Intervention de Serge Andreoni

Réunion du 11 mai 2010 à 22h15
Bilan d'application de la loi portant réforme portuaire — Discussion d'une question orale avec débat

Photo de Serge AndreoniSerge Andreoni :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président, mes chers collègues, permettez-moi de commencer mon intervention par une citation de Confucius que chacun pourra apprécier à sa juste valeur : « Examine si ce que tu promets est juste et possible, car la promesse est une dette. »

Ce soir, nous sommes réunis pour fêter le deuxième anniversaire de la réforme portuaire. Je suis très heureux d’être parmi vous pour traiter d’un sujet qui me tient tout particulièrement à cœur car, vous le savez, le moral sur le port de Marseille n’est pas au beau fixe, et c’est le moins que l’on puisse dire !

Dans un contexte d’augmentation globale du transport maritime mondial et au regard des enjeux actuels du commerce maritime, les ports français ne sont malheureusement toujours pas en situation favorable. Face à leurs concurrents européens, les parts de marché continuent de s’amenuiser comme une peau de chagrin.

Aujourd’hui, la France ne représente pas plus de 14 % du commerce maritime européen. L’ensemble du trafic des sept grands ports métropolitains est inférieur au tonnage du seul port de Rotterdam. J’oserai même dire que les ports français jouent aujourd’hui un rôle marginal. Et ce n’est franchement pas rassurant pour l’avenir !

Jusqu’en 2008, alors que le trafic maritime mondial connaissait une croissance de 8 % en moyenne par an pour les conteneurs, sur les 7, 5 millions de conteneurs destinés à la France, seuls 2 millions entraient par des ports français.

Au cours des dix dernières années, le volume du trafic de conteneurs a ainsi doublé. Il sera d’ailleurs multiplié par deux dans les sept ans qui viennent dans le cadre d’une croissance qui correspond au développement des flux commerciaux entre l’Asie, l’Europe et l’Amérique du Nord. Comme moi, vous connaissez les effets de cette évolution.

Le recul des ports français est d’autant plus dramatique qu’il s’effectue face à des concurrents de la vieille Europe, et non pas face aux dragons du sud-est asiatique, qui écrasent les coûts salariaux et où 64 % du trafic portuaire s’effectuent par conteneurs.

Pour 2009, l’Organisation mondiale du commerce prévoyait un déclin de 9 % du commerce international. C’est chose faite !

En citant ces chiffres, je tiens à apporter quelques précisions sur la situation du port de Marseille. Et, je dois l’avouer, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je suis inquiet. Certains me diront que je suis alarmiste. Peut-être ! Mais qui oserait affirmer que la situation n’est pas dramatique sur nos ports ?

Les résultats sont là ! Le Grand Port maritime de Marseille, premier port de Méditerranée pour son trafic global, a perdu, en deux décennies, plus du tiers de ses parts de marché. Il a transporté 12, 7 millions de tonnes de marchandises entre janvier et mai 2009, soit une baisse de 21 % par rapport à 2008. Le trafic des marchandises a supporté une baisse de 31 % en cinq mois et la fermeture d’une escale « fruits et légumes » à Marseille.

Dois-je continuer cette litanie de mauvais chiffres ? Eh bien, oui, puisque nous en sommes à l’heure des bilans !

Le vrac solide a subi à Marseille une perte sèche évaluée à 50 % et les hydrocarbures n’ont d’ailleurs été épargnés ni en 2009, avec une baisse de 7 %, ni en 2010 puisque, déjà en février, ils souffraient d’une baisse de 14 %.

Il y a sept ans, le nombre de tonnes manufacturées était de 350 par an et par mètre de quai à Fos contre 400 au Havre et 1 300 à Anvers. Et aujourd’hui, cette situation ne s’améliore pas, loin de là!

Oui, mes chers collègues, nous avons de sérieuses raisons de nous inquiéter. On a pu constater sur certains ports près de 25 % de journées dockers en moins.

Sur le port de Marseille, la situation de l’emploi est pour le moins fragile. Pas moins de 14 000 postes directs et indirects sont menacés par les baisses continues de trafic. D’ailleurs, entre janvier et mai 2009, sur le golfe de Fos, pas moins de 2 000 emplois ont déjà été supprimés. C’est la triste réalité des ports aujourd’hui en France !

Pourtant, dans le cadre de la discussion qui a eu lieu en mai 2008, comme dans votre réponse, publiée le 15 avril dernier, à une question écrite posée en janvier dernier par notre collègue Jean-Noël Guérini, vous continuez, monsieur le secrétaire d’État, à promettre la création de 30 000 emplois. Nous ne devons pas avoir accès aux mêmes informations et chiffres ! Je vous assure, en toute modestie, qu’il vous sera sans doute difficile, monsieur le secrétaire d'État, de comptabiliser les 30 000 emplois promis !

Cette réforme, qui devait transformer et redynamiser l’ensemble des ports français devenus grands ports maritimes, accouche simplement de beaucoup d’amertumes.

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