Intervention de Victorin Lurel

Réunion du 6 décembre 2017 à 21h45
Loi de finances pour 2018 — Remboursements et dégrèvements

Photo de Victorin LurelVictorin Lurel :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la commission des finances a émis un avis assez inédit sur le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État » : elle a décidé de s’en remettre à la sagesse du Sénat. Nous comptons en effet sur le Gouvernement pour nous éclairer.

Les participations de l’État, les titres possédés dans diverses entreprises, s’élèvent à 140 milliards d’euros, dont 100 milliards d’euros pour l’APE, l’Agence des participations de l’État, 15 milliards d’euros pour la BPI et le reste, 25 milliards d’euros, pour la CDC. Vous le savez, ce compte doit être présenté à l’équilibre – c’est le cas depuis de longues années, sauf l’an dernier –, d’où une programmation conventionnelle de 5 milliards d’euros. Le solde annuel cumulé ne peut en aucun cas être déficitaire.

L’exercice qui nous est demandé peut s’apparenter à un exercice de style : on nous demande de donner une autorisation – c’est le rôle du Parlement –, mais, ensuite, le Gouvernement fait ce qu’il veut, de façon totalement discrétionnaire et libéré des contraintes de la loi organique. Il nous faut, nous, parlementaires, attendre la loi de règlement, qui intervient six mois après l’adoption de la loi de finances initiale, pour voir ce que l’État a fait de l’autorisation qui lui a été accordée. En fait, et c’est pourquoi nous avons décidé à l’unanimité de nous en remettre à la sagesse de notre assemblée, c’est un véritable blanc-seing qui est délivré au Gouvernement. À bien y regarder, il a peu de contraintes.

En janvier 2014, le gouvernement de l’époque s’était assigné une doctrine d’intervention, une philosophie de l’État stratège. Depuis lors, la situation a beaucoup évolué. On a l’impression que la doctrine a disparu. J’en veux pour preuve ce qui s’est passé avec STX et Alstom, où nous avons eu affaire à deux philosophies différentes, voire contradictoires. Nous aimerions bien comprendre.

Par ailleurs, l’État nous a indiqué très clairement dans les documents que nous avons tous reçus qu’il fallait financer l’innovation. Celle-ci est déjà financée par le programme 192, par la BPI, la CDC et que sais-je encore. Bref, il y a un foisonnement de programmes et d’actions pour financer l’innovation dite « de rupture ». Apparemment, ce n’est pas suffisant. Un fonds de 10 milliards d’euros sera donc créé. Cette somme serait placée et devrait rapporter 200 millions à 300 millions d’euros d’intérêt.

Entre le moment où la commission des finances a émis son avis et maintenant, ce fonds a évolué. Ce n’est plus seulement un fonds pour l’innovation, c’est aussi un fonds pour l’industrie, et donc pour la politique d’intervention de l’État et de gestion de son patrimoine. Cela appellerait quelques précisions.

Le Premier ministre a bien voulu nous apporter quelques éclairages le 20 novembre dernier, lors d’un discours prononcé au Conseil national de l’industrie, en disant que tout est stratégique, même le yaourt. Dès lors qu’il porte le label France, l’État interviendrait.

On a l’impression que, depuis la doctrine d’intervention définie en janvier 2014, selon laquelle l’État devait se recentrer sur ses fonctions régaliennes, comme la défense ou la sécurité, on est maintenant passé – pourquoi pas ? – aux produits de l’agroalimentaire. Nous aimerions donc obtenir du Gouvernement quelques lumières au sujet de ce fonds pour l’industrie et l’innovation.

Nous souhaiterions également que le Gouvernement nous explique comment il compte parvenir à obtenir ces 10 milliards d’euros pour pouvoir dégager 200 millions d’euros en 2018. Désormais, ce sera non plus 10 milliards d’euros, mais 2 milliards d’euros immédiatement, puis 8 milliards d’euros qui vont être cédés ou prêtés, mais ce n’est pas dit…

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion