Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur spécial, mes chers collègues, j’ai en cet instant une pensée particulière pour M. le rapporteur pour avis, Bruno Gilles.
Cela dit, ce débat est un moment fort de nos discussions sur le projet de loi de finances et présente, en somme, des enjeux majeurs. En effet, il constitue une étape importante qui traduit l’engagement de la France vis-à-vis de son passé, mais aussi, dans un certain sens, de son avenir.
Car, au fond, c’est bien de cela qu’il est question aujourd’hui : la reconnaissance de la Nation pour ses combattants, toutes générations confondues, et la transmission de ce témoin de l’Histoire aux générations futures.
Comme le dit si bien cette formule faisant référence à Simone Veil, à qui je veux rendre hommage : « Transmettre la mémoire de l’Histoire, c’est apprendre à se forger un esprit critique et une conscience ».
Alors, tout d’abord, je ne vous cacherai pas notre déception concernant ce texte. La volonté est là, mais les moyens déployés demeurent en deçà des objectifs fixés.
Année après année, majorité après majorité, les gouvernements successifs s’entêtent dans la baisse des crédits alloués à cette mission, pourtant si fondamentale.
Ainsi, le budget pour 2018 s’établit à 2, 46 milliards d’euros en crédits de paiement, soit une baisse de 3, 1 %. Si l’on en croit la loi de programmation des finances publiques, la baisse cumulée sera de 11, 4 % en 2020.
Cette situation est inacceptable pour nos combattants d’hier et d’aujourd’hui, leurs conjoints et leurs descendants. Ces soldats ont participé à l’effort de guerre en payant parfois un lourd tribut. Ils méritent donc plus de considération et ne doivent pas être une simple variable d’ajustement des comptes publics.
Alors, si cette baisse dégage des économies pour l’État, elle n’en est pas moins ressentie comme un renoncement, voire une résignation.
C’est notamment le cas pour le programme 169, destiné à la reconnaissance et à la réparation en faveur du monde combattant. Ses crédits diminuent eux aussi de 3, 4 %.
Cette évolution peut s’expliquer par la réduction du nombre de bénéficiaires. Nous entendons et comprenons cet argument. Toutefois, la dynamique démographique ne justifie pas tout.
En effet, les défis à relever sont multiples, et les demandes nombreuses.
Conscients de ce changement, nous vous demandons, non pas d’augmenter ces crédits, mais de les maintenir à leur niveau actuel.
Pour ainsi dire, nous regrettons l’absence de mesures fortes.
Comme l’indique le rapporteur pour avis dans son rapport, ce budget « ne corrige en aucun cas les insuffisances du droit à réparation et les inégalités que son application engendre. » Nous aurions aimé que des solutions soient apportées aux pertes de pouvoir d’achat.
Si l’extension en année pleine de la revalorisation de la retraite du combattant s’inscrit dans le bon sens – nous tenons à le souligner –, les mesures demeurent encore trop insuffisantes.
Par ailleurs, je veux attirer votre attention sur deux sujets importants, relayés par de nombreuses associations.
Le premier concerne l’attribution du titre de reconnaissance de la Nation pour les personnels engagés dans l’opération Sentinelle. Ces femmes et ces hommes exercent leur devoir dans des conditions difficiles, parfois même déplorables : temps de repos, hébergement, logistique, problèmes de matériel, etc. Nous ne pouvons pas rester insensibles à cette situation.
Ces héros de la République risquent chaque jour leur vie et sont régulièrement la cible de fanatiques. Par conséquent, il serait souhaitable de les considérer comme des combattants à part entière et, de manière générale, de revoir ce dispositif pour les missions intérieures.
Le second sujet concerne l’octroi de la carte du combattant au titre d’une OPEX pour les opérations de sécurité conduites sur le territoire algérien après le 2 juillet 1962, en application des accords d’Évian. Il s’agit non pas de travestir l’Histoire, mais de rétablir des faits.
Une proposition de loi a d’ailleurs été déposée en ce sens à l’Assemblée nationale, en 2012, par… M. Gérald Darmanin. Nous comptons donc sur le Gouvernement pour pallier cette injustice.
N’attendons pas qu’il n’y ait plus d’anciens combattants pour prendre en considération ce qu’ils demandent depuis tant d’années !
Aussi, nous saluons le choix fait d’augmenter les crédits pour la politique de mémoire.
Les différentes commémorations prévues, notamment celles qui sont liées à la Première Guerre mondiale, témoignent de cette volonté forte de nos institutions de renforcer les liens entre les citoyens et les armées. Nous nous en réjouissons.
La quatrième génération du feu sera également mise à l’honneur, notamment lors du quarantième anniversaire de la force intérimaire des Nations unies au Liban.
L’actualité au Proche-Orient nous rappelle l’importance de l’amitié franco-libanaise, mais aussi le rôle déterminant de notre pays dans le concert des nations.
Par ailleurs, nous rejoignons l’avis du rapporteur spécial sur l’indemnisation des victimes de persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale. Elle mérite en effet de « recevoir un nouvel élan ».
Concernant la journée défense et citoyenneté, il paraît nécessaire de la recentrer sur sa vocation première : l’esprit de défense.
L’impact financier du service national universel changera considérablement les choses. C’est une mesure attendue, qui, j’en suis sûre, fera l’objet d’un débat parlementaire à la fois riche et constructif. J’aurai d’ailleurs l’occasion d’intervenir sur ce sujet dès le mois de janvier 2018.
Pour terminer, nous soutenons le Gouvernement s’agissant des deux articles rattachés.
La revalorisation de 100 euros des deux allocations versées aux anciens membres des formations supplétives et l’harmonisation des pensions militaires d’invalidité versées aux ayants droit des militaires rayés des contrôles avant le 3 août 1962 constituent une évolution positive.
À ce propos, le temps est venu d’ouvrir un débat apaisé, de mettre enfin des mots sur une période difficile, complexe et si douloureuse pour nos compatriotes harkis. Ils ont connu les pires atrocités ; nous aspirons pour eux à plus de justice et de reconnaissance.
Par conséquent, le groupe Union Centriste votera en faveur des crédits de la présente mission. En effet, voter contre consisterait à s’opposer aux avancées contenues dans ce projet de loi de finances. Nous refusons cette hypothèse.
En revanche, nous rappelons au Gouvernement la nécessité d’aller plus loin, et nous l’invitons à ne pas relâcher les efforts.
Surtout, derrière les chiffres et les discussions budgétaires se cachent avant tout des noms, des visages et des vies consacrées. Ne les oublions pas !