Intervention de Nicolas Hulot

Réunion du 18 décembre 2017 à 15h00
Fin de la recherche et de l'exploitation des hydrocarbures — Question préalable

Nicolas Hulot :

Madame la rapporteur, la motion que vous avez déposée et qui tend à opposer la question préalable résume bien les différences d’état d’esprit. Vous l’évoquez d’ailleurs vous-même, puisque vous soulignez que la commission des affaires économiques, comme la Haute Assemblée, ne semble pas adhérer aux objectifs du Gouvernement.

En fait, je crois que vous adhérez à ces objectifs, mais pas aux moyens choisis par le Gouvernement dans ce projet de loi pour y parvenir. Je ne peux évidemment que le regretter.

J’ai la conviction profonde que la lutte contre le changement climatique doit nous rassembler au-delà de ces divergences.

Les modalités de mise en œuvre des mesures décidées dans ce texte sont progressives et il faut avoir confiance dans le fait que, la contrainte étant dorénavant pleinement identifiée, des solutions et alternatives qui ne sont pas encore dans notre logiciel vont apparaître.

La menace universelle que nous encourons doit ignorer les clivages habituels et les choses commencent à bouger de ce point de vue. Vous le savez, je le dis souvent, nous gagnerons cette bataille ensemble ou nous la perdrons ensemble ; personne ne pourra tirer son épingle du jeu et je sais que je n’ai pas besoin de vous convaincre à ce sujet.

Je ne vais pas revenir sur l’ensemble des arguments que j’ai opposés à nombre d’amendements débattus et parfois adoptés au Sénat. Franchement, ces amendements vidaient le texte d’une grande partie de sa force.

Dans le même temps, certains estiment que ce texte ne va pas encore assez loin ; il est vrai que nous avons voulu rester dans un cadre constitutionnel et ne pas revenir sur les droits acquis, mais le débat perdure.

Je souhaite être le plus objectif possible et je veux saluer les efforts du Sénat pour améliorer le texte, notamment sur un sujet important : le stockage du gaz.

Cependant, sur l’objet même du texte, nos positions sont trop éloignées, je le dis avec respect, car j’aurais aimé vous convaincre que ce texte ne vise en aucun cas à pénaliser notre économie, mais plutôt à la libérer de son addiction aux énergies fossiles.

J’aurais aimé vous convaincre que le Gouvernement n’est en rien opposé à la recherche et à la connaissance de notre sous-sol – nous aurons d’ailleurs l’occasion d’en reparler, lorsque nous débattrons, en principe l’an prochain, du code minier. Pour autant, il ne faut pas poursuivre des chimères et faire croire que les entreprises qui feraient de la recherche ne souhaiteraient pas, ensuite, exploiter.

J’aurais aimé vous convaincre que la cohérence et l’exemplarité produisent des résultats et nous donnent une crédibilité et une capacité d’entraînement.

Je n’ai pas réussi à vous convaincre et je regrette le choix de déposer cette motion – je le dis franchement –, d’autant que le Sénat est souvent une source bienvenue d’intelligence et de sagesse. Il connaît parfaitement les questions minières et, plus largement, d’environnement, comme vous l’avez vous-même démontré, madame la rapporteur.

L’Assemblée nationale s’est d’ailleurs appuyée sur les rapports du Sénat, qu’il s’agisse du stockage du gaz, de la qualité des biocarburants ou encore des stations de gaz ou d’hydrogène.

La transition écologique et solidaire que je défends, avec d’autres, a besoin de mutualiser toutes ces intelligences. C’est pourquoi je regrette franchement le dépôt de cette motion, qui cache, vous le dites vous-même, une vraie divergence de fond.

Je ne rejette pas, bien au contraire, votre appel au dialogue, car il est indispensable pour construire les prochaines étapes. Nous sommes au début d’un très long processus : si nous construisons ensemble cette grande mutation, vous verrez qu’elle apportera beaucoup plus de bénéfices que de contrariétés ; a contrario, elle nous apportera de lourdes contrariétés, si à un moment ou à un autre, nous ne nous retrouvons pas sur l’essentiel.

En tout cas, j’espère que, malgré votre opposition, nous pourrons continuer à travailler ensemble pour que notre pays prenne la main dans une Europe qui doute un peu, vacille parfois, mais que nous devons emmener dans la transition écologique d’une manière déterminée, progressive, irréversible, car c’est elle qui permettra, en développant les technologies existantes et celles en gestation, de créer de nombreux emplois dans les filières renouvelables et de moderniser en profondeur notre économie.

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