Au sein de la troisième génération du feu, qui a servi en Algérie, une dernière inégalité persiste dans l’attribution de la carte du combattant. Depuis 2004, celle-ci est attribuée à tous les hommes qui y ont servi quatre mois avant l’indépendance, c’est-à-dire le 2 juillet 1962. Depuis 2014, tous les soldats qui ont servi quatre mois sur ce territoire, dès lors que leur séjour avait commencé avant cette date, peuvent la recevoir – c’est ce qu’on appelle la carte « à cheval ».
Cela ne prend pas en compte la situation des militaires qui, en application des accords d’Évian, ont été affectés dans ce pays nouvellement indépendant jusqu’en 1964, dont l’effectif total est estimé à plus de 150 000 hommes. Durant cette période, 627 d’entre eux ont été reconnus morts pour la France, ce qui témoigne de la dangerosité de leur mission.
Il convient aujourd’hui de réparer cette injustice.
Comme vous l’avez relevé, madame la secrétaire d’État, des estimations divergentes sur le versement de la retraite du combattant, donc du coût de cette mesure, ont été avancées. Pour le Gouvernement, il représenterait plus de 100 millions d’euros, mais ce calcul est basé sur l’hypothèse que l’ensemble des soldats concernés n’en bénéficient pas aujourd’hui et la percevront dès l’an prochain. Or un nombre important de ces hommes avait déjà servi en Algérie durant la guerre et touche la retraite du combattant à ce titre.
Il est plus raisonnable d’estimer qu’environ 25 000 personnes seraient concernées, soit le nombre de titres de reconnaissance de la Nation décernés pour les services en Algérie entre 1962 et 1964 – environ 36 000 –, duquel est soustrait le nombre de cartes « à cheval » attribuées depuis 2014 – 11 000.
Le coût serait donc d’environ 18 millions d’euros par an, ce que le déclin démographique des anciens combattants permet de financer à budget constant.
Par ailleurs, il n’est pas question en l’occurrence de rouvrir le débat sur la guerre d’Algérie et ses bornes temporelles. Le maintien de forces françaises sur ce territoire indépendant après le 2 juillet 1962 s’apparente plutôt à une opération extérieure.
Or, depuis 2015, les anciens combattants des OPEX peuvent bénéficier de la carte du combattant après quatre mois de présence sur un théâtre d’opérations. Ces OPEX ne sont pas toutes postérieures à la guerre d’Algérie : dans la liste, fixée par arrêté, on compte par exemple Madagascar entre mars 1947 et octobre 1949.
En théorie, l’intervention du législateur ne serait donc même pas nécessaire, si le Gouvernement prenait ses responsabilités. Il lui suffirait en effet de modifier cet arrêté.
En raison des règles propres à la recevabilité des amendements au projet de loi de finances, cet amendement prévoit le transfert de 18 millions d’euros de l’action n° 02 vers l’action n° 01.