Intervention de Xavier Iacovelli

Réunion du 18 décembre 2017 à 15h00
Ordonnance créant l'établissement public paris la défense — Adoption définitive des conclusions d'une commission mixte paritaire

Photo de Xavier IacovelliXavier Iacovelli :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes aujourd’hui amenés à nous prononcer sur le projet de loi ratifiant l’ordonnance du 3 mai 2017 portant création de l’établissement public Paris La Défense. Nous parlons ici du premier centre d’affaires européen, La Défense représentant en effet 150 000 emplois et 3, 2 millions de mètres carrés de bureaux.

À l’aube du Brexit, La Défense doit faire l’objet d’une réforme en profondeur, d’autant plus que, depuis quelques années, nous faisons face à des difficultés liées à la répartition complexe des compétences des deux établissements. La gouvernance bicéphale, confiée, d’un côté, à un établissement aménageur, l’EPADESA, et, de l’autre, à un établissement gestionnaire, DEFACTO, est à bout de souffle, et le bon fonctionnement de La Défense en est affaibli.

Cette réforme doit lui permettre à la fois d’être innovante et de consolider son rang de premier centre d’affaires européen. Soyons clairs, l’enjeu du premier centre d’affaires européen n’est pas seulement départemental : il est métropolitain, régional, national ! Reste que nous ne pouvons pas sacrifier sur l’autel de l’efficacité toute notion de démocratie et de concertation. Pour garantir la mise en œuvre d’une réforme ambitieuse, nous devons ainsi prendre le temps de la réflexion et associer tous les acteurs concernés, au premier rang desquels les communes.

Or, à la lecture du projet que nous sommes appelés à voter, on constate une remise en cause complète de la démocratie dans ce que deviendra l’établissement public Paris La Défense. Nous exprimons plusieurs désaccords avec le texte qui nous est aujourd’hui soumis. Nous avions d’ailleurs déposé deux amendements lors de la réunion de la commission mixte paritaire, mais, bien sûr, ils ont été rejetés.

Le premier point de désaccord porte sur l’article 4, relatif à la composition du conseil d’administration. Il nous semble en effet primordial que le pluralisme soit respecté. Or, sur les dix-sept membres du conseil d’administration, neuf sont issus du conseil départemental et nous nous étonnons que pas même un siège ne soit attribué à l’opposition. Ce n’est pas acceptable.

Le second point de désaccord est encore plus important et porte sur l’article 2, qui donne à l’établissement public Paris La Défense la possibilité d’intervenir en dehors de son périmètre historique d’intervention.

Contrairement à ce qu’avait annoncé le précédent gouvernement dans un communiqué de presse du 27 mai 2016, l’établissement public n’aura pas l’obligation de passer des conventions d’aménagement avec les communes concernées. Je cite le communiqué : « Au-delà de ce périmètre, l’établissement disposera d’une compétence non exclusive d’aménagement et de gestion, définie par voie de conventions, notamment afin de garantir la poursuite par le nouvel établissement des opérations déjà engagées par l’EPADESA ».

Or le texte que nous sommes appelés à voter prévoit le contraire. Il n’impose pas d’obligation de conventionner entre l’établissement public Paris La Défense et les communes, mais prévoit simplement un avis consultatif des acteurs concernés, et on connaît le sort de ces avis…

Je tiens à rappeler que le périmètre non exclusif de la gouvernance de l’établissement Paris La Défense concerne un tiers du territoire de la ville de Nanterre. Dès lors, pourquoi ne pas revenir à l’ambition initiale, à savoir une obligation de convention entre l’établissement public et la commune ?

Mes chers collèges, nombre d’entre vous ont été responsables d’exécutifs locaux. Qui est à même de se rendre compte de la réalité de nos territoires mieux que notre chambre ? Tel est d’ailleurs le rôle que la Constitution nous confère. Nous demandons simplement que la ville ait son mot à dire sur son territoire.

Notre collègue Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques, l’a d’ailleurs parfaitement rappelé sur Public Sénat : « Au Sénat, nous considérons que les communes restent la cellule de base de la démocratie. »

Dès lors, comment accepter qu’un établissement public puisse contrôler un tiers d’une commune sans même être obligé de passer des conventions avec elle ? Quel maire accepterait une telle situation ?

Mes chers collègues, le Président de la République avait annoncé lors de la campagne présidentielle une réforme territoriale d’envergure. Il avait indiqué : « Nous supprimerons au moins un quart des départements, là où ils peuvent être rapprochés de l’une de nos grandes métropoles. […] En concertation avec les élus, nous simplifierons l’administration territoriale en confiant aux services des métropoles les compétences des conseils départementaux où elles se situent. »

Or nous allons voter un texte qui confie la gestion du premier pôle financier non pas à la métropole, mais au département, contrairement à la vision exposée par le Président de la République lors de la campagne présidentielle !

Par ailleurs, nous allons voter un texte dans la précipitation – à cet égard, je rappelle que la Cour des comptes a estimé que la décentralisation du quartier se faisait de manière trop rapide –, alors que la réforme territoriale qui pourrait intervenir dans les mois à venir serait susceptible de conduire à la suppression du département à qui on vient de confier la compétence de l’établissement public !

Si les départements étaient supprimés, monsieur le ministre, quelle entité serait alors chargée de la gestion de cet établissement public ?

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