intervenir en soutien, y compris si l’enjeu est de préserver des savoir-faire et des emplois à moyen et long terme, ou encore en renforcement, voire en créant de nouvelles filières industrielles.
Les crédits de cette mission illustrent le désengagement de l’État. Celui-ci ne passe plus par des mesures volontaristes et ciblées, mais se sert du levier fiscal. Or ce dernier ne peut remplacer le soutien direct aux entreprises par la dépense publique.
Ainsi, comme cela a été souligné en commission, « le principal levier d’aide aux entreprises reste de nature fiscale, et non budgétaire ».
Ce budget, c’est moins de mesures directes en faveur des entreprises – moins de 2 milliards d’euros – et près 90 milliards d’euros de mesures fiscales indiscriminées, c’est-à-dire aveugles et à l’efficacité plus que douteuse. Ces avantages bénéficieront encore une fois aux grandes entreprises sans que l’impact en termes de création d’emplois soit évalué, et ce même si ce sont les TPE et les PME qui font la force de notre appareil productif. Ce sont elles qu’il convient d’aider à se développer.
Dans le détail, nous déplorons depuis maintenant de nombreuses années la baisse de plusieurs dépenses essentielles pour nos entreprises.
Ainsi, le FISAC est encore en baisse en 2018, passant à 11 millions d’euros de crédits de paiement. Ce fonds joue pourtant un rôle essentiel dans la préservation et la modernisation du tissu commercial en zone rurale, dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville et dans les centres-bourgs. En moins de dix ans, ses moyens ont baissé de 83 % ! Nous saluons donc l’amendement adopté en commission portant les crédits du FISAC à 30 millions d’euros.
De même, on fait la promotion de la protection et de la sécurité des consommateurs. Comment, dès lors, expliquer la baisse continue des dotations à la DGCCRF ? Comment justifier la diminution de 40 % initialement prévue des crédits d’intervention pour les associations de consommateurs agréées ? Un amendement a été voté à l’Assemblée nationale pour réduire la baisse annoncée à 5 %, mais cela reste encore insuffisant.
Enfin, alors que notre industrie est toujours en crise, les crédits destinés au soutien à la politique industrielle reculent de 12 %. Loin de préserver notre patrimoine industriel, il semble au contraire que le Gouvernement ait fait le choix de s’en désintéresser, que ce soit en termes budgétaires ou patrimoniaux.
Nous regrettons aussi qu’il n’y ait pas de ministère de l’industrie dans ce gouvernement.
Enfin, la vente de fleurons industriels à des groupes étrangers semble s’accélérer, l’État prévoyant un plan de cessions d’actifs de 10 milliards d’euros, à rebours de la nécessité de trouver des moyens pour assurer la stabilité capitalistique de nos industries.
Aujourd’hui, il n’est plus à démontrer que les entreprises individuelles et les PME font la richesse de nos territoires, et permettent de lutter contre la désertification.
Il est illusoire de croire que nous pourrons faire de la France une start-up nation, en ne soutenant que l’innovation et en négligeant les savoir-faire qui ont fait la richesse de nos territoires. Cela étant, malgré les discours, ce budget ne soutient ni l’innovation, ni les savoir-faire, ni l’industrie. Vous l’aurez compris, mes chers collègues, le groupe communiste républicain citoyen et écologiste votera contre ce projet de budget.
Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la mission « Économie » rassemble les programmes qui ont pour objet d’encourager l’emploi, la compétitivité, les exportations, la concurrence et la protection des consommateurs. Ils sont au nombre de quatre, dont le récent programme « Plan “France très haut débit” », qui devrait financer la couverture intégrale du territoire en internet fixe à très haut débit d’ici à 2022.
Cette mission doit être l’un des vecteurs, l’un des bras armés d’une nouvelle façon, pour l’État, d’intervenir dans l’économie. L’État français, traditionnellement « État stratège », doit en effet repenser son rôle dans une économie mondialisée. Il doit savoir associer volontarisme politique et libération des énergies. Il doit rompre avec la logique de l’« État pompier », qui réagit avec éclat aux crises ponctuelles, sans être capable de dessiner une vision industrielle de long terme. Il doit, enfin, accompagner les mutations du monde du travail, sans laisser un seul travailleur au bord du chemin, sans se résigner à la chute vertigineuse de l’emploi industriel que nous connaissons depuis quelques années.
La France sans ses usines : le titre du livre de Patrick Artus et de Marie-Paule Virard n’est pas seulement le signe d’un déclin industriel inexorable ; il met en évidence un risque pour notre cohésion sociale et notre modèle de société.
Cet effort industriel n’est d’ailleurs pas l’apanage de l’État ; il est également le fait des régions, dont la compétence en matière de développement économique doit être mieux articulée avec celle des administrations centrales. Je voudrais saluer ici l’action de Xavier Bertrand à la tête de la région Hauts-de-France : ses efforts constants en faveur de la reconversion des anciens territoires industriels portent leurs fruits et constituent un modèle de pragmatisme et d’efficacité.
Sans tissu industriel robuste, il n’est pas de puissance exportatrice. Par exemple, les excédents commerciaux titanesques de l’Allemagne sont le fruit de politiques de long terme pour renforcer le Mittelstand, le puissant réseau de PME et d’ETI allemandes.
Si la France est encore le sixième exportateur mondial de biens et services, ses exportations représentant près de 30 % de son produit intérieur brut, les chiffres du commerce extérieur, depuis quelques années, ne sont pas à la hauteur des attentes. Le solde des échanges de biens a baissé de près de 30 % en quatre ans. Le déficit commercial de la France s’est creusé en septembre 2017 de 500 millions d’euros, pour atteindre 4, 7 milliards d’euros, selon les chiffres des services des douanes. Sur douze mois, le déficit cumulé de la France atteint 60, 8 milliards d’euros, contre 48, 1 milliards d’euros en 2016, soit une aggravation abyssale et extrêmement inquiétante.
Dans ce contexte, nous ne pouvons que regretter la diminution des crédits alloués au commerce extérieur. Par exemple, vous n’avez pas augmenté, madame la secrétaire d’État, les crédits affectés à la COFACE et à Business France, …
… dont les programmes d’aide à l’export sont nécessaires à l’accompagnement de nos PME à l’international.
La France ne compte que 125 000 entreprises exportatrices, contre 350 000 en Allemagne. Votre projet de budget ne pas prend pas en compte ce retard criant, dont le comblement devrait être une priorité politique.
Pour terminer, je m’attarderai sur le plan France Très haut débit. Lors de la conférence des territoires du 17 juillet 2017, le Président de la République s’est engagé sur l’objectif d’une couverture du territoire en haut débit d’ici à 2020 et en très haut débit d’ici à 2022. Cela s’est traduit, dans le projet de loi de finances pour 2018, par l’allocation de 208 millions d’euros de crédits au programme 343. Nous estimons néanmoins que ce montant est insuffisant pour que les engagements du Président de la République puissent être tenus.
La couverture numérique est essentielle à la survie de nos territoires, à leur dynamisme et à leur développement. Nous souhaitons que ce budget traduise sincèrement les dépenses afférentes et que soit précisées les modalités de mise en œuvre opérationnelle du plan France Très haut débit.
Pour l’ensemble des raisons que j’ai évoquées, le groupe Les Indépendants – République et Territoires, déçu par le manque d’ambition de cette mission, ne votera pas ses crédits en l’état.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, reconduit cette année encore, représente à lui seul 20, 8 milliards d’euros de crédits, soit plus de 72 % du montant total de la dépense fiscale rattachée à la mission.
Encore aujourd’hui, de l’aveu même du comité de suivi du CICE, il reste difficile d’évaluer les effets réels du dispositif. Ce comité s’accorde toutefois pour estimer à 100 000 le nombre d’emplois préservés grâce à celui-ci entre 2013 et 2015. La fourchette allant de 10 000 à 200 000, cela manque tout de même de précision… Si l’on retient le chiffre de 100 000 emplois préservés, le coût de la mesure s’établit à 20 000 euros par emploi, ce qui, somme toute, est bien plus cher que les emplois aidés !
L’emploi n’est pas le seul bénéfice du CICE, heureusement ! Le CICE a permis à un certain nombre d’entreprises de reconstituer leurs marges, et parfois d’investir, ce qui est une bonne chose. Cependant, quand on y regarde de plus près, il a surtout permis à un grand nombre de grandes entreprises d’augmenter les dividendes pour leurs actionnaires, sans aucun bénéfice pour l’emploi et pour l’investissement. Je pense notamment à la grande distribution, premier secteur bénéficiaire du CICE, dont certains acteurs ont même profité de l’aubaine pour supprimer des emplois, ce qui est un comble !
Alors, mes chers collègues, plutôt que de financer le versement de dividendes, ne serait-il pas temps de recentrer le CICE sur un certain nombre d’objectifs et de secteurs dont on sait qu’il leur manque un petit coup de pouce pour pouvoir embaucher, investir, innover ? Nous espérons que cette proposition sera prise en compte dans les réflexions sur les mesures à venir.
Concernant les autres crédits de la mission, on peut souligner la pertinence, reconnue par tous, de certains mécanismes, comme le Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce, le FISAC, dont le recentrage en 2015 a permis une plus grande efficacité des dépenses, en particulier en faveur du commerce local de centre-ville ou de centre-bourg, notamment dans nos espaces ruraux. C’est pourquoi nous soutiendrons nous aussi l’amendement qui tend à porter les crédits alloués au FISAC à 30 millions d’euros.
En ce qui concerne la fibre, nous voulons croire à l’annonce faite par le Président de la République d’une couverture numérique en très haut débit de l’ensemble du territoire d’ici à 2022. Nous espérons vraiment que le Gouvernement tiendra ses engagements. Dans le Morbihan, beaucoup de doutes ont été exprimés. Il faudra que la puissance publique s’impose pour faire en sorte que les travaux soient accélérés.
Par ailleurs, l’inquiétude est grande au sein des associations de protection des consommateurs agréées. En effet, le programme 134 se voit amputé de 40 % de ses crédits, ce qui pose un certain nombre de questions, s’agissant aussi bien des subventions directes que reçoivent ces associations que des crédits alloués à la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, eux aussi en diminution. On peut se demander comment, dans ces conditions, nous allons pouvoir maintenir le même niveau de protection des consommateurs. Je pense par exemple à l’application de la loi relative à la consommation et de son volet consacré à l’interdiction de l’obsolescence programmée, ou au respect des normes alimentaires en matière de résidus de pesticides.
Avant de conclure, je voudrais évoquer brièvement le projet « Industrie du futur ». En effet, nous disposons d’un vivier de start-up technologiques dans l’ensemble des domaines prometteurs que recouvre aujourd’hui l’appellation « French Tech ». Soutenir la structuration et le développement de ces filières est une nécessité, si l’on veut éviter de se retrouver dans la situation de domination écrasante des géants américains de l’internet que nous vivons actuellement. C’est pourquoi nous saluons ce projet, en insistant sur les efforts que nous devons poursuivre en matière de formation professionnelle, afin d’accompagner les évolutions du marché du travail vers les nouveaux métiers qui vont rapidement émerger dans ces domaines.
Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, cette mission budgétaire me fait penser à cette chanson de Barbara : « À chaque fois, à chaque fois, […] on refait le même chemin. » Chaque année, c’est la même chose, et on ne voit guère de progrès…
Le constat qui a été dressé est accablant : superposition des structures, cacophonie, doublons, inconséquences. Business France, petite lueur dans la nuit, n’est pas assez doté. Nous proposera des amendements visant à y remédier.
Madame la secrétaire d’État, je voudrais plaider pour la diplomatie parlementaire économique et la coopération décentralisée.
Nous sommes nombreux ici à bien connaître qui la Chine, qui les pays du Golfe, qui le Caucase ou l’Iran, et à avoir noué au cours des années des liens avec les secteurs économiques, à avoir créé des synergies. Nous connaissons nos territoires et ses acteurs, nous savons les mettre en relation avec des partenaires étrangers.
Le service de coopération décentralisée doit donc être au cœur des dynamiques du commerce extérieur. Il y a quelques années, notre ancien collègue Jean-Claude Peyronnet, dressant un inventaire, avait relevé que huit régions entretenaient, chacune dans la plus parfaite ignorance de l’action des autres, une coopération avec la Chine…
En matière de coopération décentralisée, je voudrais citer l’exemple de la coopération entre Lyon et Dubaï, qu’Élisabeth Lamure connaît bien pour y avoir beaucoup œuvré. Elle a permis, outre l’établissement d’une ligne aérienne directe entre Lyon et Dubaï, un développement très significatif des affaires. Cette réussite tout à fait remarquable n’est due qu’au territoire, à la chambre de commerce et aux élus.
Il y a quelques années, Mme Bricq, alors ministre du commerce extérieur, avait tenté d’étendre à l’ensemble des régions le modèle de l’agence d’attractivité de l’Alsace, qui fonctionne très bien.
Malheureusement, elle n’a pas pu mener ce projet à son terme. Il est tout de même dommage que l’on ne puisse pas dupliquer les opérations qui marchent, au lieu de toujours réinventer l’eau chaude.
Je me suis amusée à dresser un état des lieux des outils à disposition des collectivités territoriales pour les aider à asseoir leur coopération.
Parmi les autorités étatiques, on trouve la Commission nationale de la coopération décentralisée, qui a notamment pour mission de collecter les informations et de les centraliser – alors qu’il faudrait plutôt, au contraire, les diffuser ! –, le délégué pour l’action extérieure des collectivités territoriales, flanqué bien sûr d’une délégation pour l’action extérieure des collectivités territoriales, ainsi que d’une mission opérationnelle transfrontalière chargée de conduire trois missions, dans un dialogue avec les autorités nationales et européennes – je ne sais pas de quelles autorités il s’agit, mais en tout cas pour notre part nous n’avons pas de rapports avec elle : veiller aux intérêts des territoires transfrontaliers, aider les porteurs de projet, mettre en réseau les acteurs et les expériences. Son dernier rapport date de 2008 ; il serait intéressant de savoir ce qu’elle a fait ces dix dernières années !
On trouve également des instances de concertation des politiques de coopération régionale pour l’outre-mer – je laisserai à nos collègues ultramarins le soin de nous en dire plus à ce sujet –, l’Association des maires de France, l’Assemblée des départements de France, le Conseil des communes et des régions d’Europe.
Ont bien sûr disponible été mis en place des moyens financiers, des cofinancements multiples et variés, un programme formidable appelé « NUTS », dont j’ignore s’il est très opérationnel, des programmes de coopération territoriale France-Espagne-Andorre, France-Belgique, Deux Mers, Rhin supérieur, France-Angleterre, Grande Région, Espace alpin, Espace atlantique, Espace méditerranéen, etc., ainsi qu’un fonds d’urgence humanitaire, des politiques de développement, des instruments de cohésion territoriale… Je m’arrêterai là !
Madame la secrétaire d’État, pour en finir, il faudrait que vous confiiez à des parlementaires une mission visant à dresser un état des lieux et à évaluer tous ces outils, en vue d’instaurer un guichet unique.
Mme Nathalie Goulet. En l’état de notre économie, diviser nos forces n’est absolument plus acceptable. Le dispositif actuel est d’une totale inefficacité. Le Sénat est l’endroit idéal pour organiser la coopération décentralisée : nous connaissons nos territoires, nous connaissons les acteurs, nous sommes parties à l’équipe « France ». Nous avons la France et son rayonnement en partage : il serait grand temps de mettre de l’ordre dans la maison !
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et sur des travées du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, chers collègues, le budget pour 2018 de la mission « Économie » s’inscrit dans une trajectoire qui conjugue notamment deux objectifs étroitement liés : le redressement économique et productif de la France ; la contribution à la restauration progressive des comptes publics de la nation. À cet égard, il s’inscrit dans la continuité du précédent.
Je ne reviendrai pas sur le niveau des crédits des quatre programmes, pour lesquels on constate une certaine stabilité. Mon propos sera plutôt centré sur la question de la place et du rôle de l’État dans la politique industrielle dont notre pays a besoin pour retrouver le rang et les emplois qu’il n’aurait jamais dû perdre.
Sur la question majeure de la place de l’industrie dans notre production, nous partons de loin. La régression de la production industrielle au cours des décennies passées a été considérable, se traduisant par la perte de plus de 3 millions d’emplois depuis 1980.
Après avoir cru, pendant plus de trente ans, que les pays industrialisés s’acheminaient tous vers une société postindustrielle, dans laquelle les activités de services supplanteraient les activités de production, on constate aujourd’hui l’émergence d’un modèle hyperindustriel, fondé sur la convergence de la productique, du numérique et des services, les coûts très bas du transport maritime engendrant la spécialisation des productions et la reconfiguration des chaînes de valeur à l’échelle du monde.
Dans ce contexte de mondialisation, et donc de concurrence exacerbée, la question de fond est celle de la définition de la stratégie industrielle que le Gouvernement entend mener pour relever les grands défis de la compétitivité et de l’emploi.
C’est l’objet du programme 305, « Stratégie économique et fiscale », et du programme 134, « Développement des entreprises et régulations », dédié au soutien aux entreprises qui s’adaptent aux modes collaboratifs, lesquels prévalent désormais pour rester dans la course.
Sur la question de la transformation des filières, en quoi, madame la secrétaire d’État, votre action se distingue-t-elle de la politique mise en œuvre depuis la sortie du rapport Gallois, qui avait dressé le constat d’un décrochage industriel de la France ? Cette politique s’était traduite par la démarche dite de « nouvelle France industrielle », déclinée initialement sous la forme de trente-quatre plans regroupés en neuf « solutions industrielles » et un projet « Usine du futur ». Je n’oublie pas non plus l’instance de partage que permet l’alliance « industrie du futur ». Quelle appréciation portez-vous sur l’écosystème qui a été mis en place dans notre pays avec les industriels eux-mêmes ? Ces industriels nous disent, quand nous les rencontrons, qu’ils ont besoin de stabilité et de visibilité s’agissant des mesures qui leur sont appliquées. Quelle valeur ajoutée le Gouvernement entend-il apporter par rapport à ce qui existe aujourd’hui et qui produit des résultats encourageants ? Quelle place, forcément nouvelle, l’État doit-il prendre dans ce contexte ? Doit-il se limiter au développement de politiques fiscales et d’allégement des charges, comme le donne à penser le projet de budget pour 2018, ou doit-il aller plus loin ?
Personnellement, je crois qu’il faut aller plus loin dans le soutien à l’organisation industrielle du futur et à la montée en gamme de l’offre. L’État ne peut se borner à agir sur la compétitivité-coût, qui n’est qu’un aspect de la problématique de la compétitivité.
Par ailleurs, on peut se demander quelle politique de soutien l’État entend mener à l’endroit de l’économie industrielle de nos territoires, souvent ruraux, souvent structurés en pôles de compétitivité, étant donné le très faible niveau des crédits qu’il est prévu de lui consacrer dans ce projet de budget. Cette ligne budgétaire connaît même une baisse de 1 million d’euros…
Le ministre de l’économie et des finances, auditionné par notre commission, a évoqué le concept d’« État stratège ». Qu’entendez-vous concrètement par cette notion ?
À cet égard, nous avons besoin d’une clarification de la doctrine du Gouvernement en matière de participation de l’État au capital des entreprises œuvrant dans des domaines relevant de l’intérêt général et de la souveraineté nationale. L’audition récente de M. le ministre de l’économie et des finances par la commission des affaires économiques, à propos notamment d’Alstom et de STX, ne nous a pas permis de comprendre où l’État veut aller en la matière. Il ne faudrait pas que, à terme, l’État qui se veut « stratège » se transforme en spectateur ou en commentateur de décisions prises par d’autres, au détriment de notre souveraineté et de nos emplois.
À partir de 2012, l’État s’est doté d’une doctrine en matière d’actionnariat, qui vise, pour les « entreprises jouant un rôle stratégique pour l’intérêt national, […] à protéger les intérêts économiques et patrimoniaux du pays en veillant à la mise en œuvre d’une stratégie économique, industrielle et sociale exemplaire, garante de la préservation sur le territoire national des emplois et des compétences ».
Cette doctrine a été confortée par l’instauration du droit de vote double, qui permet de renforcer le rôle de l’État au sein des entreprises. Une nouvelle gouvernance des entreprises à participation publique a aussi vu le jour, permettant de doter l’État de plus grandes capacités d’influence dans les sociétés dont il détient une majorité du capital.
Aujourd’hui, la vente de 10 milliards d’euros de titres va diminuer drastiquement les actifs de l’État. Au bénéfice de qui interviendra cette cession massive de titres ? Quelle recette financière procurera-t-elle au budget de l’État, sachant qu’actuellement le rendement de ces actifs est supérieur à celui des marchés ?
Quant au fonds de soutien à l’innovation, qu’une partie de ces recettes de cession est censée alimenter, comme le souligne le rapport pour avis d’Alain Chatillon sur le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », il devrait financer l’innovation à hauteur de 200 millions à 300 millions d’euros. L’État dépense par ailleurs 8, 5 milliards d’euros, dont 2, 2 milliards d’euros hors dépenses fiscales. L’ordre de grandeur n’est pas du tout le même. On ne comprend pas quelle nécessité il y aurait de céder ces 10 milliards d’euros d’actifs.
On voit, par cet exemple, qu’il y a un grand besoin de clarification de la doctrine de l’État en matière de participation au capital, dans le cadre de la stratégie de développement économique qu’entend mettre en œuvre le Gouvernement.
D’autres points mériteraient d’être abordés, mais je conclurai en disant que, compte tenu des incertitudes qui pèsent pour l’instant sur la stratégie que le Gouvernement compte développer en matière économique, nous nous abstiendrons sur les crédits de cette mission.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord de saluer le travail réalisé par les différents rapporteurs des crédits de la mission « Économie » du projet de loi de finances pour 2018. C’est un thème auquel je suis très sensible, en tant que membre de la délégation sénatoriale aux entreprises, présidée par Élisabeth Lamure, sénateur du Rhône.
Si les crédits de la mission « Économie » affichent une certaine stabilité, il existe néanmoins une grande disparité selon les programmes : baisse de 7 % des autorisations d’engagement pour le plan France Très haut débit, augmentation de 17, 5 % des autorisations d’engagement pour le programme 134, « Développement des entreprises et régulations ».
Au-delà des écritures comptables et du savant équilibre entre autorisations d’engagement et crédits de paiement, les crédits de la mission « Économie » représentent aussi un signal envoyé au monde de l’entreprise.
Je souhaite évoquer deux sujets qui me préoccupent, relatifs au programme « Développement des entreprises et régulations ».
Le premier tient à l’action n° 21, Développement du tourisme, qui pâtit d’une baisse de 67 % de ses autorisations d’engagement et de 56 % de ses crédits de paiement. En effet, le Gouvernement a décidé de supprimer tous les crédits d’intervention jusqu’alors affectés à cette action. Les actions en faveur du tourisme se limiteront donc, pour la mission, à des dépenses fiscales liées à l’application d’un taux réduit de TVA et aux chèques-vacances.
La mobilisation complète du Gouvernement, annoncée par le Premier ministre lors du conseil interministériel du tourisme du 26 juillet, a entériné l’absence d’un ministère dédié. C’est désormais le ministère de l’Europe et des affaires étrangères qui a la responsabilité de ce secteur, pesant 8 % de notre PIB et 2 millions d’emplois directs et indirects.
La France est la première destination touristique mondiale, et nous ne pouvons que nous en féliciter, mais les actions doivent largement dépasser la promotion de la destination France à l’étranger. Élue d’un territoire de montagne, où le tourisme est un vecteur économique important, voire essentiel, je ne pense pas que rattacher le secteur du tourisme au ministère des affaires étrangères soit un bon signal. Je rappelle que le tourisme en montagne représente 9 milliards d’euros de chiffre d’affaires et que 30 % de la clientèle est d’origine étrangère. Nous devons mettre en œuvre des logiques économiques qui nous permettent de rendre nos territoires attractifs et nos entreprises compétitives. C’est un gisement de croissance et d’emplois non délocalisables précieux pour notre pays ; il mérite toute notre attention.
Mon second sujet de préoccupation concerne le FISAC. Alors que ce dispositif destiné à financer des opérations de création, de maintien, de modernisation, d’adaptation ou de transmission des entreprises du commerce, de l’artisanat et des services a été réformé en 2015, les crédits prévus pour 2018 sont largement insuffisants. Comment 1 million d’euros pourraient-ils permettre de préserver ou de développer le tissu d’entreprises de proximité et de répondre aux appels à projets pour conduire des opérations collectives, individuelles ou spécifiques au plan national ?
Le Sénat s’est penché sur ce sujet, en particulier nos collègues membres du groupe de travail sur la revitalisation des centres-villes et centres-bourgs. En effet, la France voit nombre de ses centres-villes et centres-bourgs se vider et mourir lentement. Si le phénomène est continu et unanimement constaté, il n’est pas inéluctable. Des moyens financiers appropriés doivent être consacrés à cette problématique.
En conclusion, je voterai ces crédits sous réserve que des améliorations puissent y être apportées.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la mission « Économie » regroupe un ensemble de dispositifs en faveur des entreprises, notamment des PME des secteurs de l’artisanat, du commerce et de l’industrie, ainsi que les crédits des administrations, autorités administratives indépendantes et opérateurs chargés de leur mise en œuvre.
Je n’insisterai pas sur les dispositifs de soutien à l’économie concernés, sur lesquels les précédents orateurs sont déjà largement intervenus. Je rejoins les propos de Mme Goulet : certains dispositifs sont redondants et peu lisibles pour les entreprises, spécialement les petites et moyennes, qui n’ont pas de services dédiés à la compréhension des méandres et subtilités parfois tatillonnes de l’administration. En ce domaine comme ailleurs, il y a un grand besoin de clarté et de simplification.
Je préfère évoquer un sujet qui me tient à cœur : la transmission d’entreprise, essentielle pour l’économie de notre pays. Au sein de la délégation sénatoriale aux entreprises, créée en 2014 et excellemment présidée par Élisabeth Lamure, …
… je travaille avec Claude Nougein, depuis maintenant un an, à améliorer sensiblement le cadre législatif des transmissions et cessions d’entreprise, pour tout type d’entreprise et tout secteur.
C’est un réel besoin, dont j’ai pu mesurer l’importance, et même l’urgence, ce mardi au salon Transfair de la transmission d’entreprise, qui se tenait au palais Brongniart, où je suis intervenu en séance plénière. J’y ai entendu, de la part des professionnels de la transmission – avocats, notaires, experts-comptables –, un éloge de la délégation sénatoriale aux entreprises et de la qualité du travail sénatorial qui m’a réjoui et que je tenais à partager avec tous mes collègues.
Madame la secrétaire d’État, permettez-moi d’évoquer le plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises, le PACTE, en cours d’élaboration à Bercy.
Je dirai d’abord un mot sur la méthode, puisque l’association des parlementaires était évoquée, au travers du recours au concept inédit et intéressant de binôme chef d’entreprise-parlementaire. Il semble que les parlementaires n’aient en réalité guère été sollicités, ou alors seulement ceux siégeant sur certaines travées. J’étais moi-même demandeur, car, voilà près d’un an maintenant, nous avons produit, dans le cadre de la délégation sénatoriale aux entreprises, un rapport contenant vingt-sept propositions d’ordre financier, fiscal, social, ou portant sur la communication, l’animation de réseaux…
Faute d’avoir été consulté pour la rédaction de ce projet de loi, j’attire l’attention sur le contenu de la proposition de loi que nous allons déposer, dont nous débattrons dans cet hémicycle pour alimenter le texte du Gouvernement.
Les besoins sont simples. Il faut mieux connaître les réalités statistiques et économiques, en dotant l’INSEE de pouvoirs complémentaires. Il faut simplifier le cadre juridique de la transmission, supprimer certaines obligations déclaratives. Il faut encore, s’agissant de transmission intrafamiliale, modifier le pacte Dutreil, instaurer un taux unique pour les droits d’enregistrement, faciliter la reprise par les salariés – mais en supprimant les articles 18 et 19 de la loi Hamon –, expérimenter certains dispositifs, notamment pour les entreprises agricoles et artisanales, redonner confiance aux chefs d’entreprise en leur administration, à commencer par Bercy. Il y a là un très gros travail à effectuer !
Nos entreprises ont besoin de reprendre confiance ; les paroles et les grandes déclarations ne suffiront pas, elles attendent des actes. Elles ont besoin d’être placées dans des conditions comparables à celles de leurs concurrentes européennes. Elles ont besoin de stabilité, de confiance envers leur administration.
J’espère vous avoir convaincue, madame la secrétaire d’État, que la transmission et la cession d’entreprise constituent un enjeu majeur pour l’économie de notre pays. Nous espérons être largement associés aux travaux en cours.
Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, vous examinez aujourd’hui les crédits de la mission « Économie », ainsi que ceux du compte d’affectation spéciale « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés ». Je remercie l’ensemble des rapporteurs pour la qualité de leurs observations.
La mission « Économie » regroupe un ensemble de dispositifs en faveur des entreprises, notamment des PME dans les secteurs de l’artisanat, du commerce et de l’industrie, ainsi que le budget des administrations, autorités administratives indépendantes et opérateurs chargés de la mise en œuvre de ces diverses politiques.
Les crédits de la mission sont stables par rapport à 2017. Les services de l’État qu’ils financent participent à la définition et à la mise en œuvre de la politique économique du Gouvernement, dont l’objectif pour le quinquennat, conformément aux engagements pris par le Président de la République devant les Français, est de conduire la transformation en profondeur du modèle économique de notre pays.
La dépense fiscale constitue un levier essentiel. Elle est en forte augmentation en 2018, s’agissant notamment du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, qui sera transformé en un allégement de charges à compter du 1er janvier 2019.
Plus largement, c’est aussi le sens de la réorientation de l’épargne des Français vers l’investissement et l’économie productive et de l’incitation à entreprendre et à réussir donnée aux acteurs économiques et à nos concitoyens, au travers de la mise en place de l’impôt sur la fortune immobilière, du prélèvement forfaitaire unique et de l’engagement à réduire sur la durée du quinquennat le taux de l’impôt sur les sociétés de 33 % aujourd’hui à 25 % en 2022.
Ces mesures pérennes, favorables à l’investissement productif, ont été préférées aux mesures ponctuelles de suramortissement.
La réorientation de l’épargne doit, in fine, soutenir l’investissement dans les entreprises pour leur permettre de faire face aux enjeux de modernisation et de développement. C’est par exemple le cas en matière industrielle, pour préparer l’industrie du futur.
Le Gouvernement entend accompagner la vitalité de l’écosystème des start-up en France. L’incubateur Station F, le plus grand incubateur au monde, avec 1 000 start-up, bénéficie, comme cela a été mentionné, d’un pôle où les administrations sont représentées et que Gérald Darmanin inaugurera ce soir.
De transformation en profondeur, il est également question au sein même de la mission « Économie », dont plusieurs des mécanismes d’intervention en faveur des entreprises, notamment les PME-TPE, sont améliorés.
En réponse aux observations de vos rapporteurs spéciaux, je voudrais revenir sur quelques modifications importantes opérées par le PLF pour 2018. Ces modifications visent non pas à supprimer brutalement tel ou tel dispositif, mais à rationaliser leur action et à les mettre au service de la politique de libération des énergies qu’entend mener le Gouvernement.
La rebudgétisation en 2018 des garanties bancaires accordées aux PME par BPI France Financement est une première modification importante. Pour 2018, la dotation budgétaire, complétée de la mobilisation des ressources internes de BPI France, permettra d’assurer un niveau d’activité comparable à celui des années 2016-2017.
Comme l’a indiqué le ministre Bruno Le Maire devant la commission des affaires économiques du Sénat, l’amélioration sensible des conditions de financement des entreprises et de leur santé, s’agissant notamment des PME-TPE, doit conduire à revoir globalement le positionnement de l’activité garantie, qui a fortement progressé durant la crise. Il convient désormais de construire un format répondant aux besoins nés de la reprise économique.
Une deuxième modification tient à la poursuite de la rationalisation des dispositifs d’accompagnement des entreprises qui existent au sein des réseaux consulaires.
Le Gouvernement s’est engagé en faveur de la baisse des prélèvements obligatoires, parmi lesquels la taxe affectée pour le financement des missions de service public réalisées par les chambres de commerce et d’industrie.
La Haute Assemblée a décidé de revenir, lors de la discussion de la première partie du PLF, sur la diminution de 150 millions d’euros du plafond de prélèvement, qui aurait permis de réduire à due concurrence le taux de la taxe additionnelle assise sur le montant de la cotisation sur la valeur ajoutée.
Le Gouvernement reste convaincu que les réseaux consulaires peuvent continuer à se moderniser et à réduire leur appel aux financements publics. Il continuera donc à promouvoir cette mesure.
Dans cette optique, ont été engagés, comme vous le savez, des travaux visant à déterminer le périmètre des missions de service public effectuées par les réseaux consulaires. Ils contribueront à l’identification des pistes en vue d’améliorer l’efficacité du réseau des chambres de commerce et d’industrie.
Je rappelle à cet égard que la dotation des fonds de péréquation et de modernisation, de rationalisation et de solidarité financière au sein du réseau des CCI a été significativement majorée à l’Assemblée nationale. Cela amortira la diminution des ressources affectées pour les chambres les plus fragiles financièrement.
Une troisième modification consiste en l’internationalisation de l’économie française. Vos rapporteurs spéciaux se félicitent des progrès qu’a permis la création de Business France. Il convient d’aller encore plus loin dans la simplification et l’efficacité du dispositif pour les entreprises.
Une réflexion en ce sens a été confiée au nouveau directeur général de Business France, Christophe Lecourtier, qui vient de remettre ses conclusions au ministre de tutelle.
Cette réforme sera guidée par la nécessité de rendre le dispositif d’accompagnement des entreprises plus lisible, plus efficace, plus simple et générateur d’économies pour l’État, en France et à l’étranger.
Le sujet de l’articulation avec le rôle des chambres de commerce et d’industrie sera, bien sûr, central dans cette évolution.
Bref, le PLF pour 2018 constitue une première étape essentielle dans une démarche globale et cohérente pour renforcer le tissu des entreprises françaises.
Cet effort se poursuivra au travers du plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises, pour lequel Bruno Le Maire vient de lancer la consultation, organisée selon six thématiques. Les parlementaires ainsi que les chefs d’entreprise y sont étroitement associés. Je remercie en particulier le sénateur Richard Yung, qui est chargé, avec Éric Kayser, d’animer la réflexion sur le thème du développement international de nos entreprises. Les préoccupations de Mme Nathalie Goulet quant à la coopération économique décentralisée pourraient utilement être portées à l’attention de ce binôme. J’ai bien noté que certains d’entre vous, de même que la délégation sénatoriale aux entreprises, souhaitaient apporter leur contribution. Bien évidemment, c’est encore possible, puisque les consultations se poursuivront jusqu’au début de l’année prochaine.
Vos rapporteurs ont fait part de leur attachement au FISAC. Le Gouvernement en a tenu compte lors de la première lecture à l’Assemblée nationale, en majorant de 2 millions d’euros les crédits de ce fonds, ce qui permet de stabiliser à leur niveau de 2017 les autorisations d’engagement et de majorer de près de 35 % les crédits de paiement.
Ce sont ainsi 200 projets qui pourront être soutenus. Les stations-service dites de « maillage », c’est-à-dire sans concurrent à moins de dix kilomètres, constituent pour leur part une priorité du règlement d’appels à projets depuis 2015.
Vous avez mentionné les actions de revitalisation des centres-villes. Le FISAC a vocation à être un outil opérationnel à l’appui de notre politique en la matière.
S’agissant des associations consuméristes, je voudrais rappeler l’attachement du Gouvernement à la protection des consommateurs. Elle est assurée par l’action conjointe et complémentaire de la DGCCRF et d’autres instances, dont les associations de consommateurs. Pour autant, la fragmentation du monde consumériste nuit à sa lisibilité à son efficacité. À la suite de la discussion à l’Assemblée nationale, le Gouvernement a accepté de se donner un temps de réflexion en majorant les crédits de la DGCCRF alloués à ces associations de 3, 1 millions d’euros.
Enfin, la mission « Économie » comporte en son sein le programme du plan France Très haut débit.
Le Gouvernement a souhaité accélérer la mise en œuvre de ce plan essentiel pour la compétitivité mondiale de nos territoires en réaffirmant l’objectif d’un bon accès au haut débit pour tous à l’horizon 2020 et du très haut débit pour tous à l’échéance de 2022. Le Gouvernement a lancé les travaux dès cet été pour s’en assurer.
Des engagements devront être pris par les opérateurs. Ils seront contraignants et des sanctions frapperont les opérateurs qui ne joueront pas le jeu. Le Gouvernement a décidé de mobiliser l’ensemble des technologies disponibles, afin de ne laisser aucune habitation, aucune entreprise sans solution d’internet fixe offrant au moins un bon accès au haut débit dès 2020 : il s’agit des réseaux de fibre optique, mais également des solutions satellitaires nouvelles, des réseaux mobiles 4G et des réseaux radio.
Le cas du satellite a été évoqué par vos rapporteurs pour avis. Il constitue une solution pour les zones du territoire national difficiles d’accès, comme les zones de montagne. Les technologies spatiales viendront donc en appui au déploiement de la fibre optique.
Je terminerai en évoquant le compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés ».
S’agissant du Fonds de développement économique et social, qui finance les prêts de l’État en faveur d’entreprises en difficulté ayant des perspectives réelles de redressement, sa doctrine d’emploi prévoit que les prêts FDES doivent permettre de compléter un tour de table après des négociations financières avec l’ensemble des partenaires privés exposés.
En 2017, ce programme a disposé de 100 millions d’euros de crédits en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. Les montants unitaires des prêts FDES accordés par le Comité interministériel de restructuration industrielle, le CIRI, peuvent être potentiellement très élevés. Ces prêts sont souvent décidés dans des situations d’urgence liées à des crises industrielles et sociales majeures. Par exemple, un prêt FDES a dû être mis en place fin décembre 2016, pour un montant initial de 70 millions d’euros, au profit du groupe Financière Turenne Lafayette, sans qu’un tel décaissement ait pu être anticipé. Pour ces raisons, la consommation de crédits reste volatile. Pour 2018, le montant des crédits proposé s’élève à 100 millions d’euros, ce qui garantit un maintien des capacités d’intervention au niveau de 2017.
La ligne nouvelle « crédit-export vers l’Iran » permettra aux entreprises françaises de tirer pleinement parti de l’ouverture des marchés iraniens, …
… alors même que les sanctions internationales résiduelles à l’encontre de ce pays dissuadent la plupart des opérateurs financiers privés d’y intervenir. Les 100 millions d’euros mobilisés par l’État à ce titre permettront d’amorcer un dispositif de crédit-export, BPI France se mettant par ailleurs en situation de lever des financements privés dans des conditions vérifiées de sécurité juridique.
Enfin, le projet CDG Express vise à réaliser une liaison ferroviaire rapide directe et à haut niveau de service entre Paris et l’aéroport Paris-Charles-de-Gaulle. Essentiel pour améliorer la desserte de la plateforme aéroportuaire de Roissy à l’horizon 2024, ce projet contribuera au développement de l’image de la France à l’étranger et à l’attractivité économique de notre territoire.
Je rappelle que l’engagement de la France à mettre en service cette liaison a été l’un des critères ayant conduit au succès de la candidature de Paris à l’organisation des jeux Olympiques. La Haute Assemblée a souhaité supprimer cette nouvelle dotation, contre l’avis du Gouvernement, pour qui ce projet, compte tenu de son caractère hors norme, doit faire l’objet, à titre très exceptionnel, d’un prêt de l’État à la société de projet.
Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Économie », figurant à l’état B.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Économie
Développement des entreprises et régulations
Dont titre 2
401 341 298
401 341 298
Plan “France Très haut débit”
Statistiques et études économiques
Dont titre 2
375 856 082
375 856 082
Stratégie économique et fiscale
Dont titre 2
156 090 986
156 090 986
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-185 rectifié, présenté par MM. Pointereau, Bas, J.M. Boyer, Grosdidier, Duplomb, Reichardt, Vaspart, Leroux, B. Fournier, Chatillon, D. Laurent, de Nicolaÿ, Savin et Cardoux, Mmes Gruny, Morhet-Richaud, de Cidrac et Imbert, MM. Bazin et Danesi, Mmes Deromedi et Canayer, MM. Paul, Perrin, Raison, Leleux et Karoutchi, Mme Bories, MM. Milon, Genest, Cuypers, Chevrollier, Husson, Longuet, Bonhomme et Pierre, Mme Lopez, MM. Babary, Brisson, Mayet, Magras, Calvet, del Picchia, Priou et Darnaud, Mme F. Gerbaud, MM. Poniatowski et Paccaud, Mmes M. Mercier et L. Darcos, M. Rapin, Mme Garriaud-Maylam, M. Dufaut, Mme Chauvin, MM. Gremillet, H. Leroy, Morisset et Revet, Mme Keller et M. Lefèvre, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
en euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Développement des entreprises et régulation
dont titre 2
Plan “France Très haut débit”
Statistiques et études économiques
dont titre 2
Stratégie économique et fiscale
dont titre 2
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Roger Karoutchi.
Cet amendement a été déposé par notre collègue Rémy Pointereau et cosigné par un grand nombre de membres du groupe Les Républicains.
Tous les orateurs, tous les experts, tous les analystes le disent : le FISAC, c’est formidable ! Contrairement à bien d’autres fonds ou organismes dont l’efficacité est mise en doute, voilà un dispositif qui fonctionne bien et qui est absolument nécessaire pour la revitalisation du commerce de proximité dans les centres-villes et les centres-bourgs. Comme il fonctionne bien, on décide, selon une logique implacable, de réduire ses crédits…
Sourires.
Rémy Pointereau a eu, quant à lui, l’idée tout à fait extravagante de proposer, au travers de cet amendement, d’attribuer pour une fois quelques crédits à un dispositif qui marche plutôt qu’à des organismes qui ne servent à rien ! Il s’agit de porter les crédits du FISAC à 20 millions d’euros, c’est-à-dire de les doubler. Il n’est pas forcément insensé que la Haute Assemblée, qui représente si bien les collectivités territoriales, se préoccupe de la revitalisation des centres-bourgs et des centres-villes.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste et du groupe Les Indépendants – République et Territoires.
L’amendement n° II-229, présenté par Mme Espagnac et M. Lalande, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
en euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Développement des entreprises et régulation
dont titre 2
Plan “France Très haut débit”
Statistiques et études économiques
dont titre 2
Stratégie économique et fiscale
dont titre 2
TOTAL
SOLDE
La parole est à Mme la rapporteur spécial.
Cet amendement, adopté par la commission des finances, vise à abonder de 17 millions d’euros les crédits du FISAC, ce qui permettrait de doubler l’enveloppe actuelle.
Entre 2010 et 2018, la dotation du FISAC est passée de 64 millions d’euros à 11 millions d’euros en crédits de paiement, soit une baisse de 83 %. C’est énorme !
Il n’est tout simplement pas possible de mener une politique ambitieuse de lutte contre la désertification des territoires et la dévitalisation des centres-villes sur l’ensemble du territoire français avec seulement 11 millions d’euros.
La majoration de 2 millions d’euros adoptée par l’Assemblée nationale n’apparaît pas, à cet égard, suffisante. Le présent amendement prévoit donc de porter les crédits du FISAC à 30 millions d’euros en 2018, pour donner à cette politique les moyens de ses ambitions et permettre à la réforme de 2014, qui repose sur une procédure d’appel à projets, de faire ses preuves, ce qui n’est pas le cas à ce jour.
Cet amendement répond aussi à une exigence de sincérité budgétaire. Chaque année, en effet, les dépenses effectivement engagées par le FISAC excèdent largement les crédits prévus en loi de finances initiale. Ainsi, en 2016, 37, 1 millions d’euros ont été engagés, contre 27, 5 millions d’euros inscrits en loi de finances initiale.
Sur ces 17 millions d’euros, 5 millions d’euros seraient réservés à un fonds spécifique d’aide aux stations-service de proximité. Alors que celles-ci représentent un enjeu crucial pour la cohésion de nos territoires, leur nombre continue de diminuer, au profit notamment des stations adossées aux grandes et moyennes surfaces. La France, qui comptait 33 000 stations-service traditionnelles en 1985, n’en compte plus que 5 347 aujourd’hui. Quelque 320 stations-service ont donc fermé durant la seule année 2016. Or, depuis la suppression du Comité professionnel de distribution des carburants en 2015, les aides aux stations-service de proximité ne font plus l’objet d’un dispositif dédié, à l’exception des 2 200 dossiers en souffrance au moment de la fermeture du CPDC, repris par le FISAC, le dernier ayant été clôturé en juillet 2017.
Afin d’assurer l’avenir des stations-service de proximité, il importe donc de maintenir un dispositif spécifique, géré par le FISAC, dédié à la mise aux normes environnementales –remplacement des cuves –, aux énergies renouvelables – bornes électriques, stations hydrogène, etc. –, à la diversification – relais colis, dépôt de pain, etc. – ou à la dépollution des stations ne trouvant pas de repreneur.
Les crédits seraient transférés du programme 305, « Stratégie économique et fiscale », auquel est rattachée, au titre de l’action n° 01, la subvention à la Banque de France, qui est cette année en hausse alors que des gisements d’économies sont identifiés.
Je demande à M. Karoutchi de bien vouloir retirer cet amendement au profit de l’amendement n° II-229, que je viens de présenter et qui vise également à doubler les crédits du FISAC, mais en tenant compte de la petite hausse de 2 millions d’euros déjà votée par les députés. Devant l’inertie actuelle du Gouvernement, cela permettrait de constituer un front commun entre l’Assemblée nationale et le Sénat.
Le Gouvernement, lors du débat à l’Assemblée nationale, a en effet tenu compte d’un certain nombre d’avis et remis les crédits du FISAC à leur niveau de 2017, soit 16 millions d’euros en autorisations d’engagement. Cette augmentation s’accompagne d’une forte hausse des crédits de paiement. Les crédits sont désormais calibrés pour soutenir les 200 projets engagés. C’est une bonne enveloppe, nous semble-t-il, pour l’année 2018. Par ailleurs, comme je l’ai indiqué, les stations-service de maillage constituent toujours une priorité.
Le Gouvernement est défavorable aux amendements n° II-185 rectifié et II-229.
Je soutiens l’amendement n° II-185 rectifié, pour plusieurs raisons.
D’abord, s’agissant des stations-service, le bon sens aurait voulu qu’avant d’en venir à utiliser des fonds publics pour rouvrir des stations-service, on envisage la mise en place de normes moins drastiques, afin d’éviter qu’elles ferment toutes, notamment en milieu rural ! §Aujourd’hui, ce sont souvent les communes qui sont obligées d’intervenir pour préserver ou rouvrir des stations-service de proximité.
Ensuite, nous avons fait remonter, entre 2014 et 2017, près de 17 millions d’euros de crédits du programme LEADER non consommés. Or un cofinancement, qui peut être apporté par le FISAC, permet une meilleure consommation de ces crédits.
Il me semble donc qu’il faut massivement voter en faveur de l’adoption de cet amendement !
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.
Bien entendu, je soutiens totalement l’amendement de M. Pointereau et je suis tout à fait d’accord avec M. Karoutchi : quand un dispositif fonctionne, il faut le conserver !
En tant qu’élu du milieu rural, j’ai pu constater que le FISAC était très intéressant pour maintenir les quelques commerces qui nous restent.
S’agissant des stations-service, on est en train de prescrire de l’aspirine pour soigner une maladie grave, causée par les normes trop contraignantes et, surtout, les prix libres. Le carburant constitue un produit d’appel pour les supermarchés, et les petites stations ne peuvent pas vivre !
Le Sénat a mis en place une commission de revitalisation des centres-villes et des centres-bourgs, dont les conclusions seront présentées dans peu de temps. Le constat est patent : tous nos centres-villes et nos centres-bourgs se dévitalisent dangereusement.
Des millions de mètres carrés de surfaces commerciales supplémentaires sont sur le point d’ouvrir. Ne faudrait-il pas instaurer un moratoire lorsqu’un nombre trop important de grandes surfaces sont déjà implantées dans un secteur donné, avec pour conséquence une dévitalisation des centres-villes et des centres-bourgs ?
Il y a aussi des actions à mener avec les municipalités, les communautés de communes et les communautés d’agglomération, afin de lancer des opérations de revitalisation en matière de bâti, de logement, de services et d’équipements structurants dans les centres-villes et centres-bourgs. Le FISAC est un levier indispensable pour conduire ces politiques !
Marques d ’ approbation sur les travées du groupe Les Républicains.
Je propose de fusionner les deux amendements, sachant que, de toute façon, 20 millions d’euros, cela ne suffira pas !
Si le Sénat se rassemblait autour d’un même amendement, ce serait néanmoins un bon début, un commencement d’inversion de tendance.
Certains disent que le commerce de proximité dans les centres-villes et les centres-bourgs, c’est fini ! Pour notre part, nous pensons au contraire qu’il ne faut pas baisser les bras. Le FISAC est un outil indispensable dans cette perspective.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.
Je soutiendrai également l’amendement de Rémy Pointereau.
Dans le monde rural, quand il n’y a plus de commerces, les collectivités se vident, même s’il reste un peu d’activité économique ou industrielle.
M. Karoutchi a raison : il y a tellement de choses qui ne marchent pas et dont on devrait revoir le fonctionnement ! Arrêtons de jeter à la poubelle ce qui marche et occupons-nous de ce qui ne va pas ! Le FISAC est un instrument fantastique.
En adoptant cet amendement, nous montrerons aussi aux collectivités tout l’intérêt que nous portons au monde rural, à nos petites villes, mais aussi à nos anciens, qui ne peuvent pas se déplacer facilement pour aller faire leurs courses ailleurs.
Madame la secrétaire d’État, en prenant en compte cet amendement important, vous montrerez la volonté du Gouvernement d’accompagner les politiques que mènent les maires et les conseils municipaux dans les territoires ruraux.
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et sur des travées du groupe Les Républicains.
Je voudrais à mon tour, en ma qualité de sénateur, représentant des territoires, de la ruralité, des collectivités locales, militer pour l’adoption de l’amendement n° II-185 rectifié.
L’une des compétences des collectivités territoriales est précisément de mettre en œuvre des programmes de revitalisation des bourgs-centres, des centres-villes, mais aussi de la ruralité, qui en a tant besoin. À l’origine des projets financés par le FISAC se trouve souvent une collectivité locale, une petite commune qui a envie de garder ses commerces et qui profite de ce levier pour relancer des opérations non seulement de revitalisation de l’artisanat, du commerce et des services, mais aussi d’urbanisme.
Je milite également en faveur de l’adoption de cet amendement en qualité d’ancien président du conseil régional d’Alsace et d’ancien vice-président chargé de l’économie et des fonds européens. À cet égard, le FISAC joue un rôle de détonateur pour l’utilisation des crédits du programme LEADER et de levier pour obtenir des aides du conseil régional et, parfois, du conseil départemental. C’est par l’addition de ces forces que l’on peut entreprendre un vrai projet.
Enfin, dans une vie antérieure, j’étais directeur général de la chambre de métiers d’Alsace. Je puis vous certifier, à ce titre, que le FISAC est un instrument absolument fondamental pour aider au développement de l’artisanat. On ne s’en rend peut-être pas suffisamment compte en haut lieu, mais il permet véritablement de mettre les mains dans le cambouis.
Porter l’enveloppe à 20 millions d’euros, ce n’est donc vraiment pas exorbitant.
Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.
Madame la secrétaire d’État, vous avez entendu les plaidoyers de l’ensemble de mes collègues, ils vont dans le même sens : nous vous demandons une petite rallonge pour le FISAC, afin de sauver le commerce de centre-ville.
Pour ma part, je voudrais vous proposer une mesure qui ne coûte rien. Dans le projet de loi mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures, une disposition introduite par voie d’amendement impose à l’ensemble des stations-service de France la double distribution de carburant et de biocarburant. Je peux vous dire que sa mise en œuvre va entraîner la fermeture des stations-service en zones rurales.
Je regrette que les sénateurs du groupe La République En Marche ne soient pas là…
Exclamations et applaudissements sur différentes travées. – M. Thani Mohamed Soilihi signale sa présence dans l ’ hémicycle.
(Rires et applaudissements sur de nombreuses travées.) Je vous fais donc porte-parole de mes observations auprès des députés de votre groupe : demandez-leur de ne pas voter cette obligation de double distribution ! Sinon, que se passera-t-il, une fois que l’on aura fait mourir ces stations-service ? On demandera de l’argent au FISAC pour les ressusciter…
Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste et du groupe socialiste et républicain.
Dans mon département, extrêmement rural, la petite commune de Lonlay-L’Abbaye, située dans le sud du Domfrontais, a créé une pompe municipale, grâce à la volonté de son maire. Ce type d’opération a un effet d’entraînement évident : les automobilistes qui viennent se servir en carburant en profitent pour faire des courses dans les autres commerces de proximité. Une station-service joue donc un rôle de point d’attraction, outre sa fonction de distribution de carburant, indispensable dans nos territoires où il n’y a ni transports en commun, ni internet à haut débit pour commander des marchandises en ligne, ni téléphonie mobile…
Il est donc extrêmement important pour l’attractivité des territoires de pouvoir flécher des crédits au bénéfice des stations-service de proximité. C’est pourquoi je voterai l’amendement n° II-85 rectifié.
Le groupe CRCE votera les amendements, eu égard à l’importance du FISAC en tant que levier pour accéder à d’autres aides. C’est l’un des outils, de moins en moins nombreux, dont disposent encore les élus locaux pour redynamiser les centres-villes ou les centres-bourgs. Cela étant, cette redynamisation exige aussi que l’on mette en place, dans le même temps, d’autres actions, en particulier en ce qui concerne l’habitat et l’accueil de nouvelles populations.
En tout cas, on ne saurait fragiliser le FISAC. D’ailleurs, nous sommes nombreux ici à être sollicités par les élus qui attendent une réponse à leurs demandes d’aide.
Il semble qu’un grand œcuménisme se manifeste sur ce sujet précis dans notre assemblée, mais nous devrons mener une réflexion plus globale sur la problématique du développement des centres commerciaux. À cet égard, je constate que les commissions départementales, où siègent de nombreux élus locaux, donnent systématiquement des avis favorables à l’installation ou à l’agrandissement de grandes surfaces commerciales en périphérie de nos villes.
Cela ne contribue pas à redynamiser le commerce de proximité dans les centres-villes, auquel nous affirmons, toutes et tous, être attachés.
Quoi qu’il en soit, nous voterons en faveur de l’augmentation des crédits du FISAC, tout en regrettant que, là encore, la contrainte de l’exercice budgétaire nous oblige à prélever des crédits sur d’autres programmes de la mission. Les règles de la LOLF nous condamnent à raisonner à budget constant, mission par mission ; il faudrait que nous puissions disposer d’un peu plus de liberté bien plus grande dans l’exercice de notre droit d’amendement lors des débats budgétaires.
Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain. – M. Joël Labbé applaudit également.
J’apporte mon soutien à l’amendement n° II-185 rectifié, pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, pratiquant le dispositif du FISAC depuis plusieurs décennies, je puis dire qu’il a fait ses preuves dans nos zones rurales. Je trouverais vraiment dommage de le fragiliser par une diminution de ses crédits.
Ensuite, nos territoires ont été bousculés ces dernières années, en raison notamment des regroupements de communautés de communes. Dans beaucoup d’intercommunalités, une réflexion sur l’avenir du territoire a été menée, qui a très souvent conduit à ériger en priorité la redynamisation des commerces dans les centres-bourgs.
Madame la secrétaire d’État, 20 millions d’euros, cela ne fait guère que 200 000 euros par département, ou 100 000 euros par projet, puisque vous nous avez dit avoir 200 projets sous le coude ! On peut donc penser qu’une enveloppe de 20 millions d’euros n’est même pas suffisante…
Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.
Pour aller dans le sens de Cécile Cukierman et de Martial Bourquin, je vais faire une proposition que j’espère œcuménique. Il est tout à l’honneur de cette assemblée de savoir se rassembler sur ce genre de sujet.
Nous avons tous connu, dans nos petits villages, la fin du dernier commerce. Quand on réussit à en rouvrir un, souvent grâce au FISAC, tout change, y compris le lien intergénérationnel. Comme l’a dit Mme Goulet, une station-essence peut ainsi devenir un point de convergence, un facteur de vie. Or l’objet de l’amendement n° II-185 rectifié ne fait pas mention des stations-service, qu’il est pourtant nécessaire de pouvoir aider.
Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.
Je propose de rectifier l’amendement n° II-229 de la commission des finances afin qu’il vise, lui aussi, à porter les crédits du FISAC à 20 millions d’euros, comme l’amendement n° II-185 rectifié, tout en prévoyant, dans son objet, le fléchage d’une partie des crédits vers les stations-service. Si M. Karoutchi est d’accord, il pourrait alors retirer son amendement.
En effet, l’œcuménisme a des limites !
La loi, ce n’est pas le commentaire, si intéressant soit-il, et l’objet ne fait pas partie du dispositif de l’amendement.
Par ailleurs, ce qui me gêne un peu, ce n’est pas que l’on veuille aider les stations-service, mais qu’une enveloppe d’un montant prédéterminé leur soit affectée. Nous préférerions que l’on laisse les collectivités locales décider selon leurs besoins, sans allouer d’office 5 millions d’euros aux stations-service ! §Peut-être cette enveloppe ne serait-elle pas entièrement consommée, tandis que d’autres projets se trouveraient bloqués faute de financement. Restons-en à notre amendement, qui vise à porter les crédits du FISAC à 20 millions d’euros sans en flécher une partie !
Au-delà de la satisfaction que peut nous procurer l’œcuménisme qui règne dans l’hémicycle sur cette question, il convient de faire en sorte que le Gouvernement ne soit pas tenté de susciter à l’Assemblée nationale un œcuménisme contre la position du Sénat…
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Madame la secrétaire d’État, on ne peut pas philosopher sur la ruralité, prôner un développement équilibré de nos territoires, et en même temps raisonner en silos sur chaque politique afin de rogner les crédits, comme cela a été le cas hier pour le logement, avec la question du prêt à taux zéro.
L’aménagement du territoire comporte de multiples dimensions. On sait combien la vitalité du commerce de centre-ville est un élément structurant du territoire, non seulement pour la ville elle-même, mais aussi pour la ruralité qui l’entoure.
Le Président de la République, au Congrès des maires, a dit avoir compris les territoires ruraux, les a invités à faire des rêves fous, à oser, mais, chaque jour, nous constatons que les crédits qui permettent de conserver du dynamisme à ces mêmes territoires sont sabrés !
En matière de maintien des commerces de proximité, il est essentiel de faire de la prévention. Le FISAC permet, en sauvant le dernier commerce, d’empêcher la dévitalisation des centres-villes, du moins quand il n’est pas déjà trop tard…
De grâce, madame la secrétaire d’État, arrêtons d’être hors-sol et dogmatiques ! Si vous aimez nos territoires et si vous croyez à l’équité, écoutez-nous !
Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.
Mes chers collègues, je crois qu’il n’y a pas de difficulté entre nous sur le fond, mais quel amendement retenir ? Je ne comprends d’ailleurs pas bien que M. Karoutchi soutienne un autre amendement que celui de la commission des finances, dont il est pourtant membre…
Nous nous sommes déjà plus d’une fois mis d’accord pour soutenir ensemble le même amendement, heureusement ! L’amendement n° II-229 a été voté sur toutes les travées en commission des finances. Il rassemble donc l’ensemble de notre assemblée. Je trouverais élégant que les signataires de l’amendement n° II-185 rectifié le retirent au profit de celui de la commission des finances.
Mme Frédérique Espagnac, rapporteur spécial. Le règlement intérieur d’attribution des subventions du FISAC ne permet plus, depuis juillet dernier, d’aider les stations-service. Par conséquent, cela restera ainsi, monsieur Karoutchi, si nous ne visons pas explicitement les stations-service pour ouvrir à nouveau la possibilité de les financer.
Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain.
M. Roger Karoutchi. Madame la présidente, je veux bien le retirer au profit de l’amendement de la commission des finances rectifié pour porter les crédits du FISAC à 20 millions d’euros, à condition que l’on n’affecte pas a priori une somme déterminée au financement des stations-service.
Marques d ’ approbation sur les travées du groupe Les Républicains.
M. Roger Karoutchi. Nous sommes d’accord pour que l’on ouvre la possibilité de financer les stations-service, mais sans fléchage d’une enveloppe spécifique.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.
Il n’y a aucun problème, monsieur Karoutchi ! Notre seul souhait est de rendre de nouveau les stations-service éligibles aux crédits du FISAC, et non pas de flécher vers elles telle ou telle somme prédéterminée.
Nous modifions donc également l’objet de notre amendement afin de mentionner simplement que les stations-service seront éligibles aux crédits du FISAC, sans aucun fléchage d’aucune somme.
Cette précision me semble de nature à nous permettre de sortir de ce débat par le haut, dans l’intérêt de nos territoires.
Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° II-185 rectifié est retiré.
Je suis saisie d’un amendement n° II-229 rectifié, présenté par Mme Espagnac et M. Lalande, au nom de la commission des finances, qui est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
en euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Développement des entreprises et régulation
dont titre 2
Plan “France Très haut débit”
Statistiques et études économiques
dont titre 2
Stratégie économique et fiscale
dont titre 2
TOTAL
SOLDE
Je le mets aux voix.
L ’ amendement est adopté.
Mme la présidente. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° II-444, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
en euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Développement des entreprises et régulation
dont titre 2
Plan “France Très haut débit”
Statistiques et études économiques
dont titre 2
Stratégie économique et fiscale
dont titre 2
TOTAL
SOLDE
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Si vous le permettez, madame la présidente, je présenterai en même temps l’amendement n° II-519.
J’appelle donc en discussion l’amendement n° II-519, présenté par Mme N. Goulet, qui est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
en euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Développement des entreprises et régulation
dont titre 2
Plan “France Très haut débit”
Statistiques et études économiques
dont titre 2
Stratégie économique et fiscale
dont titre 2
TOTAL
SOLDE
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
Ces deux amendements concernent Business France, dont j’ai déjà évoqué brièvement, tout à l’heure, l’efficacité, mais aussi le manque de moyens.
L’amendement n° II-444 vise à accroître les moyens financiers, l’amendement n° II-519 tend à augmenter les moyens humains.
Les besoins et les demandes en matière de promotion de nos entreprises à l’étranger sont aujourd’hui multiples. Or quand le bureau de Moscou de Business France doit couvrir l’ensemble de l’Asie centrale, voire le Caucase, son personnel, n’ayant pas le don d’ubiquité, ne peut évidemment pas rendre tous les services attendus, alors que les opportunités économiques sont nombreuses.
L’amendement n° II-444 prévoit d’abonder les crédits de Business France de 20 millions d’euros. L’amendement n° II-519 tend à renforcer ses moyens humains, en diminuant les crédits de personnel de la direction générale du Trésor. On ne mesure pas bien l’efficacité des agents de celle-ci en poste à l’étranger, qui touchent des primes d’expatriation et représentent 664 équivalents temps plein.
Si nous partageons l’analyse de notre collègue, je relève que le directeur général de Business France vient de remettre au Gouvernement un rapport sur l’internationalisation de l’économie française. Nous pensons préférable d’attendre d’en connaître la teneur, s’agissant notamment des équilibres financiers proposés – Mme la secrétaire d’État nous donnera peut-être quelques indications à ce sujet –, avant le cas échéant de décider d’accorder des crédits supplémentaires.
Pour autant, la commission des finances est extrêmement vigilante sur cette question. C’est pourquoi elle a déposé un amendement visant à demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport beaucoup plus global sur la situation de Business France.
Je vous propose donc, madame Goulet, de retirer vos amendements au profit de celui de la commission des finances, qui sera examiné tout à l’heure.
En ce qui concerne l’amendement n° II-444, qui prévoit d’augmenter les crédits de Business France, je rappelle que l’agence est engagée dans une évolution profonde de son modèle d’affaires et de financement. Ainsi, elle va augmenter la part de ses ressources propres. Des progrès importants ont déjà été réalisés en la matière, puisque la part de celles-ci est passée, en trois ans, de 45 % à 49 % du total des ressources.
Ces réformes ont pour objectif de toujours mieux répondre aux demandes des entreprises exportatrices. Tel est aussi l’objet de la mission confiée à Christophe Lecourtier, le nouveau directeur général.
Les propositions de réforme du dispositif de soutien à l’export que M. Lecourtier a remises à ses tutelles impliquent notamment la création de nouveaux outils digitaux pour mieux servir les entreprises, ce qui supposera des investissements à court terme. Elles impliquent aussi une rationalisation des dispositifs et une meilleure articulation entre les différents intervenants.
Une évaluation du coût des investissements doit encore être menée avec l’ensemble des acteurs, au premier rang desquels Business France, en tenant compte des marges d’efficience collective qui seront dégagées grâce à une meilleure organisation de l’ensemble du dispositif.
Les financements que cette réforme rendrait nécessaires seront identifiés au terme de cette réflexion. L’ouverture de crédits que propose aujourd’hui l’auteur de cet amendement apparaît donc prématurée.
En outre, cet amendement est gagé sur les dépenses hors personnel de l’INSEE. La mise en œuvre de ce gage serait extrêmement douloureuse, et même clairement insoutenable, pour l’INSEE, puisqu’elle amputerait d’un tiers ses autorisations d’engagement, qui s’élèvent à 61 millions d’euros, et de 40 % ses crédits de paiement, qui sont de 52 millions d’euros.
En ce qui concerne la masse salariale du programme 305, c’est-à-dire celle de la direction générale du Trésor, elle augmente de 4 millions d’euros entre la loi de finances initiale pour 2017 et le projet de loi de finances pour 2018. Cette augmentation se fonde sur des prévisions d’exécution pour 2017 et résulte, pour l’essentiel, de facteurs exogènes, notamment la variation de l’indemnité de résidence à l’étranger des agents expatriés, celle-ci étant indexée sur le cours de l’euro, lequel a connu une baisse en 2017, et de mesures de transfert de services.
Il convient de rappeler que le programme 305 supportera vingt-quatre suppressions de postes en 2018, soit 1, 5 % du plafond d’emploi de 2017, dont vingt et un à la direction générale du Trésor et trois à la direction de la législation fiscale.
Pour l’ensemble de ces raisons, le Gouvernement demande également le retrait de ces amendements.
Madame Goulet, les amendements n° II-444 et II-519 sont-ils maintenus ?
Je comprends bien les arguments que l’on m’oppose, mais ce n’est jamais le bon moment, jamais le bon texte !
Si nous ne saisissons pas l’occasion de la discussion de ce projet de loi de finances, Business France, qui est aujourd’hui complètement débordée, devra attendre une année encore pour obtenir des moyens supplémentaires. Pendant ce temps-là, les entreprises françaises qui essayent de s’implanter ou de se développer à l’étranger sont livrées à elles-mêmes ! Que faisons-nous pour répondre concrètement aux besoins de ces entreprises et de Business France ?
Il ne faudra pas s’étonner si, l’année prochaine, nous constatons les mêmes difficultés qu’aujourd’hui ! Ne pas augmenter les crédits de Business France est franchement un très mauvais signal.
Cela étant dit, je retire les amendements.
Les amendements n° II-444 et II-519 sont retirés.
L’amendement n° II-562 rectifié, présenté par M. Tissot, Mme Artigalas, MM. M. Bourquin et Cabanel, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli et P. Joly, Mme Lienemann et M. Montaugé, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
en euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Développement des entreprises et régulation
dont titre 2
Plan “France Très haut débit”
Statistiques et études économiques
dont titre 2
Stratégie économique et fiscale
dont titre 2
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Patrice Joly.
M. Tissot, qui ne pouvait être présent, m’a demandé de présenter cet amendement.
La protection économique du consommateur est l’objet de l’action n° 17 du programme 134, qui comporte des dépenses d’intervention en faveur de l’Institut national de la consommation, de quinze associations de consommateurs, du Centre européen des consommateurs français et du Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie, le CREDOC.
Les quinze associations nationales agréées qui siègent au Conseil national de la consommation travaillent au quotidien auprès des consommateurs pour l’accès au droit et à l’information juridique en droit de la consommation, ainsi que pour le règlement amiable des litiges.
Ces associations jouent également un rôle crucial dans l’éducation et l’accompagnement des consommateurs au travers des études et des analyses qu’elles produisent. Dans de nombreux cas, elles ont joué un rôle de lanceur d’alerte : on peut évoquer leur combat contre l’obsolescence programmée ou les révélations sur des médicaments comme le Levothyrox ou la Dépakine.
Le monde de la consommation est actuellement en pleine mutation et les consommateurs ont besoin d’information, de conseil et d’orientation pour faire des choix éclairés et indépendants pour aujourd’hui et pour demain. Sans ces associations, ce sont des missions de service public qui ne sont plus assurées sur l’ensemble du territoire national.
Le projet de loi de finances pour 2018 prévoyait initialement une diminution des crédits d’intervention de 40 %, soit d’environ 2, 2 millions d’euros. L’examen du texte à l’Assemblée nationale a permis de majorer ces crédits de 1, 9 million d’euros, ce qui a ramené leur baisse à 5 %, au lieu de 40 %.
Pour autant, ces associations ont déjà produit de nombreux efforts ces dernières années pour maintenir leur activité au service des consommateurs, malgré des diminutions successives de leurs subventions. Toute nouvelle baisse du financement aurait des effets irréversibles sur l’organisation de leur implantation, leur maillage territorial et les missions qu’elles assurent au quotidien. Pour que ces structures demeurent en mesure d’accompagner les consommateurs pour relever les défis résultant des différentes transitions économiques, énergétiques, numériques, environnementales et sociales, il est proposé de maintenir leurs subventions au niveau actuel, soit 5, 4 millions d’euros.
Cet amendement tend donc à majorer de 300 000 euros les crédits d’intervention dédiés à la protection économique du consommateur qui sont inscrits à l’action n° 17 du programme 134.
Comme cela a été dit, les subventions aux mouvements de défense des consommateurs affichaient une baisse de 40 % dans le projet de loi de finances initiale. L’Assemblée nationale a adopté un amendement visant à majorer les crédits de 3, 1 millions d’euros, ce qui a permis de ramener la baisse à seulement 5 % et de préserver les moyens, et donc l’indépendance, de ces organismes, sans pour autant remettre en cause la nécessité de réaliser des économies de fonctionnement.
Le Gouvernement avait donné un avis favorable à l’atténuation de l’effort initialement demandé. Il semble donc que nous partagions tous la même préoccupation à cet égard. Toutefois, compte tenu de la majoration déjà adoptée par les députés, la commission souhaite entendre l’avis du Gouvernement sur cet amendement.
Le Gouvernement, attaché à la protection des consommateurs, indispensable à la préservation de leur confiance et au bon fonctionnement des marchés, a en effet soutenu la décision de l’Assemblée nationale d’abonder les subventions aux associations consuméristes à hauteur de 3, 1 millions d’euros. .
Toutefois, nous considérons qu’il n’est pas opportun d’aller au-delà de cette remise à niveau, qui limite à 5 % seulement la baisse des subventions et permet d’envoyer un signal pour une amélioration de l’efficacité de cet écosystème.
Nous suggérons le retrait de cet amendement. Sinon, l’avis serait défavorable.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Économie », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
L es crédits sont adoptés.
J’appelle en discussion les articles 54 quinquies à 54 octies, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Économie ».
Économie
La section 3 du chapitre unique du titre II du livre VI du code monétaire et financier est ainsi modifiée :
1° Au d du 3° du II de l’article L. 621-5-3, les mots : « un taux fixé » sont remplacés par les mots : « des taux fixés » et le mot : « peut » est remplacé par le mot « peuvent » ;
2° Il est ajouté un article L. 621-5-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 621 -5 -5. – L’Autorité des marchés financiers peut recevoir des contributions versées à titre volontaire par des associations professionnelles représentant les personnes soumises à son contrôle, en vue du financement de projets d’intérêt commun.
« Un arrêté du ministre chargé de l’économie précise l’affectation de ces contributions et les associations mentionnées au premier alinéa. »
L’amendement n° II-227, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
La commission des finances propose de supprime l’article 54 quinquies, qui constitue le comble de l’horreur budgétaire ! En effet, il vise tout simplement à contourner un plafond en créant – l’imagination est au pouvoir ! – une contribution volontaire obligatoire des entreprises.
L’Autorité des marchés financiers, l’AMF, a des besoins d’argent, sans doute légitimes. Cela aurait normalement dû conduire à relever son plafond de ressources. Au lieu de cela, on supprime une taxe pour la remplacer par une contribution volontaire obligatoire…
Il vaut mieux revenir à l’essentiel et considérer que si l’AMF a des besoins financiers, il suffit de relever le plafond des ressources affectées, fixé à 94 millions d’euros pour 2016.
Si nous ne supprimons pas cet article, il n’y aura plus de limite aux artifices budgétaires ! Peut-être pourrait-on demain supprimer les impôts et les remplacer par des contributions publiques volontaires obligatoires ! Je pense préférable de mettre fin à cette plaisanterie et inviter le Gouvernement à donner à l’AMF les moyens dont elle a besoin en relevant son plafond de ressources.
Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.
L’adoption de cet amendement, qui vise à supprimer la possibilité, pour l’AMF, de prélever des contributions volontaires non obligatoires, la priverait de ressources pour financer des investissements exceptionnels qui contribuent à l’attractivité de la place de Paris et que les acteurs concernés sont prêts à financer, au moment où, à la suite du Brexit, la concurrence entre les places financières bat son plein. On rendrait ainsi un mauvais service à l’attractivité de notre pays !
Je le rappelle, ces contributions serviront à financer des projets informatiques ponctuels et d’intérêt commun, qui ne touchent absolument pas aux missions régaliennes de l’AMF, dont l’autonomie financière dans l’exercice de ces missions n’est pas remise en cause.
Ce panachage entre contributions obligatoires ajustées et contributions volontaires nous paraît constituer la solution la plus équilibrée, qui, sans remettre en cause le niveau structurel des ressources de l’AMF, permettra de lui ménager les marges de manœuvre budgétaires dont elle a ponctuellement besoin.
L’avis du Gouvernement est défavorable.
Si l’AMF a des besoins dans le contexte du Brexit, ce que nous pouvons comprendre, il suffit de relever son plafond de ressources. Le Gouvernement propose de supprimer une taxe obligatoire et de la remplacer par une contribution volontaire. Que se passera-t-il si les entreprises décident de ne pas verser leur contribution ? Les ressources de l’AMF s’en trouveront diminuées d’autant.
Il s’agit en fait, avec cet article, du contournement d’un arbitrage budgétaire qui a été perdu. Faute d’avoir eu gain de cause, on a choisi d’inventer ce mécanisme quelque peu tordu de remplacement d’un impôt par une contribution volontaire… Pourquoi ne pas généraliser ce procédé en supprimant les impôts acquittés par nos compatriotes et en les remplaçant par des contributions volontaires ? Je ne suis pas certain que cela puisse marcher !
Que le Gouvernement prenne ses responsabilités et donne à l’AMF les moyens dont elle a besoin en toute transparence, en relevant son plafond de ressources affectées.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Une grande confiance n’excluant pas une petite méfiance, nous voterons évidemment l’amendement du rapporteur général !
Je veux préciser que le plafond de ressources de l’AMF n’est pas abaissé, mais simplement modulé. Il y a 94 millions d’euros de crédits par taxe affectée, contre un besoin de 6 millions d’euros par contribution volontaire. Je pose les chiffres sur la table. Nous avons besoin de ces deux modalités de financement de l’AMF, de manière à respecter la contrainte budgétaire tout en répondant aux besoins ponctuels que j’évoquais.
Je salue la beauté de la chose : une contribution volontaire dont le montant est fixé à l’avance…
L ’ amendement est adopté.
L’amendement n° II-718, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 54 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article 23 de la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l’artisanat, il est inséré un article 23-1 ainsi rédigé :
« Art. 23 -1. – I. – Les organisations professionnelles d’employeurs reconnues représentatives au niveau national et interprofessionnel en application de l’article L. 2152-6 du code du travail sont habilitées à conclure un accord pour mettre en œuvre des actions collectives de communication et de promotion à caractère national en faveur de l’artisanat et des entreprises artisanales définies à l’article 19.
« Les actions collectives de communication et de promotion ont pour objet :
« 1° De maintenir et développer le potentiel économique du secteur de l’artisanat et concourir à la valorisation de ses savoir-faire auprès du public ;
« 2° De promouvoir les métiers de l’artisanat auprès des jeunes, de leurs parents, des professionnels de l’éducation, de l’orientation et de l’emploi.
« II. – L’accord mentionné au I :
« 1° Détermine les actions collectives de communication et de promotion à caractère national en faveur de l’artisanat et des entreprises artisanales ;
« 2° Désigne l’entité de droit privé, mentionnée au V, chargée de mettre en œuvre les actions collectives de communication et de promotion ;
« 3° Peut instituer une contribution obligatoire due par les entreprises artisanales adhérentes aux organisations professionnelles signataires destinée à financer les dépenses des actions collectives de communication et de promotion et les dépenses de fonctionnement de l’entité de droit privé mentionnée au V, chargée de mettre en œuvre ces actions. L’accord détermine l’assiette, le montant et les modalités de perception de cette contribution. Le montant de la contribution ne peut être supérieur à 10 % du montant de la taxe prévue par l’article 1601 du code général des impôts, dans la limite d’un montant, par entreprise artisanale, fixé par arrêté du ministre chargé de l’artisanat.
« L’accord précise la durée pour laquelle il est conclu. Après chaque arrêté fixant la liste des organisations professionnelles d’employeurs reconnues représentatives au niveau national et interprofessionnel et en l’absence de conclusion d’un nouvel accord, l’accord en vigueur cesse de produire ses effets le 1er janvier de l’année suivant celle de la publication de l’arrêté prévu à l’article L. 2152-6 du code du travail.
« III. – L’accord, ses avenants ou annexes peuvent, à la demande unanime des organisations professionnelles d’employeurs signataires, être étendus, pour une durée déterminée, en tout ou partie, par arrêté du ministre chargé de l’artisanat aux entreprises artisanales assujetties aux a et b de l’article 1601 du code général des impôts. La contribution perçue, nonobstant son caractère obligatoire, demeure une créance de droit privé.
« Pour pouvoir être étendus, l’accord, ses avenants ou annexes ne doivent pas avoir fait l’objet dans un délai d’un mois à compter de la publication par arrêté du ministre chargé de l’artisanat d’un avis d’extension au Journal officiel de la République française, de l’opposition écrite et motivée d’une ou de plusieurs organisations professionnelles d’employeurs reconnues représentatives au niveau national et interprofessionnel, non signataires de l’accord, ses avenants ou annexes.
« Les conditions d’extension des accords, avenants ou annexes ainsi que le droit d’opposition sont précisées par décret.
« IV. – L’accord peut être dénoncé par une des organisations professionnelles d’employeurs signataires. La dénonciation est portée à la connaissance du ministre chargé de l’artisanat qui procède à l’abrogation de l’arrêté d’extension.
« V. – Les actions collectives de communication et de promotion à caractère national en faveur de l’artisanat et des entreprises artisanales et la gestion de la contribution due par les entreprises artisanales sont confiées à une association, administrée par un conseil d’administration composé de représentants des organisations professionnelles d’employeurs signataires. Au sein du conseil d’administration, chaque organisation professionnelle d’employeurs dispose d’un nombre de voix proportionnel à son audience au niveau national et interprofessionnel. Pour l’appréciation de cette audience, est pris en compte le nombre des entreprises adhérentes à l’organisation professionnelle d’employeurs représentative au niveau national et interprofessionnel tel qu’il résulte de la dernière mesure d’audience prévue à l’article L. 2152-4 du code du travail. Ces représentants sont renouvelés au plus tard le 1er janvier de l’année suivant celle de la publication de l’arrêté prévu à l’article L. 2152-6 du code du travail.
« Les statuts de l’association peuvent prévoir que des représentants de l’Assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat ou des personnalités qualifiées participent avec voix consultative au conseil d’administration.
« Le ministre chargé de l’artisanat désigne un commissaire du Gouvernement auprès de l’association. Le commissaire du Gouvernement assiste de droit aux séances de toutes les instances de délibération et d’administration de l’association. Il est destinataire de toute délibération du conseil d’administration. Il a communication de tous les documents relatifs à la gestion de l’association.
« Lorsque le commissaire du Gouvernement estime qu’une délibération du conseil d’administration ou qu’une décision prise par une autre instance ou autorité interne de l’association n’est pas conforme aux dispositions du présent article, à des stipulations de l’accord mentionné au I ou à des dispositions légales ou réglementaires, il saisit le président du conseil d’administration, qui lui adresse une réponse motivée.
« VI. – Les organisations professionnelles d’employeurs signataires de l’accord fournissent chaque année aux autorités administratives compétentes :
« 1° Un bilan d’application de l’accord étendu ;
« 2° Le compte financier, un rapport d’activité et le compte rendu des assemblées générales de l’association chargée de la mise en œuvre des actions collectives de communication et de promotion et de la gestion de la contribution due par les entreprises artisanales.
« Elles communiquent aux autorités administratives compétentes tous documents dont la communication est demandée par celles-ci pour l’exercice de leurs pouvoirs de contrôle. »
La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Cet amendement tire les conséquences de la suppression par le projet de loi de finances pour 2018, à compter du 1er janvier 2018, de la taxe fiscale affectée qui alimente le Fonds national de promotion et de communication de l’artisanat, le FNPCA. Cette taxe représente une contribution de 11 euros par an pour chaque entreprise artisanale. La suppression de cette taxe emportera de facto la suppression du FNPCA.
Or, depuis sa création en 1997, le FNPCA a contribué à installer durablement, dans l’esprit du public, une image positive de l’artisanat. Nous souhaitons permettre une continuation des actions de communication menées. Pour ce faire, un mécanisme de substitution, compatible avec les règles du droit européen, a été élaboré. Il reposera sur une contribution privée, gérée par un organisme privé.
L’adoption de cet amendement habilitera les organisations professionnelles d’employeurs à conclure un accord qui leur permettra de mener des actions collectives de communication et de promotion à caractère national en faveur de l’artisanat et des entreprises artisanales.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. C’est absolument génial ! On a enfin trouvé le moyen de faire baisser le taux de prélèvements obligatoires en France, l’un des plus élevés au monde ! On va supprimer les impôts, les taxes affectées, et on va les remplacer par des contributions volontaires obligatoires !
M. Roger Karoutchi rit.
Je vais émettre un avis de sagesse sur cet amendement, parce que son adoption ne changera strictement rien sur le fond. Le dispositif de l’article que nous venons de supprimer était encore plus tordu en ce sens qu’il ne garantissait pas le niveau de ressources attendu, l’entreprise n’étant absolument pas obligée de payer. Là, elle y sera contrainte puisqu’il s’agit d’une contribution volontaire obligatoire. L’imagination est au pouvoir ! Le seul effet de l’adoption de cet amendement sera de diminuer artificiellement le taux de prélèvements obligatoires en France. Cela me donne des idées en vue de la discussion du projet de loi de finances rectificative !
Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.
Il s’agit de transférer aux acteurs du secteur de l’artisanat, qui sont demandeurs, la gouvernance de cet outil. Ils seront ainsi en mesure de décider eux-mêmes des actions de promotion de leurs métiers. Cette mission peut, me semble-t-il, relever de l’initiative privée.
Tout à l’heure, notre collègue Nathalie Goulet a dénoncé la complexité de l’organisation de la promotion de l’artisanat et des entreprises, et le Gouvernement propose ici de créer encore un outil supplémentaire… Il y a déjà les chambres de métiers et quantité d’autres structures qui agissent pour promouvoir l’artisanat ! Pourquoi rajouter à la complexité ? Tout cela mériterait peut-être un examen plus approfondi en termes de choix budgétaires.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Les contributions volontaires obligatoires, d’habitude, c’est la Mafia qui les exige !
Sourires.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’article 71 de la loi n° 2003-1312 du 30 décembre 2003 de finances rectificative pour 2003 est ainsi modifié :
1° Après le İ, il est inséré un İ bis ainsi rédigé :
« İ bis. – Il est institué une taxe pour le développement des industries de fabrication du papier, du carton et de la pâte de cellulose.
« I. – Le produit de cette taxe est affecté, dans la limite du plafond prévu au I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 précitée, au Centre technique de l’industrie des papiers, cartons, et celluloses, dénommé Centre technique du papier, pour financer les missions de recherche, de développement, d’innovation et de transfert de technologies qui lui sont dévolues en application de l’article L. 521-2 du code de la recherche, précisées, en tant que de besoin, par le décret en Conseil d’État pris en application de l’article L. 521-13 du même code.
« Les opérations financées au moyen du produit de cette taxe font l’objet d’une comptabilité distincte tenue par le centre technique industriel.
« II. – Cette taxe est due :
« 1° Par les fabricants établis en France du papier, du carton et de la pâte de cellulose ;
« 2° À l’occasion de l’importation du papier, du carton et des pâtes chimiques de bois à dissoudre, par la personne désignée comme destinataire réel des biens sur la déclaration en douane ou, solidairement, par le déclarant en douane qui agit dans le cadre d’un mandat de représentation indirecte, défini à l’article 5 du règlement (UE) n° 952/2013 du Parlement européen et du Conseil du 9 octobre 2013 établissant le code des douanes de l’Union.
« Les produits des industries de la fabrication du papier, du carton et de la pâte de cellulose soumis à cette taxe sont recensés par arrêté du ministre chargé de l’industrie, en référence à la nomenclature de produits française en vigueur.
« III. – Constituent des fabricants les entreprises qui :
« 1° Vendent les produits mentionnés au II :
« a) Après les avoir fabriqués ou assemblés ;
« b) Après les avoir conçus et fait fabriquer ou assembler par un ou plusieurs tiers, quel que soit le lieu de fabrication ou d’assemblage, soit en leur fournissant les matières premières, soit, s’agissant des produits dont l’assemblage est confié à un ou plusieurs tiers, en leur imposant des techniques faisant l’objet de brevets, de procédés, de formules ou de plans, dessins ou modèles, quel qu’en soit le support, dont elles ont la jouissance ou l’exclusivité, soit en leur imposant des dimensionnements, des spécifications ou des technologies ;
« c) Après y avoir apposé ou fait apposer des griffes ou des marques dont elles ont la jouissance ou l’exclusivité ;
« 2° Travaillent à façon ou réalisent des prestations portant sur les produits mentionnés au II.
« IV. – La taxe est assise sur le chiffre d’affaires, hors taxes, réalisé ou, à défaut, sur la valorisation, déterminée à partir de la comptabilité de l’entreprise, au titre des ventes, exportations ou autres prestations de services et des opérations à façon portant sur les produits mentionnés au II.
Elle est déterminée dans les conditions suivantes :
« 1° Pour les produits que l’entreprise fabrique ou fait fabriquer et livre à des tiers, la taxe est assise sur le chiffre d’affaires, hors taxes, généré par la vente de ces produits ;
« 2° Pour les papiers et cartons que l’entreprise fabrique et incorpore dans des ensembles non soumis à la présente taxe et destinés à la vente, la taxe est assise sur la valeur de ces papiers et cartons. Il appartient au fabricant de déterminer la valeur vénale des produits incorporés en la justifiant par tous documents probants ;
« 3° Pour la pâte de cellulose, n’entrent pas dans l’assiette les pâtes de cellulose transformées au sein de la même entreprise, ainsi que les ventes effectuées auprès d’entreprises françaises contrôlées à 100 % par l’entreprise assujettie ou contrôlant à 100 % l’entreprise assujettie. Sont également exclues de l’assiette les ventes effectuées entre deux filiales françaises contrôlées à 100 % par la même entreprise.
« Pour les importations, la taxe est assise sur la valeur en douane appréciée au moment de l’importation sur le territoire national.
« V. – Le taux de la taxe est fixé à 0, 4 ‰.
« Il peut être révisé chaque année par décret à l’intérieur d’un intervalle compris entre 0, 4 ‰ et 0, 6 ‰.
« VI. – Les importations en provenance d’un État membre de l’Union européenne ou d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen sont exonérées de ladite taxe.
« VII. – Le fait générateur de la taxe est constitué par :
« 1° La livraison des produits, pour les ventes et livraisons à soi-même ;
« 2° L’importation sur le territoire national, pour les importations ;
« 3° L’exécution des services pour les prestations de services et les opérations à façon.
« VIII. – La taxe est exigible :
« 1° À la date du fait générateur pour les ventes et à la date de l’expédition pour les exportations ;
« 2° Lors de l’encaissement des acomptes, du prix ou de la rémunération pour les prestations de services ou les opérations à façon.
« La circonstance qu’un produit ou une prestation qui est pris en compte pour le calcul du chiffre d’affaires d’une entreprise a donné lieu, à un stade antérieur, au versement de cette taxe n’ouvre aucun droit à déduction.
« Les redevables adressent au Centre technique du papier, au plus tard le 25 du mois suivant l’expiration de chaque semestre, la déclaration du chiffre d’affaires imposable qu’ils ont réalisé au titre du semestre écoulé. Le présent alinéa s’applique aux opérations dont le fait générateur intervient à compter du 1er janvier 2018.
« Cette déclaration est conforme à un modèle établi par arrêté du ministre chargé de l’industrie.
« Lorsqu’elle est due sur les produits importés, la taxe est recouvrée par l’administration des douanes et droits indirects, selon les règles, garanties et sanctions applicables en matière de droits de douanes. Le produit de la taxe est versé mensuellement au centre technique mentionné au I. » ;
2° Le J est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, la référence : « İ » est remplacée par la référence : « İ bis » ;
b) Le I est ainsi modifié :
– à la deuxième phrase du deuxième alinéa, les mots : « et le Centre technique industriel de la plasturgie et des composites » sont remplacés par les mots : «, le Centre technique industriel de la plasturgie et des composites et le Centre technique de l’industrie des papiers, cartons et celluloses » ;
– à la première phrase du troisième alinéa, les mots : « et du Centre technique industriel de la plasturgie et des composites » sont remplacés par les mots : «, du Centre technique industriel de la plasturgie et des composites et du Centre technique de l’industrie des papiers, cartons et celluloses » ;
– au neuvième alinéa, la référence : « et İ » est remplacée par les références : « İ et İ bis » ;
c) À la fin du premier alinéa et au troisième alinéa du II, la référence : « du İ », est remplacée par les références : « des İ et İ bis ». –
Adopté.
I. – Au premier alinéa du I de l’article 120 de la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008, les mots : « en tout ou partie » sont supprimés.
II. – La section 1 du chapitre Ier du titre II du livre II du code monétaire et financier est ainsi modifiée :
1° L’article L. 221-5 est ainsi modifié :
a) Le troisième alinéa est supprimé.
b) Le sixième alinéa est ainsi modifié :
– à la première phrase, le mot : « quatrième » est remplacé par le mot : « troisième » ;
– à la même première phrase, les mots : « et qui n’ont pas choisi d’opter, dans les conditions prévues par un décret en Conseil d’État, pour la centralisation intégrale des ressources qu’ils collectent, » sont supprimés ;
– les deux dernières phrases sont supprimées ;
c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d’État, pris après avis de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, précise les conditions de mise en œuvre du présent article. » ;
2° Au V de l’article L. 221-7, les mots : « en tout ou partie » sont supprimés.
III. – À titre de mesure transitoire et à compter du 1er avril 2018, le fonds prévu à l’article L. 221-7 du code monétaire et financier reverse, sur une période de dix ans, aux établissements distribuant le livret A ou le livret de développement durable et solidaire les sommes centralisées au-delà de la quote-part mentionnée au premier alinéa de l’article L. 221-5 du même code. Pour les établissements qui en feraient la demande auprès de la Caisse des dépôts et consignations entre le 1er janvier 2018 et le 28 février 2018, cette période peut être réduite entre le 1er avril 2018 et le 1er avril 2020. Un décret en Conseil d’État, pris après avis de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, précise les conditions de mise en œuvre du présent III.
IV. – Lorsque les établissements distribuant le livret A et le livret de développement durable et solidaire optent pour la centralisation intégrale des ressources qu’ils collectent après la date du 13 octobre 2017, le montant des dépôts qu’ils ont choisi de ne pas conserver leur est restitué en totalité, à compter du 1er avril 2018. –
Adopté.
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er juillet 2018, un rapport sur le financement public dont bénéficie Business France. Ce rapport évalue la pertinence des choix opérés en termes d’équilibre entre le financement budgétaire et les ressources propres de l’opérateur. À cette fin, il précise les modalités de gratuité et de facturation, selon les cas, des prestations proposées par Business France au regard de l’objectif d’un plus grand accès des petites et moyennes entreprises à ces prestations. Il présente également des éléments permettant d’apprécier la situation de concurrence dans laquelle ces prestations peuvent se trouver avec celles proposées par des opérateurs privés ou consulaires. Il fournit des éléments de comparaison internationale à l’appui de ces constats et comporte, le cas échéant, des recommandations quant à l’évolution souhaitable des différentes ressources et tarifs de l’opérateur.
L’amendement n° II-228, présenté par M. Lalande, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Compléter cet article par une phrase ainsi rédigée :
Enfin, il évalue les modalités, notamment financières, d’une mise à disposition de Business France des conseillers en développement international relevant du réseau des chambres de commerce et d’industrie, dans le cadre de la modernisation du dispositif public de soutien à l’internationalisation des entreprises.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
Madame la secrétaire d’État, sur toutes les travées, nous nous accordons sur un constat qui relève de l’évidence : le commerce extérieur de notre pays connaît un déficit structurel.
Il a été créé, avec Business France, une force de frappe à l’extérieur du pays. Or, à l’intérieur de nos frontières, comme l’a excellemment dit notre collègue Goulet, on trouve, à différents échelons territoriaux, des dizaines et des dizaines d’organismes, de spécialistes, de services d’aide à l’export, chacun essayant, dans son secteur et son territoire, d’être le meilleur. Autant dire qu’il y a une grande dispersion des efforts et des structures ! Il en va exactement de même en matière de crédits. Le résultat de cette situation est un déficit structurel extraordinaire !
Peut-être est-il temps d’étudier, au travers d’un rapport ou d’une mission, s’il existe une relation directe entre un premier de cordée à l’extérieur et une multitude de premiers de cordée à l’intérieur. Comment coordonner tous ces acteurs ? Il convient de déterminer quelles sont les synergies ou les inerties. Tous ne sont pas responsables de notre situation de déficit structurel. Il y a, dans notre pays, une hypocrisie qui, elle aussi, est structurelle.
L’AFEP, l’Association française des entreprises privées, qui regroupe plus de cent entreprises parmi les plus importantes de France, annonce avec condescendance qu’elle va aider les PME et les ETI à exporter. Signalons tout de même qu’une grande majorité des ETI et des PME sont des sous-traitants des entreprises membres de l’AFEP. En fin de compte, celle-ci demande donc à des sous-traitants de dépendre de l’entreprise donneuse d’ordres en matière d’exportation !
De notre côté, nous qui nous préoccupons en permanence des PME, nous avons multiplié les intervenants en matière de conseil à l’export sur nos territoires. Les PME et les ETI sont ainsi prises entre un foisonnement de conseillers, d’une part, et l’AFEP, d’autre part. Il en résulte que nous n’avons pas de véritable politique de l’exportation pour nos PME et nos ETI. Business France et la Banque publique d’investissement, la BPI, ont été créées dans cette perspective. Il faut aller jusqu’au bout de la réforme !
Il paraît que nous sommes dans un nouveau monde. Eh bien formons un commando réellement doté des moyens de porter les couleurs de la France à l’export. Les PME et les ETI dépendront alors non plus de l’AFEP ou d’une multitude d’organismes décentralisés, mais bien d’une organisation centralisée au service de l’exportation.
Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement. Comme je l’ai déjà indiqué, M. Lecourtier a fait des propositions. Les évolutions envisageables porteront, notamment, sur une meilleure articulation de Business France avec les chambres de commerce et d’industrie.
Je soutiens cet amendement, mais si ce rapport ne fait pas une autopsie de la chaîne d’intervenants qui conduit à l’exportation ou à l’établissement de relations économiques, il ne servira à rien ! Pour très bien connaître plusieurs secteurs, je peux vous dire que le nombre d’intervenants est inversement proportionnel à leur efficacité ! Je ne parle même pas des consultants qui ne parlent pas la langue du pays, ni de ceux qui, tels des ouvriers de la vingt-cinquième heure, se greffent sur une opération seulement quand elle est déjà bien lancée, sans compter ceux qui interviennent pour contrecarrer un projet parce que l’idée ne vient pas d’eux !
Cela fait neuf ans que je plaide pour que ce rapport soit complet et, surtout, qu’il soit suivi d’effet. Je suis désormais membre de la commission des finances, et c’est mon dernier mandat : vous allez m’entendre sur ce sujet !
Sourires.
L ’ amendement est adopté.
L ’ article 54 octies est adopté.
Nous allons procéder à l’examen des crédits du compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés », figurant à l’état D.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés
Prêts et avances pour le logement des agents de l’État
Prêts pour le développement économique et social
Prêts à la société concessionnaire de la liaison express entre Paris et l’aéroport Paris-Charles de Gaulle
ligne nouvelle
Prêts à Bpifrance pour le développement du crédit-export vers l’Iran
ligne nouvelle
L’amendement n° II-415, présenté par M. Bazin, est ainsi libellé :
I. – Supprimer le programme :
Prêts à la société concessionnaire de la liaison express entre Paris et l’aéroport Paris-Charles de Gaulle
II. - En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Prêts et avances pour le logement des agents de l’État
Prêts pour le développement économique et social
Prêts à la société concessionnaire de la liaison express entre Paris et l’aéroport Paris-Charles de Gaulle
Prêts à Bpifrance pour le développement du crédit-export vers l’Iran
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Arnaud Bazin.
Il s’agit d’une mise en cohérence avec le rejet par le Sénat, il y a une semaine, d’un amendement du Gouvernement qui prévoyait de prêter 1, 7 milliard d’euros à la société qui va conduire le projet du Charles-de-Gaulle Express. Je rappelle que le Charles-de-Gaulle Express assurera une liaison directe entre la gare de l’Est et l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, le prix du billet étant évalué aujourd’hui à environ 27 euros pour un aller simple. Il s’adressera uniquement aux voyageurs internationaux.
Il s’agissait pour nous, en rejetant cet amendement, non de remettre en cause l’intérêt de ce projet défendu par Aéroports de Paris, mais de souligner une incohérence et d’exprimer une grande inquiétude. En effet, depuis plusieurs semaines, le Gouvernement laisse filtrer des informations semblant remettre en question la réalisation de l’ensemble du métro du Grand Paris Express, qui avait fait l’objet d’un accord entre toutes les parties en 2011, accord confirmé en 2013 et assorti d’un engagement sur le calendrier. Est notamment remise en cause la réalisation des lignes 17 et 18 dans les délais prévus, au prétexte qu’elle aggraverait les ratios d’endettement de notre pays.
Dans le même temps, on nous propose de prêter 1, 7 milliard d’euros à la société du projet du Charles-de-Gaulle Express, ce qui dégraderait également ces mêmes ratios. Cette société a pourtant indiqué avoir bouclé son plan de financement bancaire. On peut d’autant plus facilement la croire que les taux d’intérêt sont aujourd’hui encore particulièrement favorables pour la réalisation de cette opération.
Il s’agissait donc, d’une part, d’exprimer notre incompréhension quant au prêt de 1, 7 milliard d’euros à ladite société – nous n’avons reçu aucune explication à ce sujet –, et, d’autre part, d’appeler très fortement le Gouvernement à nous rassurer dans les plus brefs délais sur la réalisation de la totalité du projet du métro du Grand Paris Express. Cette confirmation est repoussée de mois en mois depuis octobre ; nous l’attendons toujours.
Il me paraît utile de poser avec force, au travers d’un vote de confirmation de notre décision de la semaine dernière, ces deux questions au Gouvernement : pourquoi prêter 1, 7 milliard d’euros si ce n’est pas nécessaire ? Pourquoi envisager un tel financement alors que nous n’avons pas encore obtenu la garantie que l’ensemble du métro automatique du Grand Paris Express sera réalisé ?
Mme Sophie Primas applaudit.
Le Gouvernement émet lui aussi un avis de sagesse, mais uniquement dans un souci de cohérence, la Haute Assemblée ayant supprimé le programme permettant à l’État d’octroyer un prêt à la société du Charles-de-Gaulle Express. Nous étions évidemment défavorables à cette suppression.
Je soutiens cet amendement.
On interdit à tous les banlieusards, à tous les provinciaux de venir à Paris en laissant bloquer la circulation sans prévoir d’autres modalités de transport. Notre collègue Bazin, au travers de cet amendement, appelle en fait au développement des transports en commun. Il souligne, à juste titre, que l’on ne voit rien venir, sinon des pauses pour tous les investissements. Il y a là une incohérence ! Les assises de la mobilité se sont transformées en assassinat de la mobilité ! Il s’agit donc d’un amendement d’appel. Nous voulons tous que Roissy Charles-de-Gaulle soit desservi par ce moyen de transport, mais faites aussi un effort pour les autres !
Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.
Je comprends bien ce qui motive l’amendement de M. Bazin, mais je ne le voterai pas.
Je souligne, pour la énième fois, que le Grand Paris Express est payé non par l’État, mais par l’Île-de-France et par les Franciliens. Le précédent gouvernement nous a imposé de créer des taxes supplémentaires, acquittées par les entreprises et les particuliers, et l’État s’est totalement désengagé du financement des transports publics en Île-de-France. La réalité, c’est que le Grand Paris Express est financé par la région, par les collectivités, par les entreprises et par l’ensemble des Franciliens, qui paient des taxes supplémentaires.
Cela signifie, mon cher collègue Bazin, qu’on ne peut pas soutenir que le financement du Grand Paris Express aggrave l’endettement de l’État, puisque celui-ci ne paye rien !
Je l’ai dit à moult reprises depuis dix ans, le coût du Grand Paris Express a été sous-évalué et le projet a été assorti d’un calendrier irréaliste. Mais tout le monde fait comme si de rien n’était, car entreprises, collectivités, élus, citoyens espèrent obtenir qui un marché, qui une gare, qui une desserte. Je suis pour une réalisation complète du tracé, mais je souhaite surtout que personne ne mente et que tout le monde – le Gouvernement, la région, les départements… – se retrouve autour d’une table pour tout remettre à plat et répondre aux vraies questions : que peut-on faire, dans quels délais et avec quel financement ? Aujourd’hui règne une hypocrisie générale, et je ne sais pas comment tout cela va finir.
Cela fait vingt-cinq ans que l’on parle du Charles-de-Gaulle Express. Je n’étais pour ma part pas très favorable à sa réalisation, mais, dès lors que le Sénat, l’Assemblée nationale et le Gouvernement y sont favorables, il faut trouver une solution pour la financer. Ce qui me gêne beaucoup, madame la secrétaire d’État, c’est que quand la décision a été prise, y compris par le Sénat, on nous a clairement affirmé qu’il n’y aurait pas un centime de fonds publics d’engagé ! Or il est maintenant question d’un prêt de l’État de 1, 7 milliard d’euros…
Je voterai l’amendement de M. Bazin, dont l’intérêt est d’attirer l’attention sur le sujet. Il ne s’agit pas d’opposer un projet à un autre. L’utilité du Charles-de-Gaulle Express est avérée, de même que celle du Grand Paris Express.
Nous sommes dans une situation un peu complexe parce que nous ne connaissons pas, pour l’heure, la réponse de l’État sur la réalisation du Grand Paris Express. Son report commence à pénaliser un projet qui est une priorité pour l’ensemble des élus franciliens. En effet, nous nous sommes engagés dans nos collectivités sur sa mise en œuvre et mobilisé de l’argent public, au travers notamment de la taxe spéciale d’équipement.
Il ne s’agit donc pas d’opposer un projet à l’autre, mais nous voulons mettre l’accent sur la nécessité qui incombe désormais à l’État de lever les incertitudes qui pèsent sur la réalisation du Grand Paris Express depuis que des surcoûts budgétaires ont été identifiés et quantifiés pendant l’été. C’est dans cet esprit que, pour ma part, je voterai cet amendement.
Je voudrais apporter quelques compléments à ma présentation de cet amendement.
Premièrement, il faut savoir que le projet de métro automatique du Grand Paris Express ne vise pas uniquement à améliorer la desserte et les conditions de transport en commun du quotidien, ce qui est pourtant bien nécessaire. Ce projet traduit surtout une vision du développement de la région capitale, tout à fait indispensable pour nous maintenir dans la compétition des grandes villes-mondes. En Europe occidentale, cette compétition oppose Londres et Paris. Si l’on croit que le Brexit suffira à nous faire l’emporter, on se trompe lourdement ! Nous avons absolument besoin de développer notre région capitale, au bénéfice d’ailleurs de l’ensemble du territoire français. Ce développement doit s’appuyer sur un réseau de transport complet : c’est pourquoi celui-ci doit être réalisé en totalité. Ce point est extrêmement important.
Deuxièmement, monsieur Karoutchi, il n’y a évidemment pas de recours à des fonds de l’État, puisque l’on a créé des taxes spéciales affectées et que ce sont les habitants et les entreprises de l’Île-de-France qui paient. Ce modèle est robuste ; il produit 550 millions d’euros de ressources annuelles et permet à la Société du Grand Paris, la SGP, d’emprunter les fonds nécessaires, même si certaines dépenses pourraient être revues à la baisse pour faciliter la réalisation globale du projet.
L’État nous oppose des critères d’endettement maastrichtiens globaux : à l’en croire, aux yeux de l’Europe, la dette de la SGP serait agglomérée à celle de l’État. Je ne sais pas si c’est techniquement exact.
En tout cas, c’est ce qu’on nous dit.
Quoi qu’il en soit, on ne peut pas soutenir cet argument et, dans le même temps, endetter le pays à hauteur de 1, 7 milliard d’euros pour faciliter la réalisation d’un autre projet, qui a toujours été vu comme non concurrent et différent de celui du Grand Paris Express.
Enfin, le marché bancaire permet de financer le Charles-de-Gaulle Express sans difficulté. C’est pourquoi nous ne comprenons toujours pas pourquoi l’État devrait accorder un prêt à la société qui mène ce projet.
Je voterai l’amendement de M. Bazin, mais je partage certaines des objections formulées par M. Karoutchi. De fait, leurs positions ne me semblent pas du tout antagonistes ; au contraire, elles se complètent.
Je partage aussi le sentiment de M. Karoutchi quant à l’hypocrisie du Gouvernement. Celui-ci nous explique que l’organisation des jeux Olympiques est un enjeu essentiel pour la France et que ce projet engage toute la Nation, et non pas seulement les Parisiens et les Franciliens. De même, à la suite du Brexit, le Gouvernement affirme vouloir donner à la place de Paris un rayonnement mondial ; là encore, cette ambition engage toute la Nation. Or il est illusoire de croire que l’on pourra à la fois accueillir les jeux Olympiques et développer la place de Paris sans renforcer de façon considérable tous les transports du quotidien ! Il faut aujourd’hui que l’État prenne ses responsabilités et engage de lourds investissements, par l’emprunt, afin de remettre à niveau la totalité des transports du quotidien.
À ce propos, 1, 7 milliard d’euros, c’est exactement le montant nécessaire pour remettre à niveau la ligne B du RER, c’est-à-dire pour créer un tunnel dédié entre Châtelet et Gare du Nord…
Je suis d’accord avec Roger Karoutchi, d’autant que, élu de la Seine-Saint-Denis, j’avais demandé, dès l’annonce du projet Charles-de-Gaulle Express, que cette ligne marque au moins deux arrêts dans ce département. Or il n’y en aura aucun : les habitants de la Seine-Saint-Denis n’auront pas de desserte pour aller prendre l’avion ou travailler sur la plateforme aéroportuaire, ils n’auront que les nuisances liées aux travaux.
Pour le reste, je suis d’accord : c’est l’Île-de-France qui paie, y compris la Seine-Saint-Denis, laquelle n’accueillera cependant pas une seule station… C’est aberrant !
Je mets aux voix l’amendement n° II-415.
L’amendement n° II-394, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Prêts et avances pour le logement des agents de l’État
Prêts pour le développement économique et social
Prêts à la société concessionnaire de la liaison express entre Paris et l’aéroport Paris-Charles de Gaulle
Prêts à Bpifrance pour le développement du crédit-export vers l’Iran
TOTAL
SOLDE
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Avec cet amendement, nous passons de la théorie à la pratique, puisqu’il a pour objet d’augmenter les fonds de la Banque publique d’investissement, la BPI, destinés au développement du crédit-export vers l’Iran. Un effort considérable est déjà fait, puisqu’il est prévu, très légitimement, de porter ces crédits à 100 millions d’euros ; je propose de les abonder de 20 millions d’euros supplémentaires, car le volume d’affaires est extrêmement important.
J’ai organisé la première exportation de bovins vivants depuis mon département à destination de l’Iran. Je l’ai fait toute seule, grâce à des contacts en Iran, sans l’aide de l’ambassade, de l’administration du commerce extérieur ou du ministère de l’agriculture, au sein duquel on ne sait jamais si des lobbyistes défendant tels ou tels intérêts n’intrigueront pas pour empêcher que les choses se fassent.
Aujourd’hui, le problème majeur qui se pose pour nos entreprises qui veulent commercer avec l’Iran tient à la faiblesse de l’engagement du secteur bancaire. En effet, seules deux banques françaises travaillent aujourd’hui avec l’Iran, les autres étant tétanisées par la crainte des sanctions américaines. D’un point de vue technique, les sanctions sont levées, mais elles ne le sont manifestement pas encore complètement en termes diplomatiques et économiques.
De toute façon, la France a intérêt, d’un point de vue politique et stratégique, à développer les relations commerciales avec l’Iran, de façon à équilibrer les choses entre les deux rives du Golfe persique. Il faut donc aider nos entreprises dans leurs démarches.
Favoriser le développement des relations commerciales avec l’Iran est une excellente chose. Il est important que, dans le cadre de la diplomatie financière, on permette aux entreprises françaises de pénétrer les marchés de ce pays de 80 millions d’habitants.
Néanmoins, une enveloppe de 100 millions d’euros permet déjà un effet de levier intéressant. La commission des finances considère que cette somme est aujourd’hui suffisante. Regardons quels résultats elle permettra d’obtenir avant d’envisager d’abonder l’enveloppe de 20 millions supplémentaires.
Je vous suggère donc, ma chère collègue, de retirer cet amendement, faute de quoi la commission émettra un avis défavorable.
Le programme 869 a bien pour objectif d’aider la BPI à amorcer une activité de crédit-export vers l’Iran, afin de pallier l’absence de financeurs privés pour nos entreprises exportatrices vers ce pays. Nous pensons que, à terme, des financeurs privés vont prendre le relais, mais il faut que la BPI amorce la pompe, en quelque sorte. Cette première enveloppe de 100 millions d’euros permettra à la BPI de démontrer que cette activité est praticable dans de bonnes conditions et dans le respect des sanctions internationales.
À cet égard, 100 millions d’euros nous semblent suffisants pour assurer cet amorçage et encourager les investisseurs internationaux à prendre le relais. Le nombre et le volume des prêts que la BPI sera en capacité de consentir dans les années qui viennent sont assez incertains à ce stade, mais il est peu probable que plus de 100 millions d’euros soient nécessaires en 2018.
C’est pourquoi, madame la sénatrice, nous vous suggérons également de retirer cet amendement.
Je veux attirer l’attention du Gouvernement sur la nécessité absolue, pour la BPI, de mieux communiquer. Le président de la région Normandie s’est rendu en Iran avec des chefs d’entreprise, le MEDEF y organise régulièrement des déplacements, de même que les organisations agricoles. Il faut que les entreprises agricoles et les exportateurs de produits agricoles et agroalimentaires, lesquels n’ont jamais été sous embargo, puissent aussi recourir aux services de la BPI.
Dès lors, madame la secrétaire d’État, puisque l’on veut être cohérent et que, pour la première fois, des crédits de la BPI sont fléchés vers ce pays, mettons-y tout de suite de la méthode, en ciblant les entreprises qui pourront en bénéficier et en incitant la BPI à mener une communication plurisectorielle, de façon à informer et à rassurer les entreprises qui sont encore un peu frileuses à l’égard de l’Iran, par peur des sanctions, quand bien même celles-ci ont été levées. Ce sera probablement un test de la capacité de la BPI à mettre un peu d’ordre et de méthode dans un dossier que vous prenez, madame la secrétaire d’État, ab initio. C’est vraiment le moment de montrer comment on peut travailler de façon organisée. Pour ma part, je suivrai ce dossier avec beaucoup d’intérêt, puisque beaucoup d’entreprises de Normandie sont exportatrices vers l’Iran, notamment des entreprises agroalimentaires.
Cela étant dit, je retire l’amendement, madame la présidente.
L’amendement n° II-394 est retiré.
Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés », figurant à l’état D.
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
L es crédits sont adoptés.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Économie » et du compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés ».
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante-cinq, est reprise à dix-huit heures.
Par lettre en date de ce jour, M. François Patriat, président du groupe La République en Marche, a demandé le retrait de l’ordre du jour réservé à son groupe du mercredi 13 décembre 2017 du débat sur le thème : « La politique en faveur des étudiants » et son remplacement par un débat sur le thème : « Le retour des djihadistes en France ».
Acte est donné de cette demande.
J’informe le Sénat que des candidatures pour siéger au sein de plusieurs organismes extraparlementaires ont été publiées.
Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.
Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2018, adopté par l’Assemblée nationale.
Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.
Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Outre-mer » (et articles 57 quater, 57 quinquies, 57 sexies et 57 septies).
La parole est à M. le rapporteur spécial.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l’effort budgétaire et financier global de l’État en faveur des outre-mer s’élèvera, en 2018, à 21, 3 milliards d’euros en autorisations d’engagement et à 20, 5 milliards d’euros en crédits de paiement. Cet effort correspond à 3, 9 % du budget général, alors que les populations ultramarines représentent 4, 3 % de la population française. Cela m’autorise à dire que les outre-mer ne sont pas aussi « budgétivores » que certains peuvent le penser.
Les crédits de la mission « Outre-mer », dont les deux programmes « Emploi outre-mer » et « Conditions de vie outre-mer » regroupent 13 % des crédits de l’État consacrés aux outre-mer, sont, à bien des égards, indispensables pour ces territoires qui souffrent d’importants handicaps structurels liés à leur éloignement de l’Hexagone, à la faiblesse de leurs marchés locaux et au fait que leur tissu économique reste composé, pour l’essentiel, de très petites entreprises.
L’année 2017 est, à mon sens, particulièrement révélatrice de ces fragilités : je pense au mouvement social survenu en Guyane, qui n’est qu’un symptôme des difficultés de ces territoires, mais également à l’ouragan Irma, qui nous rappelle la prégnance des risques naturels auxquels sont confrontées ces collectivités.
Il faut souligner d’emblée que les crédits de cette mission sont maintenus au-dessus du seuil des 2 milliards d’euros, puisqu’ils s’élèveront à 2, 104 milliards d’euros en autorisations d’engagement et à 2, 068 milliards d’euros en crédits de paiement. À périmètre constant, ce budget est en hausse de 3, 6 % en autorisations d’engagement et de 4, 3 % en crédits de paiement par rapport à 2017. On ne peut que s’en réjouir.
En tout état de cause, il convient d’insister sur le fait que ce budget, le premier du quinquennat, constitue un budget de transition, qui ne présage qu’en partie des priorités futures. Pour les prochains projets de loi de finances, le Gouvernement s’est en effet engagé à s’appuyer sur le Livre bleu outre-mer. Ce dernier résultera des Assises des outre-mer que le Gouvernement a lancées, le 4 octobre 2017, afin d’ouvrir un temps d’échange et de réflexion avec l’ensemble des Ultramarins.
La compensation des exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale spécifiques aux outre-mer est le principal exemple du caractère transitoire de ce budget. Selon le Gouvernement, ce dispositif devrait faire l’objet d’un réexamen à l’automne de 2019. Nous serons particulièrement vigilants à ce que cette réforme soit favorable à l’emploi outre-mer. En effet, le taux de chômage s’élève, aujourd’hui encore, à 20 % en moyenne dans ces territoires.
Ce budget présente quelques motifs de satisfaction.
Les crédits destinés au financement des opérations contractualisées entre l’État et les collectivités d’outre-mer sont en hausse de 12 % en autorisations d’engagement et de 6 % en crédits de paiement. Cette hausse est particulièrement bienvenue, alors que de nombreux contrats ont fait l’objet d’un important sous-financement les années passées.
Les crédits du fonds exceptionnel d’investissement en outre-mer sont en augmentation de 3 % en autorisations d’engagement et stables en crédits de paiement. Surtout, le Gouvernement s’est engagé à un maintien de sa dotation au niveau de 2018 sur l’ensemble du quinquennat. Nous avions souligné, dans le rapport d’information que nous lui avons dédié l’an dernier, l’utilité de cet instrument. Nous serons donc là aussi particulièrement vigilants quant au respect de la promesse du Gouvernement.
Ce budget conforte le service militaire adapté, qui a atteint en 2017 l’objectif fixé, à savoir former 6 000 jeunes ultramarins et leur permettre une insertion dans le monde professionnel. Les crédits alloués à ce dispositif sont en augmentation de plus de 4 % et le ratio d’encadrement a été amélioré.
Enfin, si les crédits affectés au logement sont en légère baisse, les crédits de paiement dédiés à la construction neuve seront en augmentation.
C’est donc bien conscients de l’ampleur des besoins des outre-mer, mais également du fait qu’il s’agit d’un budget de transition, que mon collègue Nuihau Laurey, qui ne peut être présent aujourd’hui, et moi-même vous proposons d’adopter les crédits de la mission « Outre-mer ».
Je joue ainsi le jeu, madame la ministre, comme l’a suggéré à son époque un grand Guyanais, Félix Éboué. Je joue le jeu, parce que le Président de la République, lors de son passage en Guyane en octobre dernier – vous y étiez aussi –, évoquant « les engagements budgétaires dont plus personne ne comprend même la logique » et « les milliards accumulés sans qu’on n’explique jamais les délais », affirmait qu’il voulait « en finir avec une relation asymétrique faite de promesses non tenues ».
Pour ce faire, il déclarait qu’il était « prêt à rouvrir des sujets constitutionnels s’il apparaît pertinent de le faire et que c’est utile » et à les traiter via « un véhicule législatif unique qui fasse la synthèse de tous ces besoins, de toutes ces adaptations », et ce par des « décisions fortes dès l’été prochain ».
Je veux croire en ces mots présidentiels, concernant tout particulièrement la Guyane, mon territoire. La crise de mars dernier a en effet révélé les limites institutionnelles de notre système de gouvernance et remis l’accent sur la question de l’évolution statutaire. Celle-ci figure d’ailleurs dans les accords de Guyane, signés par le précédent gouvernement, et fait l’objet d’ateliers sur la gouvernance au sein des États généraux de Guyane et des Assises des outre-mer.
J’espère, madame la ministre, que ces mots présidentiels, qui expriment une volonté affichée de coller aux réalités des outre-mer, seront suivis d’effets pour tous les Ultramarins, puisque ce discours présidentiel de lancement des assises était diffusé en direct à l’intention de tous les outre-mer.
Applaudissements au banc des commissions.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je veux à mon tour dire quelques mots de ce budget, que je qualifierai pour ma part de budget d’amorçage ou d’attente, et formuler quelques propositions opérationnelles, dont le but est d’activer la mobilisation des crédits dans nos outre-mer, après qu’ils auront été adoptés.
Tout d’abord, l’affichage d’une hausse de 4 % des crédits ne nous a pas totalement convaincus : ce chiffre traduit non pas une augmentation pour 2018, mais plutôt un dégonflement rétroactif des crédits pour 2017, qui avaient été un peu « boostés » juste avant la dernière élection présidentielle.
Madame la ministre, nous approuvons la sincérité budgétaire que vous évoquez, car il faut rompre avec ces pratiques. Nous estimons que cette sincérité doit également conduire à reconnaître que, avec des crédits stabilisés à 2 milliards d’euros depuis sept ans, les Ultramarins participent à l’effort de rigueur.
En totalisant toutes les missions et tous les ministères, les crédits dont bénéficient les outre-mer s’élèvent à 17, 3 milliards d’euros : ce chiffre est certes en augmentation, mais son niveau dément le préjugé, évoqué également par Georges Patient, selon lequel nous serions « budgétivores ».
Le budget proposé pour 2018 a un peu déçu, car il n’est pas à la hauteur des défis. Le taux de chômage ultramarin est un révélateur : quand on atteint le double de la moyenne nationale, tous les équilibres économiques, sociaux et politiques vacillent. Le Gouvernement en est conscient et a assorti ce budget de plusieurs engagements complémentaires : reconstruction, financement des projets sélectionnés par les Assises des outre-mer et Grand plan d’investissement. La commission des affaires économiques a donc choisi de faire confiance à cet élan positif.
Notre principale inquiétude porte sur le logement, qui est une base fondamentale de la citoyenneté réelle. Un objectif raisonnable a été fixé dans la loi relative à l’égalité réelle outre-mer : la construction ou la réhabilitation de 150 000 logements en dix ans. Pour atteindre concrètement cet objectif, il faut une stratégie globale et articulée, s’appuyant sur des subventions, des aides fiscales, des procédures d’agrément efficaces, mais aussi du foncier, des normes de construction adaptées et une programmation astucieuse afin de choisir les bonnes cibles.
Une fois n’est pas coutume, j’insisterai sur l’efficacité démontrée du moteur fiscal pour favoriser le logement social et la réhabilitation ; je présenterai des amendements en ce sens, mais pas dans le cadre de l’examen des crédits de cette mission.
Pour optimiser les financements publics, il faut absolument clarifier et pacifier les procédures d’agrément, sans quoi la construction stagne et, dans tous les autres secteurs économiques, le formalisme excessif engendre du découragement, surtout parmi des jeunes talents ultramarins qui vont créer des richesses dans d’autres pays.
Je terminerai par quelques mots sur la compétitivité ultramarine. Son renforcement nécessiterait tout d’abord le maintien du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, car l’impératif de stabilité prime les autres considérations. À défaut, il faudra résoudre l’équation des compensations : notre proposition est de les cibler, de préférence, sur des projets précis et à long terme. Plus généralement, optimiser la dépense publique, c’est aider les territoires à financer des activités dans un environnement normatif adapté.
Madame la ministre, vous pourrez compter sur le Sénat pour identifier et combattre les incohérences qui entravent, encore beaucoup plus qu’on ne l’imagine, le développement de nos outre-mer.
Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
M. Jean-François Longeot et Mme Nadia Sollogoub applaudissent.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le budget qui nous est proposé aujourd’hui ne comporte pas de mesures particulièrement marquantes dans le champ de compétence de la commission des affaires sociales et ne peut constituer, pour elle, qu’un budget de transition.
Notre commission a donc émis un avis favorable, eu égard à la stabilité des crédits de la mission « Outre-mer », tout en alertant sur des effets de périmètre que l’on peut qualifier de combinaisons de tuyauterie.
En clair, nous ne souhaitons pas que, par décret, des sommes affichées aujourd’hui puissent être, en cours d’année, retirées du budget ou affectées à un autre programme, fût-ce celui de l’enseignement scolaire, comme cela a été le cas l’an dernier.
Le Gouvernement diminue de 54 millions d’euros les dotations aux collectivités territoriales et leur demande de faire des efforts ; elles en font, mais elles attendent davantage de l’État.
En ce qui concerne le logement, mes collègues l’ont dit avant moi, nous regrettons que l’effort public soit interrompu alors même que les populations des outre-mer subissent des conditions de logement particulièrement dégradées. Ma collègue Viviane Malet expliquera plus en détail les effets à craindre de la baisse de la ligne budgétaire unique et des aides personnalisées au logement.
Je profite de ce moment solennel pour réitérer mes demandes concernant la politique foncière dans les départements d’outre-mer.
Au ministre de la cohésion des territoires, j’ai demandé l’extension aux départements d’outre-mer de la zone tendue, afin qu’ils puissent bénéficier de l’abattement de 100 % sur la plus-value de la vente d’un terrain à bâtir en vue de la construction de logements sociaux.
S’agissant toujours de la problématique foncière, le statut départemento-domanial qui persiste à La Réunion et en Guyane freine des vrais projets de développement environnemental et social. Ainsi, à La Réunion, des familles ne peuvent bénéficier des aides publiques à l’amélioration de l’habitat, alors même que leurs conditions de logement sont reconnues comme totalement dégradées. Ce n’est pas normal !
Madame la ministre, loger n’est pas habiter, et habiter n’est pas seulement loger. Je m’explique : les gens peuvent mener une vie très simple en gardant leur lien à la nature et à la terre, en maintenant les conditions de leur enracinement. C’est pour cela que, souvent, ils déplorent les contraintes normatives en vigueur dans nos régions, qui ne s’ancrent pas dans les réalités locales.
Madame la ministre, je ne doute pas un seul instant de votre détermination, de votre engagement. Vous connaissez mieux que moi les outre-mer. Je vous le dis : oui, les assises peuvent être une occasion de construire une politique publique cohérente et efficace afin de promouvoir l’avenir de ces territoires.
Je conclurai en exposant les préconisations de la commission des affaires sociales. En matière d’offre de soins dans les outre-mer, elle constate des performances contrastées. Quelques défis sanitaires importants restent à relever, qu’il s’agisse de maladies chroniques, d’addictions ou de mortalité périnatale. À Mayotte et en Guyane, les enjeux dépassent le seul cadre sanitaire.
Nous souhaitons donc que la nouvelle stratégie de santé outre-mer qui sera définie pour les prochaines années puisse faire l’objet d’une grande concertation et d’une mobilisation forte de l’État et des différents partenaires concernés, collectivités territoriales, régions, départements, communes.
Nous souhaitons également que des expérimentations puissent être menées dans le secteur de la santé, du sanitaire et du social, car nous sommes convaincus que les outre-mer peuvent aussi être considérées comme le laboratoire du monde qui vient.
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, ainsi qu ’ au banc des commissions.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, pour la quatrième année consécutive, il me revient de vous présenter l’avis de la commission des lois sur les crédits de la mission « Outre-mer ». Prenant acte du maintien de l’effort budgétaire en faveur des territoires d’outre-mer, celle-ci a émis un avis favorable à l’adoption de ces crédits.
Les résultats des Assises des outre-mer que vous avez lancées au mois d’octobre dernier, madame la ministre, viendront nécessairement faire évoluer ce premier budget. Dans cette attente, j’ai souhaité m’intéresser aux problématiques institutionnelles de chaque territoire ultramarin et réaliser ce travail d’état des lieux, car, au cours des dernières années, le Parlement a débattu de nombreux projets ou propositions de loi tendant à clarifier le statut institutionnel de telle ou telle collectivité ultramarine. Le Gouvernement annonce par ailleurs d’autres textes en la matière.
Au vu de l’actualité, je concentrerai mon propos sur deux collectivités ultramarines.
Je commencerai bien évidemment par la Nouvelle-Calédonie et les questions soulevées par l’organisation du référendum d’autodétermination, prévu au mois de novembre 2018, notamment celle de la composition du corps électoral. Le seizième comité des signataires de l’Accord de Nouméa, qui s’est réuni le 2 novembre dernier, a trouvé un consensus en entérinant à titre exceptionnel l’inscription d’office des personnes résidant en Nouvelle-Calédonie sur la liste électorale générale, préalable indispensable à leur inscription sur la liste électorale spéciale pour la consultation relative à l’autodétermination.
Cet accord implique de modifier la loi organique de 1999. Un avant-projet de loi organique destiné à modifier la procédure de révision des listes électorales et traduisant cet accord politique a reçu, le 23 novembre dernier, un avis favorable du Congrès de la Nouvelle-Calédonie, sous réserve de certaines précisions.
Cet avant-projet de loi organique ayant en principe été délibéré en conseil des ministres, nous serons saisis prochainement de cette question très sensible, d’autant que la conclusion de cet accord n’a pas mis fin aux tensions politiques qui secouent la Nouvelle-Calédonie, entre indépendantistes et non-indépendantistes et au sein de chaque mouvement.
J’en viens maintenant à Mayotte. Bien que dénommé « département », ce territoire n’est, sur le plan juridique, ni un département ni une région d’outre-mer, bien qu’il relève des collectivités visées par l’article 73 de la Constitution. Il constitue, depuis 2011, une forme de collectivité unique dont l’assemblée délibérante – le conseil départemental – exerce les compétences d’un département et certaines compétences d’une région, les autres étant plus ou moins assumées par l’État.
Cette situation a des incidences non négligeables en matière budgétaire, puisque Mayotte ne bénéficie quasiment pas de la dotation globale de fonctionnement régionale, ce que la commission des lois avait déjà dénoncé en 2015. Pourquoi ne pas envisager une prise en compte a minima de la double compétence de Mayotte, sur le modèle de ce qui s’applique aujourd’hui en Guyane et en Martinique ?
À l’approche des fêtes de fin d’année, je forme le vœu que cette question soit réglée à l’occasion d’un prochain toilettage institutionnel du statut de Mayotte.
Applaudissements au banc des commissions.
Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Éliane Assassi.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, si les montants des autorisations d’engagement et des crédits de paiement de la mission « Outre-mer » sont, sans nul doute, d’importance capitale, il est d’autres chiffres qu’il me paraît fondamental de rappeler en préambule.
Les outre-mer ne sont pas que des « petits bouts » de France baignés par des mers chaudes : ce sont plus de 2, 7 millions d’habitants, soit un peu plus de 4 % de la population française, dont beaucoup vivent dans une situation d’inégalité intolérable par rapport à la métropole.
Comme le rappelait l’exposé des motifs du projet de loi de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique examiné l’année dernière par le Parlement, « en dépit des politiques publiques volontaristes menées par l’État et les collectivités territoriales des outre-mer, les écarts de niveaux de vie constatés entre les outre-mer et la France hexagonale restent considérables et affectent l’égalité des droits économiques et sociaux et des opportunités économiques que la République, par la solidarité nationale, doit garantir à tous les citoyens français ».
Permettez-moi de vous donner une illustration concrète de cette situation.
L’ensemble des territoires ultramarins affichent une surmortalité néonatale marquée. Alors que le taux de mortalité infantile s’établit à 3, 5 % en France métropolitaine, il atteint 6 % en Martinique, 6, 6 % à La Réunion, 7, 9 % à Mayotte, 8, 3 % en Guadeloupe et 8, 8 % en Guyane. De tels écarts sur le territoire de la République ne sont pas acceptables !
S’agissant du travail, selon l’enquête Emploi pour l’année 2016, les taux de chômage constatés dans les départements d’outre-mer sont plus de deux fois plus élevés que celui relevé dans l’Hexagone. Ils atteignent ainsi 23, 8 % en Guadeloupe, 17, 6 % en Martinique, 23, 3 % en Guyane, 22, 4 % à La Réunion et 27, 1 % à Mayotte, contre 10, 1 % en métropole. Là encore, nous ne pouvons nous résigner à de telles différences.
L’année qui vient de s’écouler a d’ailleurs permis de rappeler à ceux qui ne se souviendraient des territoires ultramarins qu’en période de campagne électorale que nos concitoyens d’outre-mer ne se sont pas résignés, eux, aux inégalités et à la pauvreté.
Chacun se souvient du mouvement social sans précédent qui a mobilisé les Guyanaises et les Guyanais au printemps dernier et qui a trouvé un terme provisoire avec la signature d’un plan d’urgence chiffré à 1, 86 milliard d’euros, dont 250 millions d’euros pour construire cinq lycées et dix collèges en cinq ans.
Dans un tout autre domaine, les ouragans Irma et Maria, qui ont provoqué le déplacement de près de 7 000 personnes, devraient nous faire prendre conscience de l’urgence qu’il y a à agir tant pour réduire les risques que pour anticiper les migrations liées au dérèglement climatique.
Permettez-moi également, mes chers collègues, de vous conseiller la lecture des avis récemment publiés par la Commission nationale consultative des droits de l’homme dans le cadre d’une étude sur l’effectivité des droits de l’homme dans les outre-mer.
Dans l’avis relatif à la pauvreté et à l’exclusion sociale du 2 septembre 2017, cette commission rappelle à juste titre que les droits de l’homme sont indivisibles et que l’extrême pauvreté constitue, en elle-même, une violation des droits fondamentaux. Droit à un logement salubre et sûr, droit à une éducation de qualité, droit à une bonne alimentation, droit à vivre dans un environnement sain ou encore accès à la justice et à la santé : ces droits ne sont, bien entendu, pas tous effectifs en métropole – il reste beaucoup à faire –, mais, dans les territoires ultramarins, la situation est tout à fait alarmante et des mesures spécifiques doivent être prises immédiatement !
Au regard de ce que je viens d’évoquer, la question qui se pose est de savoir si les crédits qui nous sont soumis aujourd’hui sont à la hauteur des enjeux. La réponse est évidemment et malheureusement négative. C’est pourquoi le groupe communiste républicain citoyen et écologiste votera contre.
Notre collègue Nassimah Dindar, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, parle à juste titre de « budget de transition », le Gouvernement s’étant engagé à s’appuyer, pour la détermination des priorités des prochains projets de loi de finances, comme pour un éventuel nouveau cycle de réformes, sur les constats et propositions qui ressortiront du Livre bleu outre-mer qui sera produit à l’issue des Assises des outre-mer ouvertes le 4 octobre dernier. Malheureusement, la situation est telle, s’agissant des outre-mer, que le statu quo budgétaire, dans l’attente de nouvelles orientations et de nouvelles réformes, n’est pas acceptable.
Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Madame la ministre, chère Annick Girardin, sachez que j’ai beaucoup pensé à vous en étudiant les crédits de votre mission.
Comme vous avez dû être déçue, madame la ministre, devant un tel budget ! Comme vous avez dû être déçue, vous, la femme à la détermination palpable, au courage affiché que j’apprécie – ce courage et cette détermination de la femme des îles habituée, comme tous les habitants de l’outre-mer, à la résistance et à l’audace salvatrices !
Comme nous, madame la ministre, vous avez dû être déçue de voir autant de crédits regroupés sous le programme « Conditions de vie outre-mer » revus à la baisse dans des proportions extraordinaires. Voilà un sacré signal, un message on ne peut plus clair adressé sous l’intitulé « conditions de vie outre-mer » ! Oui, madame la ministre, vous réduisez les crédits des lignes les plus significatives dédiées aux conditions de vie outre-mer…
J’en veux pour preuve la baisse de 20 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 3 millions d’euros en crédits de paiement des crédits destinés au logement, ce qui représente un volume de logements mis en chantier pour réhabilitation d’à peine 200, en lieu et place des quelque 900 de 2017.
Quand on connaît la nature des difficultés dans ce domaine, liées à l’histoire si jeune et si tourmentée de nos territoires, comment, à l’issue de cette séance, annoncer à nos compatriotes : « madame, monsieur, pas cette année pour votre logement dont le toit fuit, dont l’électricité est affreusement hors normes » ?
Comment expliquer aux nombreuses entreprises de deux, trois, quatre ou cinq salariés totalement dépendantes des signaux adressés dans ce domaine que, cette année, les carnets de commandes resteront désespérément maigres, voire vides ? Je vous laisse imaginer les dégâts collatéraux, les charrettes de chômeurs en prévision dans des économies qui affichent déjà des taux de chômage dépassant partout les 20 %.
Comment comprendre aussi la baisse des crédits des lignes dédiées au sport, à la jeunesse, au sanitaire, au social, à la culture ? Mon collègue Patrick Kanner s’était personnellement investi en mouillant le maillot dans nos territoires pour annoncer des investissements importants liés à la réhabilitation des infrastructures sportives dans des pays fournisseurs de champions à la France : l’emblématique Teddy Riner, Jean-Marc Mormeck, Dimitri Payet, Laura Flessel, aujourd’hui ministre de la République, Raphaël Varane, Christian Karembeu, et j’en passe… Où est passé le financement de ces infrastructures ?
Les crédits d’un dispositif incontournable lié la formation professionnelle, l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité, diminuent également, de 8 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 7 millions d’euros en crédits de paiement. Vous connaissez la difficulté, compte tenu de l’étroitesse de nos marchés, à pouvoir assurer la promotion par la formation. Le Président de la République annonce que la formation professionnelle sera le bras armé du Gouvernement pour lutter contre la pandémie du chômage. C’est grâce à cet organisme que nos populations peuvent y accéder. L’équation finale est simple, hélas : les paroles ne correspondent pas aux actes. Comment en effet accomplir cette volonté sans y mettre les moyens ?
Le Gouvernement a annoncé vouloir faire du tourisme et du développement touristique dans nos pays une priorité. Très bonne intention ! Le Premier ministre a même symboliquement ouvert en personne les Assises des outre-mer par l’atelier Tourisme, le mois dernier, en votre présence, madame la ministre, et en la nôtre. Il a déclaré à cette occasion que des efforts devaient être déployés pour « améliorer le produit », pour le rendre plus performant. Mais comment faire, quand, ne serait-ce que pour la formation professionnelle de niveau supérieur, qui nécessite des déplacements, les crédits sont en baisse ? Qu’affiche ce budget pour lutter contre les disparités cruelles entre haute et basse saisons, attirer des investisseurs qui avaient quitté certains de nos territoires avec fracas, mais aussi avec pertes, augmenter le niveau moyen de dépenses du touriste ? Rien !
Je suis moi-même convaincue que ce secteur économique peut et doit être un formidable levier. C’est pourquoi j’ai déposé un amendement visant à exonérer de charges patronales les employeurs du secteur du tourisme acceptant d’embaucher des artistes pour animer valablement leurs structures, qui, aujourd’hui, sont aussi froides qu’un matin de décembre parisien.
Sourires.
Édouard Philippe l’a fortement souhaité : « Améliorez le produit ! », nous a-t-il dit avec fougue. J’espère donc que, sur cette seule petite niche, madame la ministre, vous accepterez de soutenir mon initiative en faveur des nombreux artistes de nos terres fécondes dans le domaine culturel, dont trop d’acteurs sont aujourd’hui condamnés, faute de contrats, à émarger au RSA. Oui, au RSA, dans le domaine culturel, sur les terres de Césaire, du lauréat du prix Goncourt Chamoiseau, de Damas, de Maryse Condé ! Permettez-leur de travailler, de se remettre à produire, de participer à des festivals aujourd’hui morts qui pourraient être recréés. Savez-vous que, pour un cachet de 100 euros, la dépense réelle pour l’employeur est de 187 euros ? Comment vivre de son art quand ce formidable employeur que pourrait être le tourisme ne peut, à ce tarif, « améliorer le produit » ?
Rien de significatif n’est prévu dans le domaine du tourisme, les appels lancés dans l’autre assemblée du Parlement ont été vains. Madame la ministre, je compte sur votre solidarité pour faire au moins ce geste, ce double geste, à double destination. Cette mesure très attendue ne ruinerait pas la République, mais permettrait de lutter contre la précarité des acteurs, ainsi que d’améliorer la qualité de notre produit.
Je conclus, madame la présidente !
Madame la ministre, je sais que vous me répondrez en invoquant les Assises des outre-mer ! Mais j’ai du mal à croire qu’il ne s’agit pas là d’un petit cachet de Doliprane, un autre, un énième, face aux douleurs qui nous rongent et qui, il faut l’avouer, sont loin d’avoir été symboliquement prises en compte dans cette édition 2018 du budget de votre mission.
Pour conclure
Sourires.
, je partage votre inavouable déception, celle aussi de nos compatriotes. Ils ne comprendraient pas l’inacceptable, c’est pourquoi nous ne voterons pas ce projet de budget.
Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Madame la présidente, madame la ministre, madame, messieurs les rapporteurs, chers collègues, j’aime les outre-mer et je suis honoré d’avoir été désigné pour présenter les observations de mon groupe sur les crédits de cette mission. Ceux qui me connaissent savent l’intérêt que je porte à ces territoires ; j’y suis allé souvent, toujours avec un plaisir immense, toujours avec des inquiétudes fortes. Mes chers collègues ultramarins, je tiens tout particulièrement à vous saluer, car vous relayez avec toujours beaucoup de dignité, de constance et de responsabilité les préoccupations des populations que vous représentez.
Les défis auxquels sont confrontés nos territoires ultramarins sont immenses. Il suffit de penser, pour s’en convaincre, aux paysages apocalyptiques de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy après le passage de l’ouragan Irma, aux mouvements populaires en Guyane, qui ne peuvent pas ne pas nous inquiéter. Nous constatons partout une forme de fatigue, de la consternation, un sentiment d’abandon. Il faut réagir !
Nos territoires ultramarins sont en effet plongés dans une situation économique et sociale sérieuse. Dans certains d’entre eux, le taux de chômage est extrêmement élevé. Les jeunes, incarnation du futur de ces territoires, sont le plus durement touchés par le chômage, sont désœuvrés. Le PIB par habitant est parfois scandaleusement bas, notamment en Guadeloupe et à Mayotte ; il est trois ou quatre fois plus élevé en métropole.
L’État fait pourtant des efforts importants, ce n’est pas discutable, pour aider ces territoires. Outre les crédits de la mission « Outre-mer », quatre-vingt-huit programmes de vingt-neuf autres missions contribuent au financement de l’accompagnement des territoires ultramarins, pour un effort total de 21 milliards d’euros en 2018. À l’instar de la rapporteur pour avis, notre groupe regrette cet éclatement des crédits et appelle à une unification de la structure budgétaire de ces engagements.
Depuis le mois de mai dernier, le Gouvernement a engagé une politique de rationalisation de ses dépenses ultramarines en matière d’exonérations de cotisations sociales. Elles représentent plus de la moitié des dépenses de la mission, ce qui nous conduit à saluer cette entreprise.
Les territoires ultramarins peuvent être de formidables acteurs dans la conduite des expérimentations publiques : îles alimentées à 100 % par des énergies renouvelables, laboratoire de prise en charge des personnes âgées, réforme de la politique portuaire et de la surveillance des pêches, etc. Les deux passionnantes tables rondes sur la biodiversité dans les outre-mer, menées par Michel Magras au nom de la délégation sénatoriale aux outre-mer, en attestent : quantité d’expérimentations ont lieu en outre-mer, et il faut les prendre en compte.
D’ailleurs, madame la ministre, les prochaines assises des outre-mer devront définir avec précision une feuille de route pour avancer sur ces projets. Elles devront incarner l’espérance et amorcer un renouveau.
Plusieurs situations appellent malheureusement une réaction rapide des pouvoirs publics et me conduisent à interpeller le Gouvernement, comme l’a fait avec beaucoup de détermination Mme Assassi. Je pense à la situation sanitaire – le taux de mortalité infantile est un véritable scandale, comparé à celui de la métropole –, à l’essoufflement du système hospitalier sous la pression de problèmes migratoires à Mayotte, à la situation immobilière, avec une insalubrité critique et une situation préoccupante pour près de 150 000 personnes.
Le constat est souvent terrible. Les engagements financiers sont insuffisants pour résoudre ces problèmes. Que permettront de faire quelque 3, 9 millions d’euros destinés au financement du domaine sanitaire et social, quand les territoires ultramarins sont au bord du gouffre ? Comment justifier la diminution des crédits de l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité, alors que le Gouvernement promet d’insuffler une nouvelle dynamique aux déplacements dans ces territoires et de lutter contre les inégalités territoriales ?
Enfin, comment s’attaquer au problème du logement tout en diminuant les crédits de la ligne budgétaire unique ? En commission des affaires sociales, Viviane Malet a rappelé que les crédits consacrés au logement ultramarin baisseront de 10 % en 2018, alors même que les populations ultramarines attendent un accompagnement renforcé en matière d’habitat. Il faut donc envisager le recours à d’autres outils, par exemple à la défiscalisation comme incitation à la construction de nouveaux logements.
Une mesure, cependant, nous donne espoir. Nous nous félicitons que les objectifs du service militaire adapté pour 2017 aient été atteints et que ce budget soit sanctuarisé jusqu’en 2025. C’est un outil fondamental pour assurer le suivi et l’accompagnement des jeunes ultramarins en situation d’échec scolaire ou en grande difficulté. La poursuite de ce programme est essentielle pour l’avenir de ces territoires.
Madame la présidente, madame la ministre, madame, messieurs les rapporteurs, chers collègues, le groupe Les Indépendants – République et Territoires s’abstiendra sur les crédits de cette mission et accordera une attention toute particulière aux Assises des outre-mer, auxquelles nous aimerions pouvoir participer pour dire notre détermination. Elles seront déterminantes pour l’avenir de notre relation avec ces territoires ultramarins. Certains ont parlé d’un budget de transition ; nous espérons que ces assises permettront d’assurer dans de bonnes conditions une transition intelligente, qui redonne de l’espoir à ces territoires.
« Ma puissance d’espérance est mon seul capital », écrivait Baudelaire à sa mère. Cette formule vaut aujourd’hui pour les outre-mer. C’est leur puissance d’espérance dans la République qui leur permet de croire en un avenir meilleur. Notre abstention est tout à la fois bienveillante et vigilante.
Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, un budget traduit une vision politique. Il exprime une certaine philosophie de l’action publique qui guide ceux que les Français ont choisis pour présider à leurs destinées.
Je n’ai pas l’intention de rentrer dans le détail de la mission « Outre-mer » ; beaucoup l’ont déjà fait, d’autres le feront après moi et nous disposons de rapports très complets sur le sujet. Je préfère mettre l’accent sur la méthode, qui, pour le groupe du RDSE, reste l’une des clefs de l’action politique.
Ce premier projet de budget de la mission « Outre-mer », défendu par vous, madame la ministre, préserve l’essentiel, mais ne va pas au-delà. En tant qu’ancien président de collectivité, je sais aussi que rien ne se fait du jour au lendemain. Comme l’a affirmé Michel Magras en commission, c’est « l’amorçage budgétaire du quinquennat ». Je fais mien le commentaire formulé par nombre de mes collègues : la hausse annoncée de 4 % n’est en fait qu’un dégonflement « sincère » des crédits pour 2017. En effet, madame la ministre, vous avez consenti un effort de sincérité budgétaire, qui devra être durable : êtes-vous prête à en prendre l’engagement devant nous ?
J’en viens au cœur de mon propos, en partant du constat que le budget 2018 est un budget de transition. Qu’en est-il pour demain ? À cette heure, c’est encore assez flou.
La question centrale qui se pose aujourd’hui est celle de la vision de l’État pour l’outre-mer. Souhaite-t-il, souhaitons-nous, nous qui siégeons dans cette assemblée, transformer les outre-mer ? En effet, il s’agit d’une œuvre collective. Une action politique résolue en outre-mer passe par une vision claire de notre avenir.
Je note, avec une constance qui me gêne, que, si les réalités ultramarines sont complexes, nous faisons toujours l’objet d’un traitement différencié par rapport à l’Hexagone. A-t-on vu des états généraux organisés dans l’Hexagone, comme cela a été le cas partout en outre-mer en 2009 ? Non.
Le Président de la République nous annonce aujourd’hui la tenue d’assises. Leur contour précis a été assez long à se dessiner, mais les choses sont désormais lancées, il faut s’en féliciter.
En posant comme postulat que l’outre-mer doit travailler à définir son avenir, le Président de la République ne propose pas une vision de l’outre-mer ; il nous demande, à nous ultramarins, de regarder vers la métropole et d’exprimer nos souhaits. Finalement, l’État, n’ayant pas de vision propre, ne demande-t-il pas à ses outre-mer de lui en livrer une sur un plateau ? C’est ce regard totalement inversé qui me gêne profondément. La France a pourtant tant à apprendre de ses outre-mer !
Cette absence de vision, voire de regard, sur le sens de l’action de l’État en outre-mer est encore plus flagrante en matière de culture. Nous avons tous pris note de votre volonté, madame la ministre, de faire de la Cité des outre-mer une œuvre collective. Elle ne l’a peut-être pas été suffisamment jusqu’à présent, et la suppression des crédits donne aujourd’hui à penser que les engagements de François Hollande seront difficiles à tenir.
Par ailleurs, comment comprendre qu’aujourd’hui la disparition de la chaîne France Ô puisse être une hypothèse de travail pour France Télévisions ? Alors même que, sur le plan culturel, des ponts doivent être créés entre l’outre-mer et l’Hexagone, force est de constater que l’avenir incertain de la Cité des outre-mer et la disparition possible de France Ô transforment le regard que l’Hexagone porte sur l’outre-mer, et risquent même de l’éteindre.
Je crois sincèrement que la politique ultramarine doit reposer sur un socle commun défini par le Gouvernement, dans le nécessaire respect des réalités de territoires dont les problématiques sont extrêmement diversifiées.
Or la méthode de nouveau employée par l’État, c’est de laisser croire que la colonne vertébrale du développement en outre-mer passe par de grandes consultations seulement menées dans nos territoires. Seront-elles inutiles ? Non, je ne le souhaite pas, mais ma crainte profonde est que l’on suscite un espoir qui, s’il ne se traduit pas budgétairement dans les années qui viennent, débouchera, à l’inverse de l’effet recherché, sur une démotivation des territoires et des populations. Les élus auront alors à s’expliquer devant celles-ci sur le résultat de ces consultations.
Lors de la présentation de son rapport, mon collègue Michel Magras déclarait, après avoir auditionné le rapporteur national des Assises des outre-mer, que « le but fondamental de ces assises n’est pas tant de réitérer des préconisations déjà largement connues que de faire émerger et soutenir une nouvelle génération d’entrepreneurs ultramarins ». Je suis d’accord à 100 % avec cet objectif.
Cependant, nous aurions souhaité avoir des discussions en amont pour bien comprendre ce processus. Les présidents de collectivité que vous avez reçus, madame la ministre, vous l’ont également dit. Nous cherchons avant tout à nourrir le débat public et à faire avancer les choses.
Dans ce processus où manque une certaine vision, il faut aussi tenir compte de ce que les collectivités ont déjà fait en matière de réflexion sur leurs territoires. Cette absence de vision claire de la part de l’État donne aussi parfois le sentiment que toutes les actions menées constituent un empilement sans cohérence ni colonne vertébrale.
Alors que nos territoires engagent un processus de programmation pluriannuelle pour conforter leur développement économique, j’espère sincèrement que ces ambitions se traduiront budgétairement en 2019, que ce soit pour l’adaptation au changement climatique ou le développement portuaire outre-mer ; je sais que ce thème vous tient à cœur, madame la ministre.
Le groupe du RDSE votera les crédits de la mission « Outre-mer », car nous savons dans quelles conditions vous les avez défendus, madame la ministre. Ce budget de transition vous engage pour l’avenir. Les conclusions des assises devront trouver une traduction budgétaire cohérente dans les années à venir au travers des plans de convergence et des prochains contrats de développement.
Pour autant, si ce vote se veut bienveillant, nous demandons à l’État d’élaborer une vision claire de ce qu’il souhaite pour les outre-mer. Il doit s’agir de regards croisés, et non pas seulement d’un regard de l’outre-mer vers la métropole. Vous pouvez bien évidemment vous appuyer sur cette assemblée, dont les membres sont issus des territoires, mais également sur une instance comme le Conseil économique, social et environnemental pour définir des méthodes.
Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, madame la ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, avant d’examiner les crédits dévolus pour 2018 à la mission « Outre-mer », je tiens à remercier MM. les rapporteurs spéciaux de leur excellent rapport, ainsi que Mme le rapporteur pour avis, qui a produit, au nom de la commission des affaires sociales, une analyse tout aussi approfondie des crédits de cette mission budgétaire.
Pour 2018, le budget de la mission « Outre-mer » se maintient au-dessus du seuil de 2 milliards d’euros. Il est même en hausse de 85, 1 millions d’euros en crédits de paiement par rapport à la loi de finances initiale pour 2017, ce qui représente une progression louable de 3, 72 %.
Cette hausse des crédits est un premier pas d’autant plus encourageant que la projection pluriannuelle table sur une hausse globale des crédits d’environ 10 % d’ici à la fin du quinquennat.
Il restera donc, madame la ministre, à transformer l’essai lors des prochains exercices budgétaires, afin que les ambitions affichées en début d’année à l’occasion de l’élaboration de la loi de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer, dite « loi EROM », se concrétisent véritablement au bénéfice de nos compatriotes ultramarins.
Mais, disons-le tout de go, la suppression par le Gouvernement des 22 millions d’euros de crédits affectés à l’« équivalent fonds vert » fut véritablement une erreur.
Alors que la COP23 vient de s’achever et que nous sommes à quelques jours seulement du sommet sur le climat organisé par le Président de la République, comment pourrions-nous, madame la ministre, qualifier autrement cette décision ?
Créé l’an dernier, ce mécanisme dédié aux territoires du Pacifique commence tout juste à produire ses effets. Consolidation de berges fragilisées par la répétition des catastrophes naturelles, école bioclimatique, centrale hybride, lampadaires photovoltaïques, réseaux d’eau et d’assainissement, équipements solaires : ces investissements environnementaux, engagés sur la seule année 2017, à hauteur de 12, 5 millions d’euros, plaident à coup sûr pour le maintien du mécanisme.
Nous saluons donc l’initiative transpartisane de nos collègues députés, grâce à laquelle l’Assemblée nationale est parvenue à rétablir le fonds vert. Cette décision devrait permettre d’assurer le financement de projets déjà engagés pour l’année 2018, dont le coût avoisine 20 millions d’euros. Je pense notamment à la gestion des déchets dans les îles Australes, à la centrale hydro-électrique de Fatu Hiva ou encore aux différentes centrales hybrides des îles Tuamotu.
Vous l’aurez compris, madame la ministre, mes collègues du groupe Union Centriste et moi-même veillerons attentivement au maintien de ce fonds. Nous le jugeons indispensable aux collectivités françaises du Pacifique.
Nous regrettons par ailleurs que les crédits alloués au Fonds d’échanges à but éducatif, culturel et sportif, le FEBECS, soient simplement reconduits et non rehaussés, alors que votre ministère s’était engagé à doubler, dès l’année prochaine, le nombre de billets délivrés au titre de ce fonds destiné à promouvoir les échanges éducatifs, culturels ou sportifs des habitants des territoires ultramarins avec la métropole ou les pays situés dans leur environnement régional. C’est pourquoi nous soutiendrons l’amendement de notre collègue Gérard Poadja visant à relever de 100 000 euros les crédits alloués au FEBECS, afin que la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française puissent également en bénéficier.
Nous en avons conscience, les territoires ultramarins ne sauraient être exemptés de l’effort commun de redressement de nos finances publiques. Mais ne perdons pas, madame la ministre, le pari que nous avons pris de faire converger ces territoires avec ceux de la métropole !
Des motifs de satisfaction existent par ailleurs, et ils méritent d’être soulignés.
Les crédits de paiement du programme 138, « Emploi outre-mer », s’élèveront ainsi en 2018 à plus de 1, 33 milliard d’euros, soit une hausse de 4, 25 % par rapport à 2017. L’effort porte principalement sur l’action Soutien aux entreprises, qui représente plus de 80 % des crédits du programme.
Au-delà, plus de 50 % des crédits de la mission « Outre-mer » seront opportunément affectés à des mécanismes d’exonération de cotisations sociales à destination des entreprises ultramarines. Conjuguées au maintien à 9 % du taux majoré du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi pour les outre-mer, ces aides devraient favoriser la production et le développement économique de nos territoires ultramarins.
Toutefois, si la fiscalité incitative est un outil souvent efficace, elle peut aussi devenir rapidement inextricable. La question de son éventuelle remise à plat devra à cet égard être abordée dans le cadre des Assises des outre-mer. Il y va de la lisibilité et de l’efficacité de notre politique économique et fiscale.
Toujours au titre du programme 138, nous saluons la concrétisation des engagements pris concernant le SMA, le service militaire adapté, qui joue un rôle précieux pour l’insertion de nombreux jeunes.
Quant au programme 123, « Conditions de vie outre-mer », il connaît lui aussi une augmentation de ses crédits de paiement, à hauteur de 4, 5 %. La progression des crédits est néanmoins inégale et varie suivant les actions du programme concerné.
Les crédits de la ligne budgétaire unique, dont la finalité, rappelons-le, est de répondre aux besoins en logement social, reculent ainsi de 1, 57 %. Cette baisse nous inquiète d’autant plus que l’augmentation des coûts de construction se poursuit et que la LBU supporte des restes à payer et des restes à charge toujours substantiels.
Le logement social est un enjeu particulièrement sensible dans les outre-mer. Nous aimerions donc obtenir quelques précisions sur la stratégie du Gouvernement en la matière. Pourquoi avoir réduit de 20 millions d’euros les crédits alloués à l’action Logement ? La stratégie du Gouvernement à l’égard des territoires d’outre-mer doit reposer sur ces deux jambes que sont l’efficacité économique, d’une part, et la justice sociale, d’autre part.
Ces quelques questions ou observations sont autant de pistes de réflexion. Nous vous invitons, madame la ministre, à les prendre en considération.
Le groupe Union Centriste votera en faveur de l’adoption des crédits de la mission « Outre-mer », auxquels il est dans l’ensemble favorable.
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.
Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, madame la ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, l’examen des crédits de la mission « Outre-mer » du projet de loi de finances pour 2018 est l’occasion, pour les élus ultramarins, d’insister sur les actions prioritaires à retenir pour nos territoires. Dans cet esprit, je mettrai l’accent sur plusieurs points qui me tiennent à cœur.
Si d’autres orateurs avant moi ont rappelé les singularités de nos outre-mer, j’insisterai naturellement, quant à moi, sur le cas de La Réunion, où le chômage est un fléau chez les jeunes, mais frappe aussi les seniors. Or ces derniers sont les grands oubliés de ce projet de budget ! Pourtant, la situation de ce public peu ou pas qualifié, peu mobile et très éloigné du marché du travail va encore se dégrader du fait de la baisse drastique du nombre de contrats aidés, alors même qu’un récent arrêté préfectoral plaçait les seniors au cœur des publics éligibles aux contrats uniques d’insertion et leur accordait le bénéfice de mesures dérogatoires s’agissant de la durée maximale de l’aide à l’insertion professionnelle.
Madame la ministre, nous nous devons d’apporter à tous les solutions qu’ils attendent pour faire tomber les obstacles qui les tiennent éloignés de l’emploi. Les moyens mobilisés dans cette mission devraient permettre de répondre à cet enjeu.
J’évoquerai maintenant le programme 123, « Conditions de vie outre-mer », et plus particulièrement le logement.
Je déplore que les crédits affectés au logement soient en diminution. Les autorisations d’engagement de l’action n° 1 baissent de 8 %, soit 20 millions d’euros, alors même que la demande est importante, du fait notamment de la pression démographique, de la forte proportion de familles monoparentales et des disponibilités foncières contraintes.
Au-delà des chiffres, il faut penser aux familles. Être propriétaire de son logement est au cœur du projet d’une vie. L’accession à la propriété est un enjeu primordial de la politique du logement, et il nous appartient d’aider les ménages qui le souhaitent à devenir propriétaires.
Ce parcours prend une forme singulière dans nos territoires. Ainsi, à La Réunion, il est fréquent que les parents cèdent une partie de leur bien à leurs enfants ou petits-enfants, qui doivent continuer à être aidés à la fois par la solidarité intergénérationnelle et par les opérateurs sociaux pour faire construire un logement de type LES. Je ne peux donc que m’inquiéter de la baisse de 13 millions d’euros des crédits destinés à l’accession à la propriété, lesquels ne s’élèvent plus qu’à 7 millions d’euros, contre 20 millions d’euros en 2017. Cela pénalisera fortement les plus modestes.
Dans les outre-mer, il faut l’avoir à l’esprit, cette mesure va anéantir des projets de vie, en excluant de nombreux emprunteurs. En outre, elle fragilisera encore plus le secteur du bâtiment en affectant les programmes de construction, alors que seule une politique de construction soutenue améliorera les conditions de logement et d’existence des Ultramarins.
De même, je déplore la chute du budget des aides à l’amélioration de l’habitat privé, ainsi que la baisse des aides pour la résorption de l’habitat insalubre, alors que les populations des outre-mer sont confrontées à des conditions de logement parfois très dégradées. Le budget baisse de 80 % ! Un tel choix est extrêmement regrettable…
J’en viens aux enjeux en termes de développement durable et de préservation de l’environnement dans nos territoires.
Y faire face passe par le développement de méthodes d’économie circulaire sur des territoires, souvent insulaires, dont les différences doivent être prises en compte dans la définition des orientations nationales. Or les hausses programmées de la TGAP, la taxe générale sur les activités polluantes, vont grever lourdement les budgets des collectivités ultramarines, déjà mis à mal par les différentes réformes fiscales et la baisse des dotations de l’État.
Par ricochet, le développement des méthodes vertueuses de gestion des déchets se trouvera entravé. Or les territoires d’outre-mer doivent pouvoir réaliser les équipements indispensables au traitement des déchets, des équipements adaptés au contexte insulaire et à l’éloignement géographique de l’Hexagone et de l’Europe. Il s’agit de créer des outils de valorisation efficaces et de contribuer à l’émergence de filières de recyclage vecteurs d’emplois.
Actuellement, 75 % des déchets ménagers produits sur le territoire réunionnais sont enfouis, alors que l’enfouissement est le mode de traitement le plus critique, et 90 % des déchets triés sont exportés pour être recyclés en Asie ou en Afrique.
Il est donc important, madame la ministre, de s’attacher à préserver d’une fiscalité pénalisante des territoires comme La Réunion, afin de leur donner le temps de rattraper leur retard dans la mise en œuvre des outils multifilières indispensables. Tel était le sens de l’amendement que j’avais déposé sur la première partie du projet de loi de finances pour 2018 et qui a été adopté par le Sénat le 25 novembre dernier. Je demande donc que le volet « écologie et transition énergétique » des Assises de l’outre-mer permette la poursuite des travaux sur ce sujet.
En ce qui concerne nos jeunes, enfin, la hausse du budget du SMA doit être soulignée, car cette structure est utile à plus de 6 000 d’entre eux chaque année et permet une insertion de 80 % des volontaires. Mais pourquoi réduire, dans le même temps, les financements de l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité ? Il faut avoir présentes à l’esprit les difficultés des jeunes ultramarins pour se former et s’insérer professionnellement hors de leur département d’origine. C’est l’ouverture vers l’extérieur de nos jeunes qui se trouvera affectée.
Pour conclure, je soulignerai la disparition des lignes budgétaires dédiées au financement du plan Kanner pour le développement des équipements sportifs en outre-mer. Il s’agit pourtant d’un enjeu important pour la jeunesse ultramarine.
Madame la ministre, les orientations budgétaires doivent intégrer les spécificités de nos territoires, qui font face à des défis de grande ampleur.
À mon sens, ce projet de budget ne répond pas aux attentes des habitants, qui souhaitent une meilleure prise en compte de leurs modes de vie et de leurs aspirations à plus d’égalité et de justice. Aussi ne pourrai-je pas voter les crédits de cette mission, marqués par une baisse de la ligne budgétaire unique et des crédits de la continuité territoriale.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission « Outre-mer » pour 2018 s’élèvent à un peu plus de 2 milliards d’euros, soit un volume sensiblement égal à celui de 2017. D’emblée, on peut dire que ce budget n’a pas significativement évolué ces six dernières années.
Le budget des outre-mer s’inscrit dans le contexte de la maîtrise des dépenses publiques. En effet, la croissance en volume des crédits de la mission prévue pour 2019 et 2020 est inférieure aux objectifs de croissance de l’ensemble des crédits ministériels.
Cette perspective contraste avec les espoirs suscités, d’un côté, par le discours de responsabilité prononcé par le Président de la République en Guyane, et, de l’autre, par la loi de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer et ses objectifs de convergence.
Il est important de rappeler que les crédits budgétaires ne sont pas le seul levier pour soutenir nos territoires et les politiques publiques en outre-mer. Le budget de la mission « Outre-mer » ne représente en fait que 12, 25 % de l’effort global de l’État en direction de nos collectivités.
Il faut ainsi signaler que le montant cumulé des autorisations d’engagement destinées aux territoires ultramarins, toutes missions confondues, est en progression de 1, 26 % par rapport à 2017, pour atteindre 17 milliards d’euros.
À cet égard, je constate avec satisfaction, à la lecture du document de politique transversale, que les engagements budgétaires de l’État sont en hausse. Je retiendrai notamment, pour 2018, une augmentation de 13, 2 % des crédits destinés à la santé, de 23, 2 % des crédits en faveur de la transition énergétique, de 8, 5 % des crédits pour l’écologie et l’aménagement durable, et enfin de 3, 6 % des crédits de l’enseignement scolaire.
Nous sommes également satisfaits de l’augmentation de 10 millions d’euros des autorisations d’engagement au sein du programme « Police nationale ».
Aux citoyens français des outre-mer, je voudrais dire que l’État ne se désengage pas de nos territoires sous cette mandature. Ce projet de loi de finances représente un soutien à l’exercice des missions régaliennes de l’État en outre-mer. Il nous faut maintenant investir dans une mutation tournée vers un développement économique s’appuyant sur nos atouts territoriaux.
Les crédits de paiement dédiés au programme 138, « Emploi outre-mer », augmentent de 4, 5 %, ce qui représente 54 millions d’euros de plus. Cet effort porte essentiellement sur l’action Soutien aux entreprises, garantissant ainsi la pérennité des dispositifs d’allégement et d’exonération de cotisations dont bénéficient nos entreprises. Ce programme permet également le financement d’une aide au fret dont le champ d’intervention est élargi. Autre élément positif, les moyens dédiés au service militaire adapté sont renforcés, ce qui est important pour notre jeunesse.
Globalement, ce projet de budget va donc dans la bonne direction. Cependant, permettez-moi, madame la ministre, d’attirer votre attention sur certains points.
D’abord, nous constatons une stabilisation à la baisse des crédits alloués à la continuité territoriale. Plus généralement, la baisse de près de 10 millions d’euros du budget de l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité est inquiétante, alors que la loi de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer a élargi les missions de cet opérateur. Je pense notamment au déploiement de la mobilité retour, qui est un impératif pour un territoire comme le mien, dont la démographie est vieillissante. En outre, le Président de la République a promis de porter à 200 000 le nombre de billets d’avion aidés chaque année.
J’évoquerai ensuite la faiblesse de l’enveloppe destinée au développement du sport dans nos territoires. Les outre-mer, terres de champions, méritent bien plus ! C’est là une évidence. Il est donc nécessaire de revoir en profondeur l’aide apportée aux actions sportives dans nos territoires. Madame la ministre, un effort particulier me semble indispensable à cet égard. Je sais aussi pouvoir compter sur la détermination de notre ministre des sports, Laura Flessel, pour inverser la tendance et faire en sorte que l’outre-mer soit à l’image de la « Guêpe ».
En fait, ce premier budget de l’actuelle majorité peut être considéré comme une étape vers un nouveau partenariat entre l’État et les collectivités d’outre-mer. Le Gouvernement pourra trouver une source d’inspiration dans les conclusions des Assises des outre-mer, si chères au chef de l’État.
En conséquence, nous espérons que ces assises ne seront pas une fois encore l’occasion pour l’État de reporter à plus tard le respect de ses obligations envers ces territoires qui font la richesse de la France et contribuent à son rayonnement à travers le monde.
Les récents événements survenus en Guyane témoignent de la nécessité de conduire une véritable réflexion sur la mise à niveau de nos départements. La situation économique de Mayotte est emblématique d’une France à deux vitesses ; il faut absolument la corriger.
J’ai ici même appelé à la bienveillance du Gouvernement s’agissant de la problématique de l’eau en Guadeloupe et des investissements à réaliser pour en finir avec ce scandale. À Saint-Martin et dans le sud Basse-Terre, les cyclones Irma et Maria ont montré qu’il convient désormais d’appréhender autrement la question des matériaux, du type d’habitat et du plan d’aménagement du littoral.
En outre, la situation du CHU de Martinique, placé sous administration provisoire, et l’incendie du CHU de Pointe-à-Pitre sont un grand coup porté au système de prise en charge sanitaire, déjà fragilisé dans nos régions.
Vous l’aurez compris, les besoins sont immenses et multiples, les volontés sont présentes et affichées. Les politiques publiques doivent donc être plus efficientes. Dans la nouvelle logique de copartenariat avec les collectivités locales prônée par le chef de l’État, il nous faut faire mieux avec moins.
Madame la ministre, soyez assurée de notre soutien politique. Nous voterons ce projet de budget pour 2018, qui constitue un premier signal encourageant. Il faut maintenant que se concrétisent les ambitions formalisées dans la loi relative à l’égalité réelle outre-mer et que les perspectives ouvertes par les Assises des outre-mer prennent véritablement corps. Nos territoires ont besoin de concret, et notre jeunesse de perspectives.
M. le rapporteur pour avis de la commission des lois applaudit.
Madame la présidente, madame la ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, comment parler de cette mission lorsque l’on a été soi-même ministre des outre-mer ? L’exercice est difficile !
Les premiers exercices budgétaires d’un quinquennat sont toujours des symboles, on le sait. Ils concrétisent des engagements de campagne, traduisent une volonté et dessinent une vision.
Aujourd’hui, le budget des outre-mer est à mon sens le symbole d’une résignation, le symbole d’un désengagement, celui du Gouvernement et de l’État.
Madame la ministre, je ne me présente à cette tribune ni en nostalgique, ni en cynique, ni en aigri, parce que je connais la difficulté de l’exercice, parce que je me refuse à verser dans la critique systématique, et donc stérile, mais surtout parce que je souhaite sincèrement la réussite de ce quinquennat pour les outre-mer.
Je fais partie des rares parlementaires qui ont gardé le silence jusqu’ici sur l’action gouvernementale, sauf à propos de l’organisation des secours à Saint-Martin. L’occasion m’est donnée aujourd’hui de m’exprimer.
Depuis plusieurs mois, j’observe, comme sœur Anne, sans jamais rien voir venir. Loin d’être en marche, nous sommes à l’arrêt, dans l’attente des assises. Votre premier acte concret et tangible pour nos territoires, c’est donc ce projet de budget.
J’ai pour habitude d’être direct, franc et responsable, même si je suis trop souvent tenu par les liens de l’amitié. Je ne me présente pas en juge de l’action d’un gouvernement dont je partage par ailleurs certains choix politiques. Je me dois cependant d’être honnête en affirmant que ce budget est décevant. J’y reviendrai.
En préambule, je tiens cependant à faire part d’un ressenti, madame la ministre. Je dois vous dire que les mots sont une arme, et que les mots blessent.
Au-delà de l’inaction manifeste, la rhétorique de l’État est progressivement devenue offensante. Je vous ai écoutée avec attention, et je sais que vous prônez désormais la frugalité comme philosophie de l’action publique outre-mer. Oserez-vous donc dire que les outre-mer n’en feraient pas assez avec trop ? Que nous gérerions l’abondance ? Que nous vivrions au-dessus de nos moyens ?
Vous qui connaissez parfaitement les outre-mer, comment pouvez-vous nier la nécessité d’un État interventionniste outre-mer ? Comment faire semblant d’ignorer que, au vu des enjeux et des besoins, la politique de l’État outre-mer est largement sous-dimensionnée ?
Oui, j’ai le sentiment tenace que le langage évolue et que cette évolution n’est pas anodine ; elle est signifiante. J’ai le sentiment que les mots « vie chère », « lutte contre la rente » ont disparu du vocabulaire gouvernemental, que, au lieu de parler de convergence, et donc de vision de long terme et de trajectoire concertée, stabilisée et sécurisée, on renvoie le traitement de tous les problèmes à des assises qui prennent de plus en plus la forme d’appels à projets pour les premiers de cordée ultramarins…
Connaissant votre engagement et mesurant votre poids politique, j’ai donc la triste impression que des arbitrages ont été perdus, qu’une logique exclusivement comptable de redressement de la prétendue hubris budgétaire outre-mer a présidé à l’élaboration d’un budget atrophié, à l’ambition minimaliste : en somme, la frugalité comme ligne directrice d’une politique !
Nous ne sommes pas dupes des chiffres qui nous sont présentés. Nous demandons simplement de la transparence et de la sincérité sur les grands équilibres financiers de ce budget.
Votre ministère prétend bénéficier d’une hausse de crédits de 4, 4 %. Nous affirmons que ce budget accuse une baisse de 0, 51 % en crédits de paiement et de 1, 5 % en autorisations d’engagement. Une fois n’est pas coutume, les affichages budgétaires nominalistes abusent d’artifices de périmètre.
Prétendant vous inscrire dans une démarche de sincérité budgétaire, vous fondez la hausse de votre budget sur une exécution budgétaire ayant entériné le transfert de crédits à d’autres ministères, pour un montant de 90, 4 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 82 millions d’euros en crédits de paiement.
Pour être tout à fait sincère, vous auriez dû aller au bout de cette logique en transférant les quelque 87 millions d’euros qui figurent dans la mission « Outre-mer » au budget de l’éducation nationale. Au lieu de cela, vous créez une ligne budgétaire pour la construction d’écoles, de collèges et de lycées à Mayotte, en Guyane et en Polynésie, dotée de plus de 50 millions d’euros !
Je dis cela pour faire comprendre que, encore une fois, nous allons voter un budget qui sera certainement amputé par décrets d’annulation de plusieurs millions d’euros d’ici à quelques mois.
Au-delà de cette baisse, ce budget est l’illustration d’une philosophie budgétaire globale promue par le Gouvernement auquel vous appartenez, madame la ministre, une philosophie du rabot, du court terme, par laquelle on tend à demander à tous les mêmes efforts. On demande notamment aux ménages, pour mieux financer les entreprises. Or, vous le savez, traiter à l’identique des situations différentes constitue une discrimination.
Pis, à la lecture du rapport de notre collègue Georges Patient, j’apprends que « sur le triennal 2018-2020, les crédits augmenteraient de 0, 5 % en valeur, contre une augmentation de 3 % en moyenne pour les missions du budget général. En volume, les crédits devraient connaître une baisse de 2 %. » Ce budget frugal, le premier du nouveau monde, n’est donc que la première étape d’un désengagement programmé de l’État dans nos territoires.
Cette trajectoire mortifère est d’autant plus inacceptable que l’État, je le rappelle, s’est engagé à hauteur de plus de 1 milliard d’euros en faveur de la Guyane, qu’une loi de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer a été votée à l’unanimité par le Parlement et en accord avec tous les membres du gouvernement de l’époque, dont vous faisiez partie, madame la ministre, et que le Président de la République s’est lui-même engagé sur plusieurs milliards d’euros.
Dès lors, madame la ministre, comment puis-je voter un budget qui consacre la baisse des crédits destinés à la mobilité ? Comment puis-je voter un budget qui réduit de plus de 300 000 euros les crédits du plan Séisme ? Sur ce point, je demande de la clarté : on nous dit que cette baisse doit être relativisée, puisque les crédits du fonds national augmenteraient.
Pouvez-vous nous indiquer, madame la ministre, quelles lignes budgétaires confirmeraient ces arguments ?
Comment puis-je voter un budget qui sacrifie la Cité des outre-mer ? Comment puis-je voter un budget qui réduit de moitié les crédits destinés aux actions dans les domaines sanitaire, social, culturel, de la jeunesse et des sports ? Comment, enfin, voter un budget qui met à bas la politique du logement outre-mer ? La LBU perd 21 millions d’euros en autorisations d’engagement, soit une baisse de 8, 5 % !
Sur ces 21 millions d’euros, 16 millions d’euros étaient destinés à la rénovation de l’habitat privé. Nous y reviendrons certainement lors du débat.
Madame la ministre, nous ne pouvons pas attendre les conclusions des assises pour répondre à l’urgence économique et sociale qui affecte les outre-mer. Tous les outils existent, la loi de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer a même prévu la signature de contrats et de plans de convergence.
Ne nous condamnons pas à l’échec, appuyez-vous sur les élus que nous sommes, madame la ministre. Nous ne pourrons pas voter les crédits de cette mission.
Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Madame la présidente, madame la ministre, chers collègues, je tiens à saluer l’effort de solidarité nationale à l’égard des outre-mer, surtout dans le contexte actuel de contrainte budgétaire. Beaucoup a été fait pour aider à combler le retard structurel de ces collectivités du bout du monde ! Mais, reconnaissons-le aussi, nous partions de loin, et beaucoup reste encore à faire !
Le projet de budget qui nous est présenté montre combien notre ministre sait défendre sa mission. Qu’elle en soit remerciée.
Étant le dernier orateur à m’exprimer, je ne répéterai pas ce qui a déjà été dit mieux que je ne saurais le faire par les différents intervenants, et en particulier par les rapporteurs, dont je salue avec gratitude l’excellent travail de présentation et d’analyse.
Permettez-moi de concentrer mon propos sur Wallis-et-Futuna. Je soulignerai des points éminemment positifs, ce qui ne m’empêchera pas d’exprimer quelques inquiétudes.
Un effort notable a été fait en faveur de Wallis-et-Futuna ces dernières années, à commencer par un rattrapage important en matière de santé. Je me souviens que notre ancien collègue Jean-Jacques Hyest, en visite sur notre territoire voilà quelques années, avait indiqué que notre hôpital n’était même pas au niveau d’un dispensaire de brousse. Aujourd’hui, nous avons un scanner, et bientôt un centre d’hémodialyse sera installé à Futuna. Quel progrès !
Je tiens aussi à remercier chaleureusement Mme la ministre pour la reconduction des crédits du pacte social au bénéfice des personnes âgées et handicapées, pacte social dont le père, Victorin Lurel, siège désormais dans cet hémicycle.
Les ateliers des Assises des outre-mer se tiennent avec succès, ce qui n’était pas évident à Wallis-et-Futuna. Un atelier « Institutions » mène un travail approfondi et prometteur. Je suis donc, cher Thani Mohamed Soilihi, très optimiste. Malheureusement, les grandes vacances de l’hémisphère sud, en janvier et février, raccourcissent le temps précieux de réflexion commune des assises.
Les stratégies sectorielles de notre stratégie globale peuvent être complétées par les ateliers qui, dans notre esprit, viennent appuyer la préparation de notre futur contrat de développement 2019-2023, l’actuel contrat ayant été prorogé par avenants successifs, ce qui, malgré l’attribution de 5, 8 millions d’euros de crédits, qu’il convient de saluer avec gratitude, demeure une dilution des moyens.
L’élaboration de ce nouveau contrat de développement sera notre chantier de l’année 2018. Il serait souhaitable qu’il soit complété par un contrat entre l’État et les circonscriptions, permettant à celles-ci d’assurer leur mission de présence et de proximité auprès de la population.
Les sommes allouées en matière d’investissements au titre des contrats de village ont été en diminution ces dernières années et les moyens, malgré les 500 000 euros prévus pour 2018, sont insuffisants.
Pour ce qui concerne les chantiers de développement, une fois rappelé que, à Wallis-et-Futuna, nous ne bénéficions ni de RSA ni d’indemnisation chômage, chacun comprendra leur importance croissante, et il serait profitable à tous que le budget de ce dispositif soit accru.
Le service militaire adapté doit également être encouragé. En 2017, trop peu de jeunes du territoire ont pu en bénéficier.
Je profite de cette occasion pour vous interpeller, madame la ministre, sur l’aide au fret, qui profite encore très peu à notre territoire. Peut-on envisager une adaptation du dispositif pour qu’il contribue au développement de Wallis-et-Futuna ? Peut-on avoir des précisions sur la mesure ajoutée dans la loi de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer concernant le transport des déchets ?
Développement : voilà le maître mot, celui qui conditionne notre avenir, celui de nos enfants. Le développement passera aussi par une meilleure desserte aérienne pour désenclaver le territoire. Où en est l’appel d’offres international, madame la ministre ?
Enfin, le développement passe par la mise en place de deux missions que nous attendons et espérons : l’une de l’Institut de recherche pour le développement, l’IRD, qui semble bloquée faute de financement des billets d’avion – espérons que ce détail puisse être réglé ! –, et l’autrevisant à analyser les ressources halieutiques de nos eaux territoriales, démarche nécessaire au développement du territoire et à la conclusion de tout accord de pêche. Pensez-vous, madame la ministre, pouvoir financer prochainement cette mission ?
Je voterai les crédits de la mission « Outre-mer ».
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions.
Madame la présidente, monsieur le rapporteur spécial, madame, messieurs les rapporteurs pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, si tous les Français, y compris les Ultramarins, sont appelés à consentir des efforts pour que le budget de la Nation puisse être à la hauteur de nos engagements européens, le Gouvernement a fait le choix de préserver la mission « Outre-mer ». Le soutien à l’emploi et à la jeunesse, l’accompagnement des entreprises, le développement des territoires sont autant de priorités qui sont ici réaffirmées.
Je vous remercie pour l’ensemble de vos observations, pertinentes et légitimes, et je vous redis que le projet de budget que nous présentons aujourd’hui est très positif, eu égard aux mesures de redressement des finances publiques mises en œuvre avec détermination par le Gouvernement.
Ainsi, dans le contexte d’une réduction de 7 milliards d’euros des dépenses, les crédits de la mission « Outre-mer » sont en hausse de 4 %, soit 85 millions d’euros en crédits de paiement.
Madame Dindar, monsieur Artano, je vous remercie de saluer notre effort de sincérité. Je le dis clairement, cette hausse, contrairement à ce que j’ai pu entendre, n’est pas virtuelle, elle est concrète. Dans la loi de finances initiale pour 2017, le ministère s’était vu rattacher des crédits dont il n’avait pas l’usage et qui ont été intégralement rétrocédés au ministère de l’éducation nationale au début de l’année 2017. Ces crédits n’avaient donc pas vocation à rester dans le périmètre de la mission. Ils seront d’ailleurs intégralement reconduits en 2018 dans le budget de l’éducation nationale. Les crédits qui relèvent de responsabilité progressent donc de 85 millions d’euros, soit une augmentation de 4 %.
Cette hausse de crédits consolide pour les années à venir les fondamentaux de l’action du ministère des outre-mer. Il était très important pour moi de pouvoir donner ce premier signal en ce début de quinquennat.
Non, monsieur le sénateur Lurel, ce projet de budget est tout sauf emblématique d’une résignation ! Ce n’est pas non plus un budget d’attente, messieurs Patient et Magras, mais le début d’une nouvelle impulsion. En effet, ce budget, loin de stagner, est en augmentation.
J’ai entendu les inquiétudes exprimées ces dernières semaines dans la presse, à l’Assemblée nationale, dans les territoires à l’occasion de mes déplacements, et ici même voilà quelques instants. Je tiens à vous rassurer et à vous apporter toutes les réponses nécessaires à la bonne compréhension de l’action de l’État. Il faut dire ce que l’on fait. C’est pourquoi je souhaite m’engager résolument dans un discours de vérité, de dignité et de transparence avec les outre-mer, sans entrer dans des jeux de posture politique. Je veux dire avec force et fierté tout ce que nous faisons, mais aussi convenir très honnêtement de ce qui nous restera à faire.
Il convient de se féliciter de ce qui fonctionne, mais aussi de constater ce qui ne marche pas, ce qui mérite d’être revu. Il importe d’assumer tout ce qui relève de notre responsabilité, mais aussi de cesser d’agir ou de décider lorsque l’État n’a pas vocation à intervenir localement. Les collectivités, notamment outre-mer, disposent de compétences essentielles, et de plus en plus larges, en matière de formation professionnelle, d’insertion, de gestion des services publics fondamentaux, de transports ; il ne faut pas l’oublier.
Il nous appartient donc d’accompagner les collectivités dans l’exercice de leurs compétences. J’ai pris des initiatives en ce sens dans le cadre de la Conférence nationale des territoires, en proposant notamment qu’une plateforme d’appui en ingénierie soit développée au profit des collectivités et des élus locaux.
Nous devons renouer une relation de confiance réciproque avec les élus et les populations ultramarines, qui attendent beaucoup, et avec raison, de l’ensemble des décideurs publics.
J’ai déjà annoncé que, avant la fin de l’année, un site internet sera à la disposition du public, afin de permettre à tous de constater les mesures prises et celles qui ont été engagées, par exemple, dans le cadre du plan d’urgence pour la Guyane. Cette initiative, je la conçois comme une première étape vers une plus grande sincérité de notre part.
Ce site a vocation à mettre en lumière l’ensemble des dépenses en faveur de tous les territoires ultramarins. Nous vous devons cette transparence dans tous les domaines : budget, suivi de l’application de la loi de programmation relative à l’égalité réelle des outre-mer, engagements pris en faveur de Saint-Martin.
Nous mettrons en œuvre la loi de programmation relative à l’égalité réelle des outre-mer. J’ai demandé à mes services de se mobiliser en ce sens. Les choses avancent, peut-être pas assez vite, mais le projet de loi de finances contient déjà un grand nombre des dispositions prévues dans cette loi. Près de 20 % des décrets d’application ont été pris, et plusieurs le seront avant la fin de l’année. Je comprends votre impatience, mais rappelons-nous que cette loi a été adoptée voilà seulement neuf mois.
Madame Malet, le ministère des outre-mer n’est pas seul pour mener à bien cette belle mission qu’est le développement des territoires et la satisfaction des besoins essentiels des populations. Les politiques en faveur des seniors, qui relèvent du ministère des solidarités et de la santé, y contribuent.
L’action des autres ministères en faveur des outre-mer se renforce, et les chiffres contenus dans les documents de politique transversale, les DPT, le confirment. Ces documents, qui recensent les crédits de quatre-vingt-sept programmes différents, font état d’une augmentation de 336 millions d’euros entre 2017 et 2018, soit de 2, 2 %. Si les DPT ne couvrent pas l’intégralité des dépenses publiques, loin de là, ils fournissent néanmoins une bonne vision de l’effort strictement budgétaire des différents périmètres ministériels, qui s’établit à 17 milliards d’euros pour 2018. Je vous remercie, monsieur le sénateur Théophile, de l’avoir rappelé.
J’ai souhaité que cet effort soit inscrit dans la durée. La programmation des crédits pour l’outre-mer prévoit une augmentation d’environ 5 % entre 2017 et 2020, et de 10 % à l’horizon de 2022. En d’autres temps, on promettait une augmentation de 12 %, mais la hausse n’était en réalité que de 5 %… Je sais, monsieur le sénateur Longeot, que vous veillerez, ainsi que vos collègues, à ce que cette programmation soit respectée, et que vous soutiendrez tous cette augmentation à venir. Le Président de la République s’est engagé en ce sens avec cette parole forte : il n’y aura pas de promesses non tenues. Trop souvent, les outre-mer ont été déçus de voir les promesses rester lettre morte, faute de financement.
Le Président de la République a aussi clairement indiqué que le prochain projet de loi de finances aurait vocation à traduire financièrement les conséquences des assises. S’y ajoutent les plans et les contrats de convergence prévus dans la loi EROM, dont la signature doit intervenir l’année prochaine. Les conclusions des assises nourriront bien entendu les réflexions et les discussions, mais ne s’y substitueront pas.
La convergence est parfois une notion complexe à cerner, vous le savez. Je n’en remets pas en cause la portée, mais je veux que nous ayons des échanges francs sur son contenu, afin de ne pas être dans l’injonction, de ne pas empêcher les territoires de définir des aspirations et des stratégies distinctes, adaptées à chacun d’entre eux.
Pour l’heure, le budget pour 2018 nous permet de construire une politique cohérente et volontariste. J’ai défini trois priorités.
La première est le développement des territoires. Les engagements des contrats de plan et de développement entre l’État et les collectivités s’élèveront à 152 millions d’euros, en augmentation de 12 % par rapport à l’année passée. Il s’agit ici de routes, de ponts, de réseaux d’eau potable ou de filières de gestion des déchets. Il est en effet vrai, monsieur Patient, que les outre-mer, notamment votre territoire, ont des retards structurels importants qu’il nous faut rattraper. C’est l’objet des contrats de convergence qui seront mis en place.
Pas plus qu’au cours des précédentes mandatures, le Fonds exceptionnel d’investissement, le FEI, dont les crédits sont maintenus à 40 millions d’euros, n’a vocation à résumer l’effort de l’État en matière d’investissements publics. Au-delà des différents outils de la mission « Outre-mer », le Président de la République s’est engagé à ce que les outre-mer bénéficient de 1 milliard d’euros au titre du Grand plan d’investissement. Il vous sera rendu compte régulièrement de l’utilisation de ces crédits.
La deuxième priorité, à laquelle, vous le savez, je suis attachée, c’est la jeunesse.
Je rappelle que les effectifs du service militaire adapté sont en augmentation : 127 emplois supplémentaires seront créés au cours du quinquennat, dont 20 dès l’an prochain. Le Premier ministre s’est engagé cette semaine à développer les capacités d’accueil du SMA en Nouvelle-Calédonie.
Les crédits du FEBECS seront doublés. L’annonce en a été faite, malheureusement après la parution des documents budgétaires. Je vous rassure, monsieur Longeot, le nombre de trajets financés passera bien de 4 000 à 8 000.
S’agissant de l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité, ou LADOM, vous avez été nombreux à exprimer vos préoccupations. Je vous confirme que l’ensemble des besoins présents et à venir seront financés. Vous pouvez compter sur moi, monsieur le sénateur Théophile. La loi EROM a élargi les dispositifs de continuité territoriale. Ces mesures entreront progressivement en vigueur, et nous serons au rendez-vous de ces enjeux essentiels pour les jeunes de nos territoires.
Enfin, la troisième priorité, c’est l’emploi. Plus de la moitié de ce projet de budget est consacrée au remboursement d’exonérations de charges pour les entreprises. Ces dispositifs, couplés avec le maintien, en 2018, du CICE, majoré à 9 % en outre-mer, sont essentiels à la compétitivité des entreprises et à la préservation de l’emploi.
Au-delà de la préservation de ces dispositifs, et parce que les échéances et le contexte nous obligent à penser l’avenir, je veux évoquer plusieurs projets que je promeus, parmi lesquels la réforme des aides aux entreprises.
L’économie est au cœur des Assises des outre-mer. Sans développement économique, il ne peut y avoir ni perspectives d’avenir ni cohésion sociale. Je l’ai dit, on ne peut pas penser l’économie aujourd’hui comme on la pensait hier. Nos sociétés ont changé, et il faut préparer les outre-mer à affronter l’avenir. Clarifier, rendre lisibles les dispositifs, protéger et soutenir les entreprises outre-mer, mais aussi soutenir l’innovation et la recherche pour construire l’économie de demain : voilà mon ambition. Il ne s’agit ni de coups de rabot, ni de rafistolage. L’immobilisme n’est pas dans l’ADN de ce gouvernement, et surtout pas dans le mien. La méthode du Gouvernement, c’est la justice, la sincérité, l’audace. Je veux des outils modernes, ciblés, efficaces, …
… et je souhaite qu’ils soient inscrits dans le projet de loi de finances pour 2019.
Compte tenu de l’importance de ces sujets, prendre le temps de la réflexion n’était pas superflu. Cette réflexion, monsieur Artano, mesdames, messieurs les sénateurs, je la conduirai avec vous dès les premières semaines de 2018. Nous ferons ce travail ensemble, ce sera une coconstruction.
Autre projet, autre ambition : repenser globalement la priorité que constitue la politique du logement outre-mer.
Oui, mesdames les sénatrices Dindar, Conconne et Malet, j’ai entendu les critiques et inquiétudes que suscite le projet de budget pour 2018. La capacité d’engagement de la ligne budgétaire unique a été réduite de 20 millions d’euros dans deux domaines ciblés : l’aide à la rénovation pour les propriétaires occupants et l’aide à l’accession sociale. Je ne vais pas esquiver le sujet. Ce n’est pas la première fois que ces dispositifs sont rationalisés. Ce fut le cas en 2015 ; pour autant, il n’y a eu dans les territoires aucun affaiblissement de la dynamique.
Je souhaite que, partout où cela est possible, les outre-mer bénéficient, comme l’ensemble des territoires de la République, des dispositifs de droit commun. Quand ils existent, il faut les utiliser. Ce sera l’une de mes priorités en 2018.
J’ai fait le choix, que j’assume, de promouvoir la construction neuve : 400 logements supplémentaires par an seront construits à compter de l’année prochaine, et les crédits de paiement seront en augmentation de 28 millions d’euros pour cette ligne.
J’ai aussi fait le choix de mettre l’accent sur la réhabilitation des logements insalubres. Le projet de loi de finances pour 2018 lui donne une portée concrète : pas un euro d’économies ne sera fait sur cette ligne et le fonds Barnier pour la démolition de l’habitat informel dans les départements d’outre-mer sera maintenu, tout comme les dispositifs fiscaux avantageux pour les propriétaires occupants.
Mais vous avez raison, madame Dindar, monsieur Magras, il faut pouvoir aller encore plus loin. Il est exact que notre capacité à construire ne relève pas seulement du champ budgétaire. Foncier, normes, agréments, programmation adaptée : j’ai pris tous ces chantiers à bras-le-corps dans le cadre de la stratégie nationale pour le logement.
Une troisième ambition est de faire des outre-mer des précurseurs dans la mise en œuvre des dix-sept objectifs de développement durable, en particulier celui de l’adaptation aux effets du changement climatique. La France s’est engagée en 2015 sur ces objectifs, parmi lesquels figurent la santé, l’éducation, l’égalité entre les femmes et les hommes. Tous les sujets de développement concernant les territoires d’outre-mer se retrouvent parmi les dix-sept objectifs de développement durable.
Vous avez raison, madame Assassi, les terribles événements climatiques qui ont affecté les Antilles, notamment Saint-Martin et Saint-Barthélemy, en septembre dernier, nous ont cruellement rappelé combien il était urgent d’agir.
Le budget du ministère des outre-mer a largement contribué au financement des mesures d’urgence, notamment via le fonds de secours. Il sera abondé en conséquence, à hauteur de 33 millions d’euros en autorisations d’engagement au travers de la loi de finances rectificative de la fin de cette année.
J’ai par ailleurs annoncé, à la faveur de cette discussion budgétaire, la création d’un fonds pour la réhabilitation des logements privés, axé sur la prise en compte des risques sismiques et cycloniques et doté de 5 millions d’euros dès 2018.
L’actualité ne nous permet plus d’attendre, je l’ai dit et répété. Ayant participé à la préparation de la COP21, je souhaite que les territoires d’outre-mer soient des exemples, notamment en matière d’adaptation au changement climatique.
Il faut désormais lancer cette dynamique. Les collectivités du Pacifique bénéficient d’un mécanisme de prêt à taux zéro pour accompagner leurs projets environnementaux. Mon souhait est double, monsieur le sénateur Longeot : cibler plus encore qu’actuellement nos crédits sur l’adaptation au changement climatique – en effet, nous parlons tous d’atténuation, mais rarement d’adaptation – et étendre ces avantages à l’ensemble des territoires d’outre-mer.
Je veux y travailler non pas seule, mais en concertation avec mes collègues du Gouvernement et les représentants des territoires. Soyons clairs, les enjeux sont tels que ce n’est pas le seul budget du ministère de l’outre-mer qui permettra de répondre à l’ensemble de ces défis. Nous ne pourrons le faire qu’en instaurant un fonds interministériel et inter-agences.
Je tenterai maintenant de répondre à quelques questions et interpellations particulières.
Oui, madame Conconne, la réforme des aides aux entreprises est nécessaire, et le secteur du tourisme doit être largement soutenu parce qu’il est fortement pourvoyeur d’emplois et de développement dans les territoires d’outre-mer. Le temps des assises est nécessaire pour coconstruire la réponse. Le Président de la République l’a dit, nous ne verrouillerons pas les assises par des considérations budgétaires.
Messieurs les sénateurs Mohamed Soilihi et Patient, il existe bien une possibilité d’évolution institutionnelle. Le Président de la République a dit qu’il était ouvert à de telles évolutions en Guyane, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie bien sûr. Nous aborderons ces chantiers sans tabou et avec vous, si cela est nécessaire. La réponse institutionnelle n’interviendra que si elle est pertinente et souhaitée, si elle fait l’objet d’un consensus sur le plan local. La Guyane organise actuellement des états généraux. Nous suivons de près ces débats.
Vous m’avez interrogée sur la santé. Depuis la crise de 2017, ce sont 85 millions d’euros qui ont été consacrés au secteur de la santé, notamment aux hôpitaux. Le CHU de Mayotte a bénéficié de 170 millions d’euros. Concernant la Guadeloupe, nous avons dû apporter une réponse rapide à la suite de l’incendie du CHU de Pointe-à-Pitre voilà quelques jours. Demain, 550 millions d’euros seront consacrés à la modernisation des établissements hospitaliers. Il faut aller plus loin. Dans ce contexte, la ministre de la santé a souhaité que la réflexion nationale qui a été engagée prenne également en compte les territoires d’outre-mer, notamment au travers des questions de la mortalité infantile, du diabète, de l’éducation à la santé.
Le plan pour le développement des équipements sportifs en outre-mer n’est pas supprimé, madame Conconne. Notre déplacement chez vous, en Martinique, chez M. Lurel, en Guadeloupe, et à Saint-Martin a été l’occasion pour la ministre des sports de rappeler que l’enveloppe de 10 millions d’euros pour 2018 était bien maintenue. Pour ce qui concerne les crédits du ministère des outre-mer, le complément a toujours été apporté via le FEI. Ce sera le cas lorsque ce sera nécessaire.
Monsieur Bignon, je connais votre attachement aux outre-mer, notamment pour vous avoir accueilli à Saint-Pierre-et-Miquelon. Les assises devront être source d’espérance. Je veux faire émerger l’outre-mer des solutions ! Il y a certes des défis à relever et des difficultés à résoudre dans les territoires d’outre-mer, mais des solutions y ont aussi été trouvées. Il nous faut les partager au sein des outre-mer, mais aussi plus largement.
Élus, acteurs locaux, socioprofessionnels sont tous bienvenus pour participer à cette coconstruction dans le cadre des Assises des outre-mer. Je souhaite que vous y veniez nombreux. N’attendez pas d’invitation : dans tous les territoires, les débats ont lieu, l’information est diffusée.
Monsieur Artano, vous m’avez interrogée sur la visibilité des territoires d’outre-mer, en évoquant France Ô et le projet de Cité des outre-mer. Il n’est question ni pour moi ni pour la ministre de la culture de supprimer France Ô. Il est extrêmement important que, dans les territoires d’outre-mer, les chaînes premières puissent rayonner sur l’ensemble de leur bassin maritime, mais aussi être des forces de production dans les pays voisins. Elles doivent produire des émissions qui soient visibles non pas seulement sur France Ô, mais aussi sur l’ensemble des chaînes de France Télévisions. Nous devons mener ce combat en commun. La métropole doit en effet « voir » davantage les outre-mer. Il faut que l’ensemble de la France découvre nos territoires et leur richesse.
La Cité des outre-mer contribuera aussi à leur visibilité. Lorsque j’ai pris mes fonctions, le ministère des outre-mer avait déjà prévu une enveloppe pour la rénovation d’un bâtiment destiné à accueillir la Cité des outre-mer. Comment mener à bien un projet culturel sans le ministère de la culture, sans la région d’Île-de-France ? Il est certes soutenu par la mairie de Paris, mais j’ai souhaité que nous y travaillions davantage ensemble. La région d’Île-de-France a déjà signifié sa volonté de revenir à la table de discussion.
Je tiens à ce projet, mais il devra être plus collégial. Les acteurs locaux m’ont confié, discrètement, qu’ils n’y avaient jamais été associés.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j’espère avoir pu vous rassurer sur un certain nombre de points. Certains d’entre vous m’ont interrogée sur le changement de rhétorique : il est là, marqué par la sincérité, la justice et l’audace. Le changement dérange toujours, mais je l’assume.
Vous avez dépassé votre temps de parole de plus de trois minutes, madame la ministre !
Marques d ’ impatience sur les travées du groupe Les Républicains.
, le projet de loi de finances pour 2018 fournit des outils essentiels. Nous devons rendre à l’outre-mer sa lisibilité et sa visibilité.
Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche et du groupe Union Centriste, ainsi qu ’ au banc des commissions.
Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Outre-mer », figurant à l’état B.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Outre-mer
Emploi outre-mer
Dont titre 2
154 170 286
154 170 286
Conditions de vie outre-mer
L’amendement n° II-314 rectifié quater, présenté par MM. Théophile, Mohamed Soilihi, Hassani et Karam, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(e n euros)
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Emploi outre-mer
dont titre 2
Conditions de vie outre-mer
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Dominique Théophile.
Compte tenu de la baisse affichée des crédits de LADOM, que l’on a rappelée, et des objectifs de performance qui lui sont assignés, nous proposons un virement de crédits de 5 millions d’euros, du programme 138 au programme 123, afin de répondre aux nouvelles obligations de cette agence. Cela permettra de tenir compte de la nécessaire obligation de déplacement des jeunes, dans le cadre de leur formation, et de la continuité territoriale.
Si je souscris à l’objectif des auteurs de cet amendement, tendant à renforcer l’aide à la continuité territoriale, qui connaît une diminution dans le présent projet de loi de finances, il me semble peu opportun de réduire les crédits du programme 138, puisque celui-ci finance les exonérations de cotisations sociales et l’aide au fret des entreprises.
Une baisse de ces dépenses, qui correspondent à une prévision d’exécution, puisque les exonérations sont de droit, serait irréaliste et ferait perdre sa sincérité au projet de budget.
Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, la commission émettra un avis défavorable.
Monsieur le sénateur, je l’ai dit tout à l’heure, votre préoccupation est parfaitement légitime, et j’y suis sensible. La mobilité et la formation sont des enjeux majeurs pour nos territoires.
Néanmoins, je l’indiquais lors de mon intervention, les besoins de l’agence sont intégralement couverts par le projet de budget pour 2018, et l’activité de LADOM ne connaîtra aucun recul l’année prochaine.
D’ailleurs, tous les indicateurs connaissent une énorme progression en 2017, et nous maintenons le niveau élevé de notre participation à LADOM de l’an dernier. Nous serons présents pour abonder au fur et à mesure, si nécessaire, les crédits, afin de répondre aux besoins.
Monsieur le sénateur, je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
Si je comprends bien, il est demandé à notre collègue Dominique Théophile de retirer cet amendement.
Je profite tout de même de l’occasion pour indiquer que, au-delà des crédits affectés en plus ou en moins à LADOM, c’est l’image même de cette agence qu’il faut réhabiliter. C’est un très bon outil ; je sais de quoi je parle, j’ai longtemps présidé un exécutif local et je travaillais avec cette structure.
Aujourd’hui, LADOM n’a plus les moyens de sa politique, il faut le reconnaître. Elle n’est plus attractive, alors que nos jeunes ont besoin d’une structure qui les protège, surtout lorsqu’ils se déplacent. Ne l’oubliez pas, il s’agit souvent de jeunes déracinés, déstructurés, qui viennent, pour deux, trois, quatre ou six mois en France hexagonale. Bien souvent, lorsqu’ils arrivent, ils ne trouvent même pas de lieu où se loger. Je connais des jeunes ayant eu recours à LADOM qui sont restés dans la rue pendant des jours.
Je fais donc ce plaidoyer pour défendre cette structure. On ne peut pas, d’un côté, réduire ses crédits, et, de l’autre, dire que l’on veut faire de l’insertion professionnelle. Vous savez, mes chers collègues, combien le chômage touche nos outre-mer, particulièrement la Guyane, où presque 50 % des jeunes sont en difficulté ou au chômage.
Je plaide donc pour LADOM, afin que l’on ne baisse pas ses crédits, pour des raisons budgétaires que je peux bien comprendre. Vous avez indiqué, madame la ministre, que vous alliez prendre en considération cette structure. J’attends maintenant qu’on le fasse de façon très concrète, car je suis comme saint Thomas…
L’existence de cet amendement et des suivants prouve bien l’insuffisance du budget. Ces amendements ont été présentés par le parti de la majorité gouvernementale, qui soutient le budget et qui votera en sa faveur tout à l’heure !
En plus des contrats aidés, près de 9 millions d’euros sont pris sur le budget de LADOM. Derrière cela, il y a une philosophie gênante ; on nous dit que les avions low cost sont arrivés et que l’on peut, par conséquent, diminuer le budget et peut-être revoir l’exécution budgétaire à la baisse. Or le Président de la République a proposé 200 000 billets ; on est donc très loin du compte !
Je conclus, madame la présidente, en soulignant ceci : le Président de la République, dont nous conservons toutes les lettres et tous les engagements, a indiqué à l’hebdomadaire Actu en Nouvelle-Calédonie que nous participerions au Grand plan d’investissement de 50 milliards d’euros, qui est désormais de 57 milliards d’euros, à hauteur de plus de 2, 5 milliards d’euros. Il pense en outre pouvoir inclure dans les plans de rattrapage 1 milliard d’euros, sans compter le milliard d’euros de la Guyane. Cela fait donc 3 milliards d’euros.
Or, dans ce budget, il y a zéro euro ! On aurait pu mettre des autorisations d’engagement et faire une programmation, mais, non, on attend des résultats hypothétiques des outre-mer, alors que toute l’armature et toute l’architecture du développement à long terme sont contenues dans la loi du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté.
Oui, la rhétorique a changé : « le père Noël », « la frugalité »… Je le dis très clairement, je me sens offensé. Les outre-mer ne sont pas des assistés. Nous ne sommes pas des enfants ! Ce discours d’infantilisation n’est pas de mise !
Monsieur Théophile, l’amendement n° II-314 rectifié quater est-il maintenu ?
Eu égard aux explications fournies par Mme la ministre, nous retirons cet amendement, madame la présidente, mais nous serons très vigilants.
Je suis donc saisie d’un amendement n° II-314 rectifié quinquies, présenté par M. Victorin Lurel et dont le libellé est strictement identique à celui de l’amendement n° II-314 rectifié quater.
Je le mets aux voix.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° II-556 rectifié, présenté par MM. Capus, Malhuret, Bignon et A. Marc, Mme Mélot et MM. Chasseing, Wattebled, Decool, Guerriau, Fouché et Lagourgue, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
e n euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Emploi outre-mer
dont titre 2
Conditions de vie outre-mer
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Jérôme Bignon.
Cet amendement vise à reprendre la proposition d’un député rapporteur pour avis, qui avait été rejetée par l’Assemblée nationale.
Il tend à favoriser la consolidation des habitations contre les risques de séismes et de vents forts, en y consacrant 5 millions d’euros, qu’il convient de transférer des crédits de l’action n° 01 du programme 138 vers l’action n° 01 du programme 123, « Conditions de vie outre-mer ».
Si, là encore, l’intention est louable, il ne paraît pas réaliste de diminuer les crédits de l’action n° 01 du programme 138, lequel finance les exonérations de cotisations sociales et constitue donc une dépense contrainte.
Je précise par ailleurs que le présent projet de loi de finances étend, même si cela reste très insuffisant, certains crédits d’impôt et dispositifs de défiscalisation outre-mer aux travaux de réhabilitation contre le risque cyclonique.
Par conséquent, mon cher collègue, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement ; à défaut la commission des finances émettra un avis défavorable.
Monsieur Bignon, votre amendement, qui vise en effet à reprendre une proposition débattue à l’Assemblée nationale, tend à étendre les crédits de logement du ministère et à les flécher vers la rénovation des bâtiments et leur adaptation au changement climatique.
Cet amendement a été retiré à l’Assemblée nationale, parce que, je le disais il y a quelques minutes, j’ai pris l’engagement de consacrer à ce problème, en 2018, quelque 5 millions d’euros. Nous verrons ensuite, avec le temps et après l’évaluation de ce nouveau dispositif, comment nous pouvons l’abonder pour les années suivantes.
Je vous saurais donc gré de bien vouloir retirer votre amendement ; dans le cas contraire, j’y serais défavorable.
L’amendement n° II-556 rectifié est retiré.
L’amendement n° II-188 rectifié, présenté par MM. Mohamed Soilihi, Hassani, Karam, Théophile et Dennemont, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
e n euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Emploi outre-mer
dont titre 2
Conditions de vie outre-mer
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.
Cet amendement tend à affecter 4, 2 millions d’euros supplémentaires au programme 138 en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, afin de créer une dotation pour les chambres de commerce et d’industrie, les CCI, d’outre-mer. Cette dotation est destinée à compenser l’impact de la baisse de ressources fiscales de 17 % prévue à l’article 19 du projet de loi de finances pour 2018.
Plusieurs raisons justifient cette dotation. Tout d’abord, les tissus économiques des départements et régions d’outre-mer, les DROM, sont particulièrement sensibles à l’action des CCI, du fait, premièrement, d’une part importante d’entreprises unipersonnelles, qui nécessitent un accompagnement plus prononcé, et, deuxièmement, d’un dynamisme entrepreneurial plus important.
Ensuite, la perte progressive, depuis 2010, des concessions sur la gestion des grands équipements a durement affecté le budget des CCI ultramarines, faisant passer leur volume budgétaire, dans les quatre DROM, de 300 millions d’euros en 2010 à 117 millions d’euros en 2015.
Enfin, les économies sont plus difficiles à réaliser dans ces CCI, compte tenu de la taille des territoires et de l’absence d’établissements infrarégionaux qui pourraient être fusionnés.
Les chambres de commerce et d’industrie, établissements publics de l’État, sont les représentants élus du secteur économique et remplissent des missions de service public vitales à l’activité économique, comme l’accompagnement des créateurs d’entreprises, la formation professionnelle, l’accompagnement à l’internationalisation, ou encore la gestion des centres de formation des apprentis consulaires.
Par conséquent, une nouvelle baisse aussi substantielle de leurs ressources de fonctionnement aboutirait nécessairement à une dégradation sensible de la qualité du service public prodigué aux entreprises ultramarines et à des suppressions d’emplois.
Faute de pouvoir isoler les CCI d’outre-mer dans le mécanisme de plafonnement des taxes affectées prévu à l’article 19 du projet de loi de finances, il est proposé que le ministère des outre-mer compense l’impact budgétaire à due concurrence.
Cela prendrait la forme d’un transfert de 4, 2 millions d’euros de l’action n° 02 du programme 123 vers l’action n° 01 du programme 138. Il est en effet possible de financer cette subvention par un phasage dans le temps différent du paiement des contrats liant l’État et les territoires, forts cette année de plus de 152 millions d’euros en autorisations d’engagement et de plus de 153 millions d’euros en crédits de paiement.
C’est la même configuration : il s’agit de transferts de crédits au détriment, cette fois, de la politique contractuelle de l’État en outre-mer.
Là encore, je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, la commission des finances émettra un avis défavorable.
Monsieur le sénateur, je suis, comme vous, sensible à la situation des CCI, notamment celles des outre-mer, qui sont, vous l’avez rappelé, extrêmement fragiles, mais essentielles pour le service des entreprises.
Néanmoins, je le répète, le ministère des outre-mer n’a pas vocation à contribuer au financement des CCI. Ce sont des établissements publics, dont mon ministère n’assure absolument pas la tutelle.
En outre, le ministre de l’action et des comptes publics l’a redit, la contribution demandée à l’ensemble du réseau sera limitée à la seule année 2018 et un dispositif de péréquation sera mis en place pour soutenir les CCI les plus fragiles. J’espère que ce mécanisme aidera effectivement les CCI les plus fragiles, donc les CCI d’outre- mer.
Pour toutes ces raisons, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; dans le cas contraire, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
Monsieur Mohamed Soilihi, l’amendement n° II-188 rectifié est-il maintenu ?
Eu égard aux explications de Mme la ministre, et dans la mesure où mon intention était d’appeler son attention sur ce problème, je retire cet amendement, madame la présidente.
L’amendement n° II-188 rectifié est retiré.
L’amendement n° II-513 rectifié, présenté par MM. Poadja et Laurey, Mme Tetuanui, MM. Bonnecarrère, Cadic, Canevet et Delcros, Mme Guidez, MM. Henno, Kern et Laugier, Mme Létard et MM. Longeot et Médevielle, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
e n euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Emploi outre-mer
dont titre 2
Conditions de vie outre-mer
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Michel Canevet.
J’ai bien entendu, dans son intervention liminaire, l’intérêt très vif que Mme la ministre porte aux questions de jeunesse, ainsi que son souhait de voir se développer les échanges, au travers notamment de la mise en œuvre du fonds d’échanges à but éducatif, culturel et sportif, le FEBECS.
Ce fonds fut institué par la loi du 13 décembre 2000 d’orientation pour l’outre-mer, et il a été amélioré, l’année dernière, lors de l’examen de la loi du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique.
Un certain nombre de collègues du groupe Union Centriste et moi-même nous sommes associés bien volontiers à cet amendement de Gérard Poadja, qui a pour objet que l’ensemble des populations françaises puissent bénéficier de ces échanges, à l’instar de ce qui se fait sur le territoire européen, au travers, par exemple, du programme Erasmus. Or, jusqu’à présent, il semble que les populations de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française en soient exclues ; il n’y a pas de raison qu’elles ne puissent profiter de ces mesures que l’on souhaite tous voir en mises œuvre.
D’où cet amendement, qui tend à prévoir une imputation de crédit permettant d’accompagner les projets des jeunes issus, notamment, de Polynésie française et de Nouvelle-Calédonie.
En dépit de l’objet louable de l’amendement – l’extension des compétences du FEBECS à la Polynésie française et à la Nouvelle-Calédonie –, l’adoption de cette disposition est impossible, car l’intervention de ce fonds dans ces territoires serait contraire à l’article 40 de la loi du 13 décembre 2000 d’orientation pour l’outre-mer. Il faudrait donc modifier ce texte.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Comme le souligne la commission, l’extension du FEBECS à la Nouvelle-Calédonie et à la Polynésie française nécessiterait une modification législative, dont les délais seraient incompatibles avec votre préoccupation.
En revanche, je l’ai déjà exprimé auprès de Mme la députée Nicole Sanquer, il est important que la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie soient soutenues dans l’ensemble de leurs projets éducatifs, sportifs, ou relatifs à la jeunesse, et vous avez su me convaincre, vous savez combien la jeunesse est importante pour moi. Aussi, je m’engage à ce que ces 100 000 euros soient mis au service des projets qui seront déposés auprès de mon ministère au cours de l’année 2018, même en dehors du cadre du FEBECS.
Je vous demande donc de bien vouloir retirer cet amendement, monsieur le sénateur.
Au vu de la volonté nettement exprimée par Mme la ministre, que je salue et que je remercie, nous allons le retirer, en souhaitant que les populations de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française puissent enfin être accompagnées dans leurs déplacements, comme les autres terres d’outre-mer.
Je retire donc cet amendement, madame la présidente.
L’amendement n° II-513 rectifié est retiré.
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Outre-mer », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
Les crédits sont adoptés.
J’appelle en discussion les articles 57 quater à 57 septies, ainsi que l’amendement portant article additionnel après l’article 57 septies, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Outre-mer ».
Outre-mer
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport d’information sur le coût et les économies qu’induirait un soutien renforcé à l’enseignement des langues et cultures d’Outre-mer pour ceux qui en font la demande et à la mise en valeur de la diversité des patrimoines culturels et linguistiques.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, de prime abord, les crédits de la mission « Outre-mer » du projet de loi de finances pour 2018 semblent en augmentation de 73 millions d’euros en autorisations d’engagement, c’est-à-dire de 3, 3 %, et de 85 millions d’euros en crédits de paiement, ce dont je ne peux que me réjouir.
Néanmoins, à y regarder de plus près, on constate que le programme 123, « Conditions de vie outre-mer », subit une baisse de dotation, que je qualifie d’importante au regard des situations compliquées et difficiles de nos territoires, à hauteur de 73 millions d’euros en autorisations d’engagement, soit de 9 %, et de près de 53 millions d’euros en crédits de paiements, soit de 7 %.
C’est d’autant plus inquiétant que cette baisse concerne la ligne budgétaire unique, provoquant la diminution des constructions de logements sociaux dans nos territoires, à l’inverse de ce que faisaient les gouvernements précédents.
Par exemple, en 2016, le nombre de logements sociaux était fixé à 6 953, dont 2 802 logements très sociaux. D’ailleurs, l’article 3 de la loi du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique prévoyait la construction de 150 000 logements dans les outre-mer au cours des dix ans suivant sa promulgation.
Or le Gouvernement ne s’est engagé que sur 5 870 logements locatifs sociaux et très sociaux, auxquels s’ajoutent 3 550 opérations de réhabilitation du parc existant, ce qui est très insuffisant. Cela aura un impact sur la vie de milliers de familles, mais également sur l’activité des PME de la construction.
Cette baisse touche aussi la continuité territoriale, à hauteur de 1, 3 %, alors que le Gouvernement s’était engagé à favoriser, en 2018, les conditions d’augmentation du nombre de billets d’avion aidés.
Elle concerne également les collectivités territoriales, avec une diminution drastique de leur budget, à hauteur de 40 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 24 millions d’euros en crédits de paiement.
Cette diminution affecte en outre le champ sanitaire et social, avec une contraction de 10 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 2, 1 millions d’euros en crédits de paiement, alors même que nos territoires ultramarins dans leur ensemble cumulent les difficultés, avec des risques sanitaires spécifiques importants, dans un contexte socio-économique dégradé.
Cette baisse concerne enfin l’insertion économique et la coopération régionale, à hauteur de 5 %, alors même qu’il faudrait augmenter largement ce montant, afin de permettre à nos territoires de lutter contre la concurrence des îles voisines proposant une fiscalité avantageuse couplée à une détaxe des produits de navigation.
Je termine en ajoutant que la proposition de loi relative à l’action extérieure des collectivités territoriales et à la coopération des outre-mer dans leur environnement régional, pourtant adoptée en 2016 et parue au Journal officiel du 6 décembre 2016, est toujours en attente des décrets d’application relatifs à certaines dispositions importantes, ce qui ralentit considérablement, voire annule totalement, la portée et l’ambition de ce texte.
L ’ article 57 quater est adopté.
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 30 juin 2018, un rapport sur la possibilité d’augmenter le plafond de 80 % de financement public dans le cadre de l’aide à l’amélioration de l’habitat en cas de présence d’amiante. –
Adopté.
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er janvier 2019, un rapport dont l’objet est de déterminer les possibilités d’extension et de renforcement des mesures prévues par le programme d’options spécifiques à l’éloignement et à l’insularité en faveur des filières de diversification agricole. –
Adopté.
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er janvier 2019, un rapport dont l’objet est d’approfondir les possibilités d’étendre les mesures prévues par le programme d’options spécifiques à l’éloignement et à l’insularité au secteur de la pêche. –
Adopté.
L’amendement n° II-557 rectifié, présenté par MM. Capus, Malhuret, Bignon et A. Marc, Mme Mélot et MM. Chasseing, Wattebled, Decool, Fouché, Lagourgue et Guerriau, est ainsi libellé :
Après l’article 57 septies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er janvier 2019, un rapport sur les possibilités de renforcement des dispositifs budgétaires et fiscaux déployés pour soutenir le développement du secteur touristique dans les outre-mer, étudiant notamment le recours à une variation du taux du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi.
La parole est à M. Jérôme Bignon.
J’ai déduit des explications et des engagements de Mme la ministre, lors de ses interventions au cours de la discussion, que l’objet de cet amendement pourrait figurer parmi les travaux et les préoccupations des Assises des outre-mer, qui me paraissent plus adaptées qu’un rapport à échéance de 2019.
Par conséquent, je retire cet amendement, madame la présidente.
L’amendement n° II-557 rectifié est retiré.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Outre-mer ».
La parole est à M. le président de la commission.
Je veux simplement dire aux membres de la commission des finances, encore nombreux dans l’hémicycle, que nous tiendrons, dès la suspension de la séance, une réunion pour examiner les amendements de la deuxième partie. Il y en a 350 à l’ordre du jour…
Sourires.
Nouveaux sourires.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures dix.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à vingt heures dix, est reprise à vingt-deux heures dix, sous la présidence de M. Jean-Marc Gabouty.