Intervention de Catherine Morin-Desailly

Réunion du 11 mai 2010 à 22h15
Bilan d'application de la loi portant réforme portuaire — Discussion d'une question orale avec débat

Photo de Catherine Morin-DesaillyCatherine Morin-Desailly :

Les financements prévus ont été au rendez-vous, tant au travers des contrats de plan État-région que dans le plan de relance.

En termes d’organisation, les profonds changements dans la composition et le fonctionnement du conseil de surveillance et du conseil d’administration des ports, qui étaient l’un des points essentiels de la réforme, sont intervenus, pour le port de Rouen en tout cas.

Je me fais toutefois l’écho, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, d’un petit bémol : il aurait fallu prévoir un système de suppléance des élus, car ils ne peuvent pas toujours se rendre disponibles pour siéger au conseil d’administration.

En outre, parce qu’une réforme d’une telle ampleur, qui a modernisé la gouvernance des ports autonomes et le statut de nombreux travailleurs, comporte son lot d’inquiétudes face à l’avenir, il faut à mon avis prêter ou plutôt « maintenir » une attention particulière au dialogue social pour accomplir la mise en œuvre de la réforme portuaire, en gardant le cap sur les objectifs de modernisation et de recherche de compétitivité qu’elle vise, malgré un trafic maritime international ralenti par la crise mondiale.

Au-delà des objectifs, il y a les opportunités ou les externalités positives créées par la réforme. Cette dernière a permis de faire du Havre et de Rouen une façade maritime crédible, à la hauteur de l’ambition portée par le projet de loi relatif au Grand Paris.

Sans la mise en place d’un « comité interportuaire » entre les ports du Havre et de Rouen, sans le développement de synergies entre eux, il aurait été plus difficile d’envisager cette façade maritime d’une métropole mondiale que Paris a vocation à être, capable de concurrencer les grands ports européens, notamment ceux de Rotterdam et d’Anvers. En ce sens, monsieur le secrétaire d’État, la loi de 2008 a été précurseur de la réflexion d’Antoine Grumbach sur le Grand Paris, lequel appelle une grande Normandie, dont la vocation maritime, vous en conviendrez, mes chers collègues, n’est plus à démontrer : l’histoire de notre région en porte témoignage.

La réforme portuaire, qui créait les conditions favorables pour nourrir un autre projet d’aménagement du territoire national, doit cependant impérativement s’intégrer en tant qu’outil structurant dans une vision globale de l’aménagement du territoire, notamment en matière de transport. Ainsi, c’est au désenclavement des ports qu’il faut aujourd’hui travailler.

La réforme portuaire doit donc se prolonger en fonction des besoins qui ont été très largement identifiés en Seine-Maritime, y compris par le Président de la République lui-même : après tant d’années, il a déclaré incontournable la réalisation d’une ligne à grande vitesse ; notre collègue Charles Revet en a rappelé les conditions de la réussite.

Monsieur le secrétaire d'État, dans le prolongement de la réforme, il faut impérativement déployer les moyens d’une politique ambitieuse.

Lors du débat sur le Grand Paris, Charles Revet a attiré l’attention de la commission de l’économie sur la nécessité de relier les ports maritimes du Havre et de Rouen non seulement par une ligne TGV pour les usagers mais aussi par une ligne de fret à haut niveau de performance. Il a en outre souligné l’importance des installations fluviales sur la Seine.

La voie fluviale doit, elle aussi, être une priorité. Malgré la crise, on constate d’ailleurs un accroissement des volumes transportés en 2008 sur la Seine, comme sur le Rhône, entre Marseille et Arles, voire Lyon. Le Gouvernement doit désormais développer une politique volontariste pour favoriser les complémentarités qu’offre la voie fluviale au transport routier de marchandises.

Je profite de cette occasion, monsieur le secrétaire d'État, pour insister – lourdement certes, mais au nom d’une absolue nécessité – sur un dossier que vous connaissez bien : le contournement Est de Rouen. Notre région n’accepte pas que ce dossier soit encore bloqué bien que le débat public ait lieu. Nous attendons qu’il soit très rapidement inscrit au schéma national des infrastructures de transport, le SNIT.

Cette réforme a permis de marquer un essai qu’il faut désormais transformer en étudiant de plus près les moyens de transport multimodaux afin que les ports soutiennent le développement économique des métropoles, et réciproquement.

Seul ce jeu à sommes positives permettra de développer la compétitivité des ports français par rapport aux autres ports européens. Ce que nous voulons entendre au sujet de la réforme portuaire, c’est qu’elle était absolument nécessaire, mais qu’elle appartient aussi à un vaste ensemble de modernisation des infrastructures s’appuyant sur les trois piliers que sont le transport ferroviaire, la voie fluviale et la route.

Le colloque inaugural Seine d’avenir qui s’est tenu la semaine dernière au Havre posait tout à fait cette ambition. Si, ce soir, trois sénateurs de la Seine-Maritime sont réunis sur ce dossier, l’autre jour, au Havre, l’ensemble des élus de la Seine-Maritime, toutes tendances politiques confondues, s’étaient rassemblés pour évoquer ces questions.

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