Intervention de Josiane Costes

Réunion du 7 décembre 2017 à 22h10
Loi de finances pour 2018 — Recherche et enseignement supérieur

Photo de Josiane CostesJosiane Costes :

Monsieur le président, madame la ministre, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, la démocratisation de l’accès à la connaissance constitue un enjeu fondamental pour permettre à tous nos concitoyens de s’adapter aux évolutions de la société ou, tout simplement, de s’épanouir.

La mission « Recherche et enseignement supérieur » doit donc traduire en permanence la place centrale de ces deux politiques publiques pour notre pays.

Les crédits de la mission, qui s’élèvent environ à 28 milliards d’euros pour l’année 2018 –s’y ajoutent des crédits prévus par le troisième programme d’investissements d’avenir –, ne sont pas affectés par les efforts budgétaires visant à réduire les dépenses publiques. Pour autant, ils ne répondent pas aux difficultés rencontrées sur le terrain.

En ce qui concerne l’enseignement supérieur, l’urgence est manifeste, comme pourraient en témoigner nos collègues de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication qui, chaque année, mettent en garde le Gouvernement sur la nécessité d’anticiper l’arrivée massive de nouveaux étudiants.

La France ne s’est pourtant pas donné les moyens suffisants pour relever le défi démographique consistant à accueillir plus de 2, 5 millions d’étudiants sur les bancs de l’université. En effet, ces dernières années ont été marquées par la situation financière catastrophique des universités, qui n’ont reçu aucune aide pour se sortir de cette impasse. Cerise sur le gâteau, elles ont même dû subir des prélèvements sur leurs fonds de roulement !

Nous demandons donc aux universités à la fois d’accueillir des étudiants de plus en plus nombreux, de combler les lacunes qu’ils ont accumulées tout le long de leur scolarité et de les préparer à leur vie professionnelle, le tout dans un contexte de contraintes financières fortes, sans leur donner les moyens qui auraient dû accompagner le passage l’autonomie. Dix ans après l’adoption de la loi Pécresse, le problème n’est pas résolu.

L’affaire du tirage au sort à l’entrée des filières dites « sous tension » est symptomatique de l’absence de prise en considération des difficultés vécues au sein des universités.

À la dégradation de leurs conditions de travail, s’est ajoutée la gestion d’un nombre croissant d’étudiants, alors que les capacités d’accueil n’ont pas été renforcées. Je tiens à le préciser, car les filières sous tension ne sont pas uniquement la résultante du déficit d’orientation des élèves – plus de 169 licences ont été confrontées à ces difficultés.

Madame la ministre, nous nous réjouissons de la fin de ce tirage au sort qui entrait en complète contradiction avec les principes les plus fondamentaux de notre pays et qui décourageait des vocations dès les premiers pas de nos jeunes dans l’enseignement supérieur.

Le plan Étudiants, que vous avez annoncé le 30 octobre dernier, substitue à la sélection arbitraire l’ouverture de nouvelles places dans les filières en tension tout au long du quinquennat. Nous veillerons à ce que cette décision se traduise dans les faits.

Un autre défi concerne le taux d’échec en licence, que seuls 27 % des étudiants obtiennent en trois ans. À cet égard, les dispositifs d’accompagnement pédagogique et de parcours de formation personnalisés prévus par le projet de loi relatif à l’orientation et à la réussite des étudiants sont bienvenus. Encore faudra-t-il disposer des moyens suffisants.

Au cours du quinquennat, un milliard d’euros devraient être consacrés à la réforme du premier cycle. Nous sommes toutefois loin de ce qui était attendu par les universités : à ce rythme, nous n’atteindrons pas l’objectif fixé par la stratégie nationale pour l’enseignement supérieur de consacrer plus de 2 % du PIB à cette politique.

Les crédits de la recherche augmentent dans des proportions plus positives pour l’année à venir, avec environ 15 milliards d’euros. Toutefois, la trajectoire devant nous permettre d’affecter 3 % du PIB français au budget de la recherche, conformément au souhait du Président de la République, est incertaine.

La contrainte budgétaire qui continue de peser sur les opérateurs de recherche avec la progression du glissement vieillesse technicité, ou GVT, demeure inquiétante. Les crédits accordés dans le domaine de l’énergie, du développement et de la mobilité durable sont en deçà des besoins.

Les crédits de l’Agence nationale de la recherche, l’ANR, sont en hausse de 32, 7 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 133, 9 millions d’euros en crédits de paiement, ce qui permettra d’améliorer le taux de sélectivité des projets de recherche.

Sans entrer dans le débat sur la pertinence des appels à projets, il est indispensable d’encourager nos chercheurs, qui s’investissent bien souvent sans disposer d’aucune visibilité sur les financements qu’ils pourront obtenir.

Enfin, le crédit d’impôt recherche, qui représente une dépense fiscale de 5, 8 milliards d’euros, mériterait d’être mieux évalué. Si nous comprenons qu’il a pour objectif d’inciter les entreprises à investir dans la recherche, cette générosité doit s’appuyer sur d’autres leviers, à commencer par une meilleure coopération entre recherche publique et recherche privée.

Pour conclure, je saluerai bien évidemment les efforts du Gouvernement pour parvenir à la présentation d’un budget sincère.

Toutefois, bien plus que d’une « sanctuarisation » des crédits de la mission, c’est de volontarisme que nous avons besoin. De ce dernier découlent le progrès et la réussite des autres politiques, notamment l’emploi, l’économie, l’énergie, la santé ou l’innovation.

Le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen votera très majoritairement les crédits de cette mission.

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