Intervention de Mathieu Darnaud

Réunion du 18 décembre 2017 à 15h00
Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations — Adoption en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Mathieu DarnaudMathieu Darnaud :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, j’ai parfaitement entendu la philosophie du Gouvernement : il ne veut pas d’un nouveau big-bang territorial. Nous pouvons largement y souscrire, d’autant que c’était l’une de nos affirmations. Pour autant, force est de constater que nombre de textes ont besoin d’être à tout le moins explicités, peut-être même précisés, parce que c’est une demande des élus de nos territoires. Celui-ci n’y échappe pas.

Je commencerai par remercier notre collègue Pierre-Yves Collombat, qui a beaucoup travaillé sur ce texte. À l’évidence, ces questions, celles liées à la GEMA, la gestion des milieux aquatiques, comme celles liées au fameux PI, la prévention des inondations, nécessitaient nombre de clarifications, à commencer par celle de l’attribution du chef de filat. C’est la question centrale, et nous y reviendrons lors de l’examen des amendements, qui portent essentiellement sur ce sujet.

J’ai malgré tout un regret à formuler, un regret relativement collectif et qui est davantage un enseignement qu’il nous faut tirer de cette proposition de loi et de la façon dont elle nous est parvenue, à quelque quinze jours de la prise de compétence des établissements publics de coopération intercommunale en matière de GEMAPI. Il a été difficile pour la commission des lois, et plus généralement pour le Sénat, d’expertiser le travail d’amendement réalisé à l’Assemblée nationale, ce qui nous a parfois un peu heurtés en ne nous permettant pas de formuler certaines propositions, de les rendre cohérentes et, surtout, de faire en sorte qu’elles répondent aux problématiques qui se posent actuellement. Par exemple, la commission a souhaité poser avec force la question du ruissellement, mais s’est heurtée au peu de temps que nous avions pour trouver une solution – même si nous vous ferons clairement des propositions – sur cette question majeure pour nombre de territoires, notamment du quart sud-est, comme mon propre département, l’Ardèche.

Par ailleurs, nous touchons du doigt une problématique majeure, dont il a été beaucoup question lors de la Conférence nationale des territoires, à laquelle, madame la ministre, vous avez fait référence : la différenciation territoriale.

À cet égard, si je continue de penser que cette proposition de loi est pertinente et répond à la problématique du chef de filat en prenant en compte la réalité des besoins, les perceptions des élus, comme nous l’ont confirmé les nombreuses auditions que nous avons tenues, sont largement différentes selon qu’ils sont du littoral, d’une région fluviale ou d’un territoire de montagne.

C’est, je crois, un sujet majeur, qu’il faut savoir prendre en compte, dans tous les sens : en écoutant les élus des territoires qui peuvent rencontrer des difficultés dans ce domaine comme dans d’autres – Mme la ministre a évoqué l’eau et l’assainissement, où se posent des problématiques à peu près communes – et en réaffirmant la philosophie de ce texte, qui consiste à désigner un référent, en l’occurrence l’intercommunalité, qui puisse faire œuvre utile en assumant le chef de filat sur ces sujets.

Forts de ces constatations, nous avons essayé de porter un regard attentif sur les propositions qui ont été faites sur ce texte issu de l’Assemblée nationale, en nous efforçant d’y apporter quelques corrections.

Ainsi, nous avons complété l’article 1er de la proposition de loi, qui permet aux départements et aux régions de poursuivre leur action en matière de GEMAPI au-delà du 1er janvier2020, en autorisant les régions à financer des projets dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par le bloc communal.

De plus, la commission des lois a souhaité prendre en compte le cas des communes isolées, avec lesquelles les départements ou les régions devront passer contrat ; je sais que c’est un sujet sur lequel nous avons une lecture un peu différente.

L’Assemblée nationale a entendu assouplir les modalités de transfert et de délégation de la compétence GEMAPI à un syndicat mixte, en prévoyant notamment la sécabilité interne des quatre missions constitutives de cette compétence, aux articles 1er, 3 et 4. Si la commission des lois a émis de fortes réserves sur ce point, elle en a pour autant admis le principe, tout en clarifiant la rédaction proposée. Encore une fois, nous avons voulu veiller à ce que le portage de la compétence ne soit pas dilué.

La commission a également maintenu la faculté dont disposent actuellement les EPCI à fiscalité propre de transférer leurs compétences à un syndicat sur une partie seulement de leur territoire, ou à plusieurs syndicats sur des parties distinctes de leur territoire, dans l’ensemble du champ de la politique de l’eau, et pas seulement en matière de GEMAPI.

Par ailleurs, elle a précisé et complété le régime de responsabilité limitée des gestionnaires d’ouvrages de protection contre les inondations prévu à l’article 1er, au cas où un sinistre surviendrait pendant la période transitoire entre le moment de leur mise à disposition et celui de leur autorisation par le préfet. Elle a notamment étendu le bénéfice de ce régime de responsabilité limitée à l’ensemble des ouvrages de protection, et non aux seules digues, qui seraient mis à disposition du bloc communal par toute personne publique, et non par les seuls départements et régions.

La commission des lois s’est également penchée sur la prévention des inondations et la maîtrise des eaux de ruissellement. Observant que de nombreuses et graves inondations étaient dues au ruissellement des eaux plutôt qu’à la crue d’un cours d’eau ou à une submersion, elle s’est interrogée sur l’opportunité d’élargir le périmètre de la compétence GEMAPI à la maîtrise des eaux pluviales et de ruissellement, ainsi qu’à la lutte contre l’érosion des sols. Pour l’heure, elle a souhaité autoriser l’affectation à de tels projets de tout ou partie du produit de la taxe GEMAPI. Nous vous ferons des propositions par voie d’amendement en vue d’intégrer cette compétence à moyen terme.

Moyennant ces modifications qui enrichissent le texte, la commission des lois a adopté cette proposition de loi.

Pour conclure, je me permettrai de rappeler le regret que j’ai formulé en préambule : l’examen par trop tardif de ce texte n’a pas permis à la Haute Assemblée d’en avoir une lecture exhaustive et, surtout, d’en reformuler certaines dispositions. Nous avons déjà évoqué ces sujets, notamment lors de la Conférence nationale des territoires, au cours de laquelle nous nous sommes collectivement interrogés sur la nécessité d’anticiper ce type de sujets : parce que, à l’évidence, les législateurs que nous sommes sont observés par les élus de l’ensemble des territoires.

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