Madame Gruny, je suis le premier conscient des marges de progrès de Pôle emploi. Avec un taux de satisfaction de 72 %, il reste du chemin à parcourir. Je demande simplement que l'on tienne compte des efforts que nous faisons, de la mobilisation des conseillers, et de la charge du travail que nous accomplissons.
Nous avons progressé en matière de personnalisation et de prise en compte du handicap. Nous avons des difficultés relationnelles avec Cap emploi. Alors que cette structure est un réseau spécialisé de qualité, nous ne lui adressons pas forcément les personnes les plus en difficulté. Comment mieux coordonner nos actions ? Comment faire évoluer notre offre de services ? Il est regrettable que les conseillers de Pôle emploi maîtrisent mal les aides proposées par l'Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées (AGEFIPH) : ne pourrions-nous pas spécialiser nos conseillers dans certaines agences ?
Nous avons rendu obligatoire l'inscription en ligne tout en laissant la possibilité aux demandeurs d'emploi de venir en agence : 19 % des personnes inscrites se déplacent physiquement, soit parce qu'elles n'ont pas accès à Internet, soit parce qu'elles ne maitrisent pas l'outil numérique. Le dispositif du service civique marche plutôt bien : en 2018, nous devrions avoir 1 000 agents supplémentaires. Nous essayons aussi de travailler avec Emmaüs Connect pour rendre les applications plus intuitives. En outre, les demandeurs d'emploi qui rencontrent des difficultés avec Pôle emploi en rencontrent également avec d'autres services publics : mutualisons nos efforts pour une mise à niveau numérique de nos concitoyens.
Vous parliez aussi de savoir-être : comme vous, je constate que beaucoup d'employeurs évoquent des comportements inadéquats.
M. Morisset m'a interrogé sur le budget de Pôle emploi : 5,6 milliards d'euros et 50 000 équivalents temps plein travaillé (ETPT). Certes, nous pourrions disposer de plus de moyens d'accompagnement, mais cela relève de choix budgétaires. L'accompagnement intensif mobilise 35 % de nos conseillers et 16 % des demandeurs d'emploi. À nous de dégager les forces internes pour nous améliorer. En ce qui concerne les statistiques mensuelles du chômage, les ministres en disposent la veille de leur publication, à 18 heures. À compter de l'année prochaine, nous publierons les chiffres trimestriellement : c'est une bonne nouvelle, car cela permettra d'avoir un peu de recul. Les chiffres mensuels resteront publiés en ligne, mais sans commentaires. En 2016, les chiffres du chômage ont augmenté huit mois sur douze et pourtant, sur l'année, le chômage a baissé.
Je suis d'accord avec vous, monsieur Vanlerenberghe : il faut éviter les doublons. Théoriquement, les maisons de l'emploi ne font plus d'accompagnement. Nous pouvons donc être parfaitement complémentaires. Nous sommes preneurs d'expérimentations. Pour moi, le grand enjeu est de territorialiser Pôle emploi : le bassin d'emploi doit être l'échelon de référence.
Certes, nous avons enregistré une baisse des crédits en projet de loi de finances pour 2017, monsieur Watrin, qui correspond à la suppression de 297 emplois : il s'agissait du volume d'emplois que nous n'avions pas consommé en 2016. La direction du budget a estimé que ces emplois pouvaient être supprimés. La prochaine convention tripartite sera déterminante, d'autant que l'actuelle arrive à échéance en 2018. Je souhaite que nous examinions les gains de productivité à Pôle emploi, notamment sur l'indemnisation. Les perspectives budgétaires pour les prochaines années sont un réel sujet de préoccupation.
Vous avez évoqué le contrôle des chercheurs d'emploi : nous l'avons mis en place il y a deux ans, notamment pour mettre fin aux caricatures de tout bord. Je souhaitais que nous objectivions la situation. Aujourd'hui, nous savons que 14 % des personnes contrôlées ont été radiées pour insuffisance de recherche d'emploi. Nous avons ainsi découvert des personnes qui ne cherchent plus car elles sont découragées. Dans ce cas, il ne faut pas radier mais accompagner. Il faut faire respecter la logique « droits et devoirs », y compris pour les personnes qui ne sont pas indemnisées. Je me félicite de constater que les commentaires, à l'occasion de cette étude, ont apaisé le débat. Ce dispositif a fait preuve de son humanité.
La territorialisation ne passe pas forcément par la décentralisation, monsieur Jomier. Aujourd'hui, pour accompagner un demandeur d'emploi, il faut maîtriser un minimum de règles sur l'indemnisation : en cas de reprise partielle d'activité, le demandeur doit savoir quelle sera son indemnisation. En outre, notre politique d'automatisation de liquidation génère des gains de productivité, ce qui nous permet de mieux personnaliser notre accompagnement et d'être proactifs. Tout ceci est possible grâce à l'informatisation. Le fait d'avoir regrouper dans une même entité les Assedic et Pôle emploi permet de redéployer vers l'accompagnement certains de nos personnels. Un retour en arrière poserait beaucoup de difficultés et présenterait peu d'intérêt.
Les règles relatives à l'offre raisonnable d'emploi existent depuis plusieurs années, madame Cohen, mais elles restent peu appliquées car il est difficile de caractériser un refus d'offre d'emploi. Ce dispositif ne doit pas être confondu avec le contrôle de la recherche d'emploi que nous venons d'évoquer.
En ce qui concerne l'accompagnement global, nous ne demandons pas aux départements des moyens supplémentaires : nous essayons de coordonner nos forces. D'ores et déjà, les départements mobilisent des assistantes sociales. Au lieu de travailler séparément, il faut travailler ensemble, ce qui permettra de diminuer le nombre de bénéficiaires du RSA. Tous les départements sont concernés, sauf deux, dont l'un est présidé par le président de l'Association des départements de France mais je ne désespère pas de convaincre sa vice-présidente de rejoindre notre dispositif.
Monsieur Mouiller, il faut parvenir à analyser les besoins de recrutement sur les territoires : cela suppose de créer un climat de confiance avec les entreprises. Je note que les régions développent des outils pour identifier les besoins des entreprises au niveau des bassins d'emploi.
Je transmettrai les félicitations de Mme Meunier au directeur départemental de Loire-Atlantique : il y sera sensible. « Chouette » est une application qui a été développée à partir de la problématique des saisonniers, puis étendue à l'hôtellerie et à la restauration. Elle permet de mettre très rapidement en contact un employeur avec un demandeur d'emploi. Cette application va être généralisée. Une autre application, dénommée « MaCigogne », offre des places de crèches aux mères qui veulent travailler et qui ont besoin de faire garder leurs enfants. Une autre application, « Mémo » aide les demandeurs d'emploi à classer les offres auxquels ils répondent. Ces applications ont du succès grâce au bouche à oreille sur Internet.
Madame Fournier, je n'ai jamais pensé qu'un algorithme pouvait remplacer un conseiller humain, qui motive, encourage, montre de l'empathie, provoque des réactions. Recevoir une information n'est pas ce qui déclenche le changement de comportement ; il faut de l'aide - sinon aucun médecin ne fumerait. C'est là le rôle du conseiller.
Pour accompagner la mobilité internationale, nous avons décidé de mettre en place cinq pôles géographiques, car il est nécessaire de connaître les pays et leurs différences. Dans ce cas, la relation avec les demandeurs d'emploi est essentiellement numérique. Nous dresserons un bilan de cette expérimentation. Je suis convaincu que l'expatriation peut être une bonne solution pour certains demandeurs d'emploi. Pôle emploi, qui gère déjà une agence commune avec l'Allemagne et travaille avec la Belgique, compte développer ce sujet.
M. Lévrier m'a posé une question sur nos liens avec les entreprises. Je suis preneur de tout ce qui favorise la prise en compte de leurs besoins. Lorsque nous les connaissons, nous pouvons monter des actions de formation, sous réserve que les délais de recrutement soient compatibles avec la durée de la formation, puisque l'on ne devient pas chaudronnier en un mois. Lorsque l'implantation d'une entreprise est connue à l'avance, nous avons le temps d'identifier les compétences demandées, de mettre en place des formations et de recruter.
J'insiste aussi beaucoup sur la connaissance des métiers et la lutte contre les stéréotypes. Par exemple, beaucoup de jeunes ont une vision du BTP qui correspond à ce qu'il était il y a soixante ans. Nous travaillons sur des kits des métiers présentant leurs réalités, y compris les savoir-être demandés. Actuellement, beaucoup d'emplois appartiennent au secteur des services, dans lequel le savoir-être compte beaucoup.
Nous réfléchissons aussi à ce que les élus aient, dans chaque région, un interlocuteur auquel ils signaleraient les entreprises qui connaissent des difficultés de recrutement.