Autant que la faiblesse des crédits qui lui étaient affectés, c’est la procédure de sélection des appels à projets – moins de 12 % d’entre eux étaient retenus – qui a fini de décourager les équipes de chercheurs et provoqué des démissions, et même une fronde des prix Nobel.
Le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, Daniel Dubois, semble désormais avoir des certitudes concernant la révision du processus de sélection des projets par l’ANR. Il faut l’espérer ! Pour ma part, depuis des années, je n’entends que des chercheurs qui n’y croient plus et ne peux que constater les échecs de certains.
Ainsi en est-il des projets de recherche sur la dépollution des sols antillais contaminés par la chlordécone, un dossier que je suis depuis longtemps. Pour mes collègues, je précise que cette molécule, utilisée jusque dans les années soixante-dix comme pesticide dans les bananeraies des Antilles, continuera à polluer les sols pendant 250 ans à 700 ans. Elle semble avoir des incidences sur les cancers de la prostate.
Il a fallu fermer toutes les piscicultures, mais aussi interdire la pêche dans certaines baies. Pour des îles, c’est une catastrophe, d’autant que, jusqu’à présent, aucune solution n’a été trouvée et que les quelques équipes de chercheurs ayant soumis un projet n’ont pas été encouragées par l’ANR, alors que le plan Chlordécone était prioritaire pour le Gouvernement.
J’évoquerai maintenant la recherche spatiale. La France est non seulement le premier contributeur, devant l’Allemagne et le Royaume-Uni, de l’ESA, l’Agence spatiale européenne, mais aussi, sans chauvinisme aucun, son principal moteur.
Dans la mesure où les rapporteurs l’ont évoquée, je ne reviendrai pas sur l’augmentation de 10, 6 % des crédits du programme ni sur la légère baisse de ceux qui sont alloués au CNES, le Centre national d’études spatiales, au profit de l’ESA. La double présidence, assumée par Jean-Yves Le Gall, est de nature à rassurer tous ceux qui, comme moi, soutiennent la recherche et l’industrie spatiale française, cette dernière ne pouvant se développer que dans le cadre européen.
Depuis la conférence de Naples, en 2012, l’industrie spatiale européenne a su se structurer, avec un maître d’œuvre principal pour les lanceurs, Airbus Group, et trois maîtres d’œuvre concurrents pour les satellites, Airbus, Thales et l’allemand OHB.
Le programme des lanceurs spatiaux et le centre spatial guyanais, confortés dans ce budget, doivent permettre d’assurer à l’Europe son indispensable autonomie d’accès à l’espace. J’espère que les 133 millions d’euros prévus en 2018 pour les systèmes spatiaux de télécommunications et Galileo seront suffisants.
Comme notre rapporteur Daniel Dubois, je trouve que l’ESA a été bien longue à faire la promotion du GPS européen, qui est beaucoup plus précis que les systèmes américains et russes et qui, surtout, nous assurera une autonomie. Les signaux ne dépendant pas de puissances étrangères, ils ne pourront être interrompus par ces dernières.
Si, par le passé, je me suis interrogée sur l’opportunité de continuer à financer la station spatiale internationale, la belle opération de promotion de l’espace menée à l’occasion de la mission de Thomas Pesquet me fait dire qu’elle vaut bien 240 millions d’euros.
Je profite de ce chapitre, madame la ministre, pour vous faire part d’une recommandation que j’émets depuis plus de six ans dans le cadre de l’OPECST, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques : le ministère de la recherche et de l’enseignement supérieur doit réintégrer le terme « espace » dans son intitulé.