Intervention de Arnaud de Belenet

Réunion du 13 décembre 2017 à 14h30
Réhabilitation de la police de proximité — Rejet d'une proposition de loi

Photo de Arnaud de BelenetArnaud de Belenet :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, je veux, à mon tour, remercier chaleureusement le groupe communiste républicain citoyen et écologiste de cette initiative. Celle-ci nous permet, au-delà des inventaires des dispositifs instaurés sous les précédents quinquennats, de dresser un certain nombre de constats et de converger vers une conclusion finalement toute simple : au-delà du premier enjeu, le terrorisme, les vingt années qui viennent de s’écouler, avec la succession des différents dispositifs, n’ont pas permis de faire face à la réalité de l’enjeu de la sécurité du quotidien.

Nous le savons tous ici, ce sujet de la sécurité du quotidien est à l’interface de plusieurs politiques publiques ; je pense à la justice, au domaine social, à la police, au système pénitentiaire et, bien évidemment aussi, à quelques soins médicaux.

Aussi, face à ce constat, une réorganisation est nécessaire ; c’est l’objectif de la proposition de loi qui nous est aujourd’hui soumise. Il s’agit de réorienter la police de sécurité intérieure vers une police de proximité. Au-delà de la question du domaine réglementaire et de l’inconstitutionnalité du texte, soulevée par notre rapporteur, et même si nous partageons les préoccupations qui ressortent de l’exposé des motifs de cette proposition de loi, nous sommes en désaccord sur le dispositif proposé.

Tout d’abord, nous regrettons ce que d’aucuns pourraient percevoir comme une forme de stigmatisation de ceux qui nous protègent au quotidien. Il s’agit bien évidemment d’un ensemble humain, nécessairement imparfait, mais on ne peut stigmatiser ceux qui nous protègent.

Nous regrettons également que ce texte envisage la police de proximité comme une fonction distincte des autres missions de la police nationale, alors que, au contraire, selon nous, elle doit s’intégrer dans le dispositif d’ensemble des missions assignées à la police nationale et non seulement à la police nationale.

En second lieu, nous partageons l’avis du rapporteur sur l’impossibilité de déployer une telle police sur l’ensemble du territoire ; ce point a été évoqué par quelques-uns des précédents orateurs.

Enfin, et surtout, la réorganisation de la police au bénéfice d’une plus grande proximité avec la population fait déjà l’objet de réflexions. Vous le savez, le ministre de l’intérieur a lancé, le 28 octobre dernier, une large concertation relative à la mise en place d’une police de proximité du quotidien. La concertation est aussi menée à l’échelon départemental par les préfets, avec une certaine liberté dans la forme. Pour ma part, loin de condamner cette multitude de formes, je ne peux que me réjouir de cette déconcentration et de cette liberté accordée.

Cette concertation réunit l’ensemble des partenaires – les élus, les organisations syndicales, les structures de concertation tant de la police nationale que de la gendarmerie, les représentants des policiers municipaux, les acteurs de la sécurité privée des transports, les experts, et tous ceux qui pourraient avoir une contribution positive. Ce projet de réforme prévoit d’ores et déjà l’augmentation des effectifs de police et de gendarmerie – 10 000 agents au cours du quinquennat –, avec une hausse prévue, dès 2018, dans le projet de loi de finances, à hauteur de 1 376 postes de policier et de presque 500 postes de gendarme.

Il intègre aussi, évidemment, le sujet essentiel de la simplification des procédures pénales dans le cadre des chantiers de la justice, des moyens de sanction immédiate, au travers d’amendes forfaitaires, une modernisation des moyens mis à la disposition des forces de l’ordre, et davantage de coopération, de coproduction ou de mutualisation de tous les acteurs de la sécurité – élus, autorités administrative et judiciaire, police nationale et gendarmerie, polices municipales, réseaux de transport, services et bailleurs sociaux, sécurités privées, associations et tant d’autres.

Nous pouvons considérer positivement les échanges qui ont eu lieu aujourd’hui grâce à l’initiative du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, et nous réjouir que les orientations fassent consensus ; cela est prometteur pour le bon aboutissement et même pour le caractère vraisemblablement unanime de l’adoption du projet que porte le Gouvernement, avec cette approche globale.

Je me permets de souligner, à titre personnel, qu’un certain nombre de doublons structurels posent la question de l’organisation de l’ensemble des équipes ; je pense notamment à des salles de commandement ou à des unités d’experts qui se trouvent à la fois à la DGPN, à la police judiciaire, à la Direction de la prévention et de la protection, chez les gendarmes, et à tant d’autres sujets, notamment de procédure.

Au-delà de la procédure se posera également la question des tâches indues ; tous ceux qui ont travaillé sur ce sujet savent qu’il existe un enjeu de retour au cœur de métier pour 4 000 à 5 000 de nos agents chargés de la sécurité. Il y a, dans le fait de revenir sur les missions qui leur sont propres, un gisement d’efficience et de satisfaction pour le personnel.

Les orientations et les échanges d’aujourd’hui nous permettent d’envisager une démarche collective axée sur l’efficacité, et montrent la capacité de notre assemblée à relever, de manière unanime, le défi de l’élaboration d’une loi globale efficace au service de la sécurité du quotidien.

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