En effet, nous pensons que votre projet de budget se situe dans la lignée de ceux des précédents gouvernements et qu’il consacre l’abandon par la France de la stratégie européenne, dite « de Lisbonne », dont l’objectif était de promouvoir une économie de la connaissance.
Alors que nombre de nos partenaires européens ont augmenté, parfois dans des proportions importantes, la part des dépenses publiques destinées à l’enseignement supérieur et à la recherche, la place de la France reste médiocre. Elle a même reculé dans certains domaines.
Ainsi, la part des dépenses des établissements d’enseignement supérieur dans le PIB est inférieure à la moyenne de l’OCDE. Plus grave encore, la dépense annuelle par étudiant est en baisse continue depuis 2009.
Loin de vos déclarations et de l’annonce d’un plan massif en faveur de l’université, la dure réalité des chiffres de votre budget fait apparaître une baisse, en euros constants, des dotations des établissements universitaires.
Plus grave encore, aucune création de postes n’est prévue. Non seulement les universités ne seront pas davantage aidées pour faire face à l’afflux de 35 000 étudiants supplémentaires, mais encore aucun moyen supplémentaire ne leur est octroyé pour mettre en œuvre les dispositifs imposés par la réforme de l’accès à l’université dont nous aurons à débattre prochainement.
Pour bien apprécier l’extrême gravité de la situation, j’aimerais rappeler que des experts de tous bords estiment qu’il faudrait entre 700 millions d’euros et 1 milliard d’euros supplémentaires pour permettre à l’enseignement supérieur de maintenir ses capacités d’accueil.
La situation de la recherche, dont le budget baisse également en euros constants, n’est pas meilleure. Vous avez fait le choix contestable de favoriser des structures dont l’efficience n’est pas avérée, comme l’ANR ou les communautés d’universités et établissements, les COMUE – celles-ci feront l’objet de l’un de mes amendements –, aux dépens d’opérateurs historiques qui auront à subir, comme tous les ans depuis trop longtemps, de nouvelles réductions de moyens et de postes.
Cet acharnement confine à l’absurdité quand il s’agit de l’Institut de recherche pour le développement, dont le budget baisse de plus de 1, 5 %, alors qu’il joue un rôle essentiel dans l’action de la France à l’étranger, c’est-à-dire l’un des objectifs prioritaires du Gouvernement.
Par ailleurs, je suis très inquiet de la situation très dégradée de l’emploi public dans les domaines de la recherche et de l’enseignement supérieur. Les suppressions de postes de chercheurs, l’absence de recrutement nouveau, la baisse des postes ouverts au concours du CAPES et la dégradation des conditions financières et matérielles des agents dissuadent de plus en plus les étudiants de se tourner vers toutes ses professions.
Cette crise continue des vocations se traduit par une baisse du nombre des titulaires d’un doctorat, ce qui est très inquiétant pour l’avenir de notre recherche.
Une autre politique est possible, pas en Utopie, mais dans l’Europe d’aujourd’hui !
Depuis des années, un dogme bien ancré dans les esprits impose de considérer la dépense publique comme un mal qu’il faudrait combattre. Il y aurait, comme pour le cholestérol, une « bonne dépense », qui serait privée, et une « mauvaise dépense », qui serait publique. Cette dernière, comme le mauvais cholestérol, conduirait à la sclérose – je vous rappelle certains propos sur la graisse du mammouth…