Il n'y a pas de contentieux spécifique sur les agissements sexistes, mais parfois des entreprises concluent de magnifiques accords qui ne les empêchent pas de tolérer des agissements sexistes. Nous avons écrit ce guide pour montrer que les leviers d'action ne sont pas forcément les mêmes. On joue sur la culture, mais les stéréotypes perdurent. Ce sont souvent les grandes entreprises qui se saisissent du sujet. Dans les accords sur l'égalité, il y a eu environ 2000 mises en demeure depuis 2003 et 100 pénalités. Plus de 80 % d'entre elles concernent des PME. Lorsqu'il n'y a pas de service de ressources humaines ou de structuration suffisante, les responsables font comme ils peuvent, à flux tendu. Dans les PME, il y a aussi une telle proximité avec les individus qu'il peut y avoir des ajustements de l'ordre de l'interrelationnel - sauf présence de déviants notoires. Mais cela repose sur la bonne volonté, à la différence des grandes entreprises qui mettent en place des politiques structurées.
Il existe une énorme différence dans la prise en compte de l'égalité professionnelle selon la taille des entreprises. Seules les entreprises de plus de 50 salariés doivent signer un accord, alors que celles de moins de 50 salariés n'ont à prendre en considération qu'un objectif d'égalité professionnelle. Il faudrait un véritable site Internet sur l'égalité professionnelle porté par le ministère du Travail et celui des Droits des femmes, facile d'accès, et comprenant de nombreux exemples : comment faire un accord, qu'est-ce que le sexisme, comment le traiter...
Nous avons aussi besoin de régulation et d'outils d'encadrement pour faciliter le travail des PME. À l'heure du numérique, il n'y a pas suffisamment d'informations disponibles sur Internet.
Il faut responsabiliser les entreprises. Faut-il augmenter les sanctions - c'est une piste possible ; augmenter le nombre de domaines concernés, renforcer certains d'entre eux ? Certaines dispositions, actuellement uniquement supplétives, pourraient être déclarées d'ordre public.
Il y a un véritable problème d'appropriation des outils relatifs à l'égalité. Faut-il aller jusqu'au name and shame ou privilégier le name and honour ?
Peut-être faut-il aussi prendre en compte la recommandation européenne sur la transparence des rémunérations. Les lois anglaises et finlandaises vont plus loin. Il y a un mouvement vers la transparence des rémunérations. En France, les entreprises sont obligées d'en faire une synthèse portée à la connaissance des salariés et disponible sur le site Internet, mais il n'existe qu'un seul indicateur sur les rémunérations moyennes ou médianes. Il faudra travailler sur la transparence dans ce domaine et, éventuellement, prendre des sanctions.
Nous avons une obligation de progrès. On pourrait établir des classements, comme le baromètre Ethics and board, sur la place des femmes dans le top 100 des entreprises - mais, rappelons-le, ce baromètre ne traite pas des rémunérations. Il manque une réflexion plus globale sur l'impact de l'égalité professionnelle et de l'égalité de rémunération. Il faut avoir conscience du fait que lorsqu'on améliore les conditions de travail des femmes sur les chaînes de montage, par exemple en créant des outils de portabilité par exemple, on améliore aussi l'ergonomie pour les hommes moins costauds ou qui prennent de l'âge !
Il faut faire le même raisonnement à propos des temps de vie. Pour moi, il y a un droit individuel de chacun à la parentalité. La performance au travail est liée au réseau d'interdépendances, souvent prises en charge par les femmes. Si l'on prend en compte l'équilibre du temps de vie, on laisse du temps non seulement pour la vie familiale, mais aussi pour le mandat syndical, le sport, la récupération...