Intervention de Pierre Jardon

Commission des affaires sociales — Réunion du 13 décembre 2017 à 9h20
Projet de loi ratifiant diverses ordonnances sur la loi d'habilitation à prendre les mesures pour le renforcement du dialogue social — Table ronde des organisations syndicales

Pierre Jardon, secrétaire confédéral de la CFTC :

La CFTC est extrêmement vigilante sur la manière dont les entreprises traiteront ou non de l'avenir du CHSCT. Une commission du CSE doit être spécifiquement consacrée aux questions de santé et des conditions de travail. Certaines entreprises devront créer cette commission, d'autres seront obligées par la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Dirrecte) d'en instaurer une. Nous souhaitons que cette commission soit obligatoire dans toutes les entreprises.

Nous sommes très réservés sur la limitation des mandats. Il est difficile de trouver des salariés ayant la vocation de s'engager, et d'autant plus avec cette limitation. Par accord collectif, il est possible de revenir sur cette limitation. Nous verrons comment cette mesure s'applique.

Comment le salarié sera-t-il réintégré après la fin de son mandat dans son poste de travail ? Pourra-t-il aussi bénéficier d'une reconversion, au vu de ses nouvelles compétences ?

Malgré l'amendement de l'Assemblée nationale, les cofinancements de l'expertise sont encadrés. Que signifie « ne pas avoir eu d'excédent durant trois ans » ? Est-ce un bilan à 0, qu'en est-il s'il reste 100 ou 300 euros ? L'expertise est mille fois plus importante pour un comité d'entreprise que l'organisation d'un arbre de Noël - même s'il crée du lien dans l'entreprise. L'expertise touche directement à l'entreprise, à son économie. Le budget ne doit pas être un facteur limitant. C'est la responsabilité des élus ; nous ne sommes pas opposés par principe au cofinancement, mais avons un sujet de désaccord : c'est à l'entreprise de prendre en charge l'intégralité du financement des projets ayant des effets sur les conditions de travail.

L'employeur peut, en l'absence de délégué syndical, négocier avec des élus du CSE, et il peut, par accord, créer un conseil d'entreprise, qui fusionne les instances représentatives du personnel et récupère le rôle de négociateur. La négociation est toutefois un sujet sérieux et nécessite un accompagnement juridique et une analyse des grands équilibres, et donc une formation. À défaut de représentants syndicaux dans l'entreprise, le mandatement est une réponse. Nous ne voulons pas qu'on puisse négocier sans représentation syndicale, même avec des élus du personnel.

Le conseil d'entreprise est mis en place par accord. Dans certains cas, le délégué syndical est aussi élu au comité d'entreprise. Pourquoi ne pas optimiser la manière dont ce dernier fonctionne ? Une fois le conseil d'entreprise mis en place, il sera difficile de revenir dessus, même si le contexte de l'entreprise a changé.

La présence syndicale dans les TPE est une vraie bonne question : nous ne les délaissons pas, et faisons beaucoup plus de syndicalisme de service dans ces structures, pourtant sans potentiel d'implantation, par nature. Le salarié craint le regard de l'employeur, qui a parfois le fusil braqué contre les syndicalistes. Jusqu'à présent, se syndiquer dans une petite entreprise n'avait pas beaucoup de sens puisqu'il n'y avait pas de négociation dans les TPE. Or les ordonnances élargissent le champ des négociations en leur sein. Dès lors qu'on renforce le mandatement, les entreprises comme les salariés auront intérêt à se rapprocher des organisations syndicales pour négocier des accords. Confortez le mandatement et observez ce qui se passe.

Les primes sont un vrai enjeu de régulation, notamment dans les transports et chez les dockers. Dans certaines branches, employeurs et salariés ont identifié des risques de dérégulation si les accords d'entreprises peuvent déroger sur les primes. C'est un enjeu majeur, revenez sur ce point ! Les partenaires sociaux examinent les moyens de réintégrer les primes dans le salaire minimum fixé au niveau de la branche pour pouvoir réguler de nouveau. Laissons les branches décider si elles souhaitent procéder ainsi.

La branche n'est pas uniquement le cadre de négociation d'une convention collective, ses missions vont bien au-delà : elle travaille sur l'emploi, la formation professionnelle, et fait vivre le paritarisme. Le comité paritaire sur la restructuration des branches travaille sur les missions des branches mais le ministère du travail en a déjà donné une définition restrictive : une branche correspondrait à une convention collective. Demain, la définition ira au-delà, mais elle ne devra pas impacter la mesure de représentativité des organisations syndicales. Il y a deux chantiers différents : la structuration des branches et la restructuration de la couverture conventionnelle. Les conventions collectives doivent être vivantes et évoluer dans le temps. La fusion des branches a été accélérée par le Gouvernement, avec comme échéance août 2018 - c'est demain. Espérons que les branches se saisiront du sujet.

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