Intervention de Brune Poirson

Réunion du 13 décembre 2017 à 21h00
Débat sur la cop23 — Débat organisé à la demande du groupe la république en marche

Brune Poirson :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie d’avoir organisé ce débat. Le Président de la République l’a encore souligné hier, nous sommes à un moment de bascule, à un moment absolument crucial dans l’histoire de l’humanité. Malheureusement, il nous faut regarder les choses en face : nous sommes mal partis pour tenir les engagements de l’accord de Paris.

J’ose le dire ici ce soir, parce que notre dialogue sur les questions climatiques doit être franc et honnête : la trajectoire actuelle est presque mortifère. Je vous remercie de l’intérêt que vous portez à ce sujet absolument fondamental.

L’année 2017 a été marquée par la tentative de déstabilisation de l’accord de Paris menée par l’administration de M. Trump, qui a pris une décision que la France regrette bien sûr profondément. Nous nous sentons investis d’une responsabilité particulière, puisque c’est à Paris qu’a été négocié et signé cet accord. Le Président de la République a d’ailleurs immédiatement assumé cette responsabilité, quelques heures à peine après la décision du président Trump de sortir de l’accord de Paris.

Depuis, les cris d’alarme des scientifiques se multiplient, car nous sommes au seuil de l’irréversible. Alors que l’évolution des émissions de gaz à effet de serre est plus que jamais préoccupante, nous avons la quasi-certitude que nous échouerons à contenir le changement climatique si nous n’entrons pas immédiatement de plain-pied, dès aujourd’hui, dans l’action, dans la transformation de nos modes de vie et de nos comportements, mais aussi de notre économie, de nos façons de travailler et même de penser.

Nous avons aussi la quasi-certitude de vivre une nouvelle extinction des espèces, qui mettra à mal notre agriculture et l’humanité tout entière.

Permettez-moi de revenir rapidement sur la COP23. Selon certains, le bilan de cette conférence serait en demi-teinte. Pour ma part, je voudrais rappeler le contexte dans lequel elle s’est déroulée. Les États-Unis, l’un des premiers émetteurs mondiaux de CO2, venaient de décider de se retirer de l’accord de Paris. D’autres États auraient pu les suivre dans cette attitude mortifère, parce qu’il est très facile de s’enfermer dans l’idée qu’on ne peut pas concilier développement économique et lutte contre le changement climatique. Heureusement, les États du monde entier ont refusé de tomber dans cette facilité : selon moi, cela suffit à faire de la COP23 une certaine réussite, qu’il faut véritablement saluer.

Il faut aussi, quand on évoque la COP23, penser qu’il y a urgence pour les petits États insulaires, qui vivent au quotidien la réalité du changement climatique. À cet égard, le fait que cette conférence se soit tenue sous présidence fidjienne revêt une dimension symbolique. Depuis le début du siècle, les eaux ont monté de 19 centimètres. C’est énorme, et la poursuite de ce phénomène risque d’entraîner la disparition de nombreuses petites îles, c’est-à-dire de tout un pan de l’humanité. La France, qui compte de nombreux territoires insulaires affectés par la montée des eaux, est elle aussi directement concernée.

Je tiens à souligner que certaines avancées, que je ne détaillerai pas ici, ont été obtenues lors de la COP23. En matière de financements, notamment, des engagements ont été pris. Ils devront être confirmés lors de la COP24. Les questions du genre et du développement seront traitées dans le cadre du dialogue « Talanoa ».

Les actions de la société civile ont été, plus que jamais, sur le devant de la scène lors de la COP23, ainsi qu’à l’occasion du One Planet Summit. On voit de manière frappante que nous sommes maintenant entrés dans le temps de l’action. L’accord de Paris a fourni un cadre structurant, une base, de grandes lignes directrices. La France se doit de protéger cet acquis.

Il nous faut, aussi et surtout, encourager les initiatives partout sur nos territoires. Parce que vous avez une très bonne connaissance des acteurs – élus, collectivités locales, entreprises, citoyens –, vous êtes plus que jamais, mesdames, messieurs les sénateurs, des moteurs de la transition écologique. Nous avons besoin de vous pour enclencher cette transition, la rendre totalement irréversible et la faire entrer de plain-pied dans la réalité.

Dans ce contexte, l’année 2018 sera à l’évidence décisive pour la mise en œuvre de l’accord de Paris et la préparation de l’indispensable relèvement de l’ambition en 2020.

À l’échelon national, une action résolue est plus que jamais nécessaire. Le One Planet Summit a permis de réaffirmer encore une fois l’ambition de la France. À cette occasion, le Président de la République et nos partenaires ont pris douze engagements très forts que je détaillerai plus tard.

Je tiens maintenant à rappeler certaines des initiatives phares que le Gouvernement a prises et a déjà commencé à mettre en œuvre.

Le 6 juillet, le ministre d’État Nicolas Hulot a annoncé un plan Climat plus ambitieux encore que l’accord de Paris. Au travers de ce plan, nous nous fixons pour objectif d’atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050. Nous définissons également des objectifs ambitieux pour chacun des grands secteurs qui structurent notre économie et la vie des Français : par exemple, la fin des véhicules thermiques d’ici à 2040 ou le recyclage à 100 % des plastiques d’ici à 2025.

Telle est le plan d’action que nous nous sommes fixé ; à nous maintenant de le décliner et de le mettre en œuvre chaque jour. Ainsi, ce matin encore, au ministère de l’économie et des finances, je travaillais avec Delphine Gény-Stephann à la mise en œuvre concrète du plan de recyclage total des plastiques et à la réduction des mises en décharge d’ici à 2025.

Je ne détaillerai pas d’autres mesures, pourtant essentielles, tel le paquet « solidarité climatique » en faveur des plus vulnérables. En effet, si la transition écologique n’est pas solidaire, elle ne sera pas, ou elle sera bien trop lente pour que nos objectifs puissent être atteints.

Parmi ces objectifs figure l’augmentation de la part des énergies renouvelables dans notre mix énergétique. Nous déterminerons précisément comment l’atteindre dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l’énergie ; nous avons commencé à y travailler. L’énergie nucléaire reste absolument essentielle, notamment pour assurer la sécurité d’approvisionnement pour tous les Français, mais nous voulons peu à peu réduire sa part, ou en tout cas rééquilibrer notre mix énergétique en faveur des énergies renouvelables.

Les transports sont au cœur du plan Climat et de notre travail. Nous en discutons beaucoup à l’échelon européen. D’ailleurs, je me rendrai vendredi en Bulgarie pour évoquer ce sujet, avant d’assister lundi, à Bruxelles, au conseil des ministres de l’énergie de l’Union européenne. Il s’agit d’entrer dans l’action et d’enclencher toute une dynamique, en France, bien sûr, dans nos territoires, mais aussi à l’échelon européen et international.

Je vous remercie encore une fois d’avoir organisé ce débat et je me réjouis de pouvoir discuter avec vous plus en détail de toutes les actions qui sont menées par le gouvernement auquel j’appartiens.

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