Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, avant toutes choses, je souhaite dénoncer les pratiques déshonorantes des différents gouvernements, y compris de celui qui est en place actuellement, qui visent à spéculer sur la baisse démographique, et donc sur la mort de ceux qui ont combattu pour la France, de ces femmes et de ces hommes à qui nous devons beaucoup.
Nous ne pouvons parler des anciens combattants sans regretter la suppression du secrétariat d’État qui leur était dédié. Cette décision en dit long sur la place qu’occupent ces femmes et ces hommes dans l’esprit du Gouvernement et du Président de la République.
Aujourd’hui, la réalité est là : les anciens combattants ne sont plus qu’un dossier parmi d’autres au ministère des armées, et l’on continue de faire des économies sur le dos de personnes qui ont tant donné !
La baisse constante du budget depuis plus de dix ans ne permet pas de répondre aux demandes récurrentes et au droit à réparation du monde combattant.
Les iniquités et les frustrations persistent, mais nous considérons, au groupe communiste républicain citoyen et écologiste, qu’elles peuvent être résolues par des chiffrages actualisés et précis, surtout s’ils sont suivis d’une concertation tripartite entre le Gouvernement, les parlementaires et les associations d’anciens combattants, concertation ardemment demandée par ces associations.
Évidemment, nous pouvons nous féliciter de la revalorisation de la pension versée aux harkis, forces supplétives de l’armée française lors de la guerre d’Algérie. Cette revalorisation ne peut toutefois cacher les manques de ce budget.
On relève ainsi des injustices entre les différentes générations d’anciens combattants. Pourtant, comme l’a très bien souligné mon collègue André Chassaigne à l’Assemblée nationale, « celui qui a combattu a combattu, celui qui est mort est mort, et l’on ne doit pas faire de différence ». Or, aujourd’hui, les coupes budgétaires de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » s’expliquent par une différenciation entre ces derniers.
Pouvons-nous évoquer l’urgence d’une concertation sur la prise en charge des pupilles de la Nation dont les parents sont morts pour la France, sur la revalorisation de la pension de base des conjoints survivants des grands invalides de guerre, ou encore sur la demande des harkis de souche européenne de bénéficier de l’allocation de reconnaissance, en dépit du refus réitéré opposé par le Conseil constitutionnel ?
Pouvons-nous également évoquer l’inquiétude qui plane sur le budget de l’ONAC, l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre ? Cet organisme conserve un budget semblable aux années précédentes, alors qu’il se voit confier de plus en plus de missions, notamment celle de l’assistance aux victimes de terrorisme.
Pouvons-nous aussi évoquer le fait que le statut d’ancien combattant ne soit toujours pas accordé aux militaires français déployés en Algérie entre 1962 et 1964 ? Ceux qui ont perdu la vie pendant cette période ont droit à l’appellation « mort pour la France », les autres à un titre de reconnaissance de la Nation, et si l’État français accorde ce titre, c’est bien qu’il reconnaît le climat de dangerosité qui régnait en ces temps en ce lieu.
Comment peut-on imaginer que celui qui est arrivé sur place le 1er juillet 1962 obtienne la carte du combattant, mais pas celui qui est arrivé le 3 juillet 1962, alors que ces deux militaires se trouvaient dans le même peloton et y ont effectué, ensemble, les mêmes missions, les mêmes jours, aux mêmes horaires ?
L’excuse selon laquelle la guerre a pris fin le 2 juillet 1962 n’est pas justifiable.
Aussi, je veux maintenant aborder le sujet des psychotraumatismes, notamment des troubles différés, dont souffrent des milliers de combattants et d’anciens combattants qui ont survécu, et qui vivent dans une insupportable détresse. Aujourd’hui, rien n’est prévu pour prendre en charge ces blessures morales. Il n’existe aucune structure de proximité, aucun expert… Nous devons donc travailler à l’élaboration d’une loi qui permette réparation, mais qui permette aussi d’éviter que de tels troubles et de tels désordres ne puissent se reproduire.
Enfin, j’aurai un mot pour les veuves, des femmes qui ont eu la douleur, mais apparemment aussi le tort de perdre leur mari avant que ce dernier atteigne l’âge de 74 ans, puisqu’elles sont privées de la demi-part fiscale… Sommes-nous conscients que cette décision est une double peine ?
Je pense aussi aux veuves de grands invalides qui, du fait de l’état de dépendance de leur époux, se sont consacrées à lui en permanence au détriment d’une carrière professionnelle et qui, au décès de ce dernier, n’ont pu bénéficier que d’une très modeste pension de réversion. Nous devons agir à leur égard.
Vous le savez, madame la secrétaire d’État, la liste des inquiétudes est encore longue…
Face à cette situation, l’État a le devoir de ne pas se défiler, car il est de son ressort qu’il n’y ait aucun oublié de la République.
Je terminerai mon intervention en disant que le présent projet de loi de finances va creuser davantage les inégalités, car la baisse du budget des anciens combattants accompagne aussi la baisse des APL et la hausse brutale de la CSG, des dispositions qui vont impacter durement nos retraités dans les années à venir, y compris les retraités victimes de guerre.